"Les Compagnons de l'Ombre", t. 2, de Jean-Marc Lofficier (éd.)
LOFFICIER (Jean-Marc) (éd.), Les Compagnons de l’Ombre, 2, textes de Matthew Baugh, Bill Cunningham, Paul DiFilippo, G.L. Gick, Travis Hiltz, Jean-Marc Lofficier, Randy Lofficier, Michael Moorcock, John Peel, Chris Roberson et Robert L. Robinson, Jr., traduits par Nicolas Cluzeau, Gabrielle Comhaire, Jean-Marc Lofficier, Serge Parmentier, Michel Vannereux et Thierry Virga, Encino, Black Coat Press, coll. Rivière Blanche – Noire, [2006] 2008, 294 p.
J’avais beaucoup aimé le premier tome des Compagnons de l’Ombre : de la littérature populaire au sens le plus noble, souvent parfaitement jubilatoire, et qui permettait de découvrir ou redécouvrir toute une palanquée de héros et de vilains tous plus bigarrés les uns que les autres. Il n’y avait pas de raison pour que ça s’arrête, et j’ai donc très logiquement poursuivi avec le tome 2.
Si le principe reste bien évidemment le même, « l’économie » du recueil est cependant très différente : pas de short-shorts ici, mais bien une longue novella sur laquelle s’ouvre ce volume, passée la sympathique préface de Jean-Marc Lofficier, et qui fait à elle seule pas loin de la moitié de ce deuxième tome des Compagnons de l’Ombre. Heureusement pour nous, c’est de la bonne. « Le Loup-garou de Rutherford Grange » de G.L. Gick met en scène, entre autres, un improbable duo d’enquêteurs composé d’Harry Dickson et du Sâr Dubnotal (quel superbe personnage que le Grand Psychagogue !), dans un cadre so british parfaitement délicieux. Alors, certes, ce n’est pas un chef-d’œuvre de style, loin de là, mais on se prend très facilement au jeu, et ça coule tout seul. Une réussite.
Les nouvelles qui suivent sont de taille plus conventionnelle, et on y trouve du bon comme du moins bon. Le recueil se poursuit avec une sorte de petit « cycle » ayant pour tête d’affiche le Docteur Oméga (plus qu’à son tour confondu avec le Docteur, et ce n’est pas moi qui vais m’en plaindre…). « Le Cœur de la Lune » de Matthew Baugh rassemble du beau monde (entre autres, Solomon Kane de Robert E. Howard et Maciste !), pour une nouvelle vampirique qui ne convainc cependant qu’à moitié. On y préfèrera sans doute « Annus mirabilis » de Chris Roberson, nouvelle mettant en scène un jeune Albert Einstein, des énergies bizarroïdes et les Xipéhuz… Reste enfin une petite farce très prévisible mais assurément mignonne avec « Trois Hommes, un Martien et un couffin » de Travis Hiltz.
Une grosse déception, ensuite, avec la nouvelle de Michael Moorcock intitulée « L’Affaire du Bassin des Hivers » ; celle-ci, qui n’est pas sans faire penser à la nouvelle figurant dans l’Anthologie d’histoires effroyables dirigée par Michael Chabon, se révèle assez laborieuse et guère palpitante, malgré deux, trois gags, et laisse parfaitement froid. Traduction douteuse, accessoirement.
« La Danse de la Nuit et de la Mort » de Travis Hiltz n’a pas grand-chose pour elle : simple rencontre bastonneuse entre Fantômas et Irma Vep, ça ne fait pas une nouvelle, en ce qui me concerne.
« Deux Chasseurs », de Robert L. Robinson, Jr., est plus amusante, même si « un peu » grosse : nous y voyons cependant avec plaisir Judex faire alliance avec Tarzan…
Avec « Les Yeux de son père », Jean-Marc Lofficier nous offre une sorte de remake de Rosemary’s Baby assez correct. Après quoi Randy Lofficier s’amuse avec le Docteur Francis Ardan et la Belle au Bois Dormant, pour un résultat potable.
« L’Assassinat inachevé » de John Peel est assez sympathique : là encore, on a droit un beau duo, avec Rouletabille et Michel Strogoff.
Mais l’autre point fort de ce recueil, après la novella qui l’inaugure, est assurément le « Retour au XXe siècle » de Paul DiFilippo, que l’on sait de toute façon très doué pour ce genre d’exercice. Il s’empare ici du « XXe siècle » de Robida, auquel il mêle James Tiptree, Jr., et les Félines d’un vieux space-op’ hollywoodien. Très drôle et bourré d’idées.
Reste enfin « Au suivant ! » de Bill Cunningham, nouvelle en forme de mauvaise blague graveleuse, plutôt moyenne.
Au final, ce second tome est incontestablement moins bon que le premier. Il a tout de même ses bons moments et, même dans les textes les moins convaincants, n’ennuie pas une seconde. Ce qui est déjà pas mal, ma foi. Pas de doute, je vais poursuivre l’exploration de ces Compagnons de l’Ombre, ils le méritent bien. À un de ces jours pour le tome 3…