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CR "Eclipse Phase" (3) : Bienvenue à bord

Publié le par Nébal

Terminus-les-etoiles.jpg

 

Pour l’épisode précédent, voir ici.

 

L’ambiance est pour le moins morne sur Carnasis, après le massacre perpétré par les exhumains. Terminus les étoiles s’en tient cependant à son plan de route et, fidèle à sa tradition, vient en aide à l’habitat sinistré ; la plupart des touristes, ainsi que certains résidents permanents, ont décidé de partir, que ce soit par egodiffusion ou en prenant un ticket pour l’essaim d’écumeurs. Les PJ seront bien sûr du voyage, et Callisto commence à préparer leur intégration, en leur trouvant un logement temporaire et en arrangeant quelques rencontres.

 

Un nouveau PJ intègre le groupe : Washak, néo-lynx mondain, artiste et reporter d’avant-garde ; arrivé trop tard pour la simulation « test », il retrouve les autres sur Carnasis, sur les instructions du Philosophe. Ils font le point sur les événements récents et sur la double mission que leur a confiée Firewall.

 

Buck s’est résigné à accompagner le reste du groupe à bord de l’essaim, dans la mesure où ça le rapprochera de Mars (et où il tient à son morphe, précieux pour le Mouvement). Shad fait de son mieux pour l’apaiser alors qu’il passe ses journées à boire (et à faire des pompes… il a par ailleurs arrêté de prendre du clarum).

 

Shad et John font connaître leur présence dans Terminus les étoiles, proposant leurs services.

 

John contacte le Philosophe, l’interrogeant sur les raisons qui l’ont poussé à choisir ce cadre précis et la Chute pour le « test ». Le proxy, qui prend cette fois l’apparence de Sigmund Freud, lui propose en gros de se livrer à une forme d’analyse, et dans un premier temps de se repasser la simulation, de bien l’étudier ; John se rend compte qu’elle lui produit effectivement un certain effet, sauf la fin, qui ne colle pas.

 

En attendant le départ de l’essaim, qui sera suivi d’une sorte de fête d’accueil dans le Flagship, Callisto entreprend d’organiser quelques rencontres. Elle amène notamment Buck et Washak (qui se fait remarquer et brille au jeu) à bord d’Abstinence Only, dans un tripot sans pareil, et biaise pour que le Dr Mindfuck, qui a l’air un peu gêné, ait une petite conversation avec Buck… laquelle tourne court. Le docteur est accompagné d’un citoyen de Callisto, Hubertus Khan, et l’écumeuse lui fixe un rendez-vous après s’être entretenue avec le psychochirurgien du cas de Buck et de la « Génération perdue ».

 

Puis elle convie John et Natalia à bord de Thoughtcrime, pour qu’ils fassent la rencontre du collectif des anciens savants soviétiques et notamment de Lena Andropov.

 

Callisto et Washak ont laissé Buck s’écrouler dans un coin d’Abstinence Only. Il est réveillé par un Futura alors que la personnalité d’Adán reprend le dessus, lequel inconnu lui rend son arme « confisquée » par Callisto qui s’en était débarrassée et lui suggère de se méfier du Dr Mindfuck. Il se remet immédiatement au clarum.

 

Puis c’est le départ, bientôt suivi d’une réception à bord du Flagship. La plupart des gens présents sont là pour faire la fête, et Natalia comme Washak ne s’en privent pas (qui discutent notamment avec François Leclerc, le styliste néo-avien), mais la discussion avec notamment Kalbir Singh (John) et Alice Chu (Shad) permet de prendre conscience de certaines tensions relevant de la politique interne de l’essaim.

 

Les membres d’Eat-Drink-Fuck (EDF) et le chef de la sécurité sont hostiles au passage par Jupiter, et expliquent que cette décision aberrante et potentiellement très dangereuse résulte de l’action mémétique de jeunes excités contestant leur « autorité » et désireux de frapper un grand coup en narguant la Junte jovienne ; le Dr Mindfuck joue un rôle important dans cette « faction », en affichant clairement son hostilité à l’égard des leaders traditionnels de l’essaim (et notamment d’Alice Chu) et de toutes formes de hiérarchies informelles (lui-même ne compte donc pas a priori devenir une « autorité » de remplacement, mais il est un symbole des dissensions internes) ; mais il paraît difficile de changer la route de l’essaim désormais…

 

Kalbir Singh évoque également la présence d’autres Futuras à bord de l’essaim – une concentration inhabituelle pour ces individus rares –, dont un aurait été assassiné récemment ; il s’inquiète donc de la présence d’Adán à bord, et recommande à ses camarades la prudence.

 

Le Dr Mindfuck s’incruste dans la réception et fait son show, ce que supporte assez mal Alice Chu. Hubertus Khan passe une bonne partie de son temps à surveiller Adán, essaye d’avoir une conversation avec lui, mais Callisto intervient ; tous deux parlent des difficultés rencontrées par les habitants de Callisto, et notamment de Hyoden, du fait de l’action impérialiste de la Junte ; Khan mentionne Arcas, la némésis de Callisto Hawke, qui aurait gagné en pouvoir ces derniers temps.

 

Après la réception, qui s’éternise, et tandis que certains vont se « finir » sur Abstinence Only, Adán reçoit un contact télépathique renouvelant les avertissements de méfiance à l’égard du Dr Mindfuck. John, qui s’est éclipsé plus tôt pour faire des recherches et se repasser les séquences de simulespace, reçoit de son côté une LX du Philosophe, mais décide de la mettre de côté pour le moment…

 

À suivre…

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"Des anges mineurs", d'Antoine Volodine

Publié le par Nébal

Des-anges-mineurs.jpg

 

 

VOLODINE (Antoine), Des anges mineurs, Paris, Seuil, coll. Points, [1999] 2001, 217 p.

 

Le 1er octobre qui vient, l’indispensable librairie Charybde reçoit Antoine Volodine, et c’est quand même la classe. Du coup, j’ai eu envie de me lancer dans un petit cycle post-exotique, dans la mesure où je ne connais finalement que très peu cet auteur hors-normes ; je n’en avais après tout jusqu’à présent lu (sous le nom d’Antoine Volodine en tout cas…) que les quatre premiers romans, en leur temps publiés en science-fictionnie dans la défunte collection « Présence du Futur » (l’auteur faisait partie du groupe Limite), puis repris dans un omnibus en « Des heures durant », et aujourd’hui semble-t-il introuvables. Ce premier contact ne m’avait pas laissé de marbre, c’est rien de le dire ; mais il m’avait confronté à un terrible problème : si j’avais adoré (oh que oui), je ne savais absolument pas comment en parler, ni même dire au juste de quoi ça parlait…

 

Problème que j’avais déjà rencontré auparavant avec le très volodinien et parfaitement indispensable Yama Loka terminus de Léo Henry & Jacques Mucchielli, premier tome de leur cycle consacré à Yirminadingrad. Les deux auteurs, zélés propagandistes, n’avaient pas manqué de me recommander la lecture de Volodine, à bien des égards une figure tutélaire de ce premier recueil, avec un J.G. Ballard et quelques autres tout aussi admirables. Si je me souviens bien – mais du temps a passé, je dis peut-être des bêtises –, ils m’avaient notamment vanté Des anges mineurs, que j’avais acquis immédiatement mais qui était resté à prendre la poussière dans ma pile à lire, ainsi que Dondog et Bardo or not Bardo (tous trois disponibles en « Points »). Si j’ai découvert l’auteur par d’autres romans (donc), ces titres me sont restés derrière l’oreille, et il est bien temps aujourd’hui de leur faire un sort.

 

Bref. J’ai (enfin) lu Des anges mineurs (en son temps récompensé par plusieurs prix, c’est aussi mérité qu’étonnant). Et, après avoir un peu patiné sur les premières pages, j’ai adoré. En fait d’introduction à l’auteur, disons-le tout net, ce livre n’est pas vraiment d’un abord aisé. On se prend tout un univers dans la gueule, sans véritable préambule, et, si ça produit indéniablement son effet, si l’on est bien vite séduit par la plume de l’auteur et les « enfers fabuleux » qu’il nous dépeint, on peut néanmoins s’y noyer, pour le meilleur et pour le pire, et l’on peut même être tenté de dire (ce fut mon cas, j’en connais d’autres) qu’on n’y comprend pas grand-chose, et sans doute que c’est quand même un peu frustrant. Mais, passée la moitié environ du « roman », les pièces du puzzle s’assemblent en une étrange et belle épiphanie, ou apocalypse, comme vous voudrez ; non, on ne comprend certainement pas tout, et l’on passe sans doute à côté de bien des choses essentielles (le jeu des contraintes, notamment, qui se devine sans se montrer écrasant), mais on a le sentiment – et quand je dis « on », je veux essentiellement dire moi, Nébal – de mettre le doigt sur quelque chose de fondamental, et l’effort accompli jusqu’à présent (si tant est que l’on doive parler d’effort) se trouve amplement récompensé.

 

Ces quarante-neuf « narrats étranges », semble-t-il dus à Will Scheidmann, l’homme providentiel créé par des vieilles immortelles pour parfaire la révolution égalitariste, mais qui a finalement rétabli le capitalisme, et dont le procès puis l’exécution s’étirent sur des années, constituant le véritable (ou le plus visible…) fil rouge du livre, nous décrivent un avenir cataclysmique, quelque part entre une Union soviétique grisâtre, ressuscitée pour mieux déchoir, et une Mongolie martienne, un futur d’après l’histoire déserté de l’humanité, réduite à quelques dizaines d’individus qui ne meurent pas. Chaque narrat se voit attribuer un numéro et un nom, formant ainsi une litanie de victimes et bourreaux tout droit sortis des camps, voyageurs, écrivains, chamans, etc., errant dans le presque-néant, et témoignant, à leur façon, d’un monde absurde en train de périr. Le temps s’étire sur des siècles, on ne sait trop s’il s’agit d’une action lente ou d’une inaction éternelle. Et les récits s’organisent, qui voient passer d’un bout à l’autre du monde tous ces noms issus de listes, parfois à peine entraperçus, parfois centraux ; des hommes, des femmes plus encore ; des animaux, aussi. Quarante-neuf icônes d’une réalité qui se délite, traversée de fulgurances et d’improbabilités, de rencontres hasardeuses et d’occasions manquées, dans une atmosphère, aurais-je envie de dire (pardon), de « surréalisme socialiste ». L’histoire d’une révolution qui a échoué – le grand mouvement égalitariste, beau et violent, condamné d’avance, malgré un succès temporaire – et d’un simulacre, d’une farce à la façon dont Marx qualifiait, dans Le Dix-huit Brumaire de Louis Bonaparte, les événements de 1848 : l’insurrection des vieilles de la pension du Blé-Moucheté, ces immortelles qui ont suscité le petit-fils idéal, et qui, juges et bourreaux, l’ont collé à un poteau au cœur de la steppe, afin qu’il entonne lui-même le réquisitoire autocritique le condamnant à mort… mais qui a tant de choses à dire.

 

Les « narrats étranges » oscillent ainsi entre politique et poésie – sans doute parce qu’au fond c’est, ou cela devrait être, la même chose. Mais cela dépasse probablement en bonne part la compréhension ; l’œuvre, dont on pourrait craindre une certaine froideur, intellectuelle, mécanique, industrielle (ou post tout ça, en plus de l’exotisme), touche finalement au cœur, chargée d’émotions inqualifiables, et d’autant plus belles et fortes. On a (trop ?) souvent opposé, en science-fiction, littérature d’idées et littérature d’images ; nous avons ici les deux, avec ces quarante-neuf anges mineurs, beaux comme des friches industrielles.

 

Et nous avons – je ne peux pas m’empêcher de conclure là-dessus, même si d’aucuns, sans doute, pourraient y voir un vulgaire troll – de l’excellente science-fiction. Le meilleur, à vrai dire, de la science-fiction française, à des années-lumière de la médiocrité du tout-venant qu’on nous refile au quotidien (médiocrité qui a ses exceptions, certes, mais rares, comme de juste). Il y a une continuité nette entre l’œuvre de Volodine estampillée Limite et les œuvres qui y ont succédé en « blanche ». Et il est à vrai dire d’autant plus éloquent et regrettable que cette excellence se retrouve exilée en dehors des collections de genre. C’est sans doute mieux pour l’auteur, qui touche ainsi un plus large public, c’est probable. Mais, quand bien même la question de l’étiquette me passionne de moins en moins (voire m’horripile carrément), je ne peux m’empêcher de me dire que cette situation bien particulière est symptomatique d’un triste problème inhérent, peut-être au genre, peut-être à sa perception en France, de l’intérieur comme de l’extérieur. Attention : je ne dis pas que la science-fiction française devrait être ainsi (elle ne doit rien du tout, et il y a de la place pour bien des approches du genre), mais je prétends qu’elle pourrait se le permettre plus souvent, et que cela serait mieux pour tout le monde. Mais voilà : lors d’un récent sondage à la con sur « les auteurs de SF français préférés », Antoine Volodine ne figurait même pas dans la liste… ce qui, à mon sens, est bien plus absurde que les narrats les plus improbables de Des anges mineurs. Parce que l’auteur, en l’occurrence, pour le peu que j’en ai lu, écrase de toute sa puissance brute la masse informe que je n’oserais même pas qualifier de concurrence, quand bien même ce ne serait que pour blaguer.

 

Citons, en instrumentalisant peut-être (je ferai mon autocritique sur le poteau) :

 

« La Troisième Chanson golde n'avait été interprétée nulle part depuis qu'elle avait été écrite, deux cent quatre-vingt-un ans auparavant. Naïsso Baldakchan errait encore dans les songes de quelques individus isolés, souvent des femmes, des femmes très âgées, mais personne ne se donnait le travail de déchiffrer ses partitions, décrétées une fois pour toutes trop subtilement ou trop brutalement éloignées de ce qu'attend l'oreille humaine, à supposer que l'oreille humaine attende quelque chose. Pendant près de deux siècles, aucun cahier signé Naïsso Baldakchan n'avait été placé sur quelque pupitre que ce fût. Ensuite, les violonistes, altistes et violoncellistes avaient totalement disparu de la surface du globe. Pour entendre les Sept Chansons goldes, il fallait maintenant patienter jusqu'à ce qu'advînt un sommeil favorable. On pouvait alors constater que l'ostracisme dans lequel on avait tenu Baldakchan n'avait pas la moindre racine objective. Les harmonies de Baldakchan ne contenaient aucune brutalité, ses mélodies n'avaient rien de vilainement intellectuel. Elles étaient terriblement émouvantes. Il est vrai que désormais les auditeurs qui jugeaient Baldakchan correspondaient mieux au public parfait tel qu'il l'avait toujours imaginé quand il composait : des loups vivants, des immortelles pluricentenaires, des loups morts. »

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"Dédale"

Publié le par Nébal

Dedale.jpg

 

 

Ce fut le premier texte de ma veine psychiatrique-geignarde. Inspiré par un rêve. Écrit probablement courant 2004.

 

Dans un premier temps, tout était noir et vide. Ensuite, une grande lumière blanche, aveuglante, de ces lumières qui font mal et laissent encore longtemps leur empreinte derrière les paupières endolories, comme pressurées violemment. Alors seulement – après un temps de récupération en un délicat fondu flou – je pus me voir, démultiplié en un nombre infini de silhouettes ahuries, regardant toutes fixement, d'un air quelque peu stupide, dans ma direction. J'étais vêtu, à mon habitude, de couleurs sombres et sobres, et, au moindre mouvement que je faisais, c'était comme des milliers d'ombres me moquant dans une imitation narquoise, un balai grotesque qui se répétait de façade en façade pour nul autre spectateur que moi-même. Du moins, c'était ce que je pensais alors, et – je dois le confesser – ma grande frayeur, très vite, fut que quelqu'un d'autre ne se trouve en position de regarder ce singulier cauchemar. Regardant à droite, puis à gauche – des milliers de têtes bougèrent en même temps –, je m'assurai de ma solitude, puis me levai, quelque peu étourdi, tâtonnant contre les murs froids de l'étrange pièce où je me trouvais.

Partout, où que je tourne mon regard, ce n'étaient que reflets de reflets, s'enchaînant sans fin. Dans cette pièce, tous les murs, mais aussi le plafond et le plancher, n'étaient constitués que de miroir. J'en éprouvai vite une terrible sensation, véritablement maladive, de désorientation. Tout tournoyait à mon rythme, à gauche, à droite – des dizaines de milliers de moi –, et, par terre aussi, l'inquiétante impression de marcher dans le vide, de n'être séparé de la chute que par le fabuleux hasard qui me faisait marcher dans mes propres pas.

M'adossant à une paroi, je me laissai glisser jusqu'au sol ; je me réfugiai, ensuite, la tête contre les genoux, les bras contre le front, les yeux fermés, la respiration sèche et douloureuse. J'aurais sans doute pu rester fort longtemps ainsi – que faire d'autre, après tout ? Oui, longtemps, à jamais peut-être, silhouette prostrée ne demandant qu'à rester dans son isolement.

 

Pourtant, rebondissant contre les glaces – au bout de combien de temps, je n'en savais trop rien –, l'écho d'une conversation lointaine me parvint.

« Si si ! Je t'assure, j'ai vu une ombre, quelqu'un qui n'est pas de notre groupe.

— Vraiment ? Non, un reflet sans doute ; j'ai des vêtements amples et flottants : au moindre mouvement que je fais, paf ! ça perturbe vachement.

— Je sais ce que je dis ! C'était pas toi. »

— Bon, bon, du calme ! Enfin, si c'est vrai, on finira bien par tomber dessus, fin du débat. »

 

Les voix se rapprochaient. Des bruits de pas, aussi, avançant de manière désordonnée – quelques pas pressés s'enchaînant rapidement, une pause, deux, trois pas prudents, nouvelle pause, nouveaux pas saccadés –, je pensais à la démarche d'un insecte, ou peut-être d'un lézard. Mais je ne doutais pas, à tous ces sons, que c'étaient de mes semblables qui s'approchaient ainsi de moi.

Je pouvais distinguer quatre personnes. Il y avait tout d'abord cette voix rauque, cette voix de fumeur, chargée d'accent et d'autorité, débordante de confiance en soi et de virilité, une voix tour à tour menaçante et entraînante, celle d'un chef en somme. Une voix qui portait, aussi, bien plus distincte que les autres –, et de toute évidence son possesseur marchait en tête. Il y avait ensuite une voix de femme, une voix un peu enfantine, chantante et maladroite, de celles qui peuvent, selon l'heure et les circonstances, se révéler douces ou irritantes. Derrière, un toussotement récurrent, d'un homme sans doute, qui a vécu ; un toussotement nerveux, gêné, issu peut-être de l'ennui – ou encore de la simple envie de se faire remarquer. Plus loin, enfin, à peine audible, flottait un faible rire mesquin, un ricanement de hyène lourd de sarcasmes, qui virevoltait par-dessus les autres voix, les encadrant, les soulignant, les enveloppant.

Quatre personnes. Au moins.

Je relevai la tête. De nouvelles silhouettes apparaissaient dans mon champ de vision, par morceaux – ici, une étoffe rouge, là, un tissu blanc –, tout cela se répercutait comme dans un kaléidoscope fou, agité de violents mouvements.

 

« Là, tu vois ! »

C'était la voix de « chef ». Je distinguai sa figure dans un reflet éloigné face à moi, forte tête carrée au menton franc et aux yeux vifs, les lèvres alors parcourues d'un sourire triomphal. En avançant vers moi, il disparut ; mais, au bruit de ses pas, je ne doutais pas de son approche. Les autres semblaient suivre. J'avais l'impression – mais peut-être n'était-ce que l'anxiété de cette rencontre – j'avais l'impression que leurs pas s'étaient accélérés, comme une machine s'emballant, ou comme les dernières foulées du coureur devant la ligne d'arrivée. Encore quelques instants – si peu... –, et ils seraient là.

La simple idée de leur rencontre ne m'enchantait guère. Quant à leur parler, mais quoi ? Qu'aurais-je bien à leur dire ? Tandis que les bruits de ces intrus se faisaient plus pressants, je décidai de me lever et de les fuir. Me lever fut une chose ; mais fuir... La terrible sensation de désorientation ne se fit que plus forte alors que je tentais de diriger mes pas loin d'ici – marcher dans le vide, ne pas avancer vers moi, tâtonnant... J'avance une main, qui rencontre bientôt la surface polie d'une glace ; l'autre main à côté, je me déplace avec la gaucherie d'un mime exécutant un de ces ridicules numéros – crainte de tomber à chaque instant. Est-ce au moins par là que je dois diriger mes pas ? Non, peut-être à gauche mais les reflets, sans cesse, ils arrivent. NON ! Je prends l'autre direction – moins de reflets rouges noirs blancs, tissu vert aussi maintenant, un bras menaçant, comme tendu vers moi, comme cherchant à me saisir tel un insecte, et reproduit à des milliers d'exemplaires... Tourner, ailleurs, ici un long couloir – je cours vers mon reflet, mais toujours ces taches de couleur, violentes, soudaines, envahissantes ! J'avance pourtant j'avance...

 

Ils sont en face de moi, tournant le dos à mon reflet.

« Là, tu vois ! » fit à nouveau le chef en tendant l'index dans ma direction. Il devait s'adresser à la jeune fille ; celle-ci haussa les épaules d'un geste résigné, en faisant une moue dédaigneuse. Derrière, un homme plus âgé, crachant ses poumons par à-coups, s'adossa à son reflet et glissa contre le sol, l'air exténué. Le dernier – homme, femme ? – lui adressa un sourire moqueur, puis se tourna vers moi, les yeux brillants.

Ainsi qu'il était prévisible, ce fut le chef qui m'adressa la parole :

« Hé toi ! Ça va ? »

... Je ne savais que répondre. Dans un mouvement nerveux, je me collai à une glace, comme la proie acculée au pied d'une falaise. Mes lèvres tremblaient de murmures incohérents, et j'étais traversé de l'idée folle de hurler quelque chose, de hurler, oui, quoi que ce soit, quelque chose, que ma voix égale – ou même surpasse ! – celle de mon interlocuteur, qu'elle affirme ma capacité à atteindre ce niveau et à m'y maintenir, avec un timbre d'assurance, chargé de confiance en moi ! Mais rien, si ce n'est, bafouillé après quelques secondes d'éternité :

« Où... où est-ce que...

– Où c'est qu'on est ? » fit le chef. « Ah ! ça... Très bonne question, l'ami. Ben, si tu veux que je te dise, on en sait rien nous non plus, tiens.

– Qu'est-ce que ça peut faire ? On y est, c'est tout », fit le plus âgé des quatre. « Il ne sert à rien de se poser trop de questions », acheva-t-il d'un ton sentencieux pour le moins caricatural.

Les deux autres n'avaient pas ouvert la bouche. La jeune fille me scrutait de haut en bas, comme un animal au zoo, ou, que sais-je ? une acquisition récente et regrettée, le visage figé dans cette moue méprisante, suintant la répulsion, le dégoût. À ses côtés, « l'androgyne » faisait de même, en souriant.

Maintenant, ils me regardaient, tous, comme s'ils attendaient que je dise quelque chose. Mais je ne voulais pas de ce rôle d'interlocuteur, c'était trop tôt et... trop, tout simplement. Trop de visages se reflétant sans cesse partout, l'œil inquisitorial, dont le clignement, le moindre clignement, claquait dans l'espace comme un volet fracassé par la tempête contre les murs d'une vieille bâtisse. Non, je ne trouvais rien à dire. Alors...

 

...

 

Enfin, le chef dit :

« En tout cas, c'est un labyrinthe. »

 

...

 

Le vieil homme se releva – cent mille jambes frêles s'agitèrent partout autour de moi. Il éructa violemment, puis :

« Voilà. C'est ça. Un dédale. Et on est tous dedans. Hein ? Comme De Niro dans  Brazil : “We're all in it together, son ! Bon film... Très, très bon...

– Un labyrinthe, quoi », refit le chef. « Et... ça fait un moment qu'on s'y balade, et... enfin, je pensais juste, comme ça... ça te dirait de te joindre à nous, peut-être ? »

 

...

 

« Histoire d'être ensemble », fit la jeune fille. « On y arrivera toujours mieux, comme ça, hein ?

– Arriver à quoi ? » fit le dernier dans un ricanement cinglant. C'était la première fois que j'entendais sa voix, une voix clairement masculine, bien que suraiguë, une voix qui faisait sa mue, pourrait-on dire, avec de soudains pics. « Hein ? Arriver où ? À quoi ? Hein ? Parce que c'est ça la question », continua-t-il dans un crescendo foudroyant, « c'est ça la putain de question : où est-ce qu'on va, hein ? HEIN ? »

 

Un silence gêné s'installa, dont je ne me sentais pas cette fois le seul responsable. Ce fut le vieil homme qui le rompit :

« Eh bien, broumpf... C'est très simple. Hum... Nous sommes – donc – dans un labyrinthe. Or nous pouvons poser qu'un labyrinthe a forcément une sortie...

– Mon cul ! Pourquoi y'en aurait une, hein ? Quoi, quoi !... Y'a une Loi, peut-être, quelque part, qui pose qu'il y a toujours une nom de Dieu de putain de sortie dans un putain de bordel de merde de dédale ? Et pourquoi, hein ? Dis-moi seulement pourquoi, vieux gland !

– Oh, là ! du calme », fit le chef en saisissant le jeune homme à la gorge et en le plaquant soudainement contre la paroi. Le geste fut si brusque que le miroir se fissura, éparpillé en mille reflets sauvages des gémissements du jeune homme. « Vas-y, reprends », fit le chef à l'attention du vieil homme.

« Hum. Voilà. Ceci posé (le jeune homme fit mine de retourner dans la conversation mais le chef l'en dissuada d'un regard fauve), nous pouvons donc admettre qu'il y a un chemin, au sein de nombreuses possibilités, permettant d'accéder à cette sortie. Voilà... Brompf ! C'est là... que nous allons.

 

Je pensai d'abord rester muré dans mon mutisme. Mais le silence qui s'instaura était bien trop lourd d'anxiété, il y avait trop de tension dans l'air, il fallait que quelqu'un rompe à nouveau ce silence. N'y tenant plus, je demandai :

« Mais... comment trouver le bon chemin ? »

Le vieil homme sourit. Le chef, le désignant, fit : « C'est qu'y en a là-dedans », accompagnant sa sentence d'un petit coup de coude amical qui fit tousser le vieil homme. Après un temps – « Hum... » (Il en profita pour réajuster sa cravate) – le vieil homme reprit :

« Eh bien, voilà. Donc, nous sommes dans un labyrinthe, lequel labyrinthe a une sortie. Nous sommes d'accord ? » fit-il à l'attention du jeune homme d'un air abominablement hautain (l'autre ne répondit que par un sifflement haineux). « Bien. Par conséquent, pour atteindre cette sortie, vaille que vaille, il suffit d'une chose... » Et là il suspendit son discours, désireux de faire attendre la réponse ; mais la jeune fille, croyant bien faire, ne lui laissa pas cette chance :

« Il faut suivre le même mur ! » fit-elle dans un glapissement hystérique. « Et c'est pour ça qu'on tourne toujours à gauche ! » Il y avait dans ses yeux tant de joie tandis qu'elle prononçait ces mots magiques que je me surpris à être peiné pour elle. Je baissai la tête.

Le jeune homme se releva, alla se réfugier derrière elle, et, avant même que le chef n'y prenne garde, voulut relancer le débat :

« Ouais, mais ça, très chère, ça suppose au moins deux trucs, QUAND BIEN MÊME IL Y AURAIT UNE SORTIE », fit-il d'un air forcé, jonglant de la tête de la jeune fille au vieil homme. « Primo : faut avoir choisi le bon mur, parce que si ça se trouve, là, on est en train de tourner en rond comme des cons, et dans deux heures on va se retrouver ici, bêtement, à côté de ce putain de miroir où tu m'as fracassé la gueule ! » fit-il à l'attention du chef. Celui-ci banda les muscles, et le jeune homme recula, dans un gémissement. Puis il continua : « Deuzio : faut pas que ce putain de labyrinthe soit sur plusieurs étages, accessibles uniquement depuis des cheminées verticales – qu'on distinguerait carrément pas dans tout ce foutoir – et pas par des escaliers. Parce que là encore on se retrouverait à tourner comme des cons au rez-de-chaussée, quand la sortie est, je sais pas, moi, au troisième ? Capito ? »

 

Un long silence à nouveau. Puis le vieil homme se tourna vers le jeune, et, d’un air sec :

« Il est pourtant une chose qui prouve que nous sommes sur le bon chemin… »

Il se mit à taper du pied. La jeune fille le regardait, perplexe. Le jeune homme :

« Ah oui ? Et quoi ? Quelle intuition de génie vas-tu nous sortir cette fois-ci ?

– La nourriture. »

Le jeune homme devint subitement pâle. Il bredouilla quelque chose d’incompréhensible, tremblant de tout son corps.

« La NOURRITURE ! » répéta le vieil homme, un ton au-dessus.

« La nourriture ? » fis-je, tandis que la jeune fille sautillait de joie, sous l’œil ému et admiratif du « chef ».

« La nourriture », reprit le vieillard plus calmement. « Car, pour être dans ce dédale, nous n’en sommes pas moins des êtres humains qui éprouvons le besoin de nous sustenter. » Il marqua une pause, comme s’il souhaitait obtenir l’approbation de son auditoire. « Jeune homme », fit-il à mon attention, « voyez-vous, cela fait quelque temps que nous déambulons dans ces couloirs. Fort longtemps en ce qui me concerne. Certes, il est quelques éléments de notre groupe qui n’ont que récemment pris la décision de marcher à nos côtés », dit-il, à l’attention cette fois de son contradicteur, qui s’était effondré contre le miroir brisé, et agitait tristement un éclat de verre qui faisait rebondir son reflet lumineux sur les parois. « Or, et ce depuis que nous appliquons ma technique, nous avons toujours fini, à des horaires réguliers, par aboutir dans une pièce où se trouvait une table garnie des mets les plus délicieux, arrosés des boissons les plus exquises. C’est bien la preuve que nous sommes sur le bon chemin. D’ailleurs… »

Et il fit un signe de tête en direction du couloir au fond à gauche, derrière moi ; je me retournai, et vis un jeune garçon, d’une quinzaine d’années, semblait-il, et vêtu d’une étrange livrée, semblable à celle d’un groom du début du XXe siècle ; je pensai à une sorte de liftier. Il m’adressa un large sourire, et, d’un geste soigneusement étudié :

« Si vous voulez bien me suivre… »

 

Le petit groupe derrière moi s’avança sans hésiter – le jeune homme, l’air terriblement abattu, quelque peu à la traîne – et, suivant le groom, ils disparurent au bout du couloir. Je ne bougeais pas, perplexe. L’apparition soudaine de ce groom – et si à propos ! – m’avait stupéfait. Ne sachant trop que faire, je restais debout dans mon coin, tanguant d’une jambe à l’autre. Au bout d’un petit moment, la tête de la jeune fille apparut en biais, par-delà le couloir. Elle me fit signe d’approcher : « Allez, viens. » J’hésitai un instant, puis la rejoignis.

Elle m’entraîna jusqu’à une pièce semblable en tous points à la description du vieil homme. Au milieu de la salle se trouvait une longue table, avec cinq chaises, un mobilier du meilleur goût. Devant chaque chaise, une assiette en porcelaine, superbement lisse – à tel point qu’on s’y reflétait –, entourée de couverts en argent. Deux verres en cristal chacun. Et puis, au milieu de la table, sur une toile verte, divers plats. Je ne connaissais pas la plupart des aliments, mais ils étaient tous des plus appétissants.

 Le vieil homme, en se servant une salade de tomates fleurant bon le basilic, me fit un grand sourire : « Merveilleux, n’est-ce pas ? Et pour cela il suffit d’avancer, en tournant selon la méthode que je vous ai décrite… Tout simplement ! Et on arrive ainsi à ces excellents plats, qui nous permettent de continuer, et nous permettront, un jour que j’estime fort prochain, d’atteindre la sortie… Mais joignez-vous donc à nous ! Vous voyez bien qu’une chaise vous attend… »

Et le groom tira la dernière chaise inoccupée, en me regardant d’un air serviable. Avec un sourire :

« Monsieur, si vous voulez bien prendre place… »

 

… J’hésitais. Puis :

« Je n’ai pas faim.

– Allons, allons », fit le chef, « des conneries, tout ça ! On est obligé d’avoir faim quand c’est des trucs aussi bons que ça qu’on mange ! Allez, ramène-toi, et détends-toi un peu, l’ami ! Depuis tout à l’heure, tu es raide comme un cadavre, avec la tête qui se cache dans les épaules ! »

Il émit un rire gras. La jeune fille dodelina de la tête – « Viens, c’est vach’ment bon ! » – tandis que les autres mangeaient désormais en silence.

« Non. Je n’ai pas faim. »

 

Je m’assis dans un coin. Le groom restait debout près de la chaise qui m’était destinée : « Monsieur ? » Je ne répondis pas, je me contentai d’attendre. Le repas me sembla durer une éternité. Les plats étaient abondants et alléchants ; chacun mangea à sa faim. Après chaque plat, le chef – qui ne faisait guère de manières – se léchait goulûment les doigts ; il s’était empiffré comme un porc, ses lèvres affichant perpétuellement un sourire béat de pure satisfaction. La jeune fille, par contre, avait un appétit d’oiseau – elle expliqua à plusieurs reprises qu’elle devait surveiller sa ligne, d’autant plus qu’il y avait tous ces miroirs, là, partout… Le vieil homme, quant à lui, faisait preuve d’une grande délicatesse, et semblait montrer une attention toute particulière à respecter les plus ineptes des bonnes manières. Quant au jeune homme, il mangea peu, et sans dire un mot de tout le repas.

 

« Fameux ! » fit le vieil homme, enfin, en m’adressant un large sourire. Puis il se tourna vers le chef ; celui-ci, après un rot tonitruant, en se frottant la panse : « Bon, ben, va falloir y aller. » Et il se leva brusquement. Les autres l’imitèrent et se préparèrent à reprendre leur chemin ; la jeune fille baillait. Se retournant vers moi – qui n’avais pas bougé de tout le repas –, elle me demanda : « Vous nous accompagnez, bien sûr ? »

Ils se tournèrent tous vers moi, le groom y compris. Ils arboraient pour la plupart un sourire consternant.

« Non. Non, je ne crois pas, je… je vais rester seul un moment. »

Le vieil homme, haussant les épaules :

« Comme vous voudrez ! De toute façon, vous savez comment nous retrouver : il vous suffira de presser un peu le pas, et hop ! Toujours à gauche ! »

Sans plus d’adieux, ils s’en allèrent.

 

Le groom seul était resté. Il me regardait fixement : « Monsieur ? Peut-être désirez-vous maintenant une collation individuelle ? N’hésitez pas, surtout !

– Non, rien… Non, je… laissez-moi, je vous prie.

– Comme vous voudrez, Monsieur. »

Et il se mit à débarrasser. Bientôt la pièce fut entièrement vide, même la table avait disparu. Quand il eut tout emporté, le groom revint et s’assit un instant en face de moi. Relevant la tête, je le regardai d’un air de chien battu. Il me sourit et se leva.

« A un des ces jours, Monsieur ! »

Et il s’en alla.

 

 

Quant à moi, j’attendis longtemps, très longtemps, et puis la faim et la soif me saisirent, et l’ennui aussi, et alors je me levai et avançai. Je pris à gauche à la première intersection – j’entendais au loin les échos d’une conversation, très loin…

 

 

Avais-je un autre choix ?

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Du son chez Duclock

Publié le par Nébal

Duclock m'a invité à causer d'un souvenir musical ; hop, c'est .

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CR "Eclipse Phase" (2) : Snuff global

Publié le par Nébal

Exhumain.jpg

 

 

Pour l’épisode précédent, voir ici.

 

Les PJ, tous un brin anxieux après l’expérience en simulespace, font un peu plus ample connaissance dans le salon privé. Mais quand ils ouvrent la porte afin d’aller prendre un verre et de faire le point, ils tombent sur deux cadavres juste devant le salon, éviscérés, défigurés, et en partie dévorés, alors que les parois de chair de Carnasis ont été lacérées à coups de griffes. Adán interroge sa muse sur son activité des dernières heures. Un Acolyte de la Viande les surprend devant les cadavres et s’enfuit aussitôt, tout en donnant l’alerte, mais Adán prévient de même la secte qui fait office (vaguement) d’autorité et gère la « police » dans l’habitat, tandis que John cherche à déterminer l’identité des victimes, ce qui n’est pas évident ; mais à partir des tatouages d’identification, il obtient quelques renseignements qui sentent le factice, et prétendent que l’homme et la femme viennent de Mars. Les Acolytes arrivent bientôt, emmenés par un certain Frère Viktor, et interrogent les PJ, mais ne se montrent pas très efficaces. Quand ils vérifient les systèmes de surveillance à l’extérieur du salon, ils acquièrent rapidement la certitude (de même que John, qui épie en douce) que les caméras ont été piratées pour effacer toute trace du double meurtre. Frère Viktor demande aux PJ de ne pas quitter Carnasis le temps que l’enquête soit bouclée (les Acolytes manquant d’autorité à proprement parler, cela tient plus de la requête et de la faveur que de l’injonction ; Callisto s’en plaint, y voyant une entrave à sa liberté, mais les autres calment le jeu : de toute façon, Terminus les étoiles n’est pas censé quitter l’habitat avant environ une semaine…).

 

Les PJ vont discuter de tout cela, ainsi que de leur mission pour le compte de Firewall, autour d’un verre. Callisto leur parle du fonctionnement de l’essaim, et organise une soirée sur Carnasis avec les Dogs (elle connaît bien Barking Dog). Shadul fait des recherches sur les événements récents dans le système jovien, et entend parler de la Lance de Longinus, dont la recrudescence d’activité inquiète la Junte. On fait également le point sur le peu d’informations dont on dispose sur Nine lives et Legba. Plusieurs PJ reçoivent des messages sibyllins, dont la suggestion d’enquêter sur les deux meurtres, les Acolytes étant des branques.

 

Les PJ se rendent à la soirée de Barking Dog, une vraie débauche de drogues. Ils y font la connaissance de plusieurs Dogs, ainsi que de quelques autres écumeurs (dont Amrita Shah) et touristes. La soirée se prolonge, Natalia et Callisto s’attirent les sympathies des convives par leur poésie et leur danse. Mais, pendant la fête, Shadul reçoit un nouveau message, témoignant d’un autre meurtre perpétré dans les mêmes circonstances que les deux premiers. Puis chacun rejoint son « appartement » privé à tour de rôle.

 

Quand Adán se lève, il cherche à savoir ce qui s’est produit pendant son sommeil, et se rend compte qu’une femme a fait le guet devant son « appartement » pendant quelque temps. Les PJ se retrouvent chez Shadul. Ils comprennent que les messages qu’ils ont reçu proviennent de Carnasis même, qui les presse d’enquêter. Les actualités locales ne mentionnent rien à propos de tout cela, mais une recherche sur des sous-réseaux criminels permet de découvrir un snuff artistiquement réalisé, qui porte semble-t-il l’empreinte de Korova, une artiste de l’extrême « connue » (façon de parler, son identité réelle est protégée, seul cet avatar a une certaine notoriété) pour sa fascination pour l’ultra-violence. Surtout, la vidéo montre le meurtrier en action : une créature rapide et puissante, toute en muscles et en griffes. Natalia l’identifie comme étant un exhumain de type prédateur. Quelques recherches supplémentaires confirment que des exhumains étaient déjà venus sur Carnasis, mais que l’habitat, d’une manière ou d’une autre, les avait chassés. Là encore, les systèmes de sécurité ont été piratés avec beaucoup de talent. Les PJ parviennent par contre à identifier la femme qui surveillait l’appartement d’Adán : Lucia Sotomayor (une identité qui sent à nouveau le factice, et dont la provenance serait Mars). Ils déterminent sa position… mais le piratage des réseaux de surveillance de Carnasis est bientôt généralisé, ce qui prohibe toute utilisation des caméras, etc. Carnasis est dès lors trop occupé pour répondre aux demandes des PJ. Ceux-ci se tournent vers le Philosophe, qui confirme que, si un exhumain est dans le coup, il est de leur devoir d’enquêter pour le compte de Firewall et de mettre un terme à la menace.

 

Les PJ décident de se rendre dans le secteur où l’on a vu pour la dernière fois Sotomayor ; mais, quand ils sortent, les écrans des parois de Carnasis, contaminés, diffusent en boucle des snuffs de massacres à bord de l’habitat, dont certains en Lex ; un détail permet à Adán de déterminer qu’il y a au moins deux prédateurs dans l’habitat. La panique et la confusion sont totales, résidents comme touristes de Carnasis se ruent sur les passerelles d’ego-diffusion et le spatioport, qui devient inaccessible. Des cadavres jonchent les couloirs. Les PJ cherchent des renforts : Callisto contacte les quelques Dogs qui sont restés sur Carnasis après la fête, puis les PJ se rendent auprès des Acolytes de la Viande… mais ceux-ci se sont scindés en deux factions, l’une suivant les enseignements traditionnels de la secte, tandis que l’autre se revendique de la philosophie exhumaine, et les deux groupes s’entretuent. La situation est extrêmement chaotique, et John est vaguement blessé en cherchant à récupérer de toute force une arme.

 

Les PJ cherchent ensuite à rejoindre, avec les Dogs, « l’appartement » de Sotomayor, mais Carnasis, qui sort très brièvement de son silence, leur communique une adresse vite supprimée, non loin. Natalia se rend compte que le système d’oxygène de Carnasis est également atteint par le piratage global, et que la situation deviendra très critique dans quelques heures. Les PJ se rendent à l’endroit indiqué. Ils y retrouvent Sotomayor, armée, qui défonce une porte, mais est vite envoyée voltiger contre la paroi par un prédateur qui sort du local. Le combat s’engage avec cette machine à tuer ; Adán change subitement d’attitude, s’empare d’autorité d’une arme et se met en avant. Les Dogs, surtout, font du bon travail et affaiblissent progressivement l’exhumain, tandis que Sotomayor, suivie par Shadul, pénètre dans « l’appartement ». Voyant cela, le prédateur se détourne des autres PJ (et notamment d’Adán) pour retourner dans le local. John, sur un coup de chance, paralyse le prédateur amoché, et Natalia le décapite. À l’intérieur, Sotomayor fait feu sur un neurode ; une fois celui-ci abattu, Carnasis reprend progressivement le contrôle de ses systèmes, et se met à rétablir l’ordre (notamment en gérant la panique au spatioport et en rappelant à l’ordre les Acolytes, dont le courant « traditionnel » l’emporte, qui se lance sur la piste du second prédateur). Korova est également présente à l’intérieur de « l’appartement », mais elle s’est contentée de tout regarder en fumant. Shadul s’avance pour lui parler… mais John l’exécute sommairement (elle avait un dispositif d’évacuation de l’ego), ce que les autres PJ prennent très mal. Lucia Sotomayor refuse de répondre à toute question, et s’en va. Adán se comporte de manière très étrange : il dit s’appeler Buck Owen, et devoir regagner Mars au plus tôt ; Shadul le calme et l’amadoue, le convainquant d’embarquer avec eux à bord de Terminus les étoiles (dont le départ sera sans doute accéléré vu la situation à bord de Carnasis).

 

À suivre…

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Jalons musicaux

Publié le par Nébal

En ce moment, sur Facebook, c’est la folie des chaînes. Je ne m’en plains pas, j’aime bien.

 

Il y en a une sur les dix albums de musique essentiels, au sens notamment où ils ont donné envie de faire de la musique soi-même. Personne ne m’a tagué… Mais j’ai envie de répondre quand même, na. Sauf que dix, c’est vraiment impossible. Voici donc une liste de mes principaux jalons musicaux, dans l’ordre à peu près chronologique de découverte.

 

The-Wall.jpgPink Floyd, The Wall : Je n’ai pas tenté l’expérience depuis longtemps, mais je crois qu’aujourd’hui j’aurais beaucoup de mal à réécouter cet album hyper mégalo. Mais il m’a longtemps fasciné, et c’est grâce à lui que je me suis intéressé à la musique quand j’étais gamin.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Nevermind.jpgNirvana, Nevermind : L’album générationnel ? Aujourd’hui, je préfère In Utero, mais ce premier contact avait quand même quelque chose d’effroyablement bon.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Maxinquaye.jpgTricky, Maxinquaye : Découvert grâce à Bernard Lenoir, si je ne m’abuse lors de ma première écoute de son émission. Une baffe colossale.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


To-Bring-you-my-Love.jpgPJ Harvey, To Bring you my Love : Mêmes circonstances, même effet. Un album proche de la perfection, de très loin mon préféré de la dame.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Grace.jpgJeff Buckley, Grace : J’ai mis un peu de temps à accrocher, et puis je suis tombé radicalement amoureux. Sa mort m’a profondément abattu ; je me souviens encore des gens qui se foutaient de ma gueule à l’époque : les mêmes se sont mis à chanter à tue-tête « Hallelujah » quelque temps plus tard (au point de m’écœurer de cette reprise).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Goo.jpgDirty.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sonic Youth, Goo et Dirty : Découverts ensemble grâce à un cousin, aujourd’hui presque indissociables dans mon esprit ; mon premier contact avec ce groupe qui figure parmi mes préférés. Je suis en pénurie de superlatifs.

 

 

Beaucoup-Fish.jpgUnderworld, Beaucoup Fish : Un des albums que j’ai le plus écoutés. Un sommet de la techno, qui a bleui mes rêves.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Metal-Explosion-3.JPGUne compil du magazine Metallian, je crois que c’était Metal Explosion 3 : Découverte fascinante du metal, pas celui de la radio, mais celui qu’on disait « extrême » ; tout n’était pas bon, loin de là, mais ça m’a fait un choc ; surtout le black metal, pour les images qu’il suscitait…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Fixed.jpgNine Inch Nails, Fixed : Mon premier contact avec l’œuvre de Trent Reznor, par la face nord ; l’occasion aussi d’entendre parler pour la première fois de Coil et de Fœtus…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


The-Mind-is-a-Terrible-Thing-to-Taste.jpgMinistry, The Mind is a Terrible Thing to Taste : La bible du metal indus (donc), ça reste encore aujourd’hui un de mes albums préférés tous genres confondus.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Richard-D.-James.jpgAphex Twin, Richard D. James : On peut vraiment faire de la musique comme ça ? Sans déconner ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Unknown-Pleasures.jpgJoy Division, Unknown Pleasures : Je sais que cet album a été écrit spécialement pour MOI.

 

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

 

 

The Man-MachineKraftwerk, The Man-Machine : Acheté en raison d’une curiosité un peu perverse ; sauf que j’ai été immédiatement conquis. Ca m’a amené à m’intéresser à plein de choses.

 

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

  

 

  

Slow Riot for New Zero KanadaGodspeed You ! Black Emperor, Slow Riot for New Zerø Kanada : Entendu complètement par hasard sur une petite radio toulousaine, j’ai été bouleversé.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LCD-Soundsystem.jpgLCD Soundsystem, LCD Soundsystem : Parce que James Murphy est un génie et un passeur inégalé ; là encore, ça m’a amené à découvrir plein de choses. Yeah !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Suspended-Animation.jpgFantômas, Suspended Animation : On peut vraiment faire de la musique comme ça ? Sans déconner ? (Bis.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


The-Remote-Viewer.jpgCoil, The Remote Viewer : Mon premier véritable contact avec Coil. Bluffant.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ambient-4-On-Land.JPGBrian Eno, Ambient 4: On Land : Ma véritable découverte de l’ambient, un gros choc.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Christ-Illusion.jpgSlayer, Christ Illusion : Parce que c’est l’album qui m’a ramené au metal et m’a fait redécouvrir Slayer, qui reste ZE groupe du genre.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Rossz-Csillag-Alatt-Szuletett.jpgVenetian Snares, Rossz Csillag Alatt Szuletett : Découvert sur les bons conseils d’un ami, qui savait que ça me plairait. Pas qu’un peu ! Cet album génial est en même temps lié pour moi à toute une palette d’émotions noires…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


White2.jpgSunn O))), White2 : On peut vraiment faire de la musique comme ça ? Sans déconner ? (Ter.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


The-Place-Where-The-Black-Stars-Hang.jpgLustmord, The Place Where the Black Stars Hang : Ma véritable découverte de Lustmord, un traumatisme durable.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  N’hésitez pas à commenter et à jouer, hein.

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"Je suis la reine", d'Anna Starobinets

Publié le par Nébal

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STAROBINETS (Anna), Je suis la reine et autres histoires inquiétantes, traduit du russe par Raphaëlle Pache, Bordeaux, Mirobole, coll. Horizons pourpres, [2005] 2013, 210 p.

 

Ce n’est pas exactement un scoop : le fantastique – le bon, en tout cas – est à bien des égards le parent pauvre des littératures de l’imaginaire. Il faut dire qu’ « on » a longtemps prétendu, sous la forme d’un axiome irrémédiable, qu’il était vain de vouloir publier du fantastique et/ou de l’horreur en France de nos jours, a fortiori sous forme de nouvelles. Chose que j’ai toujours trouvée aberrante, pour rester poli… Résultat : ce genre a largement été évacué par les collections dédiées, en tout cas celles des gros éditeurs traditionnels de l’imaginaire, pour se réfugier, soit chez des éditeurs essentiellement consacrés à la « blanche », soit chez de « petits » éditeurs – de bons éditeurs, j’oserais presque dire de vrais éditeurs – qui envoient balader les préconçus sur cette prétendue « impossibilité » et publient des choses qu’ils aiment, aussi improbables soient-elles. Je pourrais citer ici plusieurs exemples : je ne m’étendrai bien sûr pas sur Dystopia, mais j’ai ainsi à maintes reprises évoqué Le Visage Vert, ou, plus « gros » et plus « blanc », L’Arbre vengeur. Et il faut aujourd’hui rajouter à cette liste les jeunes éditions Mirobole, notamment pour leur collection « Horizons pourpres ».

 

Mirobole m’a tapé dans l’œil depuis un certain moment, ne serait-ce que pour ses couvertures à très forte identité graphique – je sais bien qu’elles ne sont pas du goût de tous, mais personnellement je les adore. J’ai ainsi flashé dès le premier regard sur l’étrange composition de ce Je suis la reine de la Russe Anna Starobinets (oui, parce que Mirobole a aussi le bon goût – son catalogue est éloquent – d’aller chercher ses auteurs étrangers ailleurs qu’en simple Anglo-saxonnie). J’ai cependant attendu (trop longtemps) avant de me le procurer, et, finalement, mon premier Mirobole fut l’excellent Les Furies de Borås du Suédois Anders Fager, vraie réussite dans le genre si difficile de l’horreur à tentacules façon Lovecraft. Mais ce premier contact ayant été particulièrement savoureux, j’ai eu envie d’approfondir ma découverte du catalogue de Mirobole, et me suis donc enfin tourné vers ce Je suis la reine qui m’intriguait tant (en attendant d’autres titres, je n’en ai certainement pas fini).

 

Les « histoires inquiétantes » d’Anna Starobinets, qui oscillent entre fantastique subtil et discret, et vagues teintes de science-fiction (Mirobole annonce d’ailleurs pour bientôt un roman d’anticipation de l’auteur), représentent sans doute ce que l’on pouvait attendre de mieux du genre : la finesse du trait, servi par une plume plus qu’à son tour émouvante, n’exclut en rien l’horreur la plus viscérale, voire grotesque (au meilleur sens du terme), tout en ménageant de délicieux effets d’angoisse. En s’attachant à un quotidien russe passablement grisâtre, et en accordant beaucoup d’importance à ses personnages le plus souvent fragiles (dont un certain nombre d’enfants), l’auteur parvient à instiller le malaise avec délicatesse, pour mieux malmener le lecteur vaguement masochiste qui se délecte de ce sentiment d’inconfort que j’aurais presque envie de qualifier de kafkaïen (et pas seulement quand la dame fait dans l’absurde tragi-comique, comme dans la dernière nouvelle, « L’Éternité selon Yacha »). Et bon nombre de registres de l’inquiétude trouvent ainsi à être illustrés avec un brio égal au long (enfin, court…) des six nouvelles de ce petit recueil.

 

Le livre attaque en force avec « Les Règles », et son idée toute simple, voire convenue, mais brillamment mise en scène ; nous sommes ici en plein fantastique de l’ambiguïté, et cela fonctionne parfaitement. « La Famille », qui tient sans doute pour une bonne part de l’allégorie, évoque davantage une certaine science-fiction dickienne en condensé perturbant (je n’ai pu m’empêcher ici de penser à Coulez mes larmes, dit le policier). « J’attends », de son côté, joue la carte du grotesque, de la névrose et de l’organique, non sans humour tordu ; on lorgne ici, peut-être, du côté d’un Cronenberg, ou d’un Burroughs vu par Cronenberg. « Je suis la reine », le plus long texte du recueil, à la construction adroite, décrit la descente aux enfers d’une famille mono-parentale avec une grande finesse psychologique, et s’achève dans un délire sordide et glauque pour le moins saisissant. « L’Agent », à la conclusion certes un peu « facile », n’en est pas moins très efficace. « L’Éternité selon Yacha », enfin, convoque le mythe le plus classique dans un cadre on ne peut plus réaliste, et fait beaucoup rire avant de tirer quelques larmes…

 

Excellent recueil, donc, que ce Je suis la reine, où l’effroi et la finesse se mêlent avec harmonie pour peindre des tableaux impressionnants, oscillant entre réalisme social et onirisme noir. Preuve, s’il en était besoin, que le fantastique n’est pas mort, qu’il bouge encore ; sans doute y a-t-il bien des merveilles du genre qui n’attendent que d’être publiées. Mirobole, en tout cas, a réussi un beau doublé dans le genre avec Anna Starobinets et Anders Fager. On souhaitera donc une longue vie à ce jeune éditeur, que l’on félicitera en outre pour son audace rafraîchissante.

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CR "Eclipse Phase" (1) : De poussière et d'acier

Publié le par Nébal

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Un scénario très bourrin en guise d’introduction à Eclipse Phase: le but était essentiellement de tester la mécanique ; on verra très prochainement pour l’univers dans tout ce qu’il a de foisonnant…

 

Les PJ (ils sont cinq pour l’instant : « John Doe », Shadul Kushie Khabie Gham, Callisto Hawke, Adán Lagarto et Natalia Nikonovna ; je ne vais pas les décrire en détail pour le moment, histoire de préserver leurs backgrounds pour la suite) sont convoqués par un proxy anonyme sur Carnesis, dans un salon privé de simulespace. Ils travaillaient déjà pour Firewall séparément, mais se rencontrent pour la première fois. Après quelques brèves présentations, ils se connectent au réseau privé, et se retrouvent dans un environnement virtuel évoquant l’Acropole d’Athènes pendant l’Antiquité. Leur proxy, qui se fait appeler le Philosophe, prend l’apparence de Diogène (« Barre-toi de mon soleil ! ») ; il leur explique qu’il a une mission délicate à leur confier, consistant à s’infiltrer sur Legba suite à la demande de renforts de leur sentinelle sur place, qui évoque une assemblée des pontes de Nine Lives et un comportement étrange de la part des gladiateurs esclaves du cartel. Les PJ vont voyager jusqu’à Extropia au sein de l’essaim d’écumeurs Terminus les étoiles (dont fait partie Callisto Hawke), à charge pour eux de trouver ensuite comment se rendre sur Legba. En chemin, l’essaim va passer dans l’orbite de Jupiter et en utiliser le puits gravitationnel, ce qui peut entraîner quelque grabuge ; les PJ devront également veiller à ce que tout se passe au mieux à cette occasion.

  

Mais, en attendant, le Philosophe va leur faire passer un test en simulespace – un « jeu de rôle »… – pour voir comment ils travaillent ensemble…

  

L’environnement change (et l’apparence du Philosophe, qui prend l’aspect d’un mafieux caricatural) : les PJ se retrouvent dix ans plus tôt, dans la cité-État de Marseille (scénario « De poussière et d’acier », Alpha+Phase #1. Premier Morphe), alors que les signes de la Chute se multiplient rapidement (mais les PJ sont affectés par un blocage mental, qui les empêche de considérer ceci comme un simple jeu, et tout autant de communiquer à propos de la Chute). Ils ont pour mission, en tant que malfrats (mais dotés de leurs morphes et de leur équipement, qu’il s’agit de tester), d’exfiltrer Ronald Dufour, chercheur en intelligence artificielle pour le compte de NeuroteQ, une filiale de Cognite. Le Philosophe leur donne des plans du bâtiment, ainsi que des codes administrateur, et leur donne rendez-vous quelques heures plus tard dans un entrepôt près du port.

  

John se procure rapidement un terminal afin de se livrer à quelques manipulations et piratages. Tandis que leurs muses les bombardent de flash infos alarmants (et parfois déroutants) sur le conflit qui s’envenime entre l’Alliance germanique et les cités-États du Sud (dont Marseille), Natalia et Adán se concoctent des identités d’emprunt (Natalia une chercheuse en IA, membre de NeuroteQ, supérieure hiérarchique de Dufour, et Adán son assistant). L’équipe loue un véhicule qu’elle va garer non loin de NeuroteQ. Pendant que Natalia et Adán entrent, sans souci, dans le bâtiment pourtant hautement sécurisé, les autres restent dans le camion, où ils assistent bientôt à l’exécution sommaire d’un passant par des policiers. L’ambiance est de plus en plus tendue. Natalia prétend d’abord à Dufour qu’il y a eu des fuites depuis son laboratoire, pendant qu’Adán drogue son thé (qui ne sera finalement pas bu…) ; puis, jouant sur les flashs d’informations, Natalia persuade Dufour qu’elle est là pour exfiltrer le chercheur en attendant que la crise avec l’Alliance germanique se calme. Dufour est très paniqué, mais se résout à la suivre. Un garde, devant les escaliers, se montre méfiant, mais les laisse finalement passer. Alors qu’ils sont dans les escaliers, ils ressentent un tremblement ; la nouvelle tombe bientôt : Milan a été atomisée… En chemin vers le camion, Dufour se montre de plus en plus sceptique sur les raisons de son exfiltration et les procédés employés, mais les PJ le font monter dans le véhicule et le maîtrisent. La muse de John est endommagée (cela arrivera par la suite à d’autres PJ…), et certains appareils (comme, plus tôt, l’ascenseur) connaissent des défaillances et autres comportements étranges (ils se mettent à chanter, ont des parasites, etc.). John crame d’ailleurs son terminal…

  

Tandis que les PJ se rendent à l’entrepôt où ils ont rendez-vous dans quelque temps avec le Philosophe, des avions se mettent à rugir dans le ciel, et bombardent des emplacements stratégiques de Marseille ; des troupes variées, humanoïdes ou non, sont également parachutées sur la ville. Pendant qu’Adán calme Dufour (Shadul l’intimidant de son côté…), John essaye d’établir un périmètre de sécurité, mais ne parvient qu’à étendre le réseau de vidéosurveillance. Il voit ainsi des signes du conflit qui se rapprochent ; l’environnement à l’extérieur de l’entrepôt, peu fréquenté, reste encore assez calme, mais il voit néanmoins un blindé étrange se débarrasser de policiers marseillais, et un fuyard se faire couper la tête par un drone.

  

Le Philosophe contacte les PJ, tandis que d’autres flashs continuent régulièrement de leur parvenir sur la situation qui s’envenime. Il ne pourra pas venir au rendez-vous ; l’objectif change : les PJ doivent trouver un moyen de quitter Marseille, et même la Terre… Ils débattent pour savoir quel serait le meilleur moyen d’y parvenir. L’ego-diffusion est à peine envisagée : les plate-formes publiques sont prises d’assaut, mais les PJ ne se posent pas la question des passerelles privées ou des darckcasts, et ils se décident pour « emprunter » un lanceur et quitter ainsi physiquement la Terre. Il leur faut néanmoins rejoindre l’appareil, qui est à quelque distance…

  

En route, les signes du conflit se multiplient. Shadul, qui conduit, est obligé de freiner brutalement quand un blindé leur bloque le passage et se prépare à leur tirer dessus. Il parvient à le contourner en roulant sur le trottoir et à s’éloigner, mais, un peu plus loin, confrontés à un combat de rue, les PJ sont contraints d’abandonner leur véhicule. Cinq soldats non identifiés les prennent pour cibles. La plupart des PJ se mettent à couvert, mais Callisto leur tire dessus avec son fusil à plasma ; elle en met très vite deux hors de combat, mais les survivants ripostent, elle est gravement blessée et sombre dans l’inconscience. Pendant qu’Adán met Dufour à l’abri et que Natalia contourne le bâtiment (elle doit bientôt faire face à un des soldats, assez vite écrasé par un camion lancé à toute vitesse, puis à un drone), Shadul et John cherchent à protéger Callisto et à éliminer les soldats restants. Ils y parviennent finalement et se réfugient dans le bâtiment, où ils donnent les premiers soins à Callisto, toujours gravement blessée mais qui reprend conscience.

 

Les PJ (qui ont beaucoup de chance…) trouvent un autre véhicule et reprennent la route en direction du lanceur. La voie est encombrée. Près de la piste, les combats font rage, il y a trois factions qui s’entredéchirent, sans compter les civils paniqués qui cherchent un moyen de fuir. Peu après qu’un bombardement a fait sauter une bonne partie du spatioport, un camion les double, défonce la grille, et fonce sur ce qui est semble-t-il le dernier lanceur en état. Mais Shadul parvient à les dépasser à nouveau et à leur faire faire une embardée. Pendant que les autres vont pirater l’accès au lanceur, il fait un carton sur le camion des importuns… et le fait sauter. Après quelques tentatives infructueuses, les PJ parviennent à monter à bord du lanceur. Seule Callisto est en mesure de le piloter, mais elle est gravement blessée… Elle parvient cependant à décoller et à piloter l’appareil ; tandis que les PJ s’interrogent sur la destination à prendre, un satellite de défense les prend pour cible alors qu’ils sortent de l’atmosphère, et ils sont désintégrés…

  

Les PJ se retrouvent dans un bureau type début du XIXe siècle, où le Philosophe (qui a encore changé d’aspect) dresse un bilan mitigé de leur action. Il les félicite pour l’exfiltration de Dufour et le travail en équipe plutôt convaincant qu’ils ont accompli, mais blâme Callisto pour s’être lancée la tête la première dans le combat, face à une troupe dangereuse. Surtout, il leur montre combien l’idée du lanceur était regrettable, a fortiori avec une pilote en aussi mauvaise condition ; il savait que certains des PJ étaient rétifs à l’ego-diffusion, mais il s’agissait justement de tester cet aspect…

  

Les PJ se retrouvent dans leurs fauteuils, l’expérience les a passablement traumatisés. Ils vont incessamment rejoindre Terminus les étoiles, et entamer le voyage vers Extropia via l’orbite de Jupiter.

  

À suivre…

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"Tolkien et ses légendes", d'Isabelle Pantin

Publié le par Nébal

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PANTIN (Isabelle), Tolkien et ses légendes. Une expérience en fiction, Paris, CNRS, coll. Biblis, [2009] 2013, 320 p.

 

J’étais supposé chroniquer ce livre pour le Bifrost spécial Tolkien. Mais, bien qu’en ayant grandement apprécié la lecture – si l’ouvrage est relativement décousu, et parfois frustrant dans ses partis-pris, il est tout à fait passionnant et fort bien fait –, je me trouve aujourd’hui incapable d’en parler… Je ne saurais quoi en dire de plus que dans cette critique de Claude Ecken, par exemple. Je vous le recommande néanmoins, et vous prie de m’excuser pour cette défaillance.

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