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X-Wing 2.0 : Star Wars, épisode – CVIII² : L'échange des listes

Publié le par Nébal

X-Wing 2.0 : Star Wars, épisode – CVIII² : L'échange des listes

Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine…

 

Genre à Mérignac…

Les camarades Acteris, Albu, Sepresham et moi-même avons fait notre séance mensuelle X-Wing + jeu de rôle (en l’espèce Apocalypse World). Côté figouzes, nous avons choisi, passé quelques séances « normales » pour tester la v2, de revenir à notre principe de « règles à la con » qui changent un chouia la donne, d'une manière différente à chaque fois. Nous avons décidé, en l’espèce, de procéder à une sorte d’échange de listes : chaque joueur concevait une liste, de la faction de son choix, et en toute liberté ; mais, le jour venu, cette liste serait jouée par un autre joueur, déterminé aléatoirement ; l’idée était que l’on ne jouerait pas sa propre liste, donc, mais aussi, dans la mesure du possible, qu’on ne jouerait pas contre la liste qu’on avait créée.

 

Mais il s’agissait de créer de vraies listes, bien sûr – pas un truc tout pourri qu’on balancerait mesquinement à un autre joueur pour qu’il perde, aha, PERDE. En fait, à la suggestion très pertinente d’Albu, nous procéderions alors à un double classement : nous compterions aussi bien, mais séparément, les victoires et les défaites en tant que « pilote », mais aussi en tant que « concepteur de liste ». Ce qui donnait un petit aspect compétitif à la rencontre, mais incitait en même temps à tester des trucs – littéralement : plusieurs d’entre nous nous sommes retrouvés à jouer des listes, voire des factions, totalement inédites pour nous ; à titre d’exemple, me concernant, ça a été la première fois que je jouais Racailles…

 

Voyons donc les listes proposées par les quatre joueurs…

 

LES LISTES À ÉCHANGER

 

La liste racaille d’Acteris

 

 

Et commençons par Acteris, qui est revenu à ses premières amours : les Racailles. Toujours très adepte des listes à deux vaisseaux seulement (les trois autres joueurs ont des frissons quand ils ne doivent jouer que deux vaisseaux…), il a proposé une variante de liste Boba-Guri.

 

(Et, oui, pour les maniaques de la précision : la photo juste au-dessus présente un StarViper rouge, mais Acteris alignait la figurine blanche – c’est juste que j’ai pris cette photo tout seul dans mon coin après la partie, et je n’ai pas le StarViper blanc qui va bien…)

 

 

Détaillons un peu – et, à tout seigneur tout honneur (hein ?!), commençons par le légendaire Boba Fett, à bord de son Patrouilleur de classe Firespray (80 points d’escadron). Le Firespray est un socle moyen très versatile, j’ai eu l’occasion de le constater en l’ayant en face à maintes reprises (Acteris aime beaucoup ce vaisseau, et je ne lui jetterai pas la pierre, certainement pas). Et Boba aime avoir plein d’ennemis autour de lui : quand il défend et quand il attaque, il peut relancer un dé pour chaque vaisseau ennemi à portée 0-1.

 

Côté Titre, Acteris a fait une entorse à l’orthodoxie starwarsienne en choisissant Marauder (3) plutôt que Slave One. Ce Titre a deux effets notables : il confère au vaisseau un slot d’Artilleur, et permet de relancer un dé quand on fait une attaque principale dans l’arc de tir arrière – car, oui, ce n’est pas le moindre atout de ce vaisseau, il a un arc de tir arrière, et aussi puissant que l’arc de tir avant (trois dés rouges dans les deux cas). Et l’Artilleur, justement ? Ni plus ni moins que… Han Solo (4) ; et là l’adepte du lore rigoureux défaille… Han Solo, en tant qu’Artilleur racaille (très différent de ses équivalents rebelles), permet de faire une action de Concentration rouge avant de s’engager.

 

Puisqu’on fait dans le (petit) personnel, évoquons l’Équipage embarqué par Boba, qui se trouve être un Copilote perspicace (10) : quand il fait une action de Concentration, il gagne un marqueur de Concentration supplémentaire – ce qui joue comme de juste avec l’aptitude de l’Artilleur Han Solo.

 

Côté Talent, Acteris a opté pour un Gambit des astéroïdes (2) : cette carte confère au Firespray, qui en est autrement dépourvu, une action d’Évasion rouge, et celle-ci devient blanche s’il y a un Obstacle à portée 0-1.

 

Et, pour ce qui est des Engins, Acteris a équipé Boba de Charges sismiques (3) : ces bombes n’explosent pas directement sur des vaisseaux, mais sur des Obstacles, les faisant disparaître du tapis de jeu, et c’est à la portée 0-1 de l’Obstacle en question que l’on détermine quels vaisseaux subissent un dégât automatique ; il y a deux charges sur cette carte. C’est un choix étrange : comme l’a fait remarquer Albu, quand il a joué cette liste (contre moi, d’ailleurs), les Charges sismiques paraissent entrer en contradiction avec le Gambit des astéroïdes – Boba Fett a en fait (…) tout intérêt à avoir des Obstacles près de lui… d’autant plus, d’ailleurs, que sa partenaire Guri aussi avait une carte lui permettant de jouer avec les Obstacles (même si de manière moins offensive), étant équipée d’un Détecteur anti-collision, comme on le verra plus loin. Mais, bon, pourquoi pas.

 

Reste une dernière Amélioration pour Boba, une Modification, en l’espèce un Système d’occultation, qui lui confère un dé vert de plus tant qu’il y a une charge sur la carte – c’est-à-dire tant que le vaisseau n’a pas subi de dégât, puisqu’il perd alors sa charge unique. Cette carte est à coût variable, fonction de l’Agilité du vaisseau : celle du Firespray étant de 2, cette carte coûte pour lui 6 points d’escadron.

 

Boba Fett représente 108 points d’escadron en tout.

 

 

Et il y a donc (seulement) un second vaisseau, qui est une Plateforme d’attaque de classe StarViper, pilotée par l’androïde Guri (62) – un vaisseau très agile, qui a quelque chose d’un as racaille, je suppose. Les StarVipers sont équipés en série de Micropropulseurs, qui leur permettent de faire des tonneaux bizarres : au lieu d’utiliser le gabarit Tout droit 1, ils utilisent le gabarit Virage sur l’aile 1. Guri, plus spécialement, a une capacité spéciale rappelant celle de son partenaire Boba Fett, en ce qu’elle bénéficie d’avoir des ennemis tout près d’elle : au début de la Phase d’Engagement, s’il y a au moins un vaisseau ennemi à portée 0-1, elle peut gagner un marqueur de Concentration – il faut pourtant noter que, Guri étant une androïde, elle n’a normalement pas d’action de Concentration, mais une action de Calcul (ce qui vaut aussi pour ses actions liées).

 

Ce StarViper porte le Titre Virago (10), qui a plusieurs effets notables : il confère au vaisseau un Bouclier de plus (soit deux au lieu d’un) ; ensuite, il ajoute un slot de Modification (mais Acteris n’en a pas profité) ; enfin, il permet à Guri, pendant la Phase de Dénouement, de dépenser une charge (il y en a deux sur la carte) pour effectuer une action d’Accélération rouge.

 

Acteris n’a donc pas choisi de faire usage de la possibilité offerte par ce Titre de double Modification, n’en prenant qu’une seule – en l’espèce, Postcombustion (8) : quand Guri effectue entièrement une manœuvre à vitesse 3-5, elle peut dépenser une charge (il y en a deux sur cette carte) pour effectuer une action d’Accélération, même en étant stressée.

 

Ces facultés de repositionnement s’accommodent très bien du Talent Manœuvre improbable (6) : tant que Guri effectue une attaque dans son arc de tir avant, si elle n’est pas dans l’arc de tir du défenseur, ce dernier lance un dé de défense en moins.

 

Ultime Amélioration de Guri : le Senseur Détecteur anti-collision (5), donc – en faisant des Accélérations ou des Tonneaux, Guri peut se déplacer à travers des Obstacles ou les chevaucher. Et, de manière générale, après s’être déplacé à travers un Obstacle ou en avoir chevauché un, elle peut dépenser une charge (il y en a deux) pour ignorer les effets de l’Obstacle jusqu’à la fin du round.

 

Guri représente 94 points d’escadron en tout.

 

 

Ce qui fait donc une liste à 199 points d’escadron.

 

En voici le résumé, avec le lien permettant de visualiser cette liste dans le Générateur d’escadrons officiel :

 

Patrouilleur de Classe Firespray - •Boba Fett - 108

    •Boba Fett - Chasseur de Primes Célèbre (80)

        Gambit des Astéroïdes (2)

        Copilote Perspicace (10)

        Charges Sismiques (3)

        Système d’Occultation (6)

        •Marauder (3)

        •Han Solo (4)

Plateforme d’Attaque de Classe StarViper - •Guri - 91

    •Guri - Garde du Corps du Prince Xizor (62)

        Manœuvre Improbable (6)

        Détecteur Anti-Collision (5)

        Postcombustion (8)

        •Virago (10)

Total: 199/200

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Cette liste a été jouée, d’abord par Albu contre moi, ensuite par Sepresham contre Albu.

 

La liste racaille d’Albu

 

La photo est d'Albu - je n'ai pas ces figurines...

 

Passons à la liste d’Albu. Il s’agit d’une seconde liste racaille, mais très différente de celle d’Acteris, avec trois vaisseaux – mais qui se retrouvent à avoir des capacités très similaires, puisque c’est la folie des IG-88 truc.

 

 

Les deux vaisseaux principaux sont donc des Chasseurs d’assaut Aggressors, en l’espèce IG-88A et IG-88C (70 points d’escadron chacun). Ce sont des robots, avec l’action Calcul à la place de la Concentration, donc, et ils disposent même en série d’un Cerveau droïde avancé, qui fait que, quand ils réalisent une action de Calcul, ils gagnent un marqueur Calcul supplémentaire.

 

IG-88A a une capacité spéciale lui permettant, au début de la Phase d’Engagement, de choisir un vaisseau allié à portée 0-3 disposant de l’action Calcul pour lui transférer un de ses propres marqueurs de Calcul. Son pote IG-88C, quant à lui, peut, après avoir effectué une action d’Accélération, faire une action d’Évasion. Mais, le truc, c’est qu’ils sont tous deux équipés du Titre non unique IG-2000 (2 points d’escadron chacun) : dès lors, chacun des deux Aggressors bénéficie, non seulement de ses propres capacités de pilote, mais aussi de celle du copain ! IG-88A et IG-88C deviennent en fait exactement semblables.

 

D’autant plus, à vrai dire, qu’Albu les a équipés tous deux exactement de la même manière : tous deux ont donc le Talent Feinte (4 points chacun), qui fait que, s’ils ont un marqueur d’Évasion tandis qu’ils attaquent, on peut changer un résultat Évasion de l’adversaire en un résultat Concentration ; bien sûr, la Feinte est rentabilisée par la capacité de pilote d’IG-88C, qui la partage gentiment avec IG-88A.

 

Ensuite, tous deux sont équipés du Senseur Simulateur de trajectoire (3 points chacun), qui leur permet, durant la Phase de Système, plutôt que de larguer une Bombe, de la lancer en avant avec le gabarit 5 Tout droit. Et c’est bien pourquoi ils sont tous deux équipés également de Bombes à protons (5 points chacun), qui ont deux charges, et explosent à la fin de la Phase d’Activation, infligeant un dégât critique automatique à tout malheureux qui se trouve à portée 0-1.

 

Ces deux Chasseurs d’assaut Aggressors, exactement semblables donc, coûtent 84 points d’escadron chacun, et 168 points d’escadron ensemble.

 

 

Restait de la place pour un troisième et dernier (petit) vaisseau, et Albu a donc aligné un Remorqueur spatial de transfert quadrimoteur (plus communément appelé Quad Jumper) générique, le moins coûteux, à savoir un Trafiquant d’armes de Jakku (28). Tous ces petits vaisseaux disposent en série d’un Dispositif tracteur de remorqueur spatial, qui fournit l’action suivante : on choisit un vaisseau dans l’arc de tir avant à portée 1, et celui-ci gagne un marqueur de Rayon tracteur, voire deux s’il se trouve dans le Bullseye du Quad Jumper – ce qui peut le contraindre à un mouvement non désiré, et diminuer sa valeur d’Agilité.

 

Mais le Quad Jumper a envie de faire le foufou avec les Aggressors… Rien de plus simple : il suffit d’avoir, en Équipage, IG-88D (4) ! Du coup, le trafiquant d’armes récupère les capacités de pilote de tous les vaisseaux dotés du Titre IG-2000, ça tombe bien, il y gagne en outre l’action de Calcul, et, de même que les Aggressors, il gagne un marqueur Calcul supplémentaire quand il entreprend cette action…

 

Le Quad Jumper coûte ainsi 32 points d’escadron en tout, et bénéficie pour ce prix des aptitudes de ses deux copains plus gros…

 

 

La liste, en tout, représente 200 points d’escadron, et en voici le résumé, avec le lien permettant de visualiser cette liste dans le Générateur d’escadrons officiel :

 

Remorqueur Spatial de Transfert Quadrimoteur - Trafiquant d’Armes de Jakku - 32

    Trafiquant d’Armes de Jakku (28)

        •IG-88D (4)

Chasseur d’Assaut Aggressor - •IG-88C - 84

    •IG-88C - Machine Trop Indulgente (70)

        Feinte (4)

        Simulateur de Trajectoire (3)

        Bombe à Protons (5)

        IG-2000 (2)

Chasseur d’Assaut Aggressor - •IG-88A - 84

    •IG-88A - Robot Agressif (70)

        Feinte (4)

        Simulateur de Trajectoire (3)

        Bombe à Protons (5)

        IG-2000 (2)

Total: 200/200

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Cette liste a été jouée, d’abord par Sepresham contre Acteris, ensuite par moi… contre Acteris également.

 

La liste impériale de Sepresham

 

 

Voilà pour les listes racailles de cette séance de jeu – mais il faut y ajouter deux listes impériales.

 

Commençons par celle de Sepresham, qui associe trois vaisseaux : un gros socle, un moyen, un petit – comme ça tout le monde est content.

 

 

Le Gros Machin est un Décimateur VT-49, et plus précisément le Capitaine Oicunn (84 points d’escadron), lequel peut effectuer ses attaques principales à portée 0.

 

Mode bump, donc : si Sepresham a fait l’impasse sur le Titre Dauntless, il n’a pas manqué de se munir du Talent Intimidation (3) ; du coup, tant qu’un vaisseau ennemi à portée 0 défend, il a un dé vert en moins.

 

Il faut y ajouter deux Équipages, et tout d’abord l’immense Dark Vador (14) : il confère un marqueur de Force récurrent, et permet, au début de la Phase d’Engagement, de dépenser un marqueur de Force pour choisir un vaisseau dans l’arc de tir (pas nécessairement l’arc de tir avant, c’est important eu égard à la double tourelle d’arme principale du Décimateur) à portée 0-2, et le contraindre, soit à subir un dégât, soit à retirer un marqueur vert.

 

Le fait que Dark Vador himself soit présent dans cette liste a une autre conséquence essentielle, car c’est la condition pour y intégrer les deux autres Améliorations que Sepresham a attribuées à son Décimateur, autrement réservées aux listes racailles – à savoir, tout d’abord, un second Équipage, qui est le droïde 0-0-0 (3), lequel, au début de la Phase d’Engagement là encore, permet de choisir un vaisseau ennemi à portée 0-1, et de lui imposer un choix : soit il prend un marqueur de Stress, soit le Décimateur gagne un marqueur de Calcul. Or il faut y associer un Artilleur, cette fois, qui est un autre droïde : BT-1 (2) ; dès lors, quand le Décimateur attaque, il peut changer un résultat dégât en un résultat critique pour chaque marqueur de Stress affligeant le défenseur – ce qui tombe plutôt bien, non ?

 

Le Décimateur ainsi équipé représente en tout 106 points d’escadron.

 

 

Le socle moyen de la liste de Sepresham est un TIE/ca Punisher, plus précisément « Deathrain » (42), lequel, après avoir largué ou lancé un Engin, peut faire une action.

 

« Deathrain » aime les Bombes : il est du coup équipé de Bombes à protons (5) et de Charges sismiques (3) – deux Améliorations décrites plus haut, de même que le Senseur Simulateur de trajectoire (3) qui va bien avec. Il faut y ajouter un Artilleur, Bombardier compétent (2) : quand il largue ou lance un Engin, « Deathrain » peut utiliser un gabarit de même direction, mais avec une vitesse supérieure ou inférieure de 1 ; concrètement, cela lui permet de larguer des Engins avec le gabarit Tout droit 1 ou 2, ou, avec le Simulateur de trajectoire, de lancer des Bombes avec le gabarit Tout droit 4 ou 5.

 

Enfin, « Deathrain » est équipé de Torpilles ioniques (6) : il s’agit d’une attaque, nécessitant une Acquisition de cible, à 4 dés rouges dans l’arc de tir avant, à portée 2-3, sans modificateur de portée, et dotée de 2 charges ; mais les dégâts sont particuliers : on dépense tout d’abord un dégât ou un critique pour infliger un dégât au défenseur ; ensuite, tous les dégâts ou critiques restants sont convertis en autant de marqueurs ioniques. Ce qui, j’imagine, va bien avec la tactique bump du Capitaine Oicunn, en offrant une option de contrôle sur les déplacements ennemis, facilitant la collision souhaitée.

 

Le Punisher ainsi équipé coûte 61 points d’escadron.

 

 

Reste un troisième vaisseau, un petit socle d’appoint, qui est un Chasseur TIE/ln, plus précisément « Scourge » Skutu (32) : tant qu’il effectue une attaque contre un défenseur qui se trouve dans son Bullseye, il lance un dé d’attaque supplémentaire.

 

« Scourge » se voit aussi attribuer le Talent Adresse au tir (1) : l’effet se déclenche, là encore, lors d’une attaque contre un défenseur qui se trouve dans le Bullseye de « Scourge », et permet de convertir un dégât en critique.

 

En tout, « Scourge » représente donc 33 points d’escadron.

 

 

La liste fait 200 points d’escadron en tout. En voici le résumé, avec le lien permettant de visualiser cette liste dans le Générateur d’escadrons officiel :

 

Décimateur VT-49 - •Capitaine Oicunn - 106

    •Capitaine Oicunn - Tacticien Inspiré (84)

        Intimidation (3)

        •0-0-0 (3)

        •Dark Vador (14)

        •BT-1 (2)

Chasseur TIE/ln - •“Scourge” Skutu - 33

    •“Scourge” Skutu - Vétéran Chevronné (32)

        Adresse au Tir (1)

TIE/ca Punisher - •“Deathrain” - 61

    •“Deathrain” - Bombardier Adroit (42)

        Simulateur de Trajectoire (3)

        Torpilles Ioniques (6)

        Charges Sismiques (3)

        Bombe à Protons (5)

        Bombardier Compétent (2)

Total: 200/200

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Cette liste a été jouée, d’abord par moi contre Albu, ensuite par Acteris contre moi.

 

Et ma liste impériale à moi…

 

 

Et reste donc ma liste – une autre liste impériale, comme de juste.

 

Je me suis longuement posé la question de ce que je voulais proposer à mes camarades. Un point était clair : je n’avais pas envie de faire une proposition très « méta », ce qui n’est pas le but de nos parties mensuelles. Cela m’incitait d’ores et déjà à mettre de côté les TIE/ca Punishers, mais aussi les Bombardiers TIE/sa, tant qu'à faire. La question se posait tout de même pour le TIE/ph Fantôme, mon vaisseau préféré… Je ne m’y attendais pas forcément, mais il semblerait que « Whisper » soit très, très, TRÈS présente dans le « méta » actuel, et souvent qui plus est avec Dark Vador en Équipage ! Cette considération, ajoutée au fait que c’est tout de même un vaisseau très particulier à piloter, et probablement difficile pour une première fois, m’a incité à chercher ailleurs, avec un triple objectif : quelque chose qui ne soit pas trop compliqué à jouer, qui soit fun en même temps, et probablement inédit pour mes camarades ? C’est pourquoi je me suis en définitive décidé pour une nuée de Chasseurs TIE (plus ou moins) : la nuée présente certes une difficulté particulière, qui est qu’il faut voler en formation pour qu’elle soit efficace – mais il ne faut pas s’en faire une montagne, d’autant que, ceci mis à part, peu de choses sont aussi brutales qu’une nuée de TIE, ou en tout cas cette nuée : on avance, et on tape. En même temps, c’est très rigolo à piloter, j’étais certain qu’Acteris n’en avait jamais joué, à peu près certain qu’il en allait de même pour Albu, et je ne pouvais pas me prononcer pour Sepresham, autre joueur impérial, mais en tout cas je ne l’avais jamais vu moi-même jouer de nuée. Alors…

 

Le principe de cette liste est repris d’une autre que j’avais évoquée il y a quelque temps de cela, sous l’intitulé « Girl Power à l’Académie », et que j'avais jouée contre Acteris. Mais j’ai rebidouillé le machin pour qu’il soit plus simple à prendre en mains, et probablement plus efficace aussi. Il s’agissait donc d’aligner six vaisseaux : cinq petits TIE, et une Lambda en soutien.

 

 

Commençons par cette dernière – une Navette T-4A de classe Lambda, donc. Restait à déterminer le pilote : dans ma précédente liste, je m’étais décidé pour le Capitaine Kagi, mais, en y réfléchissant, sa capacité spéciale ne fonctionnait peut-être pas très bien avec celle de l’Amiral Sloane – or la fonction essentielle de cette Navette est bien de transporter ladite amirale. C’est pourquoi j’ai choisi cette fois le Lieutenant Sai, qui a en outre le bon goût d’être moins cher… bon, d’un point seulement, certes (47) ; mais il n’y a pas de petites économies ! Le Lieutenant Sai a en outre cette capacité spéciale : quand il fait une action de Coordination, si le vaisseau coordonné fait une action se trouvant dans la barre d’actions de la Navette, alors celle-ci peut faire cette action gratuitement ; maintenant, ne rêvons pas, avec une nuée de TIE, une seule action est commune à la Navette et à ses petits copains, celle de Concentration – mais c’est toujours ça de gagné.

 

Qu’importe : la fonction essentielle de la Navette (et même sa fonction unique, dans un sens, puisque j’ai choisi d’enlever tout le reste, on verra plus loin pourquoi) est donc de transporter l’Amiral Sloane (10) : après qu’un autre vaisseau allié à portée 0-3, forcément un petit TIE/ln tout fragile donc, a défendu, s’il est détruit, l’attaquant gagne deux marqueurs de Stress. Mais ce n’est pas tout : en outre, tant qu’un vaisseau allié à portée 0-3 de la Navette (ce qui l’inclut, donc) effectue une attaque contre un vaisseau stressé (eh !), il peut relancer un dé d’attaque… C’est la philosophie masochiste : « Plus tu me tapes, plus je te tape, ET ENCORE PLUS FORT OH OUI OH OUI OH OUI. » J’aime bien.

 

(N’en déduisez rien.)

 

La Navette ainsi équipée coûte 57 points d’escadron en tout.

 

 

Restait donc à aligner cinq Chasseurs TIE/ln – mais il leur fallait un chef d’escadron… qui coulait de source : ce serait la légendaire « Howlrunner » (40) ! Tant qu’un vaisseau allié à portée 0-1 (ce qui l’inclut, mais aussi la Lambda) effectue une attaque principale (ce qui inclut l’arc arrière de la Lambda, si jamais), il peut relancer un dé d’attaque – d’où la nécessité de voler en formation : pour être efficace, « Howlrunner » doit toujours être à portée 0-1 de ses pioupious (et idéalement de la Navette aussi). Avec les (probables, à un moment ou à un autre) relances de l’Amiral Sloane, ça fait de bonnes garanties de plein d’attaques qui touchent (bien sûr, on ne peut pas sauf erreur relancer le même dé, par contre).

 

En outre, comme j’ai économisé pas mal de points sur la Lambda dans cette liste, par rapport à mon premier essai de « nuée Sloane », j’ai pu ajouter deux Améliorations utiles à « Howlrunner » : d’une part, le Talent Tactique de nuée (3), qui fait que, au début de la Phase d’Engagement, ma championne peut conférer jusqu’à la fin du tour son Initiative de 5 à un vaisseau allié à portée 1 (d’où re-l’importance de voler en formation) – les autres vaisseaux de cette liste ayant une Initiative de 1 seulement pour quatre d’entre eux, et de 3 pour la Lambda, c’est là une aptitude non négligeable et qui peut faire la différence. D’autre part, comme il est nécessaire de faire durer « Howlrunner » le plus longtemps possible, il m’a paru pertinent de lui attribuer la Modification Système d’occultation, déjà décrite plus haut – cependant, le coût est différent, puisque le Chasseur TIE/ln a une Agilité de 3 : pour « Howlrunner », cette Modification coûte donc 8 points d’escadron – et je les avais pile-poil ; je sais que d’aucuns trouvent ça trop cher, mais, en ce qui me concerne, et tout particulièrement dans cette configuration, ça les vaut parfaitement.

 

« Howlrunner » représente en tout 51 points d’escadron.

 

 

Ne reste plus que les pioupious, et pour le coup ça va aller vite : quatre autres Chasseurs TIE/ln, qui sont quatre Pilotes de l’Académie, à poil – on joue sur la masse, après tout.

 

Chacun de ces vaisseaux coûte 23 points d’escadron (je ne vous apprends rien, c’est le vaisseau le moins cher du jeu – ou, autre manière de le dire : C’EST LA BASE, GROS), et, ensemble, ils représentent donc 92 points d’escadron.

 

 

Et la liste complète fait donc 200 points d’escadron tout rond. En voici le résumé, avec le lien permettant de visualiser cette liste dans le Générateur d’escadrons officiel :

 

Chasseur TIE/ln - •“Howlrunner” - 51

    •“Howlrunner” - Leader Obsidian (40)

        Tactique de Nuée (3)

        Système d’Occultation (8)

Chasseur TIE/ln - Pilote de l’Académie - 23

    Pilote de l’Académie (23)

Chasseur TIE/ln - Pilote de l’Académie - 23

    Pilote de l’Académie (23)

 Chasseur TIE/ln - Pilote de l’Académie - 23

    Pilote de l’Académie (23)

 Chasseur TIE/ln - Pilote de l’Académie - 23

    Pilote de l’Académie (23)

 Navette T-4a de Classe Lambda - •Lieutenant Sai - 57

    •Lieutenant Sai - Vétéran de l’Escadron de la Mort (47)

        •Amiral Sloane (10)

Total: 200/200

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Cette liste a été jouée, d’abord par Acteris contre Sepresham, ensuite par Albu… contre Sepresham également.

 

PHASE DE JEU (ENFIN, DE MON CÔTÉ, SURTOUT)

 

Désolé, les gens, j'ai encore une fois foiré les photos de partie, et je n'ai que celle-là - le déploiement lors de mon premier combat...

 

Voyons maintenant ce que tout cela a donné en jeu. Enfin, je vais comme de juste surtout parler des deux parties que j’ai jouées, hein… Les deux autres, je n’étais pas impliqué – mais je vais essayer quand même d’en toucher deux mots, par rapport aux debriefings de mes camarades.

 

Partie 1 : avec la liste de Sepresham, contre celle d’Acteris, jouée par Albu

 

Dans la première partie que j’ai jouée, j’ai hérité (aléatoirement, donc) de la liste impériale de Sepresham, tandis qu’Albu face à moi jouait la liste racaille d’Acteris.

 

Dans l’absolu, je pense que cette configuration m’avantageait, et ce pour deux raisons : tout d’abord, si je n’ai jamais joué cette liste précisément, en tant que joueur impérial, j’ai déjà eu maintes fois l’occasion de jouer ces trois vaisseaux, séparément certes, mais dans des optiques assez proches – à vrai dire, « Deathrain », en dehors de « Whisper », est probablement le vaisseau que j’ai le plus souvent joué en v2 (je n’avais absolument jamais joué le Punisher en v1, ce qui ne surprendra personne), et équipé en gros comme ça, même si, plus récemment, concernant ce châssis, je me suis mis comme les autres à succomber aux appels moites autant que mélodieux de la douce (aheum) sirène « Redline » ; quant au Décimateur, quand je le joue, c’est presque systématiquement en mode Oicunn bump (c’est peut-être moins ultra-efficace que le violent Chiraneau, mais ça m’a toujours, dès la v1 en fait, paru bien plus rigolo) ; enfin, les Chasseurs TIE/ln, bon, hein… et j’ai joué « Scourge » plusieurs fois, dès la v1 là encore, même si je n’en ferais pas mon chouchou.

 

Or, en face, Albu, plutôt un joueur rebelle à la base, était dès le départ assez peu enthousiaste à l’idée d’une liste racaille à deux vaisseaux seulement, nonobstant la puissance d'icelle... Il lui manquait « quelque chose », impression qui persisterait tout au long de la partie.

 

Enfin, si les Charges sismiques étaient d’un emploi risqué chez lui, elles étaient toutes désignées pour moi : sachant que Boba Fett et dans une moindre mesure Guri avaient tout avantage à faire mumuse avec les astéroïdes, je n’ai guère attendu pour mobiliser « Deathrain » dans la Fameuse Entreprise de Démolition Punisher et Fils.

 

Le début de la partie a été… très étrange. Clairement, Albu et moi nous cherchions, avec des manœuvres un peu biscornues de part et d’autre, destinées à tromper l’adversaire et/ou à le faire tomber dans un piège pile-poil au bon endroit. À ce compte-là, c’était Albu qui était avantagé – ses vaisseaux étant incomparablement plus manœuvrables que les miens. Mais ce petit jeu a eu des conséquences étranges pour les deux camps : de mon côté, j’ai été plus ou moins contraint de passer au large avec le Décimateur, ce qui n’était pas catastrophique du fait de sa tourelle, mais, pour le coup, Oicunn bump, ben, pas vraiment, quoi, et, dans ces conditions, mon gros socle a été quasiment hors-jeu pendant bien trop longtemps, ce n’est que lors des derniers tours qu’il a pu vraiment se montrer utile, aussi bien avec sa force de frappe personnelle qu’avec Dark Vador à bord ; bilan plus que mitigé le concernant, donc… la faute étant mienne, pas celle de la liste : clairement, je l’ai plutôt mal piloté – pas catastrophiquement, mais pas efficacement. En face, cependant, Albu s’est étrangement plus ou moins retrouvé dans une situation similaire avec Guri, pourtant bien plus agile, mais qui a gardé ses distances assez longtemps (et sans doute trop).

 

Ce qui m’arrangeait sacrément : j’avais toutes les raisons de concentrer mon feu sur Boba Fett. « Deathrain », à cet égard, s’est montré égal à lui-même ; j’ai regretté de n’avoir que des Torpilles ioniques plutôt que des Torpilles à protons (tout en comprenant le choix tactique de Sepresham, c’est juste que dans cette configuration de partie ça ne s’est pas avéré payant, my bad), mais, à force d’assauts combinés sur le Firespray, Boba Fett a giclé du tapis – ne restait plus que Guri, qui se sentait bien seule pour le coup, et que j’ai pu sortir au tout dernier tour (sauf erreur). De mon côté, le Décimateur n’a jamais été inquiété (bon, il était sans doute trop loin pour ça, et, ben, 4 Boucliers, 12 points de Coque…), et « Deathrain » a tenu le choc : Albu n’a pu me dégager que « Scourge » (je ne me souviens plus à quel moment de la partie, par contre), et, honnêtement, ça n’était pas bien grave (la conviction de son rôle de vaisseau d’appoint en sortant renforcée).

 

Victoire, donc – 199 à 33.

 

Mais une partie peut-être un peu frustrante pour moi, car, si la liste de Sepresham fonctionnait très bien, j’envisageais surtout cette journée comme une occasion de jouer des choses totalement inédites dans mon expérience ludique – ce qui serait assurément le cas dans la partie suivante… avec, aheum, bien moins de réussite.

 

Pendant ce temps, dans une galaxie pas lointaine du tout vu que c’est la même 1…

 

Sur le tapis de jeu à côté, pendant ce temps, Sepresham jouait la liste racaille d’Albu, et Acteris jouait ma liste impériale.

 

C’est peu dire qu’Acteris partait vaincu : la nuée de Nébal, misère, ça pouvait pas tomber plus mal, malédiction, il allait se faire sortir en dix minutes, malheur, c’était même pas la peine de jouer, gémonies, il regarderait ensuite notre partie à Albu et à moi, etc.

 

Bon, ben… il a gagné. Il a trouvé la partie stressante (si j’ose dire : avec Sloane, je suppose que Sepresham a eu ce même sentiment d’une manière plus concrète…), mais instructive, et il a gagné, en sortant toute la liste opposée, s’il a connu des pertes lui aussi (ce qui était peu ou prou inévitable avec une nuée de petits vaisseaux fragiles).

 

Victoire d’Acteris, donc, 200 à 120.

 

Hélas, je peux difficilement rentrer dans les détails de cette partie… Le pilotage en formation d’Acteris a cependant eu ses limites au bout d’un certain temps, j’ai l’impression, avec un gros bordel de collisions affectant les deux camps, pour ce que j’en ai entraperçu ; ce qui, entendons-nous bien, est parfaitement dans l’ordre des choses avec une nuée.

 

Visiblement, cela dit, Sepresham, joueur impérial de manière générale, avait pas mal galéré avec la liste racaille d’Albu. Pour celui-ci, comme pour Acteris qui avait probablement déjà joué ce genre de choses, c’était une liste facile à prendre en main, pour la simple raison que tous les vaisseaux disposaient exactement des mêmes capacités ou peu s’en faut, avec IG-88A, C et D, sans conditions de portée ou truc, etc. ; mais Sepresham l’a trouvée difficile à prendre en main quand même, et je ne lui jetterais certainement pas la pierre… car j’ai vécu exactement ou presque la même expérience juste après.

 

Partie 2 : avec la liste d’Albu, contre celle de Sepresham, jouée par Acteris

 

Deuxième round, donc : je succède à Sepresham au pilotage de la liste racaille d’Albu ; en face, Acteris, qui joue donc pour la deuxième fois contre la même liste, mais qui a cette fois entre les mains la liste impériale de Sepresham.

 

J’étais très curieux et enthousiaste à l’idée de cette partie : non seulement je jouais ainsi quelque chose que je n’avais absolument jamais joué (c’était sauf erreur ma première partie en Racailles de manière générale, v2 comme v1), mais en plus il s'agissait des deux vaisseaux racailles qui me faisaient le plus de l’œil (devant même le redoutable Firespray) : la mécanique droïde des IG-truc me plaisait beaucoup, et leur agilité très impressionnante itou (putain, deux socles moyens avec 3 en Agilité et ce cadran de manœuvre ?! WAHOU !) ; quand au Quad Jumper, pas cher et doté d’habilités rigolotes, il m’excitait presque autant – à son niveau de Petit Truc Pénible Qui Coûte Vraiment Pas Cher Et Qui Peut Faire Des Trucs Bizarres…

 

Mais… non, je n’ai pas su les prendre en main. Tout particulièrement les Aggressors. Si Albu et Acteris mettaient en avant qu’ils étaient « simples » à jouer parce qu’exactement pareils, c’est un autre sentiment qui a dominé chez moi – et je ne garantirais pas que ce soit le même que pour Sepresham avant moi, c’est très personnel, hein. Le truc, en fait, c’est que l’extrême versatilité de ces vaisseaux, qui est dans l’absolu un atout indéniable et même majeur, m’a totalement décontenancé au bout d’un moment : ils pouvaient faire tellement de choses… que je ne savais absolument pas quoi en faire ; fallait-il faire une Accélération pour bénéficier de la Feinte, ou grapiller deux marqueurs de Calcul ? Fallait-il engager l’adversaire ou jouer plus finaud sur le repositionnement ? Etc. Que sont ces vaisseaux, au juste ? Ce sont des socles moyens, mais ils ont un comportement d’as… ou de « brawlers », peut-être ? En fait, côté impérial, leur versatilité mêlant agilité et capacité offensive m’a fait penser au Défenseur TIE – un de mes vaisseaux préférés, pourtant. Mais un petit socle, avec un comportement de petit socle. Est-ce du coup la taille du socle qui a son impact sur les manœuvres ? Est-ce une mauvaise appréhension de leur capacité tactique ? Oui, au bout d’un moment je ne savais plus quoi en faire… et j’ai donc probablement fait n’importe quoi.

 

Le début de la partie… Je suppose que ça allait. Je me suis amusé à faire des manœuvres bizarres avec les IG-2000, le Quad Jumper étant davantage en retrait. Mais, bon, ça n’était pas hyper constructif, hein… Mon objectif initial était de faire tomber d’abord « Deathrain » ; l’évolution de la partie, cependant, m’a fait changer de plan – ce qui est rarement une bonne idée… et je m’en suis donc pris au Décimateur. Costaud, le bougre, même avec son Agilité de 0 ! Le temps que j’en vire péniblement la moitié des points pour avoir quand même un peu de score, l’horloge avait tourné, et j’avais déjà perdu un (au moins) de mes Aggressors ; lors du dernier tour, dans une tentative désespérée de marquer un peu plus en dégageant, ou « Scourge », ou au moins la moitié de « Deathrain », je me suis mis en danger… et au final Acteris a achevé de me fumer l’Aggressor restant et le Quad Jumper. Enfin, pour autant que je m’en souvienne – je suis un peu confus sur les derniers tours de cette partie, honnêtement.

 

Bref : je ne savais pas quoi faire de mes Aggressors, et je n’ai rien fait du Quad Jumper – sérieux, mon moment de gloire avec lui (voire dans toute la partie, aheum), ça a été de faire une PUTAIN DE MARCHE ARRIÈRE ! Manœuvre cool, cela dit : il fallait que je vive ça au moins une fois dans ma vie… Mais sinon, zob, nada – et certainement pas la moindre occasion de faire mumuse avec le Dispositif tracteur de remorqueur spatial ; dommage…

 

Acteris, de son côté, a bien joué, lui. L’issue était inévitable : défaite du Nébal, 53-200.

 

MAIS !

 

Mais.

 

Je me suis beaucoup amusé quand même, même en jouant très mal, même en perdant comme une tanche. J’ai piloté des vaisseaux que je ne connaissais pas, et, si je m’en suis on ne peut plus mal tiré, j’ai eu au moins un aperçu de leur potentiel, et en suis ressorti avec l’envie de creuser tout ça. Un de ces jours…

 

Sans compter que…

 

J’AI FAIT UNE PUTAIN DE MARCHE ARRIÈRE !

 

Et ça, putain (…), c’est super COOL.

 

Pendant ce temps, dans une galaxie pas lointaine du tout vu que c’est la même 2…

 

À côté de nous, Sepresham jouait de nouveau racaille, mais avec cette fois la liste d’Acteris, et il était opposé pour la deuxième fois d’affilée à ma liste impériale, quant à elle entre les mains d’Albu.

 

Et cette partie s’est semble-t-il avérée très compliquée pour Sepresham – pas forcément un fan lui non plus des listes à deux vaisseaux seulement, et un impérial qui jouait exceptionnellement racaille (même si pour la deuxième fois de suite en cette journée glorieusement bizarre).

Albu, lui, s’est semble-t-il beaucoup amusé avec ma nuée, m’a-t-il dit : cool, c’était bien le but ! Et pourtant la partie s’est déroulée très étrangement au regard de la tactique fondatrice de cette liste : en effet, Sepresham n’est parvenu à sortir qu’un seul vaisseau impérial… et c’était « Howlrunner » ! Relativement tôt dans la partie, qui plus est, ai-je cru comprendre. Dès lors, non seulement Albu devait faire sans les relances de son chef d’escadron… mais il a dû faire aussi sans celles de l’Amiral Sloane, n’ayant perdu qu’un seul vaisseau ! J’ai cru comprendre, toutefois, qu’il avait quand même pu bénéficier de situations stressantes pour Sepresham ? Quoi qu’il en soit, Albu a donc été amené à jouer de la masse, sans fioritures : plein d’attaques à chaque tour, même petites. Elles finissent par payer : Albu n’a donc perdu que (si j’ose dire) « Howlrunner », même pas un demi-Pilote de l’Académie ici ou là en plus, et il a sorti Guri, ce qui suffisait (largement) pour l’emporter aux points quand est venu le moment d’arrêter la partie.

 

EDIT : Albu m'a corrigé ! « Howlrunner » est sorti à l'avant-dernier tour. Pas tant de stress que ça, par contre un Boba Fett bien embêté par tous les petits moustiques qui le faisaient bumper !

 

Victoire d’Albu, 91-51.

 

LE PODIUM

 

Et maintenant, le (double) classement – avec cette feuille de suivi conçue par l’Excellant Albu :

 

 

Ce qui nous donne donc, classement des pilotes :

1 – Acteris (400)

2 – Nébal (252)

3 – Sepresham (171)

4 – Albu (124)

 

Classement des concepteurs de listes :

1 – Sepresham (399)

2 – Nébal (291)

3 – Albu (173)

4 – Acteris (84)

 

Et en combinant les deux scores :

1 – Sepresham (570)

2 – Nébal (543)

3 – Acteris (484)

4 – Albu (295)

 

 

Bon, ben, je suppose que je ne m’en suis pas si mal tiré ! En tout cas, c’était fun. Pas dit qu’on reproduise cette expérience, on a d’autres idées à la con à mettre en œuvre, mais c’était fun.

 

Oh, et GLOIRE À L’EMPIRE GALACTIQUE, hein.

 

Da Best.

 

Et à un de ces jours…

Mes articles consacrés à X-Wing ont désormais leur blog dédié, Random Academy Pilot ! La suite là-bas !

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Peleliu, Guernica of Paradise, vol. 1 et 2, de Kazuyoshi Takeda

Publié le par Nébal

Peleliu, Guernica of Paradise, vol. 1 et 2, de Kazuyoshi Takeda
Peleliu, Guernica of Paradise, vol. 1 et 2, de Kazuyoshi Takeda

TAKEDA Kazuyoshi, Peleliu, Guernica of Paradise, vol. 1, [Peleliu – Rakuen no Guernica ペリリュー~楽園のゲルニカ~], avec le concours de M. Masao Hiratsuka, traduction [du japonais par] Satoko Fujimoto, [s.l.], Vega, coll. Seinen, [2016] 2018, [n.p.]

Peleliu, Guernica of Paradise, vol. 1 et 2, de Kazuyoshi Takeda

TAKEDA Kazuyoshi, Peleliu, Guernica of Paradise, vol. 2, [Peleliu – Rakuen no Guernica ペリリュー~楽園のゲルニカ~], avec le concours de M. Masao Hiratsuka, traduction [du japonais par] Satoko Fujimoto, [s.l.], Vega, coll. Seinen, [2016] 2018, [n.p.]

Comme ses prédécesseurs, le n° 8 de l’excellente revue Atom m’a fait découvrir un certain nombre de mangas ayant l’air intéressants, dont, dans l’actualité, cette série qu’est Peleliu, Guernica of Paradise, due à Takeda Kazuyoshi, et dont la publication française vient d’être entreprise par un nouvel éditeur de manga, Vega. Les deux premiers volumes sont parus d’emblée, et ce sont ceux dont je vais vous parler aujourd’hui, mais la série est en cours de publication au Japon, où il y a au moins trois autres volumes, qui devraient être traduits relativement rapidement, ai-je cru comprendre.

 

Peleliu, Guernica of Paradise est un manga de guerre, centré sur le récit de la sanglante bataille de Peleliu, une paradisiaque (donc) petite île de corail dans l’archipel des Palaos. Cette bataille, semble-t-il méconnue des Japonais contemporains (tout particulièrement à en croire Hiratsuka Masao, un spécialiste de la guerre du Pacifique qui a conseillé Takeda Kazuyoshi dans la conception de cette BD), cette bataille donc a eu lieu entre septembre et novembre 1944, et a été particulièrement meurtrière. Elle a opposé, pendant près de deux mois (là où le commandement américain pensait régler l’affaire en quelques jours...), dans les 40 000 soldats américains et 10 000 soldats japonais. Si la bataille a autant duré, c’est que les Japonais avaient aménagé tout un réseau de grottes, dans l’optique de tenir le plus longtemps possible, et de rendre la victoire particulièrement coûteuse aux Américains – un scénario anticipant la (plus célèbre car hautement symbolique) bataille d’Iwo Jima (hop), quelques mois plus tard. Cet acharnement à défendre cette île minuscule, dans une opération clairement suicidaire et, funeste originalité, pour la première fois semble-t-il véritablement conçue comme telle au plan stratégique (le contingent japonais, constitué de troupes de réserve, en infériorité numérique marquée, mal équipé, mal approvisionné, et qui ne pouvait pas espérer de renforts, n’avait absolument aucune chance de l’emporter, et se rendre était inacceptable – 97 % des soldats japonais de Peleliu sont morts durant la bataille), cet acharnement, donc, tenait à ce qu’il s’y trouvait un aéroport, qui pourrait constituer un atout déterminant pour les bombardiers américains, à même depuis cette base de menacer directement le Japon, ou de fournir un support dans la campagne visant à reprendre les Philippines – de fait, la guerre dans les Palaos, et notamment à Peleliu, était associée au théâtre d’opérations philippin ; et la victoire décisive des Américains dans le Golfe de Leyte, fin octobre, avait considérablement diminué l’intérêt stratégique de la petite île de corail et de son aéroport… La bataille n’en continuerait pas moins, une des plus meurtrières de la guerre du Pacifique.

 

Il existe un certain nombre de mangas traitant de la Deuxième Guerre mondiale – ce même numéro d’Atom en dresse d’ailleurs un intéressant panorama (j’en aurais bien repris du rab, à vrai dire). Et le traitement de ce sujet varie considérablement… De manière périodique, le regard des Japonais sur cet affrontement est tour à tour imprégné d’héroïsme, au point parfois du révisionnisme (est-ce si étonnant, dans un pays où Abe Shinzô est Premier Ministre ?), et violemment critique ; dans les évocations de la guerre en manga, dans ce dernier registre, on pensera aussitôt à Mizuki Shigeru (notamment dans Opération Mort et les tomes 1 et, surtout, 2 de Vie de Mizuki), qui était non seulement soldat alors, mais a véritablement combattu sur le front, est passé à deux doigts de mourir à maintes reprises, et y a perdu un bras… Peleliu, Guernica of Paradise s’inscrit clairement dans la filiation de Mizuki – avec bien sûr cette différence essentielle que le jeune Takeda Kazuyoshi n’a quant à lui pas combattu, de toute évidence, mais revient sur des événements passés (et désormais lointains) avec l’assistance d’un historien.

 

Peleliu est le récit d’une guerre absurde et horrible, dans un cadre initialement paradisiaque ; le sort des soldats japonais émeut, mais l’inhumanité du commandement japonais, et ses innombrables brimades et mensonges, révoltent. À vrai dire, Takeda Kazuyoshi semble priser tout particulièrement l’évocation de morts parfaitement absurdes et anti-héroïques au possible : tel soldat qui trébuche et s’ouvre le crâne sur une pierre, avant même la bataille, tel autre qui est abattu par un des siens en train d’agoniser et dont le doigt était malencontreusement crispé sur la gâchette de son fusil… et quantité d’anonymes qui sont instantanément pulvérisés par une bombe tombée suffisamment près pour que la protection supposée de la grotte ne les sauve pas le moins du monde – sans même parler des charges suicides : appréciable ironie, la mort conne du sous-officier qui l’ordonne autorise ses subalternes à survivre encore quelques heures, quelques jours peut-être…

 

Cet accent mis sur les morts absurdes ressort tout particulièrement de la tâche confiée à notre (principal) héros et personnage point de vue, le soldat de première classe Tamaru : le jeune homme chétif et peureux, petit binoclard incapable de faire du mal à une mouche (au départ, du moins…), a (ou avait…) pour ambition de devenir mangaka – ses supérieurs le savent, et il craint tout d’abord que cela ne lui joue un mauvais tour, un énième déluge de baffes, la méthode disciplinaire par excellence de l’armée impériale… Mais les officiers entendent bien au contraire en profiter : ils ont besoin d’un « attaché au mérite », qui a pour tâche de rédiger les lettres envoyées aux parents des soldats qui ont trouvé la mort sur Peleliu (ce dès avant la bataille – à vrai dire, une fois les Américains débarqués, la simple idée que ces lettres puissent parvenir à leurs destinataires relève à son tour de l’absurde, à moins de procéder, là encore, comme dans Lettres d'Iwo Jima) ; cette mort ne peut tout simplement pas se permettre d’être « ridicule » et « gratuite » – l’office de « l’attaché au mérite » est donc d’enjoliver les faits, pour témoigner, avec ardeur patriotique et révérence pour l’empereur, d’un nécessaire ultime acte de bravoure : ce camarade, qui s’est connement fendu le crâne en trébuchant ? Le vaillant soldat de l’empereur a bien évidemment abattu des avions ennemis en s’emparant d’une mitrailleuse, geste héroïque qui coûta la vie à des Ricains en même temps qu’il sauvait celle de ses bons amis du régiment ! Banzaï ! Tamaru s’acquitte du mieux qu’il peut de sa tâche – même en comprenant alors, illumination cruelle, que le désir de ce camarade de mourir « dans un ultime acte de bravoure, comme son père » n’avait jamais été fondé sur autre chose qu’un odieux mensonge… Un même mensonge qui se répète de génération en génération. Le message est assez clair, pour le coup, et les résonances très actuelles.

 

Rien n’est épargné aux soldats de Peleliu – et, sans que l’on puisse pour autant parler de complaisance, Takeda Kazuyoshi ne cache rien. La terreur des interminables bombardements préliminaires, la découverte de ce qu’ils ont ravagé la si jolie petite île paradisiaque de Peleliu pour en faire un no man’s land lunaire, les terribles premières heures de la bataille, où d’innombrables vies japonaises comme américaines sont fauchées en quelques minutes, le repli dans les grottes, les blessés qui agonisent, les ressources d’ores et déjà épuisées, en eau tout particulièrement… Non, rien ne leur est épargné. Et nous n’en sommes qu’au début…

 

Maintenant, il faut voir comment cette histoire est racontée – ce qui saute aux yeux en regardant les couvertures. En effet, Takeda Kazuyoshi a fait le choix de prime abord incongru d’un dessin très enfantin, naïf, tout en rondeurs, faisant plus que loucher sur le super deformed, grosses têtes et petit corps. Mais il ne faut pas s’y tromper : cela ne fait certainement pas de Peleliu une bande dessinée destinée aux pitinenfants. La naïveté du trait n’y change rien, ce récit est d’une extrême noirceur, et d’une extrême violence. En fait, d’une certaine manière, ce parti-pris archétypal renforce le sentiment de violence.

 

Oui, ce choix peut tout d’abord paraître étonnant, voire inapproprié, mais je le trouve en définitive tout à fait pertinent – d’autant qu’il faut lui associer un character design bien pensé : les personnages ont des traits simplistes qui devraient, dans l’absolu, les rendre indiscernables les uns des autres (ce qui, dans pareil contexte, pourrait d’ailleurs faire sens, et je suppose à vrai dire qu’il y a de cela dans la mise en scène des innombrables anonymes mourant dans un absurde anonymat), mais c’est pourtant tout le contraire qui se produit : les yeux myopes et sempiternellement plissés de Tamaru derrière ses lunettes rectangulaires (l’auteur expliquant au passage en quoi ce choix n’était pas rigoureusement historique, mais pourquoi il l’a fait quand même) sont bien sûr le premier exemple que l’on a envie de citer, mais il en va de même pour les autres – ceux du moins qui ont un nom ; la simple manière de figurer la bouche, un trait dans ce sens, une épaisseur dans l’autre, suffit à identifier le caporal Yoshiki, et à exprimer sa naïveté et son dévouement – une bouche et des yeux plus larges, il s’agit du sous-lieutenant Shimada, assez bonhomme, pas moins obligé de prendre les plus cruelles des décisions – les lunettes rondes qui masquent ses yeux désignent le caporal-chef Kosugi, homme cynique et pragmatique, rusé aussi, qui ne se leurre pas sur les chances de succès des Japonais et fera tout ce qui est en son pouvoir pour survivre, quitte à piétiner les cadavres de ses compatriotes – la casquette et la moustache, c’est le fanatique et violent sergent Namoto – cette cicatrice et cette bouche large, c’est la brute Inokuma, etc. Et si les soldats américains sont trop anonymes, dans cette optique, pour bénéficier de traits aussi précis pour les singulariser (notons tout de même, car ça n’a pas toujours été le cas dans les représentations de cette guerre de part et d'autre, que nombre de ces marines sont des noirs), ils n’en expriment pas moins tous une même humanité : Tamaru confronté à un Ricain appelant sa maman dans son agonie, cela pourrait paraître convenu, mais cela touche bel et bien au cœur. Cette figuration très subtile, en quelques traits seulement, est assez remarquable, décidément – notamment eu égard à ce paradoxe voulant que l’identification aisée de ces personnages comme distincts permette pourtant au lecteur de s’identifier lui-même à chacun d’entre eux. Je manque de références manga dans ce registre, mais, instinctivement, cela m’a fait penser à Peanuts de Charles M. Schulz – dans un contexte certes on ne peut plus différent, et certes c'est là une comparaison très laudative, mais, oui, pourquoi pas ?

 

Ce parti-pris pourra donc déstabiliser, mais je le trouve pour ma part tout à fait approprié et pertinent. J’ai lu çà et là des critiques y trouvant quelque chose d’un peu « bâclé », et je ne suis vraiment, vraiment pas d’accord. D’autant que ce choix s’associe bien sûr, et de manière assez classique pour le coup, à une esthétique plus ou moins « ligne claire » : passé la rondeur naïve des personnages, si le décor a souvent quelque chose d’un peu abstrait, il peut cependant se montrer plus détaillé quand cela importe – que ce soit pour sublimer le paradis de Peleliu avant la bataille, ou au contraire pour exprimer la cruauté de la guerre en exposant la nature ravagée par les combats ; le dessin se montre surtout plus précis pour les engins militaires, les barges de débarquement, les tanks, les avions… Sans jamais trop en faire (et, là encore, Takeda Kazuyoshi explique brièvement dans quels cas il a décidé de faire des entorses graphiques à la rigueur historique et pour quelles raisons – par exemple concernant l’uniforme des soldats japonais). L’association de ces diverses caractéristiques fonctionne très bien.

 

Vous l’aurez compris, je suis très enthousiasmé, au sortir de ces deux premiers tomes de Peleliu, Guernica of Paradise. C’est une BD rude, encore une fois, ne pas s’y tromper, mais elle fait preuve d’une certaine subtilité dans sa méthode, qui vaut pour le dessin comme pour le scénario. Et ce point de vue est très intéressant – comme un contrepoint à Tarawa : atoll sanglant, de Charlier et Hubinon, BD lue et relue quand j’étais gamin puis ado, dans laquelle le point de vue américain animalisait (ou « végétalisait » ? Faces de prune, faces de citron…) un ennemi japonais par essence indifférencié et barbare. Par ailleurs, en cette triste époque où le nationalisme et le révisionnisme semblent (re)devenir toujours plus prégnants, cette BD a quelque chose de salutaire.

 

Mon seul regret, pour l’heure, est une certaine nonchalance dans la traduction, parfois, et (surtout ?) la relecture – la fin du deuxième tome, tout particulièrement, est saturée de coquilles, ce qui est tout de même sacrément pénible. J’espère que les jeunes éditions Vega se montreront à cet égard plus soignées dans les tomes suivants.

 

Ce petit bémol mis à part, oui, j’ai vraiment apprécié ces deux premiers tomes de Peleliu, Guernica of Paradise, et ai hâte de lire la suite.

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L'Anneau Unique : Erebor – Le Mont Solitaire

Publié le par Nébal

L'Anneau Unique : Erebor – Le Mont Solitaire

L’Anneau Unique : Erebor – Le Mont Solitaire, [The One Ring: Erebor–The Lonely Mountain], Edge, 2017, 112 p.

L’ANNEAU UNIQUE ET AVENTURES DANS LA TERRE DU MILIEU

 

La gamme de L’Anneau Unique, au développement relativement lent, a été encore ralentie par la mise en avant de son portage D&D5 intitulé Aventures en Terre du Milieu, en français (où la traduction des deux premiers titres de cette dernière gamme est encore toute récente) comme en anglais – ceci dit, il reste plusieurs suppléments anglais de L’Anneau Unique non encore traduits, comme les deux consacrés au Rohan (dont j’ai eu des échos plutôt négatifs, pour une fois) ou celui qui porte sur Bree. En français, le présent volume, Erebor – Le Mont Solitaire, est à cette date la dernière traduction dans cette gamme, et date de quelque chose comme un an à un an et demi ; Edge, qui s’occupe également d’Aventures dans la Terre du Milieu, a semble-t-il promis de ne pas délaisser totalement la gamme de L’Anneau Unique, mais on se doute que les traductions ne vont pas débarquer tous les quatre matins…

 

Et je n’en dirai probablement pas beaucoup plus sur ce blog : même avec un certain nombre de réserves, dont je n’ai pas fait mystère, je vais moi aussi suivre le mouvement général, et privilégier Aventures dans la Terre du Milieu – à l’heure où mon vieux fantasme de campagne tolkiénienne sur la base de Ténèbres sur la Forêt Noire semble enfin commencer à se concrétiser : j’espère pouvoir lancer ça début 2019, après avoir fait un peu de Barbarians of Lemuria d’ici-là (la saga commence ici). Il y a donc de fortes chances pour que ce supplément soit le dernier de la gamme de L’Anneau Unique dont je traiterai ici (à moins que des suppléments communs aux deux gammes ne sortent, et c’est semble-t-il ce qui est prévu pour la Moria ?).

 

ENFIN ?

 

Mais ce n’est pas n’importe quel supplément. À vrai dire, c’en est un dont l’absence jusqu’alors avait quelque chose… d’une anomalie ? La campagne « classique » de L’Anneau Unique débute au pied du Mont Solitaire : la proclamation de Bard, roi de Dale reconstruite, est un bon prétexte pour rassembler une compagnie, et la Ville du Lac, ou Esgaroth, à peine un peu plus au sud, est théoriquement le premier Sanctuaire ouvert. Le Mont Solitaire est là, juste à côté, mais il n’avait jusqu’alors pas eu droit à une description relativement approfondie – et, à vrai dire, même pas vraiment droit à une description ne serait-ce que superficielle. Il en allait de même pour Dale, ce qui, à tout prendre, était bien plus problématique encore – car la cité de Bard est « ouverte », bien plus accessible que le puissant et riche royaume nain d'Erebor !

 

Et il faut aussi noter que, parmi les origines culturelles des PJ dans la gamme initiale, les Nains du Mont Solitaire et les Bardides occupaient une place non négligeable ; les premiers représentaient même alors la seule culture naine jouable – et, par une bizarrerie de plus, dont la gamme est assez coutumière, c’est en fait ce supplément de contexte précisément, centré sur Erebor... qui offre la possibilité aux PJ d’incarner deux cultures naines alternatives, les Nains des Monts du Fer, et les Nains des Montagnes Grises. Cela dit, si l’historique de ces dernières cultures est singulier et intéressant, au plan technique les diverses cultures naines demeurent assez proches.

 

Reste qu’il était un peu handicapant, dans le contexte de base des Terres Sauvages, de ne pas avoir véritablement d’éléments contextuels concernant Erebor et Dale, qui en sont indubitablement le cœur civilisé…

 

Dès lors, à la différence des plus « récents » ajouts (français) de la gamme, les par ailleurs très bons et ambitieux Fondcombe et Les Vestiges du Nord, qui changeaient la donne « classique » du jeu, et s’adressaient à des joueurs davantage expérimentés peut-être, Erebor est un supplément utile dès le début d’une campagne « classique » dans les Terres Sauvages – il faut d’ailleurs relever qu’il s’insère dans la chronologie initiale de L’Anneau Unique : Aventures dans les Terres Sauvages, débutant (censément à Dale, justement…) cinq ans après la Bataille des Cinq Armées, et courant ensuite sur une trentaine d’années, celles dévolues à la campagne Ténèbres sur la Forêt Noire – là où les suppléments consacrés à l’Eriador adoptent une chronologie plus tardive, illustrant plus ouvertement le retour de Sauron aux affaires

 

Mais cette chronologie, dans le contexte d’Erebor, est semble-t-il conçue avant tout pour une autre campagne, alternative, et annoncée depuis longtemps en anglais mais sauf erreur toujours pas publiée : The Laughter of Dragons. J’espère qu’elle sortira un jour – de même que le supplément consacré à la Moria, lequel, ai-je cru comprendre, donc, devrait être compatible à la fois avec L’Anneau Unique et avec Aventures dans la Terre du Milieu ; une piste intéressante, un peu dirais-je ce qui avait été fait pour Achtung ! Cthulhu avec L’Appel de Cthulhu et Savage Worlds – même si j’espère que ça sera réalisé avec davantage de soin et de constance (aheum).

 

LE MONT SOLITAIRE ET SA RÉGION

 

Mais donc, pour l’heure, Erebor – Le Mont Solitaire. Enfin ! Le plan du supplément, comme souvent dans la gamme de L’Anneau Unique, est peut-être un peu biscornu, même si pas au point où c’en devient gênant. Je distinguerais pour ma part trois parties regroupant des chapitres épars.

 

La première, assez logiquement, est essentiellement géographique, mais a sa part de développements historiques et n’est pas totalement dépourvue d’éléments techniques (bien dosés). Il s’agit donc de décrire la région couverte par le supplément, en trois chapitres : le premier consacré au Mont Solitaire à proprement parler, le second à la ville de Dale immédiatement au sud, le troisième traitant des régions environnantes.

 

C’est du bon voire très bon boulot : Erebor et Dale ont droit à leurs très jolies cartes (même si celle du Mont Solitaire est forcément « insuffisante », en ce qu’elle n’illustre pas vraiment l’idée d’un royaume « en trois dimensions », si j’ose m’exprimer ainsi), et, passé les rappels historiques particulièrement utiles dans ce contexte (et qui résonneront, plus loin, avec les développements consacrés au passé tragique des nains, toujours à vif), la description des principaux lieux est bien gérée : le lecteur n’est pas noyé sous les informations, mais en a amplement assez pour savoir quoi faire de tout ça (et je rappelle au cas où que, pour ma part, je suis plutôt un adepte du fluff touffu, mais ça me va très bien comme ça).

 

Le cas d’Erebor est peut-être un minimum problématique, car, à tout prendre, les joueurs (non nains...) ne sont pas censés y avoir aussi facilement accès qu’à Dale – ouvrir le Sanctuaire d’Erebor demandera sans doute du temps et des efforts, mais, après tout, c’est dans l’ordre des choses… Et, comme de juste, cela permettra alors aux PJ de « débloquer » très vidéoludiquement de nouvelles Entreprises lors de la phase de Communauté : les chapitres consacrés à Erebor et à Dale s’achèvent sur ce genre de développements, de manière pertinente – j’aime bien, notamment, cette idée de la « forge naine », une sorte de « super-Entreprise » courant sur plusieurs phases de Communauté, et qui voit un PJ s’appliquer à la confection d’une arme vraiment exceptionnelle… J’y reviendrai, indirectement.

 

Mais, d’ici là, il faut tout d’abord relever que les descriptions d’Erebor comme de Dale abondent en PNJ joliment décrits – Erebor est particulièrement bien servi à cet égard, car c’est l’occasion de s’instruire du sort des compagnons du Hobbit qui ont survécu à la Bataille des Cinq Armées ; mais il faut aussi relever que les deux monarques de ces puissants royaumes, respectivement Dáin Pied-d’Acier et Bard le Tueur de Dragon, ont du caractère, ce qui en fait des PNJ très intéressants, et des Garants potentiels à la forte personnalité – d’autres PNJ ne manquent d’ailleurs pas d’intérêt, comme la reine Una, épouse de Bard, originaire du mystérieux Dorwinion (à noter, quand la campagne débute, les deux ne se sont pas mariés – cela n’intervient que plus tard, et c’est typiquement le genre d’événement qui peut s’insérer avec pertinence dans la chronologie d’une campagne au long cours, une illustration intéressante parmi tant d’autres d’un monde qui évolue indépendamment des seules actions des personnages).

 

La description des régions environnantes, enfin, est tout à fait réussie – et complète utilement le Guide des Terres Sauvages au nord et à l’est. Nous avons droit à des environnements variés, des Terres Septentrionales de Dale à reconquérir par la charrue plutôt que par l’épée, à la Brande Desséchée mystérieuse et terriblement angoissante. Chaque région a droit à ses lieux et PNJ notables, allant du brigand… au dragon, bien sûr.

 

LA GLOIRE DES NAINS

 

Mais je reviendrai aux dragons plus tard. Le deuxième ensemble que j’aie envie de singulariser dans ce supplément porte en effet sur les nains – qui sont, sans surprise, les vraies stars ici. Bien évidemment, la description d’Erebor au sens strict les met en avant, mais cela va bien au-delà, puisqu’il faut y ajouter encore d’autres chapitres.

 

Passons rapidement, en toute fin d’ouvrage, sur les deux nouvelles cultures naines jouables, que j’ai déjà évoquées, et il n’y a pas forcément grand-chose de plus à en dire, si c'est un ajout tout à fait bienvenu (le caractère d'errants frustrés et rancuniers des Nains des Montagnes Grises m'intéresse tout particulièrement).

 

Reste tout de même deux chapitres directement liés aux nains : le premier porte sur « Le trésor des nains », et complète utilement les développements figurant dans Fondcombe portant sur les objets exceptionnels voire « magiques » (pour le coup, l’utilisation de ce chapitre implique donc probablement de se référer à Fondcombe, c’est à noter) ; et, comme dans ce précédent supplément, ce qui pouvait m’inquiéter un peu vu de loin s’avère très bien fait dès l’instant qu’on s’y attarde – c’est une fois de plus une démonstration du beau travail d’adaptation réalisé dans la gamme de L’Anneau Unique, qui se montre souvent bien plus subtil qu’il n’y paraît, et en tout cas toujours pertinent. À vrai dire, plus que jamais, l’insistance sur le brio des réalisations naines, et tout particulièrement des plus antiques, est un élément de caractérisation essentiel notamment (mais pas seulement, en fin de compte) pour les personnages nains, et tout à fait bienvenu.

 

Or le supplément en rajoute en dernier ressort une couche à cet égard, avec un chapitre consacré à « la guerre des nains et des orques », dont l’intérêt me paraît essentiellement fluff, mais qui a aussi ses implications éventuellement techniques, sous forme de rancunes irrémédiables, de rêves traumatisants, d’artefacts perdus et de sources de corruption en pagaille… Oui, tout cela est très intéressant, et très juste.

 

LES COUSINS DE SMAUG

 

Reste un ultime aspect de ce supplément, qui, à la fois, coule de source, et est à manier avec beaucoup de précautions : les dragons… L’ombre de Smaug le Doré plane sur le Mont Solitaire – mais les dragons, même si Tolkien en parle assez peu au-delà dans le Troisième Âge (il en va tout autrement du Premier), sont encore une réalité bien présente après le haut fait de Bard, qui lui a valu de devenir roi. Les nains ont considérablement souffert des déprédations des grands vers bien avant que Smaug ne se rue sur le Mont Solitaire : les royaumes nains des Montagnes Grises ont été anéantis par les dragons – et la Brande Desséchée, cette vallée embrumée dissimulée au cœur de la branche orientale des Montagnes Grises, abrite nombre de ces créatures titanesques… à quelques centaines de kilomètres, à peine, au nord d’Erebor et de Dale. La menace draconique pèse donc sur les Peuples Libres du Nord, même après la mort de Smaug. Il n’est peut-être qu’une chose pour les en préserver, temporairement du moins : une sorte de « darwinisme » acharné qui voit les dragons lutter entre eux dans cette région. Mais, oui, les dragons sont donc toujours une réalité durant l’époque de jeu.

 

D’ailleurs, de précédents suppléments en faisaient mention, nous avions déjà eu droit à quelques dragons (ou en tout cas au moins un, mes souvenirs sont ici un peu flous) en guise de PNJ hors-normes.

 

Maintenant… Eh bien, voilà : ce sont des PNJ hors-normes, des antagonistes extrêmement puissants, et, Sauron mis à part, qui n’est pas censé pouvoir être rencontré par les PJ, il n’y a guère que le balrog de la Moria, aka Le Fléau de Durin (ça tombe bien), pour rivaliser en puissance. Et du coup… Eh bien, même avec Aventures en Terre du Milieu, Tolkien, ce n’est pas Donjons & Dragons. Il fallait bien un Bard pour faire tomber Smaug, et les PJ ont déjà fort à faire avec une adversité plus « classique » : ils ne sont pas censés être aussi forts que les héros de Donj’ à très haut niveau, qui cassent des divinités et demi-dieux au p'tit déj’. De fait, certains points de règles ici peuvent se résumer assez vite : « Le dragon fait ça, et vous êtes morts. » Quel intérêt, alors ?

 

Eh bien, même si je reste réservé, plus que de coutume, je suppose que ce chapitre ne s’en tire pas si mal et pourrait – oui, pourrait – s’avérer malgré tout utile en jeu (il est de toute façon d’une lecture intéressante, hein, l’écologie des dragons fascine, et le jeu sur les rumeurs les concernant, vraies comme fausses, est très malin, et utilisable dans une campagne même sans véritablement de dragons, je suppose). Car l’accent est mis sur un système de création destiné à concocter des dragons qui soient vraiment des antagonistes singuliers : chaque dragon est unique – et, par-là, il ne faut pas entendre seulement sa liste de pouvoirs destructeurs, mais tout autant ses traits de personnalité, qui, régulièrement, peuvent en définitive jouer contre lui : nombre de dragons sont sensibles à la flatterie, plus encore sont joueurs au point où cela pourrait leur nuire considérablement, certains s’avèrent très lâches en dépit de leur puissance remarquable, etc. Quelques exemples en sont fournis, en fin de chapitre, qui, oui, ont vraiment de la personnalité, et témoignent en même temps des diverses manières de faire figurer un dragon dans une campagne – de l’archétype essentiellement solitaire au chef suprême d’une bande de gobelins terrorisés, en passant par la créature de la Brande Desséchée engagée dans une lutte à mort pour la survie du plus apte.

 

Enfin, pour prolonger l’idée des « défauts » bienvenus des dragons, tous ont leur faiblesse – comme cette écaille manquante qui a permis à la Flèche Noire de Bard d’abattre Smaug… Alors, peut-être que les PJ pourraient en profiter ? Ce sera probablement le seul moyen, pour des joueurs, d’abattre un dragon – ils ne peuvent pas se contenter d’êtres des barbares niveau quarante-douze qui meulent dans la cuirasse à la hache à deux mains… Mais cette approche correspond pleinement à la manière d'envisager l'héroïsme dans cette gamme : l'adversité est élevée, mais les hauts faits épiques, s'ils demeurent par essence exceptionnels, sont possibles.

 

Autant d’aspects, qui, eh bien, ont produit sur votre serviteur en gros le même effet que le chapitre là encore un peu inquiétant vu de loin, dans Fondcombe, qui portait sur les « objets magiques » : c’est plus subtil et malin que ça n’en a tout d’abord l’air, c’est une adaptation réfléchie de l’œuvre tolkiénienne, et, finalement, on peut sans doute en tirer quelque chose en jeu, oui – et quelque chose de chouette… On verra peut-être un jour, par ailleurs, si la campagne The Laughter of Dragons joue de tout cela, et comment.

 

UNE RÉUSSITE (UN PEU TARDIVE MAIS UNE RÉUSSITE)

 

Au final, Erebor – Le Mont Solitaire s’avère donc un supplément convaincant, s’inscrivant très bien dans une gamme dont la qualité est de toute façon globalement élevée. Et d’ailleurs, comme pour toute la gamme, il faut louer la beauté du livre, clair, aéré, et émaillé d’illustrations de qualité, dans ces belles teintes sobres si à propos et qui singularisent la gamme, au sein d’une production fantasy qui privilégie bien trop souvent le flashouille dégoulinant.

 

On peut s’étonner de ce que ce supplément soit sorti aussi tardivement (cela dit, ma chronique est plus tardive encore…), mais il sera utile aussi bien aux débutants qu’aux vieux briscards, je suppose, et c’est là une chose toujours appréciable.

 

Le point d’interrogation qui demeure, c’est sans doute l’avenir de la gamme de L’Anneau Unique – notamment en français, Erebor, il y a un an à un an et demi de cela donc, demeurant la dernière traduction pour ce jeu, quand plusieurs suppléments anglais sont parus depuis (assez peu, à vrai dire, mais au moins quatre, sauf erreur)… Edge semble avoir promis d’y revenir, mais il est clair qu’Aventures dans la Terre du Milieu est à l’heure actuelle une préoccupation autrement marquée, et envahissante. Je le regrette un peu – même si, moi-même, je suis en train de faire la bascule d’un système à l’autre… Non sans hésitations cela dit. Nous verrons bien ce que cela donnera à l’avenir.

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Confession d'un masque, de Yukio Mishima / Mishima ou la vision du vide, de Marguerite Yourcenar

Publié le par Nébal

Confession d'un masque, de Yukio Mishima / Mishima ou la vision du vide, de Marguerite Yourcenar
Confession d'un masque, de Yukio Mishima / Mishima ou la vision du vide, de Marguerite Yourcenar

MISHIMA Yukio, Confession d’un masque, [Kamen no kokuhaku 仮面の告白], traduit de l’anglais par Renée Villoteau, Paris, Gallimard, coll. Folio, [1949, 1958, 1971, 1983] 2013, 246 p.

Confession d'un masque, de Yukio Mishima / Mishima ou la vision du vide, de Marguerite Yourcenar

YOURCENAR (Marguerite), Mishima ou la vision du vide, Paris, Gallimard, coll. Folio, [1980, 1993] 2010, 120 p.

DEUX AUTEURS À DISTANCE

 

Mishima Yukio, de tous les grands écrivains japonais du XXe siècle, et il y en a eu un paquet, est probablement celui qui exerce le plus de fascination – et pour partie pour de « mauvaises raisons » : sa mort histrionique, comme un événement de la vraie vie qu’on jugerait trop outré s’il figurait dans un roman. Il serait dommage, pourtant, que la mort de l’auteur – bon sang, on ne parle même plus de sa vie à ce stade – gomme par sa folle démesure son œuvre. Ou en tout cas le meilleur de son œuvre, car cet écrivain de génie ne rechignait pas à commettre de temps en temps une petite chose alimentaire – qu’importe, les romans, recueils ou pièces de théâtre brillants ne manquent assurément pas ; et, parmi ces titres majeurs, Confession d’un masque occupe une place particulière – celle d’un déclencheur, d’une certaine manière, car, si ce n’est pas le premier roman de Mishima (c'est le second, sauf erreur), c’est néanmoins celui qui, très vite, alors qu’il n’est âgé que de 24 ans, en fait d’ores et déjà une célébrité et un écrivain reconnu et apprécié, aussi bien par la critique que par le public. C’est aussi une œuvre qui contient en germe un certain nombre d’aspects qui resurgiront par la suite, dans la vie et dans la bibliographie de Mishima – et à bon droit car il s’agit d’emblée d’un texte relativement ambigu, dont je suppose qu’il faut le rattacher au courant très nippon du watakushi shôsetsu, ou « roman du moi », une forme d’autofiction où l’autobiographie de l’auteur ne se dissimule pas totalement sous le récit romanesque, à moins qu’il ne faille prendre les choses à l’envers, et dans tous les cas en se méfiant raisonnablement de ce que l’on nous dit.

 

Il était bien temps que je lise Confession d’un masque. Mais j’ai supposé que c’était peut-être aussi le bon moment pour lire un fameux petit ouvrage consacré à l’auteur, et œuvre d’une prestigieuse consœur française : Mishima ou la vision du vide, de Marguerite Yourcenar – un essai paru initialement en 1980, soit dix ans après le suicide de Mishima, et qui en traite, forcément, mais sans oublier l’œuvre derrière le fait-divers. Confession d’un masque, comme de juste, y joue un certain rôle – même si l’académicienne s’intéresse surtout ici à la tétralogie de « La Mer de la Fertilité ». C’est une lecture que je repoussais sans cesse – parce que j’avais le sentiment de ne pas avoir suffisamment lu Mishima (notamment ladite tétralogie, d’ailleurs), et, disons-le, parce que je n’avais rien lu de Yourcenar (les Nouvelles Orientales, c’est très récent pour moi…). Mais je me suis dit, à tort ou à raison, que ce serait le bon moment pour au moins une première lecture – dans l’idée d’y revenir peut-être plus tard, quand je connaîtrais mieux aussi bien Mishima que Yourcenar.

 

MISHIMA EN ACTEUR

 

Mais, tout d’abord, Confession d’un masque. Ce roman paraît donc en 1949 – et le jeune Mishima passe aussitôt du statut d’inconnu à celui de célébrité. Ce qui, au-delà des évidentes qualités proprement littéraires de ce volume, peut surprendre un tantinet : le thème en est passablement tabou, et l’époque... « compliquée » (le Japon vient de perdre la guerre et est encore occupé par les Américains). Ceci étant, le genre watakushi shôsetsu était semble-t-il porté sur les récits où les auteurs/narrateurs « avouaient » leurs « travers », ce qui va d’ailleurs bien avec l’idée d’une « confession ». En l’espèce, Mishima, via un narrateur parfois appelé Kochan, mais c’est un diminutif affectueux qui pouvait s’appliquer à son véritable nom, Mishima donc témoigne de son éveil à la sexualité, et plus exactement à l’homosexualité, teintée de fantasmes sadomasochistes (mais probablement masochistes avant tout), dans une société qui ne prise pas exactement ces tendances ; aussi, tout en faisant l’aveu de ses « mauvaises habitudes » (c’est-à-dire la masturbation), se sentait-il contraint de porter ce « masque » de « normalité » en société. Mais l’imposture ne pouvait probablement pas durer, ainsi que l’auteur/narrateur en témoigne, même à demi-mots, à la fin du roman ; pourtant, la question de l'homosexualité de Mishima demeurerait longtemps tabou...

 

Ici, je suis tenté de faire un rapprochement qui, peut-être, n’a pas lieu d’être, et ne fait que témoigner de ce que mes connaissances en matière de littérature japonaise sont bien trop parcellaires : l’année précédant la parution de Confession d’un masque, un autre grand roman japonais avait adopté un dispositif qui me paraît assez proche – La Déchéance d’un homme, de Dazai Osamu, un auteur presque systématiquement associé au « roman du moi ». Passons sur le fait que les deux auteurs se sont suicidés (pour Mishima, cela ne se produirait que 21 ans plus tard ; et quand on voit le nombre de grands écrivains japonais qui se sont suicidés au XXe siècle, de toute façon…), mais voici deux grands textes de la littérature nippone du XXe siècle, parus en l'espace d'une année, dans lesquels les auteurs, jeunes encore voire très jeunes, exposent leur propre vie, les indices ne manquent pas, mais surtout leurs penchants jugés (par d’autres, mais aussi par eux-mêmes) les plus « immoraux », avec ce qui relève peut-être parfois d’une forme de complaisance, mais confessent avant toute chose que la société dans laquelle ils vivaient leur imposait de porter un « masque » ; le terme même, sauf erreur, revient chez Dazai, quand il pose et justifie sa figure de bouffon. Les deux auteurs usent de ces sujets parfois limites pour en extraire la meilleure littérature, mais il y a assurément une part d’exhibitionnisme dans la démarche – peut-être ne faut-il pas cependant s’attarder trop longtemps sur ce terme méprisant, car l’exposition était en même temps sincère… Reste que le texte de Dazai constitue comme un préambule à sa mort, si celui de Mishima est davantage un préambule à une carrière – et à une vie ? Car, dans Confession d’un masque, on est tenté, le lecteur contemporain est tenté, de faire quelque chose qui était forcément impossible pour le lecteur japonais de 1949 : tirer des traits, dessiner des trajectoires, anticiper tout ce qui suivrait… et pour le coup jusqu’à la mort, oui. La figure du masque, soit du personnage, à vrai dire, n’en acquiert que davantage d’importance.

 

Le roman de Mishima s’ouvre sur des tableaux saisissants d’une enfance remémorée au prisme de fantasmes divers, généralement liés, d’abord à l’art, plus tard à la littérature. Il est intéressant, à ce propos, de constater combien les références avancées par l’auteur sont généralement européennes, bien plus fréquemment en tout cas que japonaises. Quoi qu’il en soit, dans ces pages vibrantes et d’une élégance chargée de perversité, l’auteur se livre à une auto-analyse exhaustive, traquant dans les moindres souvenirs, probablement idéalisés, les sources de son être adulte – sources qui ne peuvent que témoigner de ses « mauvais penchants ». Nous voyons ainsi le petit Kochan, élevé par sa grand-mère assez « spéciale », s’enthousiasmer pour de beaux chevaliers – un, tout particulièrement, dont les traits androgynes l’émeuvent, bien avant qu’ils soient en mesure d’exciter ses hormones, jusqu’à l’instant fatidique où la vérité lui apparaît : c’est en fait le portrait d’une femme, une certaine Jeanne d’Arc… et le charme est rompu. Mais les chevaliers peuvent avoir d’autres atouts aux yeux du petit Kochan – tout particulièrement celui qui, combattant un dragon, subit mille douleurs et mille morts : Kochan, ou plus exactement son être adulte se repenchant sur son enfance de sorte à la rendre plus romanesque (un masque parmi tant d’autres), perçoit bien que ce sont ces souffrances qui lui plaisent – et quand le conte s’autorise la fantaisie de ressusciter le héros et de lui donner l’occasion de vaincre, le petit lecteur se sent floué : il relit sans cesse l’histoire, mais en n’en conservant que les passages de souffrance et de mort – c’est le reste qu’il censure, en masquant les mots malheureusement positifs de sa petite main d’enfant.

 

L’éveil à la sexualité, bientôt, changera la donne – ou, non, l’éclaircira, au fil d’un récit qui se déroule comme naturellement de causes en conséquences. Le passage, très célèbre, et tellement fort, vaut bien d’être cité (pp. 42-45) :

 

Je commençai par tourner une page vers la fin du volume. Soudain apparut, à l’angle de la page suivante, une image dont je ne pus m’empêcher de croire qu’elle était là pour moi, à m’attendre.

C’était une reproduction du Saint Sébastien de Guido Reni, qui fait partie des collections du Palazzo Rosso, à Gênes.

Le tronc noir et légèrement oblique de l’arbre servant de poteau d’exécution se détachait sur un fond de forêt sombre et de ciel crépusculaire, ténébreux et lointain, dans le style de Titien. Un jeune homme d’une beauté remarquable était attaché nu au tronc d’arbre. Ses mains croisées étaient levées très haut et les courroies qui lui liaient les poignets étaient fixées à l’arbre. Aucun autre lien n’était visible et le seul vêtement qui couvrît la nudité du jeune homme était une grossière étoffe blanche nouée lâchement autour des reins.

Je crus deviner que le tableau représentait le martyre d’un chrétien. Mais comme il était l’œuvre d’un peintre épris de beauté, appartenant à l’école éclectique issue de la Renaissance, même cette image de la mort d’un saint chrétien dégageait une forte odeur de paganisme. Le corps du jeune homme – on aurait pu le comparer à celui d’Antinoüs, le bien-aimé d’Hadrien, dont la beauté a été si souvent immortalisée par la sculpture – ne montre aucune trace des épreuves du missionnaire ou de la décrépitude qu’on trouve dans les représentations d’autres saints ; au contraire, il n’y a là rien d’autre que le printemps de la jeunesse, rien que lumière, beauté et plaisir.

Son incomparable nudité blanche rayonne sur un fond de crépuscule. Ses bras musclés, les bras d’un garde prétorien accoutumé à bander l’arc et à manier l’épée, sont levés selon un angle gracieux et ses poignets liés sont croisés juste au-dessus de sa tête. Son visage est légèrement tourné vers le ciel et ses yeux grands ouverts contemplent avec une profonde sérénité la gloire céleste. Ce n’est pas la souffrance qui erre sur sa poitrine tendue, son ventre rigide, ses hanches légèrement torses, mais une lueur d’un mélancolique plaisir, pareil à la musique. N’étaient les flèches aux traits profondément enfoncés dans son aisselle gauche et son côté droit, il ressemblerait plutôt à un athlète romain se reposant, appuyé contre un arbre sombre, dans un jardin.

Les flèches ont mordu dans la jeune chair ferme et parfumée et vont consumer son corps au plus profond, par les flammes de la souffrance et de l’extase suprêmes. Mais il n’y a ni sang répandu, ni même cette multitude de flèches qu’on voit sur d’autres représentations du martyre de saint Sébastien. Deux flèches seulement projettent leur ombre tranquille et gracieuse sur la douceur de sa peau, comme l’ombre d’un arbuste tombant sur un escalier de marbre.

Mais c’est plus tard que toutes ces interprétations et ces observations me vinrent à l’esprit.

Ce jour-là, à l’instant même où je jetai les yeux sur cette image, tout mon être se mit à trembler d’une joie païenne. Mon sang bouillonnait, mes reins se gonflaient comme sous l’effet de la colère. La partie monstrueuse de ma personne qui était prête à éclater attendait que j’en fisse usage, avec une ardeur jusqu’alors inconnue, me reprochant mon ignorance, haletante d’indignation. Mes mains, tout à fait inconsciemment, commencèrent un geste qu’on ne leur avait jamais enseigné. Je sentis un je ne sais quoi secret et radieux bondir rapidement à l’attaque, venu d’au-dedans de moi. Soudain la chose jaillit, apportant un enivrement aveuglant.

Un moment s’écoula, puis, en proie à des sentiments de profonde tristesse, je portai mes regards autour du pupitre devant lequel j’étais assis. Un érable, en face de la fenêtre, jetait alentour un reflet brillant – sur la bouteille d’encre, sur mes livres de classe et mes cahiers, sur le dictionnaire et sur l’image de saint Sébastien. Il y avait un peu partout des taches d’un blanc de nuage – sur le titre imprimé en lettres d’or d’un manuel, sur le flanc de la bouteille d’encre, sur un angle du dictionnaire. Certains objets laissaient échapper des gouttes molles, comme du plomb, d’autres luisaient d’un reflet terne, comme les yeux d’un poisson mort. Par bonheur, un mouvement réflexe de ma main pour protéger l’image avait empêché que le livre ne fût souillé.

Ce fut ma première éjaculation. Ce fut aussi le début, maladroit et nullement prémédité, de mes « mauvaises habitudes ».

 

Cette épiphanie, car l’excitant martyre lui confère d’emblée quelque chose de sacré (et, à nos yeux de lecteurs, on y voit l’origine de ce qui est peut-être la plus célèbre photographie de Mishima), cette révélation, donc, n’est peut-être pas immédiatement vécue comme telle – notamment parce que, dans la société japonaise des années 1930 plus encore qu’aujourd’hui, outre que les « mauvaises habitudes » suscitent invraisemblablement la suspicion voire la colère, comme elles le font étrangement toujours, dans cette société, donc, les inclinations de Kochan sont inavouables. Le collège, le lycée, sont des manufactures de normalité – bien hypocrites cependant : les jeux des garçons sont comme de juste imprégnés d’un érotisme, et parfois (souvent) d’un homoérotisme à peine dissimulé, qu’il serait vain de nier. Et puis, bien sûr, il y a ces figures qui excitent les fantasmes : Omi, le voyou, plus âgé que les autres, dur, beau. J’ai envie de relever combien les amitiés et attirances scolaires, dans La Déchéance d’un homme et dans Confession d’un masque, peuvent se reprendre, se refléter, ou se répondre, parfois se contredire, mais, je crois dans un même mouvement. De manière plus assurée, il apparaît que Kochan/Mishima conservera toujours une attirance pour les voyous, les brutes, dont la fin du roman témoigne, comme l’arrivée au terme d’une démonstration mathématique pas si compliquée en fin de compte. Cette fascination pour le corps masculin, peut-être héritée de la statuaire ou de la peinture, trouvera enfin à s’incarner dans l’investissement maniaque de Mishima dans le culturisme : honteux de son corps frêle, celui de Kochan, celui qui s’est fait réformer pendant la guerre, il entendra se sculpter, se parfaire – comme un livre, comme une mort.

 

Mais il y a un entre-deux – qui peut étonner. De fait, Confession d’un masque progresse initialement comme le récit de la découverte par Kochan de son homosexualité, d’abord dans les livres, puis au collège et au lycée – sans pour autant nouer de véritables relations charnelles. Mais le propos, au-delà, n’est finalement pas celui de l’acceptation de son homosexualité, pas du moins avant les tout derniers paragraphes, et pas vraiment non plus celui des souffrances que l’impossibilité sociale de s’assumer ainsi susciterait : dans toute la seconde moitié du roman, c’est bien l’idée du « masque » qui domine – mais de manière justement dépassionnée. La quatrième de couverture parle d’un « récit torturé sur la frustration du désir » ; c’est pour partie vrai, et pourtant insuffisant, je pense – car le désir même frustré n’a pas forcément beaucoup de place dans ces pages. La tentative, même condamnée d’avance, de feindre la « normalité », notamment au travers d’une amourette sciemment plate car forcément vide avec une jeune femme du nom de Sonoko, donne bien davantage le sentiment d’une neutralité fade (si le style est tout sauf ça !), ni désir, ni véritable refoulement – une mauvaise pièce de théâtre, où les acteurs portent nécessairement des masques, et feignent des émotions qu’ils seraient bien en peine de ressentir… en pleine connaissance de cause.

 

Cet entre-deux, d’ailleurs, ne concerne pas que le désir sexuel – à moins qu’il ne faille y associer, et il faut probablement le faire, les fantasmes masochistes suscités dès l’enfance par ces contes revisités où le dragon triomphe du chevalier, et d’autres plus tardifs, comme ce festin cannibale aux accents sadiens, qui contamine les rêves inavouables de Kochan en pleine tourmente molle. D’une certaine manière, le Japon en guerre est comme une hyperbole de ces fantasmes – avec moins de grandiloquence, pourtant ? Car le jeune homme, guère investi dans ses études, ne vibre alors pour rien – son masque déteint sur absolument tout le reste, atténuant les contours jusqu’à les effacer. Le Mishima de la fin des années 1960, qui dirige une société paramilitaire, et loue l’empereur à la moindre occasion, jusque devant ces étudiants gauchistes qui, ceci mis à part, lui paraissent comme des frères, est aux antipodes du Kochan des années de guerre, décrit par le Mishima de 1949. Indifférent à la guerre, tout de même trop heureux, malgré ses poses, d’y échapper en raison d’un début de tuberculose (qui lui fera honte plus tard), le jeune homme ignore les batailles perdues, et les bombardements et leurs drames, comme si ce grand suicide du Japon militariste et nationaliste n’était pas assez masochiste pour véritablement l’exciter ; je suis tenté, ici, d’établir un parallèle avec Le Pavillon d’or. Et Kochan semble perpétuellement en attente – du mariage avec Sonoko, pourraient avancer certains, dont la principale intéressée ? Non : Kochan ne poussera pas la mascarade aussi loin. Il continuera d’attendre – et reprendra en fait la mascarade d’une manière plus mesquine encore, en s’accordant des rendez-vous volés avec une Sonoko mariée ; en dernier recours, c’est à ses côtés, dans cette atmosphère pesante de faux adultère, qu’il prendra finalement conscience de ce dont il a besoin – soit tout autre chose.

 

Le récit de Mishima est assurément d’une grande force – mais il est aussi surprenant, notamment en ce que la trame attendue d’une certaine manière est en définitive remisée de côté. La frustration du désir est bien là, mais relativement à l’arrière-plan, passé les chapitres de l’enfance et de l’adolescence (qui, je ne prétendrai pas le contraire, sont de loin ceux qui m’ont le plus séduit). Le roman, à part égale, évite tout pathos pour se réfugier dans une froideur et un détachement qui relèvent probablement pour partie de l’imposture, mais ils n’en dominent pas moins le ressenti dans la seconde moitié du roman. L’auteur a traqué dans l’enfance l’être perverti qu’il croit constitutif de sa personne adulte, mais, délibérément, le portrait de l’adulte est d’abord celui d’un être tout opposé, creux, ou vide – ce qui entre peut-être (ou peut-être pas, car la spiritualité y a une part absente de ce premier chef-d’œuvre) en résonance avec le titre de la lecture de Marguerite Yourcenar. En somme, le roman de Mishima souffle le chaud et le froid exactement là où on ne les attend pas, peut-être du fait d’un certain formatage de ce type de récit : le charnel est ici du domaine de l’enfance, et irrémédiablement associé à l’art au sens large ; la froideur est caractéristique d’un adulte qui ne ressent rien, même dans un monde qui s’écroule autour de lui (et ici aussi je suis tenté de lire Dazai en parallèle, chez qui c'est un symptôme marqué de la dépression).

 

Maintenant, l’atout essentiel de l’auteur, celui qui unit ces deux moments du récit et avec un brio indéniable, réside dans sa plume. Or, ici, il y a un problème – car Confession d’un masque, comme un certain nombre d’autres œuvres de Mishima, a pâti d’une double traduction : cette version française est traduite de l’anglais, par Renée Villoteau. Telle pratique est toujours problématique : si traduire est trahir, la trahison ne peut être que plus signifiante encore quand la traduction est au carré. J’ai cru comprendre qu’une nouvelle traduction, du japonais cette fois, serait prévue pour l’an prochain ? Quoi qu’il en soit, ce texte français en l’état est bien d’une grande beauté, d’une grande élégance aussi – je suppose que l’extrait cité plus haut en témoigne. En fait, il a même quelque chose de précieux, qui apparaît souvent en décalage avec les événements rapportés – tout particulièrement, en fait, quand le Kochan enfant puis adulte, sous la plume certes du jeune écrivain Mishima, fait étalage de ses connaissances et de ses goûts en peinture comme en poésie. Mais ce décalage, sans doute, fait partie du « masque » : la confession est censée révéler ce que le masque cachait, mais, à la publication du roman, Mishima porte toujours un masque – et il le fera jusqu’au jour fatidique du 25 novembre 1970 ; une succession de personnages, en fait, plutôt qu’un seul – en dépit des redondances de façade, des explorations répétées des mêmes thèmes, des mêmes obsessions. Reste que l’écrivain Mishima naît véritablement avec Confession d’un masque : il brille dès le départ. Il a 24 ans – il a déjà vécu plus de la moitié de sa vie ; mais bien d’autres livres suivront, pour confirmer son génie.

 

YOURCENAR EN MÉDITATION

 

L’essai de Marguerite Yourcenar Mishima ou la vision du vide paraît en 1980, soit dix ans après le suicide de l’écrivain japonais. En fait, à ce que j’ai cru comprendre, il paraît peu ou prou en même temps que la traduction française de L’Ange en décomposition (L’Ange pourrit, dans le texte de Yourcenar composé un peu avant) – ce roman étant le dernier de la tétralogie de « La Mer de la Fertilité », et le dernier de Mishima tout court, puisqu’il en a fameusement envoyé le manuscrit définitif à son éditeur au matin de son suicide. La mort de l’auteur joue forcément un certain rôle dans cette lecture, elle était déjà devenue l’événement primordial à mentionner avant toute critique, mais l’autrice entend malgré tout parler des livres de Mishima – des meilleurs seulement, car elle sait bien qu’une part non négligeable de sa production était alimentaire.

 

De fait, ce court essai repose sur des choix marqués, des œuvres qu’il faut étudier, de celles sur lesquelles on peut passer. Pour ce qui est des romans, Marguerite Yourcenar traite surtout, mais assez brièvement, de Confession d’un masque donc, du Tumulte des flots, du Pavillon d’or et d’Après le banquet, assez vite cependant pour chacun d’entre eux, et surtout, bien plus massivement, de la tétralogie de « La Mer de la Fertilité » : Neige de printemps, Chevaux échappés, Le Temple de l’aube et L’Ange en décomposition (donc). Quelques nouvelles sont évoquées rapidement, individuellement plutôt qu’au travers des recueils les compilant : « Patriotisme », éventuellement, encore que Yourcenar préfère s’attarder sur le film qu’en a tiré Mishima lui-même, Yûkoku, rites d’amour et de mort, qu’elle aime (vraiment) beaucoup ; je crois me souvenir qu’elle mentionne hâtivement « Onnagata », nouvelle qui entre d’ailleurs d’une certaine manière en résonance avec Confession d’un masque. Pour ce qui est du théâtre, elle évoque à peu près dans une égale mesure (étrangement ?) Cinq Nô modernes et Madame de Sade. Concernant les essais, enfin, Le Soleil et l’acier a droit à quelques lignes – pas tant que cela Le Japon moderne et l’éthique samouraï, ceci alors même que Marguerite Yourcenar ne manque pas de mentionner que Mishima Yukio avait lu avec délectation et une grande attention le Hagakure. Autant de choix légitimes, pour un essai de cette taille, qui n’avait certes pas la prétention de se montrer exhaustif.

 

Et il me faut sans doute témoigner ici de mes lacunes : des huit romans cités, je n’en ai lu que deux ; j’ai lu les deux nouvelles que j’ai mentionnées, et j’ai vu le film Yûkoku, mais, côté théâtre, je n’ai lu que Madame de Sade, et, côté essais, que Le Japon moderne et l’éthique samouraï. Clairement, cela m’interdit de porter un jugement bien assuré sur la valeur de la lecture de Marguerite Yourcenar…

 

Disons… que je lui fais confiance ? Je suppose qu’un grand écrivain n’est pas forcément un grand critique (ne parlons même pas de l’inverse), mais ce statut autorise peut-être tout de même quelques remarques qu’un plumitif ne pourrait pas se permettre. Car Marguerite Yourcenar apprécie à l’évidence l’œuvre de Mishima – son œuvre « artistique », du moins –, mais ne lui épargne pas pour autant ses critiques, y compris dans les livres qu’elle loue le plus.

 

L’exemple le plus frappant concerne probablement le bouddhisme – et est associé ici, surtout, à « La Mer de la Fertilité » (il aurait probablement pu l’être à peu près autant au Pavillon d’or, mais, concernant ce roman, Marguerite Yourcenar ne s’attarde guère). L’autrice reproche à Mishima d’avoir, en gros, « recopié des encyclopédies » (du Houellebecq avant l’heure, diraient les mauvaises langues – et j’aime bien Houellebecq par ailleurs) pour exposer un peu lourdement le substrat bouddhique de la tétralogie, qui joue sur la transmigration des âmes ; elle affirme que le bouddhisme n’intéressait guère Mishima, davantage porté sur le shintô, et qu’il se retrouvait ainsi dans la situation d’un écrivain français contemporain athée qui voudrait écrire à propos d’un séminariste... Mais elle lui reproche en même temps d’avoir contaminé cette représentation de la réincarnation, hautement intellectuelle, avec d’autres davantage populaires et relevant de la superstition, comme les grains de beauté qui se retrouvent de génération en génération, ou les personnages condamnés à périr au même âge que leur précédente incarnation… Elle y voyait des incompatibilités franches, et des faiblesses dans la composition. N’ayant pas lu ces romans, et ne sachant pas grand-chose du bouddhisme, je suis bien évidemment incapable d’en dire quoi que ce soit, mais j’avoue ne pas être certain, pour le coup, qu’une romancière française soit la mieux placée pour expliquer à un Japonais ce qu’est le bouddhisme… Bon, je n’en sais rien.

 

Ceci mis à part… Enfin, non : on ne peut pas vraiment le mettre à part, car c’est là le cœur de la tétralogie de « La Mer de la Fertilité », soit et de loin la principale œuvre disséquée ici ; par ailleurs, l’apposition de cette lecture et du récit des derniers instants de Mishima suscite chez l’autrice de nouvelles résonances bouddhiques, ou peut-être issues aussi d’autres spiritualités orientales (elle mentionne l’hindouisme, sauf erreur, mais je suppose que le taoïsme au moins y aurait également eu sa part) : c’est bien ainsi qu’elle peut parler de ce « vide » qui n’a pas les connotations que nous lui associons instinctivement en Occident – et dont je suppose qu’il s’accommode bien du concept très japonais (mais qui a bien des sources bouddhiques) de l’impermanence des choses. L’analyse serrée des quatre derniers romans de Mishima reflète forcément le récit de sa mort – et l’on se demande dès lors qu’elle était la part de préparation consciente dans tout cela, comme on se le demandait en lisant « Patriotisme » ou en regardant Yûkoku. Marguerite Yourcenar, cela dit, ne peut pas vraiment répondre à cette question : il y faudrait un biographe autrement mieux au fait des réalités de la vie de l’auteur et du Japon de son temps et même d’avant – j’ai, dans ma pile à lire, Mort et vie de Mishima, de Henry Scott-Stokes, et il me faudra bien lire cette biographie souvent citée.

 

Peut-être à vrai dire mon rapport à ce livre sera-t-il différent de celui concernant Mishima ou la vision du vide ? A fortiori, bien sûr, si je peux lire quelques autres Mishima d’ici-là… dont « La Mer de la Fertilité ». Car mes lacunes, en lisant l’essai de Marguerite Yourcenar, se sont révélées conformes à mes craintes : je n’en savais pas assez de Mishima, ou des œuvres de Mishima, pour appréhender au mieux la pertinence de l’essai.

 

Cela n’a pas été pour autant une lecture vaine – car il y a la belle plume de Marguerite Yourcenar. Son essai n’a rien d’une sécheresse universitaire ou journalistique : il a une valeur littéraire qui lui est propre, il est une œuvre littéraire. La beauté du style suffit, avec la construction réfléchie, à conférer à cette lecture quelque chose de romanesque. Peut-être y a-t-il alors une part de « masque », dans cette évocation d’un mort ? De fait, elle ne déparerait pas tant que cela dans une pièce de nô – voire dans un des Nô modernes de Mishima ? L’impact sur le lecteur, en tout cas, est certain.

 

Quoi qu’il en soit, ces deux livres, chacun bien sûr d’une manière qui lui est propre, incitent à lire davantage de Mishima – et je compte bien le faire.

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CR Barbarians of Lemuria : Mariage amer (03)

Publié le par Nébal

CR Barbarians of Lemuria : Mariage amer (03)

Troisième et dernière séance du scénario Mariage amer, pour Barbarians of Lemuria. Il est dû à Andrea Salvatores, et figure dans le supplément Chroniques lémuriennes, pp. 58-75.

 

Vous trouverez la première séance ici, et la deuxième ici.

 

L’illustration en tête d’article provient de ce scénario (p. 72), et est due (forcément) à Emmanuel Roudier.

 

Voici l’enregistrement de ce troisième compte rendu :

Voici également, pour ceux que cela intéresserait, l’enregistrement brut de cette troisième séance (on dit « actual play » ?) :

Au passage, j'ai utilisé, en guise d'illustration sonore, diverses musiques dont je n'ai comme de juste pas les droits, qui demeurent à leurs propriétaires respectifs. Durant cette séance, j’ai surtout fait appel à l’album White2 de Sunn O))) (les morceaux « bassAliens » et « Decay2 [Nihil’s Maw] »), à la bande originale du jeu vidéo Darkest Dungeon, et à celle du film de Mel Gibson Apocalypto, composée par James Horner. De manière plus anecdotique, j’ai aussi fait appel aux morceaux de Lustmord « Aldebaran of the Hyades » (de l’album The Place Where the Black Stars Hang) et « Babel » (de l’album The Word as Power), ainsi qu’à « Saltarello » de Dead Can Dance (sur l’album Aion). Comme d’habitude, j’ai réservé l’immortelle bande originale de Conan le Barbare de John Milius par Basil Poledouris pour la préparation de la partie et son debrief…

 

Il y avait cinq joueurs, qui incarnaient Liu Jun-Mi, un Ghataï d’ascendance xi lu (Barbare 0 – Mercenaire 1 – Dresseur 1 – Gladiateur 2) ; Myrkhan, originaire de Tyrus (Gamin des rues 1 – Chasseur 2 – Forgeron 0 – Soldat archer 1) ; Narjeva, originaire d’Urceb (Esclave 0 – Courtisane 1 – Assassin 2 – Prêtresse de Nemmereth 1) ; Nepuul Qomrax, originaire de Zalut (Scribe 2 – Alchimiste 3 – Marchand 0 – Médecin 1) ; et enfin Redhart Finken, de Parsool (Docker 0 – Matelot 1 – Mercenaire 3 – Marchand 0).

 

I : AU CŒUR DE LA PYRAMIDE

 

Les héros, après s’être débarrassé des gardes, font face à la grande pyramide du sanctuaire des Mitis, où ils supposent que se trouve Dill Sendak. C’est un bâtiment impressionnant, massif, qui fait dans les quinze mètres de hauteur, et est constitué d’une sorte de pierre noire lisse pouvant évoquer une sorte de marbre.

 

Sur le pourtour du rez-de-chaussée, il y a des frises en marbre blanc, cette fois, qui figurent toutes une étrange et gigantesque créature reptilienne à tête de femme. L’érudit Nepuul Qomrax comprend de quoi il s’agit : une slorth – c’est-à-dire une créature monstrueuse conçue il y a bien longtemps de cela par les Rois-Sorciers ; les slorths sont des créatures toutes femelles, d’essence magique, et elles-mêmes en mesure de faire appel au Pouvoir du Néant, comme leurs maîtres d’antan.

 

Les héros ouvrent la grande porte de bronze à double battant au sommet de l’escalier, qui leur permet de pénétrer dans la pyramide ; pas un bruit à l’intérieur, pas une source de lumière non plus, aussi se munissent-ils de torches, et tendent-ils l’oreille – littéralement pour Redhart, qui n’en a qu’une. Ils entrent ainsi dans un petit vestibule, avec deux portes en bois ouvragé de part et d’autre ; Myrkhan croit entendre des bruits liquides – comme une goutte d’eau qui tomberait périodiquement dans un bassin, et cela vaut pour la porte de gauche comme pour celle de droite.

 

Derrière chacune de ces portes, de manière parfaitement symétrique, se trouve une pièce encore assez petite mais cependant deux fois plus grande que le vestibule, avec un petit bassin rempli d’une eau limpide – il faut traverser ces sortes de pédiluves pour atteindre, dans les deux cas, la porte qui se trouve au nord. Les héros méfiants prennent bien soin de vérifier que cette eau n’a rien de menaçant et que rien ne s’y tapit – ils n’ont rien à craindre ici. Nepuul, à vrai dire, fait très attention à ce qu’ils ne déclenchent pas de pièges, mais, d’une certaine manière, il doute qu’il y en ait : c’est un lieu de culte, pas une forteresse, et, à ce niveau tout du moins, les traces de passage ne manquent pas – les Mitis doivent y passer quotidiennement. Il restera prudent néanmoins… Mais les personnages mouillent donc leurs chausses, et franchissent la porte qui les mène à la pièce suivante.

 

Ils se retrouvent dès lors dans une salle bien plus vaste – au point où leurs torches ne leur permettent pas de tout éclairer immédiatement. Une grande terrasse borde un bassin plus profond que ceux des pièces précédentes – une poutre d’une dizaine de centimètres de large traverse ce bassin, mais impossible de voir où elle mène sans s’y engager. Vers le côté est, un escalier descend dans un sous-sol. Un peu au-dessus, sur le mur sud, se trouve une fresque avec l’inscription, dans un dialecte lémurien que les héros lisent sans peine : « Seul, avant l’union. » Liu Jun-Mi s’approche du bassin, avec sa torche… et cette fois ce n’est pas de l’eau qui se trouve au fond, mais des centaines, peut-être des milliers, de serpents – comme dans la petite pyramide, sans toutefois l’ersatz colossal qui y dormait. Myrkhan recule instinctivement… Mais Narjeva, quant à elle, s’avance sans plus attendre, et sans plus de difficultés, sur la poutre, en éclairant de sa torche – au bout de la passerelle se trouve une autre plateforme, un peu plus petite, avec une ouverture sur le côté ouest. La facilité avec laquelle la prêtresse de Nemmereth a franchi la poutre rassure un peu ses compagnons – surtout, en éclairant leur destination avec sa torche, elle leur facilite la tâche : tous les héros franchissent la poutre sans vrai problème. Ils sont maintenant libres d’emprunter le passage à l’ouest, lequel donne immédiatement sur un escalier montant à l’étage. Faut-il monter, ou descendre ? Les personnages peu ou prou unanimes décident de gagner le niveau supérieur – seul Myrkhan s’inquiétant de ce qu’on puisse les « prendre en traître » depuis le sous-sol.

 

Narjeva ouvre la marche. Au premier étage, il n’y a pour l’essentiel qu’une seule pièce, assez grande, plus ou moins en forme de croix. Au centre se trouve une colossale balance à plateaux métallique ; au niveau des murs ouest et est, il y a des fontaines perpétuellement alimentées d’une eau limpide – on trouve une amphore à côté de chaque bassin. En haut du mur sud, il y a une autre inscription en dialecte lémurien : « Égaux à jamais. » Pour Nepuul, à l’évidence, tout ceci renvoie à un rite matrimonial. Enfin, au coin sud-ouest se trouve une lourde porte en bois massif renforcé. Redhart la testant comprend qu’une barre de l’autre côté empêche de l’ouvrir. Il doit y avoir un mécanisme – lié à la balance. Que s’agit-il de peser ? Les époux ? Probablement pas… L’eau, sans doute – avec les amphores : il doit s’agir d’atteindre un parfait équilibre. La balance s’avère étonnamment sensible, ainsi que le constate Redhart – mais, en se coordonnant avec Nepuul sur l’autre plateau, ils parviennent à atteindre l’égalité de poids. Aussitôt, un déclic se fait entendre, en provenance de la porte au sud-ouest – laquelle donne à nouveau sur un escalier menant à un niveau supérieur.

 

Les héros arrivent au deuxième étage – qui est aussi le dernier. Là encore, passé un étroit vestibule, et une porte en bois ouvragé, ornée cette fois de figures érotiques voire pornographiques, il n’y a qu’une seule pièce, et en forme de croix. Au milieu de la pièce se trouvent deux blocs de marbre noir lisse qui se font face. Au nord, il y a une porte de bronze à double battant, répondant à celle du rez-de-chaussée – Narjeva croit distinguer quelques bruits de l’autre côté, sans vraiment comprendre de quoi il peut bien s’agir. Sur le mur sud, une autre inscription en dialecte lémurien proclame : « Unis à jamais. » La prêtresse de Nemmereth comprend aussitôt qu’il faut rapprocher les deux blocs de marbre noir – et Redhart jetant un œil à l’espace qui les sépare constate qu’il y a des traces de mouvement. L’ex-marin de Parsool se charge d’un des piliers, Liu Jun-Mi de l’autre, et les deux colosses constatent que leur force physique n’était pas nécessaire – les deux blocs coulissent aisément jusqu’à ne plus en former qu’un ; aussitôt, la double porte donnant sur la terrasse s’ouvre automatiquement…

 

II : LA SLORTH ET LES SIENS

 

… et, sur la terrasse, les héros découvrent une gigantesque slorth, furieuse, qui siffle en se dressant tel un cobra d’une taille inouïe ! Mais elle n’est pas seule : le couple formé par Orom et Dill Sendak, jusqu’alors en adoration devant sa divinité, perçoit l’intrusion des personnages – et si la jeune fille demeure ébahie sans trop savoir comment réagir pour l’heure, le guerrier miti, qui arbore des tatouages serpentins sur tout son corps musculeux, et dont la peau vaguement violacée trahit sa consommation de liqueur de férocine à haute dose, succombe à la fureur, et s’empare en hurlant de son épée longue ! Enfin, quatre enfants qui dormaient lovés dans les gigantesques anneaux de la femme-serpent s’éveillent peu à peu… et perçoivent aussitôt les héros comme des ennemis mortels de leur déesse et mère.

 

Nepuul interpelle Dill Sendak, l’enjoignant de les rejoindre : « Ces créatures sont dangereuses ! » Mais la fille semble stupéfiée par cette déclaration… Redhart ne se pose pas davantage de questions : hurlant à Liu Jun-Mi de s’emparer de la fiancée volage, le mercenaire de Parsool assène un brutal coup de hache à la slorth, en pleine face – la créature est grièvement blessée, et de toute évidence surprise par la violence de l’attaque, ses traits féminins en témoignent ; mais elle n’en est que plus enragée, elle fixe son ennemi avec son regard si étrangement intense – et le mercenaire hypnotisé se retrouve paralysé, incapable du moindre geste ! Narjeva essaye de profiter de ce que la femme-serpent est occupée avec Redhart pour la prendre à revers – elle se faufile vers le bord de la terrasse. Myrkhan décoche quant à lui une flèche empoisonnée à Orom ; il blesse le barbare au bras gauche, mais ça ne paraît pas le gêner véritablement… Liu Jun-Mi, enfin, tente sans succès de donner un coup de fouet à la slorth… Les quatre enfants, maintenant pleinement réveillés, se ruent sur les héros : ils ne sont pas en mesure de leur infliger des dégâts, mais gêneront par contre leurs déplacements et leurs attaques ; ils n’ont pas le moins du monde peur, ils sont très agressifs…

 

Nepuul, intimidé par la slorth, ne sait pas trop comment aider ses camarades – il porte la main à sa potion de feu alchimique, mais sait qu’il blesserait immanquablement de la sorte, non seulement leurs ennemis, mais aussi ses compagnons et les enfants…Orom attaque Liu Jun-Mi avec son épée longue, en poussant un cri de rage – et le gladiateur aurait été très sévèrement blessé, si un pas de côté à la dernière seconde n’avait pas atténué les dégâts… La slorth siffle et fait appel à sa magie pour soigner les blessures que lui avait infligées Redhart : le mercenaire, qui reprend peu à peu ses esprits, voit les plaies se refermer d’elles-mêmes, à une vitesse inouïe ! Narjeva aussi a assisté au phénomène – mais un enfant s’est jeté entre ses jambes et l’empêche d’agir… Myrkhan a choisi d’ignorer le petit qui s’en prenait à lui, mais il s’en faut de peu, au moment où il tire sur la slorth, qu’il se mette sur son passage et encaisse la flèche en lieu et place de la cible… Liu Jun-Mi, quant à lui, choisit de s’en prendre à Orom à mains nues, dans le but de le désarmer – les deux combattants sont de vraies montagnes de muscles… et pour l’heure c’est le Miti qui l’emporte sur le Ghataï.

 

Nepuul crie pour distraire la slorth et attirer son attention – en vain, sans surprise… Mais Redhart, libéré de sa paralysie, peut à nouveau s’en prendre à la créature des Rois-Sorciers, en choisissant lui aussi d’ignorer le gamin dans ses pattes – mais c’est une vraie plaie, et le coup du mercenaire ne porte pas. Orom est occupé avec Liu Jun-Mi – et cette fois le gladiateur prend de plein fouet l’assaut de l’ex-pilote de nef ; il est presque à l’agonie… La slorth quant à elle choisit de changer de cible : elle délaisse Redhart pour Myrkhan – et c’est cette fois l’archer de Tyrus qui est paralysé par son regard hypnotique. Narjeva de son côté choisit de bondir sur le dos de la femme-serpent – ce qui lui confèrera un avantage pour l’attaquer ultérieurement ; elle a au passage envoyé balader le petit garçon qui l’ennuyait – lequel renverse un piédestal auquel les personnages n’avaient pas vraiment eu l’occasion de faire attention jusqu’alors ; en tombe… un crâne humanoïde, dénué de toute chair, mais dont les yeux demeurent dans les orbites… et bougent… et suivent visiblement les faits et gestes des combattants ! Liu Jun-Mi, aux abois, tente le tout pour le tout : une nouvelle manœuvre de désarmement. Et, cette fois, il réussit ! Il contraint Orom à lâcher sa précieuse épée longue… Le Ghataï remarque au passage que Dill Sendak, visiblement effarée, suit d’un air désespéré l’évolution du combat : au moment où il a désarmé Orom, la jeune fille a instinctivement porté la main à la dague qu’elle a attaché à sa ceinture…

 

Nepuul avance, sans savoir que faire pour aider ses compagnons… Mais il voit alors le crâne qui a roulé au sol – un objet qui l’intrigue, mais il ne peut pas en déduire quoi que ce soit pour l’heure. Redhart hurle en portant un nouveau coup de hache à la slorth, mais rate sa cible – laquelle, furieuse de l’outrecuidance de Narjeva qui lui a bondi dessus, se débat violemment pour la désarçonner ; et la colossale femme-serpent y parvient enfin : elle propulse l’assassin contre un mur, un coup très rude qui la contraint à lâcher sa rapière – elle avance à quatre pattes en direction du crâne… Myrkhan, qui n’est plus paralysé, tire à nouveau sur la slorth, en visant la tête – il blesse la créature magique, qui souffre visiblement… mais pousse un sifflement assourdissant : ses plaies se referment à nouveau ! Orom s’est désengagé de l’emprise de Liu Jun-Mi pour tenter de ramasser son épée ; le gladiateur s’en doute bien, et espère en profiter, en faisant une manœuvre destinée à l’immobiliser : le Miti doit à nouveau lâcher son arme à peine ramassée, et la forte poigne du Ghataï l’étouffe !

 

Nepuul essaye de débarrasser Myrkhan et dans une moindre mesure Liu Jun-Mi des enfants qui les gênent, mais ces petits démons glissent comme des anguilles. Redhart, lui, s’en moque, et balance à nouveau un brutal coup de sa hache d’abordage de Parsool… qui passe à côté. Orom essaye de se libérer de l’emprise de Liu Jun-Mi, mais ce dernier, un gladiateur formé à bonne école, le domine toujours. La slorth, emportée par sa rage, n’use pas cette fois de son pouvoir de paralysie, et cherche plutôt à mordre Redhart – cependant, la créature n’est pas des plus agile, avec sa masse conséquente, et le mercenaire l’esquive sans trop de difficultés. Narjeva, toujours au sol, se détourne de la slorth : le rictus moqueur du crâne l’insupporte au plus haut point : elle s’en saisit, et en perce les yeux avec ses ongles ! Mais elle comprend aussitôt que ce geste impulsif n’était pas une très bonne idée – une sensation désagréable s’empare d’elle, avec la conviction de faire l’objet d’une malédiction pour s’en être prise ainsi à ce qu’elle comprend être le crâne d’un Roi-Sorcier… Même percés, ces yeux la fixent en ricanant ! Myrkhan, lui, s’en prend toujours à la slorth… et rate lamentablement : sa flèche perce la gorge d’un des enfants, qui meurt sur le coup ! Liu Jun-Mi, confiant en sa force, tente d’asphyxier Orom entre ses bras puissants – manœuvre audacieuse, sa proie est forte comme un bubalus… mais le gladiateur, sans étouffer totalement le Miti, le place bel et bien dans une situation très inconfortable – il lui devient plus difficile encore de se débattre pour se libérer ! Le Ghataï constate aussi que Dill Sendak s’est cette fois emparée de sa dague… et semble plutôt disposée à la retourner contre elle : il hurle à ses compagnons de s’occuper d’elle !

 

Nepuul agacé par les enfants cherche à en assommer un avec son bâton, mais il n’est pas suffisamment agile… Redhart ne se montre pas plus efficace de son côté contre la slorth ! Orom gonfle ses poumons, lâche un cri primal, et met tout ce qu’il a pour se libérer de l’emprise de Liu Jun-Mi : puisant dans ses dernières ressources, le Miti parvient enfin à repousser le Ghataï. La slorth furieuse vise Myrkhan, mais ses crocs n’inquiètent pas le moins du monde l’archer de Tyrus. Narjeva, du fait de la malédiction des Rois-Sorciers, se montre indécise… Myrkhan quant à lui continue de s’en prendre à la slorth – et il n’y a plus de gamin pénible pour le gêner : assurant son tir, il vise l’œil de la créature reptilienne – il touche, la femme-serpent fait une fois encore appel à ses facultés de guérison, mais il apparaît évident à tous qu’elle n’a pas des réserves infinies : elle ne pourra pas continuer ainsi très longtemps. Liu Jun-Mi repoussé par Orom lui inflige cependant un violent coup de coude au visage – le Miti chancelle : il suffirait de pas grand-chose pour l’achever…

 

Nepuul, en désespoir de cause, se dirige vers Dill Sendak pour la maîtriser – ce qui implique de passer à côté de la slorth ; la masse de la créature, et ses mouvements intempestifs, gênent l’alchimiste dans son déplacement. Redhart cependant parvient enfin à placer un coup dévastateur : il décapite la slorth ! La tête de la créature est propulsée hors de la terrasse dans un ultime sifflement, tandis que les anneaux du corps serpentin s’affaissent lourdement… Les enfants et Dill Sendak poussent alors un hurlement de désespoir ! Orom n’en pense visiblement pas moins… mais la férocine s’est emparée de lui, il n’est pas en mesure de faire autre chose que combattre Liu Jun-Mi, sans même chercher à ramasser son arme : il se projette en avant, tel un bolide, et Liu Jun-Mi déjà bien amoché ne parvient à l’esquiver qu’in extremis… Mais le Miti percute le mur à toute vitesse ! Narjeva, consciente des intentions suicidaires de Dill Sendak, se précipite sur la jeune fille et interrompt son geste au dernier moment, la saisissant par le bras juste avant qu’elle ne s’éventre avec sa dague ! Elle la maîtrise – ils doivent la ramener vivante… Débarrassé de la slorth, Myrkhan s’en prend désormais à Orom : une ultime flèche dans le dos abat le colosse désespéré.

 

Dill Sendak hurle de chagrin, mais Narjeva l’empêche de faire tout geste malavisé… Les enfants sont dans un même état d’esprit, terrifiés et affligés de ce qui s’est passé sous leurs yeux… Trop en fait pour s’en prendre aux personnages ou les gêner de quelque manière que ce soit : leur monde s’est effondré. Redhart rejoint Narjeva : ensemble, ils ligotent (et bâillonnent) la jeune noble – qui finit par se laisser faire, les yeux dans le vide, y compris quand le mercenaire de Parsool la place sur son épaule, comme un fagot ; une dose d’yzane administrée par Nepuul Qomrax se montre utile à cet effet.

 

Mais Liu Jun-Mi, qui s’est beaucoup dépensé dans le combat contre Orom, ressent enfin la douleur de ses nombreuses blessures : il appelle Nepuul à l’aide, le médecin faisant de son mieux pour stabiliser l’état de son patient et lui apporter un semblant de réconfort immédiat. Redhart suggère à son ami ghataï de faire dès que possible l’acquisition d’une armure et d’une bonne lame en acier… Cela dit, le gladiateur ne manquait certes pas de style : à mains nues contre un colosse armé d’une épée longue ! Impressionnant…

 

III : FUIR LE SANCTUAIRE

 

Mais les personnages ne peuvent pas s’attarder : le combat sur la terrasse, et les hurlements de Dill Sendak et des enfants, ont réveillé les prêtres mitis dans le dortoir – Narjeva et Nepuul entendent qu’il y a de l’agitation dans la partie sud du sanctuaire…

 

La terrasse se situe à une bonne douzaine de mètres de hauteur – et redescendre par les escaliers risquerait de prendre du temps. Cependant, la pente de la pyramide n’est pas trop brutale, et la pierre noire et lisse offre une issue tentante – Redhart aussi bien que Narjeva sont très enthousiastes à cette idée ! D’autant que les personnages se retrouveraient ainsi immédiatement face au mur nord du sanctuaire : ils n'auraient alors plus qu’à le franchir, et filer jusqu’à la nef volante d’Orom ! Nepuul et Redhart sont relativement confiants dans leur aptitude à faire décoller l’appareil.

 

L’alchimiste hésite à emporter le crâne du Roi-Sorcier – dont les yeux percés par les ongles de Narjeva se sont entre-temps reconstitués. Mais il y renonce finalement : le poids de la malédiction, qu’il devine, serait trop lourd à porter, dans pareille situation d’urgence ; l’alchimiste sait bien qu’il se trouverait de ses plus habiles confrères, et plus encore de puissants sorciers, pour débourser des sommes folles afin d’acquérir pareil objet… mais ce n’est vraiment pas le moment. Dans un soupir, il laisse là le crâne moqueur...

 

Les héros quittent donc la terrasse en glissant sur la pente de la pyramide ! Une décision grisante, dont ils se tirent bien – même si Liu Jun-Mi et Narjeva y récoltent quelques bleus au passage : rien de bien méchant dans l’absolu, mais le gladiateur était déjà bien abîmé par son combat contre Orom… C’était tout de même le meilleur moyen de regagner en vitesse le plancher des bubalus.

 

Les personnages se retrouvent donc en face de la muraille nord, tandis que des cris proviennent du dortoir plus au sud – et la lumière de torches se devine dans cette direction. Il faut partir au plus vite : Myrkhan lance le grappin par-dessus la muraille, qu’il leur faudra escalader rapidement. Hélas, l’affaire se montre bien vite laborieuse ! Si Redhart parvient à monter sans souci, même avec l’encombrante Dill Sendak, de même que Narjeva puis, plus difficilement, Liu Jun-Mi blessé, Nepuul et Myrkhan échouent quant à eux à plusieurs reprises, et sont toujours à l’intérieur du sanctuaire quand une première vague de cinq prêtres mitis arrivent sur les lieux…

 

Le Zaluti, qui échoue encore à grimper, se résout enfin à saisir sa potion de feu alchimique, prêt à en faire usage sur les arrivants ! Narjeva, sur le rempart, se munit de son arc, mais les prêtres attaquent les premiers – ils blessent l’alchimiste, mais pas l’archer de Tyrus ; ce dernier tente de riposter avec sa hache, mais n’a pas davantage de succès. Voyant comment la situation évolue, Redhart abandonne Dill Sendak ligotée et saute de la muraille à l’intérieur du sanctuaire, sa hache d’abordage de Parsool dirigée contre les assaillants de Nepuul… mais il se réceptionne mal ! L’alchimiste tente le tout pour le tout : criant à ses amis de se reculer (ce qui n’a rien d’évident pour Redhart, dans ces conditions…), il jette sa potion de feu alchimique sur les prêtres : le liquide brûlant se répand dans une gerbe de flammes, sur un rayon de trois mètres… et les Mitis n’en réchappent pas ! Problème : Nepuul lui-même ainsi que Redhart sont eux aussi blessés, et assez sévèrement…

 

Mais ils ont gagné du temps : ils peuvent tous retenter de grimper, avant qu’une deuxième vague de prêtres, qu’ils entendent à distance, les rejoigne. C’est laborieux, mais, en s’aidant autant que possible, tous parviennent enfin à franchir la muraille… De l’autre côté, pour l’heure, ils ne sont pas menacés. Ils courent, autant que possible (car Liu Jun-Mi, Nepuul et Redhart sont assez méchamment blessés), dans la direction du nord, pour rejoindre la clairière où Orom a posé la nef volante qu’il avait empruntée.

 

Une fois monté à bord de l’appareil, Nepuul gagne le poste de pilotage, dont il a compris le fonctionnement – quelques souvenirs lui reviennent, du temps où il avait vu des confrères travailler sur des plans de ces engins commandés par la cité de Satarla. Il a besoin, idéalement, de deux assistants : le passé de marin de Redhart le désigne aussitôt, mais ce dernier fait en sorte de compléter les instructions de l’alchimiste pour Liu Jun-Mi. Redhart confie l’arbalète lourde de la proue à Myrkhan, et Narjeva guette les environs, armée de son arc. Les prêtres approchent, à en croire les bruits qui viennent du sud… Mais, alors qu’ils sont encore à la limite de la clairière, Redhart vainc une pénible difficulté sur une poulie, et donne à Liu Jun-Mi les instructions qui lui permettront de faire de même : la nef décolle, et elle est bientôt hors de portée des flèches des Mitis

 

IV : RETOUR À SATARLA

 

Une fois en sécurité dans les airs, tandis que la nuit les environne, les personnages prennent enfin le temps de respirer un peu et de se remettre de leurs blessures, une fois que Redhart, se repérant aux étoiles, a pu indiquer le sud-ouest, c’est-à-dire la direction de Satarla, à Nepuul. Ce dernier peut alors laisser temporairement le poste de pilotage à un de ses camarades, le temps de soigner les blessés – Liu Jun-Mi en tête, puis Redhart… et enfin lui-même.

 

Le voyage prend quelques heures : les conditions sont bien meilleures qu’à l’aller, et les personnages ne sont pas engagés dans une course-poursuite impliquant un pilotage davantage casse-cou. Nepuul et ses assistants se gardent bien de commettre la moindre imprudence.

 

Dill Sendak reprend peu à peu ses esprits – elle est désespérée… Bien sûr, ses ravisseurs la gardent ligotée : ils se doutent qu’elle ne manquerait pas, autrement, de se jeter par-dessus bord ! Narjeva la fait parler, cependant – en douceur, curieuse de connaître son histoire (et Redhart l’est tout autant, qui aimerait en savoir le plus possible avant de remettre la jeune fille à ses parents ou à son fiancé Tourmar Latia). Le récit de Dill est décousu, mais la prêtresse de Nemmereth en comprend les grandes lignes : elle est effondrée, le rite de mariage avec son bien-aimé Orom n’a pas pu être mené jusqu’à son terme, elle n’a pas reçu la bénédiction de la déesse S’pirr (Narjeva comprend qu’il s’agit du nom de la slorth) ; elle n’a aucune envie d’épouser cet ignoble imbécile « qui pue le bubalus » qu’est Tourmar Latia, elle hait ses parents qui l’ont vendu à ce bouseux pour se réargenter (ce qui inclut son frère KhalamanRedhart lui annonce assez brutalement sa mort, mais elle s’en moque totalement…) ; elle hait tout autant cette bande de mercenaires sans foi ni loi qui a choisi de briser le rêve d’une vie contre monnaie sonnante et trébuchante, brutalisant au passage un peuple qui ne leur avait rien demandé…

 

Mais Narjeva comprend aussi, indirectement car Dill ne se montre pas explicite à ce propos, le fond de l'affaire : S’pirr était devenue folle, à l’époque de l’anéantissement des Rois-Sorciers, en prenant conscience de sa condition de slorth – une espèce purement femelle, qui ne pourrait jamais se reproduire, et ne comprendrait jamais des choses telles que le mariage. Son obsession l’a amenée à endosser un statut divin : s’insinuant dans une vieille pyramide de longue date délaissée, elle a travaillé pendant des siècles les mentalités de la tribu voisine des Mitis, jusqu’à bâtir une religion à sa gloire, qui serait centrée sur les rites du mariage et de la reproduction – d’où le cheminement spirituel marqué de la pyramide reconvertie, mais aussi l’injonction, pour tous les Mitis, de se marier au village et selon le rite du village, soit le rite de S’pirr ; la « déesse » poussait les guerriers de la tribu à chercher voire enlever des femmes issues d’autres peuples pour varier les cérémonies, d’où les origines ethniques très diverses constatées par Myrkhan quand il avait espionné le village ; mais si la slorth vivait ainsi l’amour par procuration, elle était tout autant avide d’une maternité qu’elle ne pourrait jamais connaître pour elle-même, et s’accaparait aussi tous les enfants du village jusqu’à l’âge de dix ans environ – et c’est bien pour cela que « ses » enfants étaient confinés dans le sanctuaire.

 

Les héros (?) arrivent enfin au « Joyau de la Lémurie », Redhart disposant un drapeau blanc à la proue pour ne pas inquiéter les autres nefs volantes. Nepuul dirige l’appareil vers la résidence des Sendak, où il se pose. Les Sendak accourent aussitôt, et c’est Redhart, bonhomme franc du collier au point parfois de la naïveté et en tout cas de l'indélicatesse, qui leur dresse un rapport sans complaisance ; leur fille « est complètement zinzin », elle veut se tuer, oh, et Khalaman Sendak est mort, aussi, etc. Les Sendak le prennent de haut, et la mort de leur fils les affecte visiblement, mais les personnages leur rendant la garde de son épée, et Nepuul ayant bien noté l’emplacement de sa tombe de fortune destinée à le protéger des charognards, les nobles ne peuvent finalement par leur reprocher grand-chose, et, s’ils ne vont pas tout à fait jusqu’à les remercier, du moins ne leur causeront-ils pas d’ennuis.

 

Du côté de Tourmar Latia, l’accueil est bien plus enthousiaste : le riche commerçant se moque du sort de Khalaman Sendak ou de ces sauvages dont il n’a que faire, la seule chose qui importe est qu’on lui a ramenée sa fiancée – le mariage aura bien lieu, et tant pis si cela ne sied pas à la jeune fille ! De toute façon, il ne cherchera pas à s’en faire aimer, pour lui ça n’est jamais qu’un moyen tant attendu de sortir de sa roture… Dès lors, Tourmar Latia ne reviendra pas sur sa promesse : en bon homme d’affaires, fidèle à sa parole, il fait amener une gigantesque balance, dans laquelle il installe littéralement Dill Sendak – déterminant son poids en ajoutant minutieusement pièces d’or, pierres précieuses et autres biens de valeurs dans l’autre plateau, en écho mesquin de la salle du premier étage de la pyramide… Les personnages quittent sa propriété avec une fortune impressionnante !

 

V : DÉPENSER LE BUTIN !

 

… Mais il n’en restera comme de juste à peu près rien quand ils débuteront leur prochaine aventure. C’est ainsi que font les héros qui arpentent la Lémurie : ils ne sont que rarement du genre à capitaliser… Comment dépensent-ils donc leur butin ?

 

Nepuul Qomrax échange l’intégralité de son salaire contre des composants alchimiques rares, qu’il achète auprès d’aventuriers parfois commissionnés par ses soins ; son laboratoire de Satarla se remplit ainsi de dizaines, de centaines d’ingrédients étranges : l’alchimiste n’a aucune idée de ce qu’il va en faire pour l’heure, mais est tout de même très satisfait de sa frénésie d’achats – il en fera forcément quelque chose un jour ou l’autre… Et il réfléchit, notamment, à faire une arme à partir de la corne d’elasmotherium qu’il a ramenée des Plaines de Klaar.

 

Redhart Finken rentre à Parsool, et commence par se livrer à des dépenses somptuaires ; puis il engloutit beaucoup d’argent dans des beuveries épiques, ou en dons aux membres de sa famille. L’essentiel, cependant, il l’investit dans une affaire que lui suggère un de ses six frères – le plus roué... et qui va le rouler, même si Redhart ne s’en rend pas encore compte : son frère lui fait miroiter de magnifiques opportunités de commerce, impliquant d’affréter un très dispendieux navire ; c’est chose faite… mais le bateau disparaît bien vite au large, et Redhart commence à s’étonner de ce qu’il ne revienne toujours pas, avec tous les trésors promis ; un contretemps, sans doute…

 

Myrkhan est retourné à Tyrus. Il entend se poser en protecteur des gamins de rues, lui qui en était encore un il n’y a pas si longtemps. Prisant maintenant la discipline, depuis son passage dans l'armée de la cité, il entend élever ces petites canailles pour en faire des soldats efficaces – mais si les enfants acceptent volontiers ses dons, ils n’ont aucune intention de satisfaire ses ambitions ; bien au contraire, la protection de Myrkhan leur paraît un gage d’impunité, et ils chapardent plus que jamais – les commerçants dépossédés sont ravis d’avoir quelqu’un à qui adresser la facture, et Myrkhan perd bien vite tout son butin… Voire un peu plus : il doit quitter précipitamment Tyrus quand il n’est plus en mesure d’honorer les dettes des gamins de la ville !

 

Liu Jun-Mi prend quelques vacances… puis décide de se procurer un ours : peut-être se montrera-t-il plus utile que ces satanés et capricieux yi qi !

 

Narjeva, enfin, ne prise pas plus que cela l’argent. Elle fait un don très conséquent au culte de Nemmereth, notamment dans sa ville natale d’Urceb – elle en attend une certaine reconnaissance en contrepartie. Elle se livre bien à quelques emplettes pour améliorer son matériel d’assassin… Mais, surtout, elle tend à ruminer ses mauvaises expériences dans les Plaines de Klaar ; dans un geste futile, elle finance une petite expédition de chasseurs pour lui ramener des peaux de crocators – elle s’en ferait bien un sac et des bottes…

 

Le scénario Mariage amer s’achève ici. Mais les aventures de nos héros se poursuivront dans un autre scénario, très probablement officiel, que je n'ai pas encore choisi (j'ai plusieurs pistes).

 

Et donc : à suivre…

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Comment parler à un alien ? de Frédéric Landragin

Publié le par Nébal

Comment parler à un alien ? de Frédéric Landragin

LANDRAGIN (Frédéric), Comment parler à un alien ? Langage et linguistique dans la science-fiction, Saint Mammès, Le Bélial’, coll. Parallaxe, 2018, 262 p.

Dans la revue Bifrost, la rubrique « Scientifiction », animée depuis… longtemps par Roland Lehoucq, astrophysicien et plus récemment Big Boss des Utopiales, vise à dresser des passerelles entre science et science-fiction, dans une entreprise salutaire et en tout cas très instructive pour le lecteur moyen – une entreprise éventuellement prolongée en dehors des seules pages de Bifrost, avec des livres comme Faire des sciences avec Star Wars. S’il s’agit probablement de vulgarisation, dans l’ensemble, les thèmes explorés, aussi passionnants soient-ils, débordant plus qu’à leur tour de sense of wonder (car « expliquer » tel roman ou tel film au prisme de la science ne revient en rien à le désenchanter – bien au contraire, parfois), peuvent cependant demeurer hermétiques pour ledit lecteur moyen, ou du moins est-ce le cas pour le lecteur moyen Nébal, régulièrement largué dans tous tyeu-les machins scientifiques, là… O l’est que j’faisions au mieux dans les sciences mol’, moué…

 

Or les Éditions du Bélial’ viennent de lancer une nouvelle collection, « Parallaxe », dédiée à des essais de vulgarisation scientifique de cet ordre. La collection est forcément placée sous le patronage de Roland Lehoucq, par ailleurs co-auteur avec le paléontologue Jean-Sébastien Steyer d’un de ses deux volumes inauguraux, La Science fait son cinéma (émanation directe, pour autant que je sache, de la rubrique « Scientifiction »). Je ne m’y suis pas risqué, même si je suis certain de la qualité et de la pertinence de cet ouvrage ; mais j’étais très intéressé par l’autre titre inaugural, dans une optique de sciences humaines et sociales : Comment parler à un alien ? Langage et linguistique dans la science-fiction – dû au linguiste Frédéric Landragin. Et qu’importe si je ne m’y connaissais pas beaucoup plus en linguistique qu’en astrophysique ou en chimie : le sujet m’attirait vraiment, et me paraissait, à tort ou à raison, plus abordable au regard de mon bagage.

 

Le titre de cet essai évoque d’emblée au lecteur bien des romans ou nouvelles, bien des films aussi, qui jouent du thème fascinant du premier contact – où la question centrale de la communication implique d’avoir recours aux outils scientifiques de la linguistique, outils que manient les auteurs, parfois (souvent) en connaissance de cause, parfois sans bien s’en rendre compte, peut-être – à la Monsieur Jourdain. Pour m’en tenir à quelques exemples que j’ai lus ou vus, Solaris de Stanislas Lem (et ses adaptations par Andreï Tarkovski et Steven Soderbergh), Le Moineau de Dieu de Mary Doria Russell, « L’Histoire de ta vie » de Ted Chiang (et son adaptation par Denis Villeneuve sous le titre Premier Contact), Rencontres du troisième type de Steven Spielberg… Cependant, cette problématique est loin d’être la seule étudiée dans cet essai, qui aborde au moins autant des œuvres un peu différentes, où la linguistique fournit un substrat essentiel au récit, fond et forme, sans qu’il soit nécessaire de faire intervenir la figure de la rencontre avec des aliens – ce qui peut inclure aussi bien 1984 de George Orwell ou Orange mécanique d’Anthony Burgess (et son adaptation par Stanley Kubrick) que Les Langages de Pao de Jack Vance, voire, si on s’éloigne un peu du seul champ de la science-fiction au sens strict, la majeure partie du corpus tolkiénien, carrément émané des inventions linguistiques (ou peut-être plus exactement philologiques) de l’auteur, ce qui en fait une passerelle de choix pour traiter de la question des langues artificielles (voire de fausses langues naturelles ?), en fiction et hors fiction.

 

La problématique de cet ouvrage est donc plus vaste qu’il n’y paraît – d’autant plus, en fait, que, si le lien avec des œuvres précises de science-fiction (et éventuellement, sous-genre certes assez rare dans sa forme la plus pure, de « linguistique-fiction ») est permanent, Comment parler à un alien ? implique en même temps d'intégrer le b.a.-ba de la discipline, si j'ose dire, les fondations indispensables à la compréhension du reste.

 

Ceci étant, Frédéric Landragin nous immerge immédiatement dans le thème, en consacrant l’essentiel du premier chapitre (après quelques définitions indispensables) au roman de Ian Watson L’Enchâssement – dont le titre même renvoie à un procédé linguistique riche de dérivations science-fictives intéressantes ; bon sang, cela fait des années que je dis qu’il faut que je le lise, celui-ci… En fait, à ce que j’ai cru comprendre, ce premier chapitre repose pour une bonne part sur une postface que Frédéric Landragin avait composé pour la réédition de ce roman aux Editions du Bélial’. Quoi qu’il en soit, cette étude permet d’envisager certains traitements courants des thématiques linguistiques dans la science-fiction : l’hypothèse de Sapir-Whorf, tout spécialement, qui postule en gros que les catégories linguistiques déterminent les représentations mentales (ou, autrement dit, que la langue que l'on parle influe sur la représentation du monde que l'on se fait), a été beaucoup travaillée par la science-fiction (ainsi, pour reprendre les exemples cités, dans 1984, Les Langages de Pao, « L’Histoire de ta vie » et Premier Contact), même si, aujourd’hui, elle paraît à peu près unanimement infondée aux linguistes – mais on peut aussi parler des théories très influentes de Noam Chomsky, par exemple ; si la SF est un laboratoire, il n’y a au fond rien de surprenant à ce qu’elle soit portée à extrapoler les conséquences les plus extrêmes des hypothèses scientifiques – c’en est un procédé essentiel, même.

 

Maintenant, l’étude de la linguistique en science-fiction, ce dont le « premier contact » n’est qu’un aspect, certes particulièrement visible voire envahissant, implique d’abord d’appréhender comment les langues vivent, évoluent, meurent le cas échéant. Dès lors, les deux chapitres suivants sont consacrés (même si, là encore, il y a toujours un lien avec telle ou telle œuvre de science-fiction), d’abord aux langues naturelles, ensuite aux langues artificielles. Dans le premier cas, s’il faut seulement les distinguer, c’est l’occasion d’envisager comment les langues naissent, quelles sont leurs structures, mais aussi comment elles ont évolué et pourraient évoluer encore – quoi qu’en pensent les conservateurs prompts à prophétiser la fin du monde si on se met à écrire « nénufar » au lieu de « nénuphar », ou les Superdupont académiques qui brandissent haut le mot-dièse contre les pollutions anglicisantes, sans même parler des guerres de tranchées de la féminisation des professions ou de l’écriture inclusive.

 

(Ne fais pas trop le malin, Nébal, toi qui es incapable d’écrire « évènement », qui ne portes pas exactement dans ton cœur la start-up nation qui se disrupte, et qui trouves l’écriture inclusive « quand même un peu moche » alors que ce n’est vraiment pas le propos…)

 

L’étude des langues artificielles, quant à elle, porte notamment sur leurs raisons d’être, souvent idéologiques – ce qui tient autant, par exemple, au souhait d’une langue internationale facilitant la communication, la compréhension et la paix, qu’à la conviction d’ordre philosophique de la prééminence absolue de la logique et de son caractère universel. C’est tout à fait passionnant dans absolument tous les cas – y compris quand l’analyse se prolonge au regard de spécificités de la science-fiction, sense of wonder, sense of reading et novum.

 

On passe ensuite à l’étude des éléments constitutifs d’une langue. Ce chapitre est probablement le plus technique de l’essai – ou du moins ai-je eu ce sentiment –, mais Frédéric Landragin l’a conçu astucieusement de sorte qu’il ne soit jamais indigeste. Pour ce faire, il a choisi une œuvre « principale » destinée à illustrer chaque notion (d’autres œuvres pouvant soutenir le discours à l’arrière-plan) : par exemple, l’étude de la phonétique se fait au travers d’Épépé de Ferenc Karinthy, tandis que celle de la prosodie passe par 2001 l’odyssée de l’espace (peut-être plutôt le film de Stanley Kubrick que le roman d’Arthur C. Clarke, pour le coup)... et Yoda la syntaxe explique (forcément). Ces choix s’avèrent très pertinents, et la technicité du chapitre n’est donc pas le moins du monde un frein pour le lecteur.

 

Ce n’est qu’alors, en fin de volume du coup, que l’on peut vraiment aborder la question titre : Comment parler à un alien ? Les exemples science-fictifs abondent, comme dans chaque chapitre, mais deux œuvres qui ont servi de fil rouge, et presque de prétexte (plus encore que L’Enchâssement ?), à l’ensemble de l’essai, s’avèrent ici plus que jamais essentielles : la fabuleuse nouvelle de Ted Chiang « L’Histoire de ta vie », et le film de Denis Villeneuve Premier Contact, qui s’en est inspiré (et qui est beaucoup, beaucoup moins subtil et bluffant, néanmoins plutôt réussi dans son genre). Et, disons-le, si tout ce qui précède est passionnant, cette étude approfondie et érudite du « premier contact » relève du fantasme le plus orgasmique pour tout lecteur de SF. Toutes les difficultés sont examinées, et nombre d’entre elles sont colossales – l’absence de lexique, ainsi que de référents culturels, la possibilité d’une physionomie différente qui pourrait avoir son impact notamment sur la gestuelle, l’éventualité d’une communication non verbale mais qui pourrait emprunter plutôt, par exemple, les odeurs ou même les champs magnétiques, la nécessité pas moins ardue de mettre en place une communication minimale à base de « oui » et de « non » (et, bon sang, comment exprimer les notions les plus abstraites ?!), sans même parler des innombrables confusions qu’un échange mal assuré pourrait susciter (« Gavagai ! »), avec le risque que ces confusions puissent entraîner des conséquences… aheum… « diplomatiques » ? À vrai dire, de tous les scénarios exposés, ceux où l’incompréhension demeure totale, en dépit de bien des efforts, peuvent paraître les plus crédibles – Stanislas Lem semble s’en être fait une spécialité, au-delà du seul Solaris qui en est probablement la plus fameuse illustration…

 

Pourtant le rêve demeure – et l’enthousiasme. En fait, c’est une chose que j’ai particulièrement appréciée dans cette lecture : Frédéric Landragin fait preuve d’une passion débordante, pour la science comme pour la science-fiction, et qui se montre irrésistiblement communicative. C’est aussi en cela que ce Comment parler à un alien ? est une vraie réussite – au-delà de sa dimension déjà appréciable de vulgarisation solidement étayée d’exemples science-fictifs pour la plupart accessibles et qui font vraiment envie.

 

Je vous recommande donc chaudement ce titre inaugural de la collection Parallaxe – et ai hâte d’en découvrir de futurs volumes, tout particulièrement (parce que moi) dans les domaines des sciences humaines et sociales, parfois un peu le parent pauvre de la SF. Et ceci sans douter le moins du monde de la qualité des publications davantage tournées vers les sciences dites « dures ». Vraiment une très belle initiative !

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CR Barbarians of Lemuria : Mariage amer (02)

Publié le par Nébal

CR Barbarians of Lemuria : Mariage amer (02)

Deuxième séance du scénario Mariage amer, pour Barbarians of Lemuria. Il est dû à Andrea Salvatores, et figure dans le supplément Chroniques lémuriennes, pp. 58-75.

 

Vous trouverez la première séance ici.

 

L’illustration en tête d’article provient de ce scénario (p. 68), et est due (forcément) à Emmanuel Roudier. Note au passage : contrairement à mes précédents comptes rendus de parties, celui-ci ne sera pas illustré au-delà – pour la simple raison que la quasi-totalité du matériel iconographique que j’ai employé pour cette partie sur Roll20 provient de Barbarians of Lemuria et de Chroniques lémuriennes, et très peu de tout cela a été mis en ligne par l’éditeur. Je suppose que piller les illustrations d’Emmanuel Roudier et les mettre en ligne sans plus de précautions ne rendrait service ni à l’artiste, ni à l’éditeur, alors on va faire dans le sobre… Bref : achetez ces deux bouquins, ils font de toute façon plus que le mériter.

 

Voici l’enregistrement de ce deuxième compte rendu :

Voici également, pour ceux que cela intéresserait, l’enregistrement brut de cette deuxième séance (on dit « actual play » ?) :

Au passage, j'ai utilisé, en guise d'illustration sonore, diverses musiques dont je n'ai comme de juste pas les droits, qui demeurent à leurs propriétaires respectifs. Durant cette séance, j’ai surtout fait appel à la bande originale du film de Mel Gibson Apocalypto, composée par James Horner ; d’autres éléments ont été empruntés à la bande originale du jeu vidéo The Elder Scrolls V : Skyrim ; et peut-être quelques autres trucs ici ou là (en réservant l’immortelle bande originale de Conan le Barbare de John Milius par Basil Poledouris pour la préparation de la partie et son debrief…).

 

Il y avait cinq joueurs, qui incarnaient Liu Jun-Mi, un Ghataï d’ascendance xi lu (Barbare 0 – Mercenaire 1 – Dresseur 1 – Gladiateur 2) ; Myrkhan, originaire de Tyrus (Gamin des rues 1 – Chasseur 2 – Forgeron 0 – Soldat archer 1) ; Narjeva, originaire d’Urceb (Esclave 0 – Courtisane 1 – Assassin 2 – Prêtresse de Nemmereth 1) ; Nepuul Qomrax, originaire de Zalut (Scribe 2 – Alchimiste 3 – Marchand 0 – Médecin 1) ; et enfin Redhart Finken, de Parsool (Docker 0 – Matelot 1 – Mercenaire 3 – Marchand 0).

 

I : L’ADIEU AUX NOMADES BLEUS

 

Les héros passent la nuit dans le camp des céruléens. Ils discutent longuement avec un Toll très affable, car ils veulent en savoir le plus possible sur les Mitis – même si les connaissances du chaman en la matière demeurent limitées : il n’a jamais approché le village, désireux de ne pas susciter l’ire de cette tribu très agressive ; il sait cependant que ce village se situe à l’orée de la Jungle de Qush, non loin des rives du fleuve Oom, et qu'il est entouré d’une palissade en bambou – le sanctuaire n’est pas très loin, l’œuvre d’une mystérieuse civilisation antique, mais Toll n’en a jamais vu que le sommet de la pyramide de pierre noire lisse qui jaillit de la canopée, à une quinzaine de mètres de hauteur ; il n’est bien sûr jamais entré à l’intérieur du sanctuaire, les Mitis l’interdisant à quiconque n’est pas de leur tribu – par ailleurs, les guerriers saoulés à la liqueur de férocine ne sont pas du genre à parlementer d’une manière ou d’une autre, et il est à craindre qu’ils attaquent à vue...

 

Les personnages négocient en même temps avec Toll, qui, en bon céruléen, est aussi marchand que chaman. Redhart Finken s’attache à préparer le matériel générique pour leur expédition – incluant vingt mètres de corde, un grappin, de l’étoupe, de l’huile…

 

Nepuul Qomrax quant à lui s’intéresse aux potions alchimiques que le chaman lui propose à la vente – il s’étonne d’ailleurs de ce que le céruléen dispose de semblables objets, car les nomades bleus sont en principe aussi réfractaires à l’alchimie qu’à la sorcellerie. Quoi qu’il en soit, le Zaluti finit par acquérir une fiole de feu alchimique, dont il suppose qu’elle pourrait s’avérer utile face aux Mitis récalcitrants ; décidément, l’idée de tout brûler semble les séduire !

 

Au petit matin, les personnages font leurs adieux à Toll et aux siens, et prennent la direction de l’ouest, suivant les indications du chaman.

 

II : LA TRAVERSÉE DE L’OOM

 

Il leur faut moins d’une demi-journée de marche pour atteindre les rives du fleuve Oom, tandis que les Plaines de Klaar autour d’eux se font progressivement plus vertes, voire marécageuses par endroits. Le chaman les ayant bien renseignés, ils trouvent assez rapidement le sommet de la pyramide noire qui indique leur destination, et que Nepuul Qomrax perçoit bien pour ce qu’elle est : une construction de la plus haute antiquité, peut-être même antérieure aux Rois-Sorciers… Se sachant en territoire ennemi, ils se montrent aussi discrets que possible ; Redhart Finken, tout particulièrement, insiste sur ce point : « Plus personne ne pète ! »

 

Reste à traverser le fleuve : à cet endroit, il fait dans les trente mètres de large, et, sans être torrentiel, le courant est relativement fort. Traverser à la nage est une option réaliste, mais qui n’enchante pas les personnages – Narjeva, tout particulièrement, n’a aucune envie de se mouiller… et si la fille de la ville se montre moins systématiquement nerveuse ici que dans l’environnement intimidant des Plaines de Klaar s’étendant à perte de vue, elle n’est tout de même pas très à l’aise.

 

Il y a quelques arbres de leur côté du fleuve ; construire une sorte de radeau devrait être possible – cependant, même avec le savoir théorique de Nepuul Qomrax et le passé aussi bien de matelot que de docker de Redhart, sans même parler des muscles de Liu Jun-Mi, la tâche s’avère plus compliquée qu’ils ne le pensaient, et prend du temps.

 

Aussi, en attendant, Myrkhan part-il en repérage vers l’amont, accompagné de Narjeva. Le chasseur espère trouver un gué, mais nulle trace… Au bout d’un moment, pourtant [dépense d’un point d’héroïsme : coup de chance], il repère enfin un passage où le fleuve est un peu plus étroit, et où quelques récifs ou petits îlots affleurent, qui devraient leur permettre de procéder par étapes – il doute de trouver mieux sans s’éloigner considérablement de leur objectif. Il va chercher ses compagnons, pour qu'ils traversent ensemble le fleuve Oom à cet endroit ; les travaux de l’embarcation reprennent sur place, plus efficaces, Redhart confectionnant même une sorte de « bouclier » destiné à les protéger d’éventuelles flèches mitis pendant la traversée…

 

Cependant, Myrkhan faisant le guet remarque une chose qui lui avait échappé tandis qu’il faisait du repérage : les trois troncs d’arbre qui flottent à proximité… s’avèrent être en réalité des crocators ; ces sortes de gros crocodiles peuvent être très dangereux dans l’eau, s’ils sont beaucoup moins menaçants, car bien moins agiles, sur la terre ferme. Et les animaux les guettent, visiblement...

 

Liu Jun-Mi propose de les attirer ailleurs en leur offrant de la viande d’elasmotherium. Las, le dresseur ghataï joue de malchance, une fois de plus… et les crocators semblent davantage intéressés par sa chair dodue et bien vivante ! Les reptiles nagent dans sa direction, et le premier d’entre eux monte sur la berge tandis que Liu Jun-Mi se recule : s’il faut se battre, ce sera sur la terre ferme !

 

Myrkhan, Redhart et Narjeva surveillaient de toute façon la situation, prêts à intervenir avec leurs armes à distance. Les premiers temps du combat ne sont pas à l’avantage des personnages, qui manquent de réussite – et le premier crocator amoche assez sévèrement Liu Jun-Mi, tandis qu’un deuxième s’en prend bientôt à Narjeva. Cependant, le dresseur et gladiateur ghataï maîtrise de sa seule force les reptiles l’un après l’autre, les empêchant d’ouvrir leurs mâchoires, et surtout exposant aux attaques de ses camarades le ventre de ces créatures, moins résistant que le reste de leur corps – Redhart et Myrkhan l’y encourageant. À force, les héros parviennent ainsi à se débarrasser de cette menace en relativement bonne condition – Narjeva notamment a fait la démonstration de ses talents… même si elle a souffert d’une vilaine morsure au passage ; Nepuul avait tout d’abord bien pris soin de rester à l’écart du combat, mais il a fini par se rapprocher pour stabiliser l’état de la prêtresse de Nemmereth tandis que leurs camarades achevaient les crocators – et, à la fin du combat, il prodigue des soins à qui en a encore besoin.

 

Débarrassés des crocators, les personnages peuvent enfin traverser le fleuve Oom à cet endroit, en s’aidant de leurs cordes, des récifs, et d’une petite embarcation improvisée : tandis que Myrkhan ouvre le passage en maniant le grappin, Redhart manœuvre le radeau avec une perche, Liu Jun-Mi les protégeant à l’aide du « bouclier » conçu par le mercenaire de Parsool. Nepuul est très mal à l’aise tout du long… Mais ils gagnent ainsi la rive ouest, et pénètrent tout juste la Jungle de Qush qui débute aussitôt ; le fleuve constitue décidément une frontière entre deux mondes très différents. Ils sont en milieu d’après-midi, et la canopée obscurcit déjà leur environnement…

 

III : REPÉRAGE ENTRE CHIEN ET LOUP

 

En restant à couvert, les personnages longent le fleuve Oom vers le sud – là où se trouve le village des Mitis et le sanctuaire qui seul peut leur servir de point de repère. Progressant prudemment, et en restant groupés, même si Myrkhan passe un peu en avant, jouant l’éclaireur, ils finissent par arriver dans une clairière… où ils trouvent la nef volante « empruntée » par Orom, en parfait état. Nepuul pense savoir comment manœuvrer l’engin, avec l’assistance de Redhart, mais ils verront cela plus tard – cela pourrait leur faire une bonne porte de sortie, une fois Dill Sendak récupérée…

 

Quoi qu’il en soit, pour l’heure, depuis la clairière, ils peuvent avoir un aperçu, un peu plus au sud, d’abord du sanctuaire où se trouve la pyramide (et, découvrent-ils, au moins une autre plus petite), complexe entouré d’une muraille de pierre de trois mètres de hauteur environ, puis quelques 200 ou 300 m au sud-est, le village des Mitis, entouré d’une palissade en bambou d’environ deux mètres de hauteur ; la végétation est assez dense alentour.

 

Ce n’est qu’un aperçu général – il faut effectuer un repérage plus précis : pour situer d’éventuels gardes, pour localiser Dill Sendak, pour trouver un endroit où faire diversion, éventuellement au travers d'un incendie… Narjeva et Myrkhan sont les plus qualifiés pour ce faire – mais la prêtresse de Nemmereth, en fille de la ville, n’est pas au mieux de ses capacités dans la Jungle de Qush ; elle laisse pour l’heure l’archer de Tyrus s’approcher discrètement du village des Mitis.

 

Myrkhan longe donc le sanctuaire par l’ouest – et est surpris d’entendre, à l’intérieur, des cris d’enfants en train de jouer. Il s’arrête à l’angle sud-ouest, et constate que deux guerriers gardent l’unique entrée du sanctuaire, qui donne sur le sud ; d’ici, il relève que le village de même n’a qu’une seule porte, orientée au nord-est, en direction d’une anse du fleuve Oom où les Mitis laissent les embarcations qui leur permettent de traverser le cours d'eau ; un troisième guerrier y est posté, qui jette en même temps un œil sur ce petit « port ».

 

L’archer revient faire son rapport à ses camarades – mais ils n’en savent pas encore assez ; il repart presque aussitôt pour jeter un œil au village des Mitis – rien à voir avec l’architecture monumentale en pierre noire du sanctuaire, c’est un environnement bien plus primitif, avec des huttes en bois et en torchis, qu’il est possible d’observer au travers de fentes dans la palissade de bambou. De nombreuses femmes (Myrkhan constate, sans trop savoir qu’en dire, qu’elles sont toutes de types ethniques très différents), des vieillards (dont un prêtre, à en juger par sa mise, une sorte de robe ornée de symboles serpentins), et quelques rares « adolescents » (mais ni enfants en bas âge, ni guerriers), tous ensemble, s’affairent sur la place centrale, autour d’un grand chaudron – Nepuul en déduira qu’ils sont en train de préparer de la liqueur de férocine. Myrkhan a pu observer une bonne cinquantaine de villageois – soit, à en croire les estimations de Toll, peut-être la moitié de la population miti. Il est tentant d’en conclure que la plupart des guerriers sont partis en maraude – le chaman céruléen avait dit que c’était souvent le cas ; coup de chance, il y aurait donc très peu de guerriers dans le secteur à ce moment précis.

 

Il faut maintenant avoir un aperçu de l’intérieur du sanctuaire – où les cris d’enfants se font moins nombreux à mesure que le soleil baisse à l’horizon. C’est Narjeva, prenant sur elle, qui se charge de ce repérage. Elle escalade sans l’ombre d’une difficulté la muraille, restant très discrète. Arrivée en haut de la fortification sur le flanc ouest, elle constate que le sanctuaire abrite quatre bâtiments : il y a tout d’abord la grande pyramide, bien sûr, avec sa terrasse au nord, près du sommet, et son entrée au sud, qui n’est pas gardée. Ensuite, il y a effectivement une deuxième pyramide, plus petite, dans le coin sud-ouest – celle-ci a une porte qui donne au nord, et qui est gardée par deux guerriers, cette fois (armés d’un arc court et d’une lance). Au coin sud-est se trouve un bâtiment bien moins imposant, et plus rudimentaire, en bois et torchis – sans doute une sorte de dortoir ? Quoi qu’il en soit, quelques prêtres s’occupent de rassembler les enfants encore en train de jouer à l’extérieur pour les guider dans cet habitat (la nuit est alors tombée) ; à sa porte se trouve un troisième garde. Enfin, le long de la muraille au nord-ouest, soit là où Narjeva a grimpé, il y a une sorte de grande halle couverte en bois, qui évoque tant de lieux de réunion ou de marchés à travers la Lémurie – il n’y a absolument personne à cet endroit. Le toit, plat, est à peu près au même niveau que la muraille, et guère éloigné ; Narjeva peut donc aisément sauter dessus sans révéler sa présence – elle constate que la même chose serait possible pour ce qui est du dortoir à l’autre bout du sanctuaire. Mais elle ne va pas risquer sa chance pour rien – elle retourne bien vite auprès de ses camarades, sans attirer l’attention.

 

Les personnages sont indécis – sur la situation exacte, sur leurs possibilités d’action (faire une diversion par un incendie, etc.), et, peut-être surtout ? sur la localisation de Dill Sendak : Redhart penche d’abord pour le dortoir : il évoque des souvenirs d’une tribu qu’il avait rencontré en tant que mercenaire, et qui considérait les enfants et les filles non mariées ensemble et comme « impurs » ; mais, à la réflexion, il parie en définitive « cent pièces d’or » sur la petite pyramide, laquelle est gardée, à la différence de la grande… Ils en discutent longuement, à l’écart du sanctuaire et du village des Mitis. Il leur manque encore trop de données…

 

Ils finissent par décider de patienter un peu, que les guerriers succombent à la fatigue, puis de capturer l'un des gardes devant le sanctuaire pour l’interroger – ce qui impliquera de tuer son compère très vite, afin de ne pas sonner l’alarme : les trois gardes à l’intérieur ne doivent rien en savoir, et pas davantage les villageois, bien sûr.

 

Narjeva s’approche furtivement, en longeant la muraille du sanctuaire – de toute évidence, les gardes sont effectivement somnolents, et ne se rendent compte de rien. Arrivée à proximité, l’assassin maîtrise aisément et assomme le guerrier le plus proche ; l’autre réagit un peu lentement, ce qui laisse le temps nécessaire à Myrkhan pour l’abattre d’une unique flèche empoisonnée. Redhart, à la suggestion de Nepuul, s’occupe de camoufler le cadavre, tandis que les autres ramènent leur prisonnier sous le couvert des arbres, où ils le ligotent et le bâillonnent.

 

Une petite dizaine de minutes s’écoule, et le guerrier capturé commence à reprendre ses esprits. Il se trémousse pour essayer de se libérer, en vain. Redhart appuie sa dague contre la gorge du prisonnier ; en appuyant de gestes ses paroles, il interroge ce dernier sur la localisation de « la fille » (Nepuul précise le nom de Dill Sendak, « qui est arrivée dans une nef volante ») : est-elle dans la pyramide, oui ou non ? Qu’il réponde en hochant la tête. Le prisonnier récalcitrant se débat sans répondre, et le mercenaire lui taille une narine, reprenant ses questions ; la douleur ne calme pas le guerrier fanatique et hyper agressif, qui continue de se débattre et tente même de donner un furieux coup de tête à son tortionnaire. À force cependant, le guerrier, involontairement sans doute, se met de plus en plus souvent à fixer des yeux la grande pyramide, par réflexe... N’espérant pas en apprendre quoi que ce soit de plus, Redhart tranche la gorge du Miti. La grande pyramide, donc…

 

IV : PÉNÉTRER DANS LE SANCTUAIRE

 

Il faut pénétrer dans le sanctuaire – où au moins trois autres gardes sont de faction. L’idée d’une diversion (a fortiori dans le village) est discutée, mais finalement abandonnée : autant jouer sur la discrétion, Narjeva et Myrkhan ayant fait la démonstration de leurs talents. Redhart se charge de définir le plan d’action : l’archer attaquera depuis les toits, l’assassin complètera au sol avec ses attaques sournoises – si cela ne suffit pas, les combattants les plus vigoureux, soit Redhart et Liu Jun-Mi, prendront les survivants à revers depuis la porte du sanctuaire ; Nepuul Qomrax, non-combattant, restera pour l’heure en arrière. Ils ne déclencheront un incendie qu’en dernier recours – si l’infiltration échoue et que la panique peut les aider.

 

Myrkhan gagne sa position en hauteur – au niveau du dortoir ; il saute sur le toit sans attirer l’attention du garde en dessous de lui, qui est visiblement somnolent. Narjeva progresse furtivement, s’approche de ce garde en toute discrétion, et l’élimine sans plus de difficultés en lui tranchant la gorge – il n’a pas eu le temps de réagir de quelque manière que ce soit. Reste les deux gardes devant la petite pyramide ; le passage étant ouvert, Redhart, Liu Jun-Mi et Nepuul entrent dans le sanctuaire par la porte, et contournent le bâtiment en longeant la muraille sud, tandis que l’assassin, sur une bonne série, traverse la place dans l’angle mort des gardes – elle jaillit sur le premier des guerriers mitis et l’élimine aussitôt ! Son camarade est surpris, mais se prépare aussitôt à riposter ; avant toutefois qu’il ne puisse crier, Redhart, passé derrière lui, lui assène un violent coup de hache dans le dos. Les gardes situés à l’extérieur du bâtiment sont tous morts, peut-être y en a-t-il encore dans une des pyramides ou dans le dortoir, mais nul ne réagit – il n’y a pas un bruit.

 

Le guerrier capturé semblait désigner la grande pyramide – mais Redhart tend à croire que, s’il y avait des gardes devant la petite pyramide, eh bien, c’est qu’il fallait y garder quelque chose… Narjeva est d’un avis similaire, et ils choisissent donc d’y jeter un œil. À l’intérieur, l’odeur est insoutenable, et l’obscurité est totale – l’assassin se munit d’une torche… qui révèle aussitôt, juste devant ses pieds, une grande fosse, assez profonde, envahie par des centaines, peut-être des milliers, de serpents – dont un de proportions parfaitement colossales ! Par chance, il dort… et les héros décident de ne pas s’attarder dans cet endroit sordide.

 

Les regards se tournent maintenant vers la grande pyramide. Tous sont convaincus, désormais, que c’est à l’intérieur de ce bâtiment colossal en pierre noire, d’une antiquité inquiétante, que se trouve Dill Sendak.

 

À suivre…

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Daredevil (saison 3)

Publié le par Nébal

Daredevil (saison 3)

Marvel’s Daredevil, saison 3 (treize épisodes), 2018

 

Acteurs principaux : Charlie Cox (Matt Murdock), Vincent D’Onofrio (Wilson Fisk), Deborah Ann Woll (Karen Page), Elden Henson (Foggy Nelson), Wilson Bethel (Benjamin Poindexter), Jay Ali (Ray Nadeem), Joanne Whalley (sœur Maggie)…

Un fâcheux hasard du calendrier a fait que j’ai achevé de regarder cette troisième saison de Daredevil hier soir – et je n’ai appris la mort de Stan Lee qu’après avoir vu le dernier épisode. Stan Lee, bien sûr, était le co-créateur du personnage de Daredevil (avec le dessinateur Bill Everett), comme il a été le co-créateur d’un nombre sidérant de super-héros et de super-vilains dans le contexte de l’univers Marvel. Le bonhomme a beaucoup compté, et mérite bien qu’on lui rende hommage – alors, comme de juste : Excelsior !

 

Maintenant, parlons donc de cette troisième saison de Daredevil – et la précaution habituelle s’impose : c’est une série, il y aura très probablement des SPOILERS dans cet article, même si je vais essayer de ne pas trop en faire non plus – méfiance quand même…

 

Adonc, Daredevil : clairement la meilleure, et de loin, des séries Marvel/Netflix, sur la base d’un univers partagé restreint très « street level », qui a donné des choses intéressantes, et d’autres beaucoup moins… Il faut dire que l’évolution des séries parallèles, globalement, a été plutôt négative ? C’est peut-être à débattre en ce qui concerne Jessica Jones, la détective badass ayant pu convaincre des camarades avec sa deuxième saison – ça n’a pas été le cas pour moi, car j’ai trouvé cette série beaucoup trop en dents de scie, alternant de manière très foutraque le pire et le meilleur, cette inégalité dans l’écriture ayant fini par me faire relever le pire bien avant le meilleur. Luke Cage, c’était plus problématique encore : après une première saison honnête, même si sans plus, avec le charismatique Mike Colter dans le rôle-titre, quelques chouettes seconds rôles (dont l’excellente Rosario Dawson, échappée justement de Daredevil), et un gimmick musical sympathique, le niveau a drastiquement chuté dans une saison 2 tellement mal conçue, interprétée et réalisée que j’ai dû m’y prendre à trois ou quatre fois pour voir l’épisode 2, déclarant forfait peu après… Je n’ai pas osé voir Iron Fist, les critiques étant unanimement mauvaises dès le départ. Quant aux Defenders, associant les quatre personnages, j’ai trouvé ça passablement navrant – au mieux indifférent. Bref : depuis la deuxième saison de Daredevil, une seule série Netflix/Marvel m’a véritablement convaincu, qui affichait son statut singulier tout en émanant, eh bien, de Daredevil (de la saison 2 plus précisément), et c’était The Punisher

 

Autant dire que j’ai commencé à regarder cette troisième saison de Daredevil à reculons : je m’attendais à ce que le niveau baisse drastiquement, au point de l’embarras… Et, finalement, eh bien, ça n’était certainement pas irréprochable, mais c’était globalement convaincant et enthousiasmant – bien plus réussi que toutes les autres séries Marvel/Netflix (à l’exception donc du Punisher), et au moins du niveau de la saison 2, car moins inégal ? C’est que celle-ci s’en tirait quand même mieux quand elle mettait en scène le Punisher, que quand elle se focalisait sur la dangereuse Elektra… Mais, oui, il y a tout de même beaucoup à redire concernant cette troisième saison, et heureusement au moins autant à apprécier.

 

L’inspiration essentielle de cette saison semble se trouver dans un fameux arc de Daredevil signé Frank Miller et David Mazzucchelli, Born Again. Bizarrement, alors que j’ai lu et relu la plupart des épisodes signés Frank Miller en solo, dans son long run révolutionnaire au début des années 1980, ou associé avec des dessinateurs tels que John Romita, Jr., ou Bill Sienkiewicz, et alors que cet arc est un des plus célèbres et décisifs associés au personnage, et que j’ai beaucoup aimé ce que j’ai lu de David Mazzucchelli (le grand écart entre Batman : année un, toujours avec Miller, et l’adaptation du roman de Paul Auster Cité de verre), je ne crois pas avoir jamais lu Born Again… Il faudrait tout de même y remédier un de ces jours.

 

Quoi qu’il en soit, nous retrouvons Matt Murdock rescapé miraculeusement de l’effondrement d’un putain d’immeuble juste sur lui, là, dans la conclusion de la médiocre saison 1 de The Defenders. Mais tout le monde le croit mort – ce qui l’arrange, en fait. Ce qui l’arrange moins, c’est que l’accident a laissé des séquelles – notamment, son ouïe a souffert, au point où elle chamboule une fois de plus toutes ses perceptions : c’est comme s’il redevenait aveugle ! Bon, par chance, ça ne durera pas – mais Murdock n’en est pas moins aigri et refermé sur lui-même : hébergé/caché par les religieux qui avaient pris soin de lui quand il était enfant, il ne veut plus voir ses amis Karen Page et Foggy Nelson ; qu’ils le croient donc morts ! Sauf qu’il reviendra vers eux… quand il aura besoin d’eux, le détestable petit con.

 

Un besoin qui ne tardera pas : c’est ce qui se passe dans les comics, quand la Némésis resurgit ! Et donc, Wilson Fisk… Celui que l’on n’appelle pas encore le Caïd (mais ça viendra précisément dans cette saison) est en prison. Via un agent du FBI aux abois du nom de Ray Nadeem, il propose un pacte aux fédéraux : l’abandon des poursuites contre sa compagne Vanessa, en échange d’informations précieuses sur le milieu new-yorkais. Ce contrat faustien ne tarde pas à évoluer, Fisk y gagnant de sortir de prison, pour une résidence surveillée dans un appartement toujours plus luxueux après chaque visite… Et la vérité apparaît enfin – au pauvre Nadeem notamment : Fisk, qui a toujours cinq coups d’avance, l’a manœuvré pour faire son grand comeback, et les fédéraux sont à ses ordres !

 

Ceci, aussi bien Matt Murdock que Karen Page et Foggy Nelson le comprennent tous avant tout le monde – c’est qu’ils ont une certaine expérience du bonhomme… Et ils ne comptent pas se défiler : chacun d’entre eux entend lutter contre ce colossal ennemi à sa manière – Foggy usera du droit et de la politique, Karen du journalisme mais en gardant un flingue dans son sac à main si jamais, Matt enfin songe à ressusciter Daredevil, sans le costume… et sans la conception très catholique de la rédemption ? Ou avec, ça dépend des moments...

 

Problème : Fisk, qui se doute de la véritable identité de Daredevil, a choisi d’anéantir à jamais la réputation du justicier de Hell’s Kitchen – en manœuvrant un agent du FBI passablement psychopathe, mais très compétent pour lancer des trucs et des machins (Ben Poindexter, aka le Tireur ou Bullseye, même si cet alias n’est pas employé dans la série) : dans cette troisième saison, Matt Murdock ne porte jamais le costume de Daredevil, c’est l’imposteur Poindexter qui le fait…

 

On retrouve, dans cette troisième saison de Daredevil, le caractère assez inégal de l’écriture qui m’avait tant posé problème dans la deuxième saison de Jessica Jones – même si, je crois, ça passe mieux en l’espèce. Quoi qu’il en soit, cette saison repose sur une opposition classique entre le super-héros, et plus encore sa personnalité non déguisée, Matt Murdock avant Daredevil donc, et sa Némésis, le super-vilain sans costumes ni pouvoirs supranormaux Wilson Fisk. Le problème, c’est que Fisk écrase (littéralement) Matt Murdock à tous points de vue… En fait, j’ai vraiment le sentiment que, dans cette troisième saison, j’ai aimé, voire adoré, tout ce qui concerne Wilson Fisk, et trouvé au mieux indifférent, au pire carrément mauvais, tout ce qui concerne Matt Murdock ou presque… Et si, en vertu de l’adage souvent rappelé dans les comics, le bon méchant fait la bonne série, il est quand même problématique, à ce stade, que le héros se montre si faible. Cela tient d’ailleurs probablement, pour partie du moins, à ce que le personnage de Matt Murdock, si aigri, s’enferme dans le seul rôle de l’habitacle d’un Daredevil particulièrement vénère et pourtant jamais totalement libéré, et n’a à côté aucune existence sociale – je suppose qu’il n’y a rien d’étonnant, alors, à ce que ses moments les plus réussis en définitive, hors scènes d’action, soient ceux où il endosse, même avec des arrière-pensées ou à reculons, le costume qui lui sied le mieux, c’est-à-dire celui de l’avocat. Autrement, la série joue forcément de son catholicisme perturbé, et c’est bien naturel, puisque ç’a toujours été une dimension essentielle du personnage, un outil de caractérisation éventuellement très subtil… mais pas ici, hélas, où le thème est traité avec de gros et lourds sabots – en y incluant, comme la pire démonstration, la révélation de l’identité de la mère de Matt Murdock, qui est incroyablement mal amenée, pas un cheveu sur la soupe à ce stade mais une putain de perruque entière… Charlie Cox s’était montré plutôt convaincant dans les deux premières saisons, mais il pâtit ici de tous ces partis-pris, qui font de Matt Murdock/Daredevil un personnage plus unilatéral que de coutume, plus brutal aussi (incomparablement), et en définitive tristement creux. Le résultat est en fait assez désolant…

 

Mais, en face, il y a Wilson Fisk – et, répétons-le une fois de plus, Vincent D’Onofrio est le putain de Wilson Fisk : il est parfait, c’est exactement lui. Au point du paradoxe temporel, je crois : les créateurs du personnage dans la BD (soit Stan Lee, RIP encore, et John Romita, Sr., en 1967 – puis certes Frank Miller avec la redéfinition du personnage au début des années 1980) devaient disposer d'une machine à voyager dans le temps, ils se sont rendus dans les années 2010 et ils ont vu Vincent D'Onofrio incarner le Caïd, ils sont retournés à leur époque et c'est comme ça qu'ils ont conçu le vilain. Pas possible autrement. Quoi qu’il en soit, la prestation de D’Onofrio écrase littéralement toutes les autres dans cette saison, et compose un personnage complexe, mais d’abord et avant tout proprement terrifiant, sur un mode carrément diabolique : oui, c’est la bonne image, il est le joueur d’échecs qui a toujours cinq coups d’avance au moins sur son adversaire, et dont la mainmise absolue sur tout ce qui compte, y compris voire surtout ce qui ne semble tout d’abord pas compter le moins du monde, le protège contre toute intervention malvenue – ses adversaires en sont réduits au fatalisme le plus dépressif : ils ne peuvent absolument rien faire contre pareil adversaire, qui a toutes les bonnes cartes en mains, pour continuer sur le jeu… Mais, oui, il s’agit en outre d’un personnage complexe – et parfois même étonnamment touchant, figurez-vous. Bizarre aussi, assurément – et Vincent D’Onofrio a une diction très particulière, pas vraiment naturelle, mais qui colle tellement bien au personnage… Oui, il est le Caïd – physiquement ça crève les yeux, mais ça va bien au-delà : il est Wilson Fisk.

 

Si Matt Murdock et donc surtout Wilson Fisk focalisent comme de juste l’attention, la série met cependant en scène bien d’autres personnages, et si Ray Nadeem est d’une importance toute particulière au regard de cet arc précisément (un personnage là aussi plus subtil qu’il n’en a l’air, et bien interprété par Jay Ali), deux personnages secondaires se montrent probablement plus essentiels – et tout d’abord Karen Page ; j’avais détesté, sinon le personnage, du moins le jeu de Deborah Ann Woll dans la première saison, mais Karen avait considérablement gagné en consistance et en subtilité dans la deuxième – ici, il y a encore de cela, du moins au regard de la consistance, même si probablement moins de la subtilité ; ce qu’illustre à vrai dire, dans un sens comme dans l’autre, un épisode « quasi » consacré à elle (disons du moins qu’une bonne moitié de l’épisode porte sur le passé chargé du personnage), dont je ne sais pas bien que penser – en tout cas, la pauvre fille souffre tout au long de la saison, et passe la moitié de sa présence à l’écran à sangloter, toute rouge et agitée de spasmes…

 

L’autre point de mire, je dirais qu’il s’agit de Poindexter – puisqu’on ne lui donne pas ici (pas encore…) d’alias. Je me suis rendu compte, en regardant cette saison, qu’au fond je ne savais pas grand-chose de l’histoire de Bullseye, même si j’avais rencontré le personnage plusieurs fois, et notamment dans Daredevil, dont il était un méchant lié plutôt récurrent. Il ne semble pas y avoir grand-chose, en fait… Ce qui a peut-être donné de la marge aux scénaristes de la série ? Pour un résultat que j’ai trouvé assez convaincant – même en empruntant des thématiques psychiatriques et sociales très casse-gueule. J’ai aussi apprécié comment le personnage et ses facultés, pas surnaturelles mais quand même aaaaaaaaaaaaaassez spéciales, sont introduits, très progressivement, fan-service adroit avec l’ombre de Wilson Fisk dans le fond. Et, disons-le, l’acteur Wilson Bethel a une tête à claques idéale, tout particulièrement quand il revêt le masque de Daredevil…

 

Cela dit, globalement, l’écriture connaît des hauts et des bas – un peu comme dans Jessica Jones, donc, moins cependant que dans la saison 2 de cette dernière série. C’est tout particulièrement vrai dans certaines séquences qui auraient gagné à davantage de subtilité, et qui mettent en scène la psyché troublée des personnages – qui revivent des scènes en spectateurs (ce qui fonctionne exceptionnellement bien pour Wilson Fisk étudiant le passé de Poindexter, cela dit), ou se voient envahir par les personnages qui les obsèdent. Il faut aussi y ajouter que, prise avec un minimum de recul, la trame globale de cette saison est bourrée de trucs qui ne tiennent absolument pas la route… Bon, la suspension volontaire d’incrédulité peut-être repoussée très loin dans les comics de super-héros, mais là c’est vraiment limite, et plus d’une fois…

 

Cela vaut aussi pour la réalisation. Certaines séquences se montrent un peu trop caricaturales, à la limite même du risible (voire au-delà), ainsi dans plusieurs moments de « cri primal ». Globalement, cependant, c’est du bon voire du très bon boulot – tout particulièrement pour ce qui est des scènes d’action, ouf. Cette saison 3, comme les deux premières, a inévitablement son long plan-séquence de baston, il se trouve dans l’épisode 4, et il est très impressionnant – et jouissif, disons-le, même si l’artifice de ce genre de scènes commence à me laisser perplexe, chose signalée récemment dans ma chronique de The Haunting of Hill House. Au plan de l’écriture, à vrai dire, le « quasi loner » consacré à Karen Page est un peu du même ordre, il y en a dans plein de séries maintenant…

 

Mais, oui, globalement, bon boulot : cette saison 3 se regarde bien, Vincent D’Onofrio est épatant, et si les défauts sont là, indéniablement, Daredevil demeure à ce stade un divertissement super-héroïque de qualité, et incomparablement meilleur que toutes les autres séries Marvel/Netflix de ce micro univers partagé.

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CR Barbarians of Lemuria : Mariage amer (01)

Publié le par Nébal

CR Barbarians of Lemuria : Mariage amer (01)

Allez, je vais tâcher de faire une chose que je voulais faire depuis un bon petit moment déjà, et on va se lancer dans une saga de Barbarians of Lemuria.

 

Et, pour commencer, ça va être le scénario Mariage amer, dû à Andrea Salvatores, et qui figure dans le supplément Chroniques lémuriennes, pp. 58-75. En voici aujourd’hui la première séance, et je suppose qu’une seconde suffira pour achever ce scénario, après quoi j’en tenterais bien quelques autres, on verra.

 

L’illustration en tête d’article provient de ce scénario (p. 59), et est due (forcément) à Emmanuel Roudier. Note au passage : contrairement à mes précédents comptes rendus de partie, celui-ci ne sera pas illustré au-delà – pour la simple raison que la quasi-totalité du matériel iconographique que j’ai employé pour cette partie sur Roll20 provient de Barbarians of Lemuria et de Chroniques lémuriennes, et très peu de tout cela a été mis en ligne par l’éditeur (contrairement, par exemple, aux aides de jeu de L’Appel de Cthulhu dans les scénarios Au-delà des limites et Étoiles brûlantes, que j’avais complétées avec des photos trouvées çà et là sur le ouèbe). Je suppose que piller les illustrations d’Emmanuel Roudier et les mettre en ligne sans plus de précautions ne rendrait service ni à l’artiste, ni à l’éditeur, alors on va faire dans le sobre… Bref : achetez ces deux bouquins, ils font de toute façon plus que le mériter.

 

Oh, et, petite note au passage, j'ai modifié les noms de deux personnages : Jil Sendak devient ici Dill Sendak, et Eormo devient Orom.

 

Voici la vidéo de ce premier compte rendu :

Voici également, pour ceux que cela intéresserait, l’enregistrement brut de cette première séance (on dit « actual play » ?) :

Il y avait cinq joueurs, qui incarnaient Liu Jun-Mi, un Ghataï d’ascendance xi lu (Barbare 0 – Mercenaire 1 – Dresseur 1 – Gladiateur 2) ; Myrkhan, originaire de Tyrus (Gamin des rues 1 – Chasseur 2 – Forgeron 0 – Soldat archer 1) ; Narjeva, originaire d’Urceb (Esclave 0 – Courtisane 1 – Assassin 2 – Prêtresse de Nemmereth 1) ; Nepuul Qomrax, originaire de Zalut (Scribe 2 – Alchimiste 3 – Marchand 0 – Médecin 1) ; et enfin Redhart Finken, de Parsool (Docker 0 – Matelot 1 – Mercenaire 3 – Marchand 0).

 

I : LA FILLE DE L’AIR

 

Satarla, le joyau de Lémurie. Pour diverses raisons, les personnages se trouvent dans la magnifique villa de la noble et richissime famille Sendak, sur les hauteurs de la prestigieuse et arrogante cité, à l’occasion du mariage entre la belle Dill Sendak, et le richissime également, mais tout à fait parvenu, Tourmar Latia, dont la fortune tient au commerce de bubalus, et qui est particulièrement ravi de recourir à ce moyen pour tenter d’effacer un peu sa roture de vendeur de bidoche...

 

Narjeva, vêtue (ou dévêtue) de ses atours de courtisane, a trouvé le moyen de figurer à la dernière minute sur la liste des invités – c’est qu’elle a un contrat portant sur le témoin du marié… Liu Jun-Mi a été engagé par Tourmar Latia au titre des divertissements : il assure un spectacle de fauconnerie, avec ses yi qi nommés Gu, Taï et Bah – ce dernier, hélas, est un peu boudeur et récalcitrant aujourd’hui… Pas assez rebelle toutefois pour que les spectateurs le remarquent vraiment. Le Ghataï avait déjà croisé Redhart Finken par le passé, quand ils officiaient tous deux en tant que mercenaires dans la Compagnie de l’Écaille de Bronze – c’est aussi le cas de Myrkhan, que l’ex-marin a pour le coup recruté, via sa propre compagnie mal assise, pour assurer à ses côtés la protection rapprochée de quelque riche invité, un bourgeois de Parsool désireux d’étaler sa fortune dans la meilleure société de Satarla. Nepuul Qomrax, quant à lui (qui a pu avoir recours aux services de Redhart par le passé), est venu à la requête d’un bon client, désireux de refaire ses stocks d’yzane, une drogue dont l’alchimiste de Zalut est son unique pourvoyeur – en temps normal, Nepuul n’aurait pas effectué le déplacement, mais il a bien voulu prendre en compte l’agenda chargé de ce client : après tout, aujourd’hui, il se marie…

 

Conformément aux traditions, la mariée attend sur la plus haute terrasse, en compagnie d’un prêtre de Lilandra, que son époux la rejoigne – le cortège de Tourmar Latia, justement, vient de passer les portes de la villa Sendak, et doit maintenant gravir les resplendissants escaliers de marbre disséminés sur les flancs de la colline, qui le conduiront à sa promise, afin de sceller définitivement leur union.

 

Le temps est magnifique – aussi, quand une ombre passe soudain, tout le monde tourne instinctivement les yeux vers le ciel. Une nef volante, la plus singulière machine de guerre de l’armée de Satarla, celle qui ne manque pas de susciter les regards ébahis en même temps qu’admiratifs des étrangers, surplombe alors la terrasse où se trouve la mariée… et une corde en descend… que Dill Sendak saisit aussitôt, commençant à grimper ! La mariée jouerait littéralement la fille de l’air ? Tout le monde est stupéfait – le marié au premier chef ! Et la panique s’empare de certains des convives…

 

Redhart, très professionnel, assure la sécurité de son client, tandis que Myrkhan aux yeux perçants cherche à voir qui se trouve à bord de la nef – craignant notamment qu’un archer ne s’y cache, prêt à faire feu… Mais il n’y voit qu’un seul homme, aux traits indistincts mais à la carrure musculeuse, aux commandes de l’appareil. En bas de la colline, passé la stupéfaction initiale, Tourmar Latia furieux ainsi que son témoin se précipitent pour gravir les bien trop longs escaliers conduisant au sommet de la colline ; Narjeva, surprise par la tournure des événements, mais supposant qu’elle pourrait en tirer profit, se lance à leur suite, au milieu d’autres membres du cortège.

 

Redhart houspille Myrkhan : c’est une occasion à saisir ! et tous deux gagnent l’escalier conduisant à la terrasse : la nef reste stable le temps que Dill Sendak grimpe à la corde, ils ont peut-être encore le temps de suivre la donzelle ! Hélas, au sommet de l’escalier donnant sur la terrasse, trois gardes obtus, conscients de ce qu’il se passe quelque chose d’anormal mais guère portés à prendre des initiatives, s’en tiennent à leurs ordres : nul ne doit monter sur la terrasse, sinon le marié ! Redhart émet un soupir