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Black Crusade : Les Griffes de la Corruption

Publié le par Nébal

Black Crusade : Les Griffes de la Corruption

Black Crusade : Les Griffes de la Corruption, [Black Crusade: Hand of Corruption], Games Workshop – Fantasy Flight Games – Edge, 2013, 144 p.

Ultime titre de la (très limitée) gamme française de Black Crusade, Les Griffes de la Corruption est une campagne passablement ambitieuse… et très excitante en ce qui me concerne, si elle soulève nombre de difficultés. Mais, clairement, il s’est agi pour moi d’une très bonne surprise – une lecture qui donne envie de jouer, même si ça impliquerait beaucoup de boulot de la part du MJ. Et, du coup, je me garde ça derrière l’oreille…

 

Avertissement général, inévitable : même si je ne vais pas rentrer à fond dans les détails, pour chroniquer cette campagne, je vais néanmoins devoir balancer pas mal de gros SPOILERS. Adonc, de manière générale, ô lecteurs, s’il vous paraît envisageable de jouer cette campagne (en tant que PJ, s’entend), n’allez pas plus loin – l’avertissement vaut tout particulièrement pour ceux de mes joueurs qui se sentiraient bien de faire du jeu de rôle Warhammer 40,000

 

Les Griffes de la Corruption fournit enfin une réponse enthousiasmante à la question qui m’avait posé problème durant toute ma lecture du livre de base : que joue-t-on concrètement dans Black Crusade ? En chroniquant la chose, j’avais relevé comment ce jeu était conçu comme un miroir des autres jeux de rôle Warhammer 40,000 : vous pouvez faire de l’infiltration dans l’Imperium, face aux inquisiteurs de Dark Heresy ; vous pouvez défourailler sévère sur les champs de bataille les plus dantesques, face aux Astartes de Deathwath ; vous pouvez explorer un univers en marge de l’Imperium, où littéralement tout est possible, dans un esprit cette fois plutôt proche de celui de Rogue Trader. Le problème, c’est que ces expériences ne sont a priori pas toujours compatibles, et que le groupe des PJ, contrairement à la note d’intention, ne peut pas toujours se permettre de se scinder entre humains et space marines du Chaos… Mais Les Griffes de la Corruption est une aventure très ample et qui est supposée permettre de faire cohabiter ces différentes approches du jeu, autrement largement incompatibles.

 

Le pitch est sacrément enthousiasmant – totalement démesuré, dans un esprit typiquement Warhammer 40,000. Alors qu’ils vadrouillent dans le Vortex Hurlant, en quête d’un truc qui leur permettrait de gagner gros en Infamie, les PJ (les Hérétiques, comme on les appelle) tombent sur un bouquin d’essence prophétique, qui décrit un rituel totalement guedin destiné à ramener dans le giron du Vortex Hurlant une planète qui, pour quelque raison tenant à ce que les voies du Warp sont impénétrables, s’était retrouvée depuis un bail dans l’espace impérial. Oui, vous avez bien lu : il s’agit grosso merdo de téléporter une putain de planète entière dans le Vortex Hurlant ! Et pas n’importe quelle planète : précisément la Pénitence de Saint Annard, une colossale prison à l’échelle d’un astre, où des millions de condamnés triment jusqu’à la mort pour extraire des ressources de ce monde particulièrement hostile et les employer pour fabriquer des biens industriels en quantités colossales pour l’Imperium. Les PJ doivent donc trouver comment se rendre sur la Pénitence de Saint Annard, c’est-à-dire, clairement, comment infiltrer la planète, pour y semer le désordre, et capturer quatre cibles essentielles dont le sacrifice constituera le cœur même du rituel destiné à faire basculer la planète entière entre les griffes des Puissances de la Ruine.

 

Mais, à supposer que les Hérétiques y parviennent, et se félicitent d’avoir ainsi accompli une étape cruciale en vue de la future Croisade Noire qu’ils ne manqueront pas de mener jusqu’à la transcendance chaotique, un gros souci inattendu leur pète à la gueule : la Pénitence de Saint Annard… s’avère être un monde-nécropole, où des troupes colossales de Nécrons s’étaient « endormies » il y a des millions d’années de cela. La translation dans le Vortex Hurlant réveille les protocoles de sécurité de la nécropole, et les Légions Immortelles se lèvent de leur tombeau, guidées par une intelligence artificielle totalement dépassée par les événements mais qui n’a dès lors plus qu’une seule idée en tête : l’éradication de tout ce qui vit !

 

Wahou.

 

Oui, franchement, je trouve ça très excitant – surtout les deux premières partie (la découverte de la prophétie et le voyage vers la Pénitence de Saint Annard constituant la première, l’infiltration puis la subversion de la planète la seconde), qui correspondent le plus à mon optique de jeu ; de fait, la troisième partie, consacrée au combat désespéré contre les Nécrons, est très, très bourrine, une sorte de gros donj’ épique où les PJ se frittent avec des hordes (littéralement) d’ennemis – et je doute franchement de pouvoir bien gérer ça. Mais c’est une illustration éloquente, je suppose, des difficultés posées par cette campagne – qui n’est pas « clef en main » (aucune campagne ou presque ne l'est, certes, mais c'est une question de degré...), et nécessite un gros boulot de la part d’un MJ qui, idéalement, aurait de la bouteille, mais aussi de l’ambition et de la souplesse.

 

Avant d’examiner ces difficultés, toutefois, il me faut ajouter quelque chose qui est tout à l’honneur de ce supplément : s’il n’est pas « clef en main », donc, il est néanmoins remarquablement conçu et écrit – il y a beaucoup de matériau utilisable ici, à chaque page, et la structure globale de la campagne est très libre : les personnages ne sont jamais sur un rail (sauf peut-être, et pas totalement non plus, dans la dernière partie – même si elle abonde en « rencontres optionnelles », et si la clef du dénouement pourra prendre bien des formes), et, pour chaque étape de leur Pacte (lequel peut poser quelques difficultés, comme celles envisagées dans ma chronique du Kit du Meneur de Jeu), ils disposent de nombreuses possibilités d’action, totalement différentes, et dont un nombre non négligeable est examiné dans ces pages, au regard des difficultés particulières qu’elles suscitent, en fournissant des pistes très bien vues pour les gérer au mieux. Mais, face à certaines difficultés, ce n’est peut-être pas suffisant ? Reconnaissons tout de même qu’un joli boulot a été fait à cet égard dans Les Griffes de la Corruption, un boulot dont nombre de campagnes censément plus aisées à mettre en route ne peuvent pas se targuer.

 

La première partie a quelque chose d’une introduction – qui peut être plus ou moins longue, au gré des envies de la table. La découverte du livre et donc du rituel aura probablement quelque chose d’un peu artificiel, mais, en même temps, elle assure de manière assez cohérente l’implication des PJ – une difficulté majeure à mes yeux de nombre de campagnes, pour quelque jeu que ce soit. C’est en tout cas l’occasion, si jamais, de préparer la suite des opérations en faisant opérer les Hérétiques dans le cadre bigarré du Vortex Hurlant (même si, illustration d’ores et déjà de la souplesse de la campagne, le bouquin fournit quelques pistes dans l’hypothèse où les Hérétiques commenceraient en fait leur aventure dans l’espace impérial). Constituer des alliances pourrait ainsi s’avérer utile – même si le gros de cette première partie, sans doute, consiste à trouver un moyen de convoyer les PJ sur la Pénitence de Saint Annard pour qu’ils puissent y semer la zone. On a ainsi plusieurs options de voyage jusqu’à Port l’Errance, un cadre de jeu plutôt développé dans Rogue Trader, et la meilleure (sinon la seule) piste pour trouver un moyen de se rendre ensuite sur la Pénitence de Saint Annard. Et c’est là que se trouve la première vraie difficulté de la campagne : comment infiltrer les PJ dans ce monde pénitentiaire ultra protégé ? Plusieurs options très différentes sont envisagées, allant de « nous sommes des fonctionnaires de l’Imperium avec toutes les autorisations nécessaires » à « on slalome entre les tirs des forces orbitales pour poser la navette quelque part dans les étendues désertiques de la planète », en passant par « on se fait passer pour des prisonniers ». Mais, ici, grosse difficulté, déjà mentionnée en chroniquant le livre de base : je n’arrive pas à concevoir un seul instant que des PJ space marines du Chaos puissent véritablement s’infiltrer… Le bouquin offre quelques suggestions à cet égard, mais je n’y crois pas vraiment ; bon, je suppose que ça peut se tenter, mais...

 

Quoi qu’il en soit, la deuxième partie (la plus passionnante en ce qui me concerne, et de loin) débute quand les personnages se trouvent sur la Pénitence de Saint Annard – et ils peuvent donc y être arrivés de manières bien différentes, ce qui a forcément un impact colossal sur la suite des opérations. L’approche idéale consiste à nouer des liens avec les principales factions de prisonniers (l’une est dirigée par une ex de la Garde Impériale qui ne parvient toujours par à haïr l’Imperium, l’autre est aux mains d’un fan de Slaanesh auquel il serait suicidaire de se fier), probablement en passant par une sorte de conciliateur efficace. Ce jeu avec les factions est crucial : elles fournissent des moyens pour que les PJ puissent parvenir à leurs fins, et, idéalement, elles doivent coordonner la révolte des millions de prisonniers de la planète, condition nécessaire à l’accomplissement du rituel – en même temps, elles ont de fortes personnalités, des ambitions, des blocages, que les PJ doivent prendre en compte. La possibilité de les corrompre – et de corrompre aussi, bien sûr et peut-être surtout, des représentants de l’autorité impériale sur la planète – est assurément séduisante, mais aussi périlleuse, et les dilemmes abondent. Or les difficultés ne s’arrêtent pas là, car les PJ ont leurs propres préoccupations plus personnelles, et non des moindres : capturer quatre notables parmi les plus importants de la planète, pour les sacrifier dans un endroit précis qu’il s’agira de capturer également ! C’est là le moment le plus complexe, mais aussi le plus enthousiasmant, des Griffes de la Corruption – et, si le bouquin est donc bien conçu et fournit plein de pistes, les PJ sont très libres, et le MJ doit se montrer souple. En même temps, le cadre plus ou moins « bac à sable » de la Pénitence de Saint Annard, un monde décrit avec méticulosité et doté de factions comme de PNJ qui ont de la chair et de l’âme, ce cadre donc s’avère idéal pour mettre en scène le scénario d’infiltration typé « cellule terroriste » qui m’avait initialement attiré dans Black Crusade.

 

Ces deux premières parties sont idéales pour des Hérétiques humains – et, globalement, elles mettent en avant les compétences sociales, la diplomatie, la subversion, mais aussi dans un autre registre l’espionnage, la discrétion, etc. Ce qui ne signifie pas que l’action n’est pas au rendez-vous : les personnages portés sur la baston peuvent avoir quelques occasions de briller durant la mise en place – et, à la fin de cette deuxième partie, dans l’anarchie de la révolte des prisonniers, guerilla urbaine de masse en guise de diversion pour les kidnappings que les PJ doivent gérer eux-mêmes (en principe), ce qui les confrontera forcément à des troupes d'élite, oui, l’action sera au rendez-vous, et c’est peu dire. Mais cette partie est bien dosée à cet égard, et vraiment, vraiment excitante à mes yeux.

 

La troisième partie est autrement problématique… car extrêmement bourrine. Elle n’est pas sans quelques atouts, cela dit : l’arrivée progressive des Nécrons, ou plus exactement la découverte, petit à petit, par les PJ, de ce qu’il se passe quelque chose de « pas normal » sur la planète, peut être mise en scène dans une optique horrifique à la Alien très enthousiasmante, qui s’accompagne en même temps d’enquête à la fois policière et scientifique – car il devient bientôt important d’envisager ces Xenos très particuliers pour ce qu’ils sont. En effet, cette optique cèdera bientôt la place à la terreur pure, quand les Légions Immortelles se mettront à frapper par dizaines de milliers ! Et gérer les réactions des factions de prisonniers, mais aussi des reliquats de l’Imperium (la planète a alors certes basculé dans le Vortex Hurlant, mais ça ne signifie pas que la Garde impériale ou les Arbitrators, etc., ne constituent plus une menace pour les Hérétiques), gérer ces réactions donc face à l’éveil du monde-nécropole, peut fournir l’occasion de très jolies scènes, où la diplomatie peut toujours avoir sa part. Maintenant, on ne va pas se leurrer, cette ultime partie du scénario prise vraiment la bourrinade – baston, baston, baston. Le nombre jouant de manière écrasante en faveur des Légions Immortelles, les Hérétiques doivent trouver un moyen aussi rapide que radical de mettre fin à la menace – d’un seul coup. Et, oui, c’est ainsi qu’ils seront amenés à descendre façon commando dans les profondeurs de la Pénitence de Saint Annard, dans une sorte de très, très gros donjon, pas formalisé par un plan à proprement parler, mais avec une bonne dizaine d’endroits décrits, indispensables ou « optionnels »… et chacun ayant son lot de combats, souvent contre des hordes, donc. Perso, c’est donc cette partie du scénario qui m’inquiète, et que je ne me sens probablement pas de gérer au mieux : c’est too much pour ma pomme, on fait vraiment dans le combat de masse systématique, et si c’est indéniablement pertinent dans le contexte de Warhammer 40,000, hein, « In the grim darkness of the far future there is only war », tout ça, je ne pense pas être compétent à cet égard.

 

Ajoutons au passage que ces combats incessants sont très violents, mais aussi démesurés, véritablement dantesques : des Hérétiques humains, je le crains, n’y feront pas long feu, ou bien se retrouveront dans des situations très frustrantes, où ils n’arriveront à rien tandis que leurs collègues space marines du Chaos seront pleinement dans leur élément et en feront la démonstration à chaque jet de dés… enfin, pour un temps du moins, car l'adversité est colossale, et triompher d'une écharde C'Tan tout en trouvant comment faire sauter toute la nécropole sans mourir au passage, ben, c'est pas évident, quoi... Mais, ceci mis à part, l'éventualité que le groupe de PJ se divise alors en humains qui ne font rien et en space marines du Chaos qui font tout (là où les premières parties de la campagne sont un peu moins tranchées), cette éventualité donc est un souci, ce me semble – peut-être un moyen de le circonvenir serait-il d’inciter les joueurs à « échanger » les PJ plus idéalement humains des deux premières parties contre des PJ space marines du Chaos pour la troisième, éventuellement en trouvant un moyen de faire intervenir des renforts (mais limités, car la terreur du nombre doit persister) une fois que la Pénitence de Saint Annard a réintégré le Vortex Hurlant ? Je suppose qu’on peut du moins y réfléchir…

 

Cette troisième partie est donc problématique à mes yeux – parce qu’elle ne correspond pas à mes compétences et habitudes de jeu. Elle soulève des difficultés propres, et à mon sens bien plus redoutables que les ambiguïtés éventuelles des deux premières parties, portant pourtant sur la tâche pas moins colossale de la subversion d’un monde entier. En même temps, je suppose qu'on peut bidouiller la structure de la campagne pour que cette troisième partie soit davantage optionnelle, ou en tout cas moins unilatérale, bon, faut voir...

 

Mais cette conclusion ardue ne suffit pas à me faire détourner le regard ! J’ai vraiment trouvé la lecture des Griffes de la Corruption très enthousiasmante – et peut-être d’autant plus… eh bien, que je n’en attendais pas grand-chose à la base, en fait. Cette campagne est donc une bonne surprise à mes yeux. Ça demande assurément du boulot, et la troisième partie représente pour moi un défi peut-être insurmontable, mais, oui, je trouve ça excitant, et ça me dirait bien de tenter l’expérience un de ces jours – d’ici-là, eh bien, je vais tâcher de garder ce supplément derrière mon oreille… déjà encombrée, certes.

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Black Wings II, de S.T. Joshi (ed.)

Publié le par Nébal

Black Wings II, de S.T. Joshi (ed.)

JOSHI (S.T.) (ed.), Black Wings II – New Tales of Lovecraftian Horror, Hornsea, PS Publishing, 2012, IX + 321 p.

Retour à la série d’anthologies lovecraftiennes Black Wings, dirigée par l’éminent critique S.T. Joshi, et éditée initialement chez PS Publishing – de beaux bouquins hardcover à jaquette.

 

Bon, je suppose qu’il n’est pas vraiment nécessaire de vous refaire ici le pitch de la série, je m’étais suffisamment étendu à ce propos en traitant du premier volume (sous son titre « rallongé », et problématique, caractéristique des rééditions : Black Wings of Cthulhu… soit exactement ce que l’anthologiste souhaitait éviter – notez que, depuis, ce premier volume a été traduit en français, chez Bragelonne, sous le titre plus problématique encore si ça se trouve Les Chroniques de Cthulhu)… et, en fait, j’avais déjà auparavant chroniqué Black Wings III, qui était le premier volume de la série que j’avais lu (et je vais le relire).

 

Bref : ici, autant se lancer directement dans les nouvelles. Et je ne me sens pas vraiment de jouer le jeu des catégories, pas forcément très pertinent ici – je vais donc évoquer chaque nouvelle dans l’ordre où elle figure dans le recueil.

 

Nous commençons avec John Shirley et « When Death Wakes Me to Myself » : un psychiatre vient de s’installer dans une nouvelle demeure à Providence, mais, très vite, un jeune homme visiblement dérangé cherche à y pénétrer par tous les moyens. Et ce jeune homme exprime bien des traits du Lovecraft historique, dans sa manière de parler par exemple… Pas mal – de la mesure dans les effets, étonnamment, et c’était probablement indispensable pour que ça fonctionne ; cerise sur le gâteau, la fin, à bon droit, n’est pas totalement celle à laquelle je m’attendais, et s’avère bien plus fine. Oui, ça fonctionne assez bien. Je relève au passage que, contrairement à ce qui s’était passé dans Black Wings of Cthulhu, le procédé consistant à faire figurer Lovecraft lui-même en tant que personnage, dans cette deuxième livraison, est beaucoup plus rare – à vrai dire, en dehors de cette nouvelle précisément, je n'en vois qu’un seul autre exemple, l’excellente nouvelle de Rick Dakan, dont je vous parlerai le moment venu.

 

Ensuite nous avons Tom Fletcher, avec « View » : un couple visite une vieille maison, guidé par un agent immobilier enthousiaste et/ou menaçant – mais la bâtisse a d’étranges propriétés, d’ordre plus ou moins géométrique… et en tout cas beaucoup trop d’étages ou de semi-étages. La nouvelle fait sans doute référence à « La Maison de la sorcière », mais on pense surtout à M.C. Escher à sa lecture. Hélas, l’effet s’amenuise à force d’insistance – la nouvelle aurait gagné à être considérablement écourtée, clairement, et ce qui fonctionne initialement finit par sombrer dans la platitude (si j’ose dire). Dommage.

 

« Houndwife », de Caitlín R. Kiernan, est d’un tout autre niveau. Difficile de résumer cette nouvelle, notamment du fait de sa narration explicitement non linéaire, mais circulaire… On y accompagne une femme qui se cherchait et qui s’est (peut-être) trouvée dans quelque chose, quelque part entre le sexe et l’occulte – ce dernier devant le rester. Le titre et certains aspects de l’intrigue renvoient au « Molosse », aucun doute là-dessus, mais d’autres éléments, pas moins importants en ce qui me concerne, évoquent plutôt « Le Festival » ou « Celui qui hantait les ténèbres » ; cependant, ces références explicites sont en fait relativement secondaires, et le plus important est ce jeu sur la temporalité et la narration – d’autant qu’il se double, dans une perspective finalement bien plus lovecraftienne que le clin d’œil du pastiche, d’un profond sentiment d’horreur cosmique, encore que « horreur » ne soit probablement pas le mot le plus juste ici. Disons-le, je n’y ai probablement rien panné… et ça ne m’a pas empêché d’adorer, non, le mot n’est pas trop fort – belle plume, aussi, faut dire. En fait, je tends à croire que c’est ma nouvelle préférée de ce volume II de Black Wings. Quoi qu’il en soit, dans mes lectures lovecraftiennes modernes, Caitlín R. Kiernan tend vraiment à se singulariser comme bien au-dessus du lot.

 

Suit Jonathan Thomas, avec « King of Cat Swamp » : un couple d’une banalité très banale reçoit la visite d’un intrus envahissant – un certain Castro… La nouvelle brode (lointainement) sur « L’Appel de Cthulhu », au travers de ce personnage croisé initialement dans le bayou bien des décennies plus tôt, et qui pouvait assurément être développé comme Lovecraft ne l’avait pas fait ; enfin, la pertinence du procédé est en fait à débattre, car celui qui était simplement fou et, très probablement, se leurrait quant aux intentions du Grand Poulpe du Pacifique, dans la nouvelle de Lovecraft, devient ici par la force des choses un puissant sorcier (soit… l’antithèse du discours habituel de S.T. Joshi ?). Bon, tout ceci n’est pas sérieux : le registre est semi-parodique, et, oui, sur le moment, c’est plutôt amusant, mais c’est le genre de truc qu’on oublie sitôt la page tournée.

 

« Dead Media », de Nick Mamatas, m’a bien plus intéressé, même si cette nouvelle n’est probablement pas sans défauts. Il s’agit d’une sorte de « suite » à « Celui qui chuchotait dans les ténèbres ». Des étudiants de l’Université Miskatonic, de nos jours, entendent percer le vieux mystère de la fac – le récit par Wilmarth de ses aventures dans le Vermont. Sauf que lire le disque envoyé par Akeley au professeur nécessite un matériel archaïque particulier, et c’est déjà un problème… En même temps, le transfert de l’enregistrement sur un support plus moderne permettrait peut-être de percer à jour la supercherie ? Cet aperçu de « médias morts » est déjà en soit intéressant, mais je suppose que ce titre a aussi quelque chose de plus métaphorique, concernant le caractère aujourd’hui multimédia de l’œuvre de Lovecraft ? Ou pas. Quoi qu’il en soit, j’ai trouvé la « rupture » vers la fin de la nouvelle un peu trop sèche (en fait un problème survenu à plusieurs reprises durant ma lecture de cette anthologie), même si « l’épilogue » est loin d’être inintéressant, en donnant davantage de perspective à l’ensemble, avec une ampleur cosmique que les premières pages ne laissaient pas vraiment entrevoir. Oui, pas parfait, mais j’ai vraiment bien aimé.

 

« The Abject », de Richard Gavin, par contre, je n’ai vraiment pas accroché… La nouvelle est globalement très convenue, avec des trentenaires ou quadragénaires qui se retrouvent pour faire de la rando dans la forêt tout à l’ouest du Canada, autant dire au bout du monde (d’ailleurs, c’est dit), et là il y a une montagne bizarre, que les Indiens n’aimaient pas, etc., etc. Le récit, central, de la misère sentimentale du couple (hétéro et en crise) qui motive l’histoire n’en est pas moins convenu, hélas, au point où c’en devient pénible. Puis l’auteur nous inflige (précisément) une de ces ruptures « sèches » dont je viens de parler, une à vrai dire qui aurait pu faire un sacré effet, mais il s’y prend tellement mal, et tellement lourdement, qu’il ne parvient guère à susciter chez le lecteur qu’un soupir désabusé. La nouvelle aurait pu, et dû, être terrible – et touchante en même temps (et, par ailleurs, elle se serait peut-être très bien passée de connotations fantastiques). Elle n’est hélas ni l’une, ni l’autre. Un des points faibles du recueil – probablement le pire en ce qui me concerne.

 

« Dahlias », de Melanie Tem, est un (court) texte à part dans cette anthologie. Et qui ne m’a pas vraiment convaincu non plus... C’est que la nouvelle entend pour l’essentiel exprimer le sentiment d’horreur cosmique dans un cadre très quotidien – au travers d’une vieille dame qui va mourir et n’attend certainement rien après. Le texte a quelque chose d’une fable, mais il est un peu trop lourdement démonstratif…

 

Après quoi, John Langan nous livre « Bloom », une nouvelle assez sympathique, même si je peine à définir exactement les intentions de l’auteur. Le point de départ de la nouvelle a quelque chose d’une blague (délibérément mauvaise), avec ce couple qui ramène à la maison un container frigorifique malencontreusement égaré, et cette dimension aura l’occasion de revenir par la suite, mais on y trouve en même temps des choses plus sérieuses, dont quelque scènes… eh bien, oui, horrifiques… et un jeu avec les thèmes et textes de Lovecraft qui s’avère plus subtil (et peut-être même parfois plus profond) que dans bien d’autres nouvelles de ce recueil et a fortiori d'autres, des nouvelles qui se la pètent probablement bien davantage. Le manque d’unité du récit (dans le ton, du moins) me laisse encore un peu indécis, mais c’était globalement assez sympa, oui.

 

« And the Sea Gave Up the Dead », de Jason C. Eckhardt, est un texte très joueur et savoureux – et qui m’a beaucoup plu. Il s’agit là encore d’une variation sur « L’Appel de Cthulhu », mais qui se présente comme un document originel annoté par un chercheur – en l’espèce, le journal d’un naturaliste ayant accompagné l'amiral Cook dans le Pacifique, et tout spécialement à l’endroit que vous savez… Je ne sais pas ce qu’il en est, pour un anglophone, de l’anglais un peu archaïque et contourné de ce texte, mais je l’ai trouvé très amusant, oui, et plutôt bien fait – même si sa conclusion manque forcément d’ampleur, puisque nous savons très bien, nous autres lecteurs, ce qui se cache là-bas. Mais je n’ai pas trouvé ça problématique, et cette nouvelle figure parmi les textes du recueil que j’ai trouvés les plus savoureux.

 

Don Webb livre ensuite « Casting Call », qui fonctionne assez bien également. Même si je suis sans doute passé à côté de pas mal de trucs, car la nouvelle tourne autour des émissions télévisées de Rod Serling, au-delà de la seule Quatrième Dimension (que je ne peux pas vraiment prétendre connaître non plus, honte sur moi…) – il me manque donc sans doute pas mal de choses pour pleinement apprécier ce récit. Mais j’en ai apprécié l’approche, assez clairement comique, et même grotesque, mais futée dans ce registre – même quand il s’agit de mêler à tout ça l’ambition très « Actors Studio » d’un jeune acteur latino qui entend incarner au mieux une goule dans l’esprit du « Modèle de Pickman ». Ce qui est amusant, mais pas seulement – outre que, là aussi, nous avons un aperçu du caractère multimédia du corpus lovecraftien, en soi pas inintéressant. Certes, ma méconnaissance du contexte exact de la nouvelle joue contre elle, mais pas au point d’en amenuiser véritablement l’intérêt, trouvé-je.

 

On passe à (attention !) « The Clockwork King, The Queen of Glass and The Man with the Hundred Knives » (ouf), de Darrell Schweitzer. C’est une nouvelle étonnante et singulière à plus d’un titre – notamment parce que c’est la seule, ici, à jouer pleinement du registre onirique de Lovecraft, à la façon de la fantasy baroque des « Contrées du Rêve ». Et, à cet égard, c’est autrement plus convaincant que… eh bien, à peu près tout ce que j’avais pu lire dans La Clé d’Argent des Contrées du Rêve (sans même parler, obviously, des abominations de Brian Lumley). Ceci, surtout, dans la mesure où la nouvelle garde en même temps une assise « terrestre » et invite sans ambages à questionner la santé mentale des principaux protagonistes, narrateur éventuellement non fiable inclus comme de juste. Et, enfin, cet onirisme est radicalement perverti dans une optique pleinement cauchemardesque. Vraiment un texte intéressant, singulier, et qui produit son effet – parmi ce qu’il y a de mieux dans cette anthologie, en ce qui me concerne.

 

Nicholas Royle, avec « The Other Man », livre une variation sur le double, pas spécialement lovecraftienne (même si on laisse entendre qu’il y a de « Je suis d’ailleurs » dans tout ça), et un peu terne… Non, je suppose que c’est plus qu’honnête dans son genre, mais, très franchement ça ne m’a pas emballé – à l’instar de sa nouvelle « Rotterdam » dans Black Wings. Ça m’ennuie d’autant plus que mon premier contact avec cet auteur, sa nouvelle « Le Leurre » dans le n° 21 du Visage Vert, m’avait bien autrement séduit. Je suis convaincu qu’il y a quelque chose de très intéressant chez lui, mais je passe décidément à côté de pas mal de ses textes…

 

J’ai davantage adhéré à « Waiting at the Crossroads Motel », de Steve Rasnic Tem, nouvelle qui suinte le mal à l’état pur. Nous y suivons un personnage proprement répugnant, qui accomplit avec sa pauvre famille foutue depuis le départ une sorte de halte rituelle dans un motel aussi répugnant que lui-même. On y devine une forme de généalogie morbide typiquement lovecraftienne, qui peut renvoyer à Dunwich comme à Innsmouth (ou à la Kingsport du « Festival »), mais « modernisée » dans le plus bassement matérialiste des contextes – lequel est pourtant en même temps teinté de vagues cultes ancestraux, quelque part entre le décorum et la substance, qui contribuent en même temps à la perpétuation du « mauvais sang » (et renforcent à mes yeux le lien avec « Le Festival »). C’est le type même du texte poisseux, qui suinte, oui, et qui inspire un vague dégoût – et c’est une vraie réussite dans ce registre.

 

Suit « The Wilcox Remainder », de Brian Evenson, ultime variation sur « L’Appel de Cthulhu », comme son titre le laisse entendre. Le narrateur y a maille à partir avec une petite statuette (exactement celle que vous supposez) qui refuse de le laisser tranquille ; la nouvelle, dès le départ, laisse entendre que ledit narrateur pourrait bien être fou, et donc non fiable – un classique du genre qui, du coup, peut renvoyer davantage à d’autres nouvelles de Lovecraft, moins « cthuliennes », notamment « Le Modèle de Pickman » et « Le Monstre sur le seuil ». C’est bien fait dans son genre, ça fonctionne. Pourtant, je ne peux m’empêcher de ressentir une vague déception – à vrai dire la même qui s’empare toujours de moi quand je lis une nouvelle d’horreur de Brian Evenson, et peine à y reconnaître l’auteur d’Inversion, de La Confrérie des mutilés, éventuellement même de Baby Leg ou de Père des mensonges… Davantage celui d’Alien : No Exit, pour le coup ? Enfin, non, quand même pas : c’est bien quand même, oui. C’est juste que, comme toujours, j’en attendais davantage…

 

« Correlated Discontents », de Rick Dakan, est une nouvelle bien autrement ambitieuse – et peut-être cela m’a-t-il encore davantage incité à baisser la note de la nouvelle de Brian Evenson, à vrai dire. Comme le récit de Darrell Schweitzer un peu plus haut, celui de Rick Dakan bénéficie de sa singularité dans cette anthologie – mais si « The Clockwork King, The Queen of Glass and the Man with the Hundred Knives » jouait de la carte de la fantasy, « Correlated Discontents » joue de celle de la science-fiction – même un peu « TGCM », certes. L’idée est celle d’un programme informatique empruntant une interface humaine, et supposer rendre la personnalité de feu Howard Phillips Lovecraft après avoir ingurgité, analysé et digéré toute sa correspondance – qu’il s’agit ensuite de régurgiter, via donc un homme de chair et de sang, pour donner des réponses « authentiques » dans un contexte de conversation, en piochant pourtant dans des citations d’un objet parfois fort éloigné. L’idée est assez fascinante en soi – et la fin de la nouvelle est dans la droite lignée du postulat –, mais le récit ne met pas tous ses œufs (j’ai failli écrire « ses yeux »…) dans le même panier : lors de la démonstration publique du procédé, fans et non-fans amenés à questionner « Lovecraft » et à se réjouir de la parfaite authenticité de ses réponses biaisent bien vite le propos de l’expérience en interrogeant le personnage sur son racisme – frontalement. Le sujet est délicat, mais joliment amené – et ce d’autant plus qu’il faut intégrer dans l’équation « l’interface humaine », un jeune étudiant, et plus ou moins toujours un fan, qui est ainsi amené à prononcer les propos les plus outrancièrement racistes… tout en se laissant progressivement submerger par la personnalité de synthèse de Lovecraft. En même temps, il ne s’agit pas d’un texte bêtement à charge, c’est même tout sauf ça ; il sait se montrer assez subtil à tous ces égards, pertinent de bout en bout. Il y a bien plus de substance dans cette histoire que dans un bon millier sinon million de « débats » sur le racisme de Lovecraft. En même temps, ce n’est pas la même approche que celle de Victor LaValle dans La Ballade de Black Tom, mais elle me paraît tout aussi pertinente. Vraiment, j’ai trouvé ça très intéressant – casse-gueule, mais en fait d’autant plus intéressant.

 

Donald Tyson, avec « The Skinless Face », joue dans un tout autre registre, bien autrement classique – en fait un qui peut rappeler celui de Brian Evenson ? Avec tout de même un côté « grosse horreur qui tâche » autrement prononcé… De fait, l’histoire est somme toute assez banale : une expédition archéologique qui fait une dangereuse découverte du côté de la Mongolie, ce qui ne manque pas de rappeler Les Montagnes Hallucinées ou encore « Dans l'abîme du temps »… Cela dit, dans son genre, c’est vraiment très bien fait – et assez effrayant, oui, avec un vague malaise quand se révèle la nature de la statue dégagée des sables… C’est le moment pulp de l’anthologie, disons – et une réussite dans son domaine. Un texte qui ne brille ni par l’ambition ni par l’originalité, mais on s’en cogne, c’est un bon moment de lecture pour qui aime l’horreur pas-seulement-lovecraftienne-même-si-ici-très-lovecraftienne-pour-le-coup.

 

« The History of a Letter, as related by Jason V Brock » convainc beaucoup moins : il s’agit… eh bien, d’une lettre, auteur inconnu, destinataire inconnu et propos inconnu. Peut-être s’agissait-il de traiter de l’indicible lovecraftien, peut-être s’agissait-il en même temps de parodier la manière lovecraftienne, ou, piste au moins aussi valable, la critique lovecraftienne (avec le procédé de l’annotation inutile…), mais, pour le coup, nous avons essentiellement un texte qui ne mène nulle part, en fait une blague, et, oui, un peu mauvaise (mais pas de celles qui emportent l’adhésion), une blague en tout cas qui dure sans doute bien trop longtemps et s’avère d’un intérêt très, très limité. Une fausse note.

 

Et l’anthologie de se conclure sur « Appointed », de Chet Williamson, une nouvelle là encore relativement classique, encore que dans une veine de l’horreur rappelant bien davantage Stephen King que Lovecraft. Son contexte, à vrai dire, est ce qu’il y a de plus intéressant, avec ces conventions geekissimes, où se retrouvent sans cesse des acteurs de seconde zone, qui ont « brillé » il y a des décennies de cela dans tel ou tel film d’horreur à petit budget, éventuellement de la lovecrafterie à gros sabots, et qui, trente ou quarante ans plus tard, en sont réduits à mendier quelques piécettes en échange de leur autographe sur un DVD qu’ils n’ont aucune envie de s’infliger. La nouvelle a dès lors quelque chose de doux-amer, plus que de véritablement drôle, qui touche étonnamment, même quand il s’agit de mener l’histoire à son terme en accumulant les codes du genre. Ceci tout en jouant (de nouveau, ça revient décidément souvent dans cette anthologie) de la popularité multimédia de Lovecraft. Oui, une réussite !

 

Bilan ? Allez, essayons de classer tout ça, du moins bon au meilleur…

 

Dans le moins bon, je relève quatre nouvelles : celle de Tom Fletcher, « View » ; celle de Richard Gavin, « The Abject » ; celle de Melanie Tem, « Dahlias » ; et enfin celle de Jason V Brock, « The History of a Letter ». Je serais tenté de mettre à part celle de Melanie Tem, tout de même, qui n’est probablement pas mauvaise, mais m’a laissé de marbre, c’est tout… « The Abject » est en fait la seule nouvelle du recueil que j’ai vraiment envie de qualifier de « mauvaise » ; et ceci d'autant plus qu'elle aurait pu s'avérer très intéressante avec un peu plus de constance et de compétence dans la narration. Le reste est, soit un peu trop médiocre, soit indifférent en ce qui me concerne.

 

Après quoi, j’ai envie de rassembler quatre nouvelles qui fonctionnent tout à fait, si elles ne m’emballent pas des masses non plus – disons des nouvelles « honnêtes », mieux que médiocres, mais peut-être pas au point où je pourrais les qualifier véritablement de « bonnes » sans sourciller : « When Death Wakes Me to Myself », de John Shirley ; « King of Cat Swamp », de Jonathan Thomas ; « Bloom », de John Langan ; et enfin « The Other Man », de Nicholas Royle. Le cas de « Bloom » est un peu litigieux : à certains égards, j’aurais envie de faire figurer cette nouvelle dans la catégorie au-dessus, mais, j’ai beau tourner ça dans tous les sens, j’ai le sentiment, pas bien assis du tout, qu’il y manque pourtant quelque chose, un je-ne-sais-quoi qui… Bon, bref.

 

Viennent maintenant six nouvelles que je qualifie de « bonnes », voire plus, sans l’ombre d’une hésitation : celle de Nick Mamatas, « Dead Media » (même s'il y a indéniablement à y redire) ; celle de Don Webb, « Casting Call » ; celle de Steve Rasnic Tem, « Waiting at the Crossroads Motel » ; celle de Brian Evenson, « The Wilcox Remainder » ; celle de Donald Tyson, « The Skinless Face » ; et enfin celle de Chet Williamson, « Appointed ». Les cas de Brian Evenson et de Donald Tyson sont un peu limites à leur tour, car il s’agit de deux textes trèèèès classiques (outre que mon ressenti concernant Evenson est donc un peu biaisé), et en même temps très efficaces – ce sont des textes « pro », ce qui n’est souvent pas exactement un compliment, mais je ne peux nier avoir pris un certain plaisir à leur lecture, alors autant ne pas chipoter. En même temps, dans cette catégorie, je suis tenté de mettre en avant les contributions de Steve Rasnic Tem et de Chet Williamson – qui sont à l’extrême limite de mériter la classification dans la catégorie au-dessus…

 

Mais j’ai voulu distinguer les quatre textes qui m’ont le plus emballé : il s’agit de « Houndwife », de Caitlín R. Kiernan ; « And the Sea Gave Up the Dead », de Jason C. Eckhardt ; « The Clockwork King, The Queen of Glass and The Man with the Hundred Knives », de Darrell Schweitzer ; et enfin « Correlated Discontents », de Rick Dakan. Ce sont en même temps des textes assez différents – ceux de Darrell Schweitzer et de Rick Dakan ont gagné leur place dans cette ultime catégorie de par leur ambition et leur singularité, et ce pourtant de manière on ne peut plus différente ; tandis que « And the Sea Gave Up the Dead » a fini ici par son côté très ludique, disons même fun. Mais ce qui m’apparaît clair, oui – et ce alors même qu’il ne s’agit pas exactement d’une nouvelle très claire… c’est que la palme, dans Black Wings II, revient (une fois de plus ?) à Caitlín R. Kiernan.

 

Quoi qu’il en soit, le niveau est globalement élevé voire un peu plus que ça – incomparablement plus en tout cas que dans l’anthologie lovecraftienne ou para-lovecraftienne-truc lambda. J’ai dans l’ensemble lu cette deuxième livraison de Black Wings avec beaucoup de plaisir – et vais poursuivre, prochainement, en (re)lisant (pour le coup) Black Wings III. Restez tunés…

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