Titre original : Pembalasan ratu pantai selatan.
Titres alternatifs : Lady Terminator, The Revenge Of The South Seas Queen.
Réalisateur : Jalil Jackson (= H. Tjut Djalil).
Année : 1988.
Pays : Indonésie.
Genre : Action / Fantastique… Nanar
Durée : 1h22.
Acteurs principaux : Barbara Anne Constable, Christopher J. Hart…
Le plagiat est un art à part entière, dans lequel certains sont passés maîtres. A l’heure actuelle, les abominables productions types Asylum en témoignent assez, et le nanardeur ne peut s’empêcher de penser avec émotion au regretté Bruno Mattei, une des plus fortes figures du genre. Mais quand le plagiat se teinte d’exotisme, c’est aussi l’assurance d’un spectacle hors du commun, où le cheap et la mauvaise foi traditionnels en la matière se voient adjoindre une certaine dose de décalage culturel qui peut faire la différence et, d’un abject naveton, faire un réjouissant nanar. Preuve en est ce Nasty Hunter indonésien, également connu sous le nom de Lady Terminator (on se demande bien pourquoi…), qui, au royaume du mauvais goût, doit être quelque chose comme un haut fonctionnaire.
Effectivement, Nasty Hunter est un plagiat total du Terminator de James Cameron : de nombreuses scènes sont directement transposées d’un film à l’autre, et une des (lamentables) actrices se fend même d’un « Hi hi ! Regarde mes muscles ! On dirait Arnold Schwarzenegger ! » qui laisse pantois. Pourtant, ici, pas de cyborg ni de paradoxe temporel. Ah bon, ben c’est pas tant que ça un plagiat de Terminator, alors ? Eh bien si, mais qui n’en est que plus absurde…
Nasty Hunter est censé se fonder sur une légende indonésienne, « la légende de la reine des mers du Sud ». Ladite reine est une vilaine sorcière nymphomane, qui baise à tout va les mâles de passage, et les tue à l’aide de sa seule foufoune (authentique). Mais survient un jour un aventurier occidental, qui résiste aux sortilèges de la sorcière, et use d’un objet magique pour vaincre son pouvoir diabolique. Celle-ci, furax, jure de se venger sur la descendance du sacripant, exactement 100 ans plus tard. Logique.
100 ans plus tard, donc. Nous sommes… Où ça ? Pas facile à dire… Parce qu’on est devant un exemple assez bouleversant « d’américanisation du produit ». La sorcière était très typée indonésienne, ainsi que son château, une bonne partie des décors et les trois-quarts du casting. Pourtant (et Nikita s’en explique très bien dans sa chouette chronique), le spectateur est vite pris d’un doute : il semblerait en effet que les auteurs du film cherchent à nous faire croire que l’action se déroule aux Etats-Unis, probablement du côté de Los Angeles… Mais, pour y croire, il faut vraiment être bon public, parce que cette Amérique-là ressemble quand même furieusement à Djakarta, et, si les « expatriés » sont assez nombreux parmi les acteurs principaux (pas tous, ceci dit), la quasi-totalité des seconds rôles et des figurants ne fait pas franchement WASP… Pour faire simple : on n’y croit pas deux secondes. On n’aurait rien eu à redire si le film se déroulait en Indonésie (d’autant plus que la légende, qui est évoquée directement, renvoie au folklore local) ; mais non, il faut que ça soit les Etats-Unis. Ah. Bon. Ben, la crise y a fait des dégâts, alors, et l’immigration y a été bien plus asiatique que latino-américaine (finalement, c’est peut-être de la science-fiction, du coup…).
Mais revenons à nos moutons. Une jeune et jolie (et stupide, mais cela va de soi) étudiante en anthropologie fait des recherches sur la légende de la reine des mers du Sud, et un vieux guignol (asiatique) lui remet un livre en lui disant que ça pourrait être dangereux. Elle s’en fout, elle n’est pas superstitieuse. D’ailleurs, elle s’embarque dans un petit bateau de pêche pour aller faire de la plongée là où est supposé se trouver le château de la sorcière (cette mer du Sud, on supposera donc qu’elle est à côté de Los Angeles, hein). Alors qu’elle frétille en bikini, elle se trouve soudain prise dans un truc bizarre, et on la retrouve dans une chambre glauque, où un serpent lui rentre dans le pilou-pilou (re-authentique). Ayé, elle est possédée par la sorcière, et va pouvoir accomplir la malédiction. Elle nage jusqu’à la plage, sort de la flotte toute nue (ben tiens), et tue deux jeunes couillons, de manière passablement gratuite, avec l’arme terrible que constitue son entrejambes.
Pour le moment, c’est pas très Terminator, je vous l’accorde (ça donne plus l'impression d'une série Z érotique et en principe horrifique). Mais ça arrive. En effet, la cible de la sorcière, c’est une insupportable dinde poussant la chansonnette ringarde (et elle aussi très typée, à la différence de la « terminatrice »), dernière descendante de l’aventurier occidental du prologue. Et c’est parti. La sorcière s’habille en cuir, garde une expression figée en permance, s’arme d’un véritable arsenal, et se met à dégommer tout sur son passage, étant pour sa part invulnérable aux balles. Comme dans Terminator, elle débarque dans une boite de nuit (là où l’autre grognasse fait son show – horrible séquence « musicale » qui nous est infligée en intégralité…), et dézingue du figurant à tout va. La chanteuse prend la fuite, aidée par un flic blondinet et ses potes (dont un personnage terrible, L’Homme A La Mulette Satanique, qui est à lui-seul un plaidoyer pour l’éradication impitoyable des odieux sadiques capillicoles) : les scènes de poursuite en voiture calquent celles de Terminator. Comme dans le film de James Cameron, la vilaine s’en prend ensuite au commissariat de police où la donzelle s’est réfugiée et tue tout le monde sur son passage. De même, elle se rend ensuite dans un hôtel… et se lance dans une auto-réparation pseudo-gore de son œil (une sorte de balle de ping pong qui fait « ploc » en tombant dans le lavabo), exactement comme dans Terminator… sauf qu’elle n’a jamais été blessée au visage et que, rappelons-le, elle n’est pas un cyborg ! Et ainsi de suite. Tout ou presque est repris à Terminator, en dépit du bon sens et du bon goût.
Un point positif, ceci dit : comme dans l’original, c’est rythmé et ça pète bien. Seulement c’est ridicule… et les dialogues tous plus affligeants les uns que les autres n’arrangent rien à l’affaire. On finit par en arriver à une ahurissante conclusion, où ça défouraille de partout, une maquette d’avion explose quand les potes du flics débarque dans un hélicoptère, lequel explose bientôt à son tour (mais a le bon goût de rester suspendu à un fil en nylon), quand la sorcière se transforme, non pas en squelette cybernétique, bien sûr, mais en une sorte de zombie raté qui émet des petits rayons lasers par les yeux.
Consternant. Un nanar sympathique, au final, même si on a vu bien plus mauvais. Par contre, on a rarement vu un plagiat aussi jusqu’au-boutiste et en même temps aussi invraisemblable…
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