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"Confessions d'un linceul", de Clive Barker

Publié le par Nébal

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BARKER (Clive), Confessions d’un linceul, [Books Of Blood, Vol. 3], traduit de l’anglais par Hélène Devaux-Minié, Paris, J’ai lu, coll. Science-fiction – Fantastique, [1984, 1990, 1994] 2003, 313 p.

 

« Livres de sang », tome 3, cinq nouvelles fantastiques. Dans tous les sens du terme ?

 

On commence avec « L’Enfant de celluloïd » : un petit truand évadé de prison meurt d’un cancer (pas d’bol) alors qu’il se planque dans un vieux cinéma. Quelques mois plus tard, à la fermeture, d’étranges événements se produisent dans ledit Palace, faisant intervenir des hallucinations (?) sortant tout droit des plus célèbres bobines filmiques. Une nouvelle-hommage qui joue bien davantage la carte de l’humour que celle de l’horreur, même si celle-ci n’est pas tout à fait absente. Plus ou moins convaincant…

 

La déception, la grosse déception dans ce volume, c’est cependant la deuxième nouvelle, hélas la plus longue (elle est probablement trop longue, d’ailleurs). « Rawhead Rex » commence très bien, avec la description du quotidien du petit village anglais de Zeal infesté par les touristes londoniens, et la résurrection d’une vilaine créature géante suite au déplacement malvenu d’une grosse pierre dans un champ. Là encore, la nouvelle – très « série B » – ne manque pas d’humour, et certaines scènes sont tout à fait réussies (notamment celles impliquant le bedeau). Il n’en reste pas moins que ce long récit m’a semblé, d’une part, passablement convenu, et, d’autre part, tournant un peu en roue libre, accumulant les péripéties répétitives sans véritable projet d’ensemble. Une fâcheuse impression de déjà-lu, donc, et d’un auteur, par ailleurs fort doué, qui, pour une fois, ne se fatigue pas trop ; mais ça n’engage bien entendu que moi…

 

À s’en tenir à ces deux premières nouvelles, le résultat, sans être calamiteux, n’est en tout cas clairement pas à la hauteur des deux précédents « Livres de sang ». Heureusement, les choses s’améliorent sensiblement par la suite, avec des textes bien plus convaincants, voire franchement excellents.

 

Suit, donc, « Confessions d’un linceul (de pornographe) » : un comptable, bon catholique, est injustement accusé de « pornographie » (horreur glauque !), ce qui détruit sa vie ; il entreprend de se venger des « brutes » qui lui ont fait le coup, mais sa vengeance tourne court… C’est en fait à titre posthume qu’il saura prendre sa revanche, sous la forme d’un linceul animé… mais il lui restera encore à confesser ses péchés. Une fois de plus, l’humour est très présent dans cette nouvelle qui joue astucieusement du code du fantôme-drap. Mais le résultat est autrement convaincant que dans ce qui précède, et c’est avec un vrai bonheur que l’on lit ce texte aussi horrible que drôle.

 

« Les Boucs émissaires » est une nouvelle plus courte, et assez perturbante, sur quatre touristes qui s’échouent sur une île ne figurant sur aucune carte. Je ne saurais en dévoiler davantage ici sous peine de tout gâcher, mais cette courte pièce est tout à fait remarquable, notamment du fait de son ambiance lourde d’inquiétante étrangeté. Une nouvelle très noire, qui sait renouveler un thème éculé avec brio.

 

Le meilleur texte de ces Confessions d’un linceul est cependant à mon sens le dernier, « Débris humains », notamment du fait de son superbe personnage de jeune prostitué, Gavin ; celui-ci, en faisant le trottoir, est amené à suivre dans son appartement un mystérieux archéologue, qui garde dans sa baignoire une étrange et grotesque statue romaine… Là encore, je ne saurais en dire plus ici, sous peine de révélations intempestives. Mais on pourrait sans doute noter que le fantastique, pour être très bien utilisé et tout à fait convaincant, n’est ici largement qu’un prétexte à une belle étude de personnage, finalement très réaliste. Et sombre. Le point d’orgue du recueil en ce qui me concerne, donc.

 

Le niveau a un peu baissé par rapport aux deux premiers « Livres de sang », ai-je trouvé, mais ces Confessions d’un linceul restent tout à fait plaisantes. J’espère seulement que la chute – lente, mais bien réelle – ne va pas se prolonger avec les suivants…

 

On verra bien avec Apocalypses.

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