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CR "Inflorenza" : l'hôpital

Publié le par Nébal

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Nouvelle partie d’Inflorenza.

 

Nous étions quatre joueurs (les retours à la ligne marquent les instances ; je n'étais pas Confident, aucun n’a d’ailleurs été désigné formellement : première erreur qui a été suivie d’un certain nombre d’autres… j’aurais probablement dû endosser ce rôle). Même si nous avons évoqué la suggestion de théâtre de la « forêt de chair », nous l’avons largement mis de côté (il n’est réapparu que tardivement), et avons développé un décor lors d’un tour préalable.

 

Les « phrases » sont indiquées par le soulignement, avec le thème qui les a inspirées (je n’ai par contre pas relevé quelles phrases étaient rayées en cas de sacrifice).

 

Décor

 

Un vieil hôpital dans la forêt, (plus ou moins) à l’abandon.

Près de l’hôpital, un jardin à la française étonnamment préservé, avec un labyrinthe en son cœur, et bordé par une falaise d’où tombe une cascade.

Des gens se promènent dans le jardin, d’autres se reposent sur la falaise.

Une caravane d’une vingtaine de trafiquants d’organes est venue voir ce qui pouvait être récupéré dans l’hôpital.

 

Premier tour

 

Le premier personnage, dont on apprendra plus tard qu’il se nomme Gabriel, est peut-être un ancien patient. Il ne se souvient pas exactement, à cause du Syndrome de l’Oubli ; quant aux dossiers, ils ont brûlé… Il souffre d’une forme de putréfaction qui gagne l’ensemble de son corps, d’autres malades dans l’hôpital sont atteints, et certains ont disparu passé un certain stade. Il a un tiers du corps pourri. Chair : je veux échapper à la maladie.

Je suis un enfant d’environ douze ans ; je vis dans une pièce sombre avec mon frère aîné. Plus personne ne s’occupe de nous. Nous sommes malades, mais considérons que nous devons passer à un stade supérieur grâce à la maladie. Mais nous avons faim. Aussi mon frère suggère-t-il que nous nous mangions mutuellement. Chair : je veux user de la maladie pour dépasser mon frère.

Le troisième personnage est sain, et s’occupe des gens de l’hôpital. On le désignera vite comme étant le directeur. Mémoire : je veux que les malades se souviennent du passé.

Le dernier personnage, qu’on appellera plus tard Haroun, fait partie de la caravane arrivée il y a quelques jours. Cet homme de main se souvient vaguement d’être déjà venu là. Il le dit à Tarek, qui ne le croît pas, et prétend que c’est impossible à cause de l’itinéraire suivi par la caravane. Mais Tarek n’arrête pas de lui mentir… Ils interrogent les « fous » du jardin ; il y aurait un « chef », qui, lui, doit savoir ce qu’il en est. Mémoire : je veux obtenir des informations du directeur de l’hôpital.

 

Deuxième tour

 

Quand les malades ont vu la caravane, le directeur a dit aux patients de se cacher dans les caves de l’hôpital. Ils récupèrent des armes improvisées ; ils savent en effet que les caravaniers constituent une menace. Mais les patients n’aiment pas le sous-sol. Il y a une petite pièce au fond dont ils ont perdu la clef. Gabriel, dont la maladie n’est pas trop visible, a eu le droit de remonter pour assister à l’entretien entre le directeur et un groupe de caravaniers devant l’hôpital. Mémoire : je suis le témoin.

J’ai entendu du bruit non loin, c’est la première fois depuis des jours. Mon frère me dit de ne pas y prêter attention. Je ne lui fais plus confiance. Je frappe violemment la porte… qui s’ouvre. Elle donne sur un couloir faiblement éclairé, avec des traces de rouille sur les murs. Société : je suis prêt à quitter mon frère.

Le directeur a invité le chef de la caravane à venir discuter de ses objectifs. Il est avec son « secrétaire », Gabriel, qui est un des seuls à savoir encore écrire. Cela fait longtemps qu’ils n’ont pas vu quelqu’un. Le directeur fait en sorte que les caravaniers ne se doutent de rien (Haroun, Science : je hais ces peuplades ignares). Mais Gabriel se rend compte que la pourriture a gagné son bras, et, du coup, ne note rien.

Haroun laisse parler ses préjugés. Il va devoir aller tout seul dans l’hôpital. Il attend la nuit, et fait le guet. Il s’approche enfin de l’hôpital, franchit le mur en ruine et le jardin. Il n’entend pas le moindre bruit. Il faut qu’il trouve le bureau du directeur ; il cherche des dossiers : peut-être a-t-il travaillé ici ? Chair : j’ai peur de la maladie.

 

Troisième tour

 

Gabriel est puni pour ne pas avoir été capable de retranscrire la prestation du docteur. Il doit passer toute la nuit à genoux dans la « salle des archives » (les étagères ont été démontées, mais l’histoire de l’hôpital est écrite sur les murs). Il passe la nuit à méditer. Quelqu’un pousse la porte : c’est Haroun. Gabriel recule : « Personne ne passe le labyrinthe, normalement ! » Le directeur l’a planté pour protéger les patients. Gabriel demande à Haroun s’il est sain. Celui-ci prend peur : « Ne t’approche pas de moi ! Je suis déjà venu ici ! » Gabriel dit que cela doit être vrai, puisque seuls les habitants de l’hôpital peuvent passer le labyrinthe. Gabriel et Haroun (qui n’est capable que de lire son nom) cherchent des informations sur les murs. Mais il ne faut pas allumer de lumière dans les archives. Haroun trouve enfin son nom, et arrache le bout de tapisserie où il figure. Le directeur se réveille. Nature : le labyrinthe nous protège-t-il ?

Je rôde dans les couloirs, à l’affût des bruits, mais ne rencontre personne. Mon frère me supplie de revenir en arrière, dit qu’on était mieux dans la pièce tous les deux, mais je ne l’écoute pas. De frustration, je finis par cogner un mur, et une tache de rouille se répand dans le couloir. Corruption : je propage la rouille.

Le directeur donne des instructions, il est entouré de gens à peu près sains qui maintiennent l’ordre dans l’hôpital. Ils mettent des cadenas sur les portes du sous-sol. Durant la nuit, il se réveille brutalement, et se rend dans la salle des archives. Il voit tout de suite que l’endroit est dégradé. Mais il ne se souvient pas de ce qui était écrit sur la tapisserie arrachée. (Corruption : ne pas se souvenir propage la rouille ; Haroun, Science : j’ai peur de perdre le savoir contenu sur ce tissu ; moi, Religion : il n’y aura de Dieu ni pour moi, ni pour personne).

Haroun se faufile hors de l’hôpital, par le labyrinthe. Il rejoint la caravane sans se faire voir. Au matin, le chef de la caravane discute de ce qu’il faut faire de cet endroit. Haroun va voir Fatma l’ancienne. Il lui montre le tissu ; mais il est impossible de lire ce qui y est écrit à cause de la rouille qui l’imprègne. Fatma demande à Haroun où il a trouvé ce tissu… mais la rouille se propage sur ses mains.

 

Quatrième tour

 

Gabriel se défend auprès du directeur, mais celui-ci ne veut rien entendre. Il le fouette. La chair pourrie ne résiste pas. Le directeur laisse Gabriel dans la salle des archives pour qu’il médite sur sa faute, et l’oblige à graver son péché sur le plancher. Mais il doit sans cesse recommencer, car tout s’efface. Religion : le plancher ne veut pas de ma faute.

J’ai pris conscience de mon pouvoir en frappant le mur. Cela va contre mon habitude de soumission. Je me mets à penser que, pour que quelqu’un me remarque, il faut que je continue sur cette voie. C’est pourquoi j’essaye de tuer mon frère, sans y parvenir. Au moment où je tente de l’étrangler, sa propre rouille se répand sur moi, et je me souviens que nous sommes indissolublement liés, ainsi qu’au directeur. Mémoire : je suis lié au directeur.

Le directeur souhaite faire partir les caravaniers. La nuit, il cherche avec ses hommes « sains » à tuer des malades et à les dépecer pour que l’atrocité fasse peur aux caravaniers. Mais il va trop loin, ses hommes ne veulent pas lui obéir. Mémoire : ils vont se souvenir de ce soir-là.

Haroun est pris de panique, il sort sa lame, et cherche à poignarder Fatma, sur qui la maladie se répand. Mais il a peur de la maladie, et n’y arrive pas. Elle hurle. Société : j’ai trahi le clan.

 

Cinquième tour

 

La nuit est tombée. Gabriel entend des bruits de course dans les couloirs. On lui dit de venir, que le directeur est allé trop loin. Il descend dans les sous-sols. Deux des bras-droits du directeur le maintiennent. Personne ne comprend bien ce qui se passe… mais tout le monde se souvient des coups de fouet. « Mettez-le dans la petite pièce du fond ! » Elle est ouverte… Mais dans la pièce, tout est moisi ou rouillé. Le directeur a un sursaut d’autorité, et sermonne ses patients avec une ferveur jamais atteinte auparavant. Tout le monde se sent penaud (le directeur, Clan : ils me doivent leur survie). Gabriel voit les silhouettes des enfants, qui sont complètement putréfiés, à part leurs yeux. Égrégore : je vois les malades au-delà du Seuil (ceux qui avaient disparu) ; Gabriel s’enfuit dans le labyrinthe (Nature : je suis perdu) ; je me rends compte du caractère foncièrement maléfique du directeur (Égrégore : il y a plus démoniaque que moi dans cet endroit).

Après ma tentative de tuer mon frère, il y a eu beaucoup d’agitation dans le sous-sol, et j’ai enfin vu des gens. J’ai notamment vu le directeur, et le mal en lui. Je trouve insupportable que ce mal dont il suinte littéralement ne se traduise pas par la pourriture de son corps. Je veux le contaminer de ma rouille, et y parviens. Égrégore : je peux corrompre ce qui a toujours résisté. Le directeur s’en ressent dans son corps (dont la moitié pourrit) et dans son âme (Égrégore : la rouille a touché mon âme). Haroun a peur des conséquences (Mémoire : j’ai peur que la mémoire du directeur ne s’éteigne). Gabriel est terrorisé à la vue de la rouille qui se répand sur l’ensemble de l’hôpital (Religion : cet endroit est maudit).

Le directeur fait un discours à sa communauté et à moi, il propose de s’allier avec moi. Je lui demande qui il est. Pour le directeur, je suis le premier malade. Mes parents sont morts peu de temps après notre arrivée. Il a nourri les enfants et les a protégés. Religion : nous sommes les enfants de la rouille.

Haroun s’enfuit du camp en hurlant que Fatma est malade. Profitant de l’agitation, il court vers l’hôpital pour retrouver le directeur. Il demande à un malade où est le directeur. Le malade ne répond pas. Haroun descend au sous-sol, où il voit le directeur haranguer sa communauté et réclamer la mort des caravaniers. Mais le directeur le repère. Je me mets à le vénérer. Haroun panique alors que les patients s’approchent de lui (Pulsions : j’ai agi sans réfléchir).

 

Sixième tour

 

Gabriel s’est enfoncé dans le labyrinthe, il en cherche vainement la sortie. L’hôpital se dégrade à vue d’œil, la rouille se répand partout. Gabriel se blesse aux buissons, il est couvert d’un sang couleur rouille. Il se rend compte que les arbres sont de chair, que les branches sont des membres, et il reconnaît des visages de disparus dans les fleurs. Il se rend sur un promontoire jamais vu auparavant. De là haut, il voit la caravane : des gens sains ! Il leur hurle de fuir cet enfer (Clan : fuyez, pauvres fous !)

Je m’approche d’Haroun, je lui demande pourquoi il est revenu, lui dis que je me souviens vaguement de son visage. J’essaie de lui prendre la main (parce qu’il est sain), mais mon frère m’arrête, me dit que « c’est mal ». Je lui demande s’il l’a reconnu. Société : mon frère me fait la morale.

Le directeur dit à ses hommes d’arrêter Haroun, lequel essaye de s’enfuir, et y parvient finalement. Société : ce que je veux construire n’a pas de bases solides.

Haroun sort de l’hôpital, il entend le bruit de la cascade, dont il se souvient, et s’en approche. Mémoire : la cascade est bienveillante.

 

Septième tour

 

Gabriel voit la caravane plier bagage et partir à grande vitesse. La rouille s’étend dans le jardin, et les caravaniers s’en sont rendu compte. Ils abandonnent Fatma. Gabriel, depuis son promontoire, voit Haroun courir vers la cascade, suivi par les malades avec à leur tête le directeur et moi (mon frère est à l’arrière, rétif). Ils encerclent Haroun à distance, mais ne peuvent s’approcher de la cascade. Égrégore : je fonds et deviens le labyrinthe.

Je suis tétanisé par le monde extérieur qui m’entoure, mais j’ai le sentiment que la rouille me protège. Je vois des visages dans le labyrinthe, qui éveillent le même souvenir que celui d’Haroun. Et parmi ces visages, je vois ceux de mes parents. Leurs bras putréfiés se tendent vers moi. J’ai peur, je veux m’enfuir, mais ils m’attrapent et m’arrachent la peau. Pulsions : la souffrance me rend ma colère.

Le directeur considère que, les caravaniers étant partis, il n’y a plus de danger pour menacer la communauté. Il cherche à persuader mon frère d’agir sur nos parents pour qu’ils me relâchent. Chair : nous sommes un seul corps.

Haroun constate qu’il ne peut pas s’échapper, il est à la merci des malades et ne peut rejoindre la caravane. Il se jette dans la cascade.

 

Débriefing

 

Disons-le tout net : cette session de jeu nous a tous laissé en définitive un goût plutôt amer en bouche, aussi avons-nous ressenti le besoin d’en faire longuement le bilan… Pourtant, tout n’était pas mauvais, loin de là (impression renforcée, je trouve, à la rédaction de ce compte rendu, en dépit de ses nombreuses incohérences – inévitables, sans doute), et je me suis pour ma part beaucoup amusé pendant la majeure partie du jeu (probablement plus encore que la fois précédente). Mais je tends à penser que nous n’avons pas su nous arrêter à temps, et que les derniers tours ont été laborieux (j’avais proposé, mais sans insister – j’aurais peut-être dû… –, de nous arrêter à la fin du cinquième tour ; rétrospectivement, un des joueurs a considéré que c’était surtout le dernier tour qui était de trop). Beaucoup de fils d’intrigue avaient été lancés, que nous n’avons pas su résoudre, en particulier celui concernant l’identité d’Haroun…

 

Je dois en partie faire mon mea culpa (c’est mon compte rendu personnel, après tout). Ainsi que je l’avais dit plus haut, j’aurais sans doute dû endosser la fonction de Confident (quelqu’un aurait dû le faire, en tout cas), notamment pour décider de la fin (donc), mais aussi pour trancher certains désaccords sur la tournure du récit, les motivations des personnages, et même les points de règle (que je ne connaissais pas si bien que ça, toutefois…), qui ont phagocyté la narration dans les derniers tours, et nui à l’ambiance et à l'immersion à force d’interruptions. J’ajouterais, pour me jeter encore quelques cailloux, que mon interprétation de mon rôle a peut-être, d’une part abusé du grand-guignol (tendance difficile à réfréner…), d’autre part – et c’est sans doute lié – abusé du surnaturel.

 

Mais il y a eu incontestablement des points positifs. Le fait d’élaborer ensemble le décor au préalable, notamment, a parfaitement rempli son office : le début était ainsi plus clair, et les personnages mieux posés, que dans la partie précédente. De plus, les instances étaient plus longues, riches et complexes, avec davantage d’interactions entre les joueurs. Enfin, tous les personnages ont été le plus souvent impliqués, et aucun en tout cas ne s’est trouvé « isolé » trop longtemps, la répartition étant assez équitable.

 

Cette partie a néanmoins soulevé beaucoup d’interrogations ; elle a pu donner un sentiment de « semi-échec », mais offre du coup une base de réflexion pour éviter de reproduire certaines erreurs à l’avenir. Le défaut majeur, donc, a été que nous n’avons pas su trouver une fin satisfaisante pour tous ; la session a été indûment prolongée ; les personnages de Gabriel et d’Haroun ont été un peu laissés en plan, et des questions importantes n’ont pas eu de réponse (notamment, donc, celle de l’identité d’Haroun). Je tends à penser que l’ordre des instances, ici, a pu jouer ; mais, au-delà, l’enchaînement mécanique des tableaux a nui à l’unité du récit en laissant des éléments importants à l’arrière trop longtemps, dont on ne savait plus ensuite quoi faire. Au-delà, nous avons été amenés à nous poser la question de la conception des personnages et de leurs motivations, qui a clairement opposé les joueurs entre eux, et généré une certaine tension, sous forme d’incompréhension mutuelle, dans les derniers tours…

 

Tous les commentaires, toutes les remarques, sont bienvenus. Si ce débriefing repose sur des éléments que nous avons tous ensemble évoqué au cours de la discussion qui a suivi la partie, il n’engage cependant que moi, ne fait que traduire mes impressions personnelles.

 

Malgré cette vague amertume finale, je reste très amateur du jeu de Thomas Munier, et souhaite renouveler prochainement l’expérience. Je veux croire que nous aurons appris de nos erreurs, et ne reproduirons pas certains des travers de cette session en particulier.

 

Et je me suis bien amusé quand même, non mais.

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