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"L'Epée de Welleran", de Lord Dunsany

Publié le par Nébal

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DUNSANY (Lord), L’Épée de Welleran, [The Sword of Welleran], traduit de l’anglais par Anne-Sylvie Homassel, illustrations de Sydney H. Sime, préface de Max Duperray, Rennes, Terre de Brume, coll. Terres fantastiques, [1908] 2004, 131 p.

 

L’Épée de Welleran est le troisième (petit) recueil de nouvelles de Lord Dunsany que je lis, après Les Dieux de Pegāna et Le Temps et les Dieux. Et – youpi – la fascination est intacte pour l’ensemble de ce nouveau volume – si l’on excepte la préface de Max Duperray, inintéressante et quasi illisible comme d’habitude, m’enfin bon, ça, c’est moi, hein.

 

Pourtant, ce recueil joue une carte assez différente des deux précédents, et témoigne d’une certaine évolution dans l’art de l’auteur. Les dieux n’y jouent cette fois qu’un rôle assez mineur, ou différent du moins, notamment dans la mesure où la mystique judéo-chrétienne y a une certaine influence, conférant à plusieurs des récits de ce troisième recueil une tonalité biblique, jusque dans les récits les plus épiques qui se font par ailleurs précurseurs de l’heroic fantasy. Mais il y a également – c’est peut-être moins étonnant – du celte là-dedans. Plus étrangement – à mes yeux de béotien en tout cas – on relève aussi dans L’Épée de Welleran plusieurs très courtes vignettes renvoyant davantage au fantastique qu’à la fantasy, et j’avoue que je n’attendais pas vraiment l’aristocrate irlandais sur ce terrain-là… Ces récits sont également très réussis, mais j’avoue tout de même y préférer la manière plus onirique qui caractérise les autres et qui, étrangement ou pas, est bel et bien celle qui a eu l’influence que l’on sait sur Lovecraft.

 

Un recueil plus disparate que les deux précédents, donc ; une « collection », sans véritable liant. Mais avec de sacrés textes. Je ne me sens pas, cependant, de détailler l’ensemble de ce très court recueil – ce qui reviendrait à se livrer à une vilaine paraphrase pour certaines très brèves vignettes, presque de poésie en prose, d’inspiration parfois assez macabre – et m’en tiendrai donc ici aux plus longs textes, que j’ai préférés.

 

On attaque donc en force avec « L’Épée de Welleran », récit centré sur la ville de Merimna, autrefois à la tête d’un puissant empire (dans les rêves de l’auteur, du moins), mais réduite à peau de chagrin. La ville est gardée par les statues de ses héros, Welleran en tête ; et ce sont ces héros qui, quand surgira le danger, sauveront une nouvelle fois – une dernière fois ? – la ville. Ce récit est absolument fabuleux. La plume passablement biblique, donc, manie avec une grande adresse les thématiques épiques pour faire de ce texte un précurseur remarquable de l’heroic fantasy, avec une subtilité dans le fond comme dans la forme qui mérite d’être mille fois soulignée. Une merveille, vous dis-je.

 

Autre récit remarquable, et qui suit immédiatement, « La Chute de Babbulkund » (lire Babylone ?) est sans doute celui où la patte biblique s’affiche le plus, non seulement dans la forme délicieuse, mais aussi dans le fond, quand bien même c’est à regret, puisque la religion du Seigneur se fait ici destructrice de merveilles… Très beau.

 

On change de manière, même si le fond biblique reste présent, avec « Les Cousines du peuple elfin », où une créature sans âme cherche à en obtenir une, attirée qu’elle est par une cathédrale, et au-delà, en un couple inséparable, par la beauté de la musique et les mystères de la foi. On est ici dans un registre bien plus intimiste que dans tout ce qui précède, mais Dunsany s’en sort remarquablement bien, et livre un texte juste et émouvant (et parfois drôle, quand il n’est pas tragique, aussi…).

 

Je passe sur plusieurs petites vignettes (encore que « Le Bandit de grand chemin » soit tout à fait saisissante) pour en arriver à un pur récit d’heroic fantasy, non dénué d’humour par ailleurs, avec « La Forteresse invincible, sauf par Sacnoth ». Tout y est, magicien, dragon, épée… Et c’est un régal, qui sait tirer la substantifique moelle des récits de chevalerie pour annoncer, déjà, Tolkien et compagnie.

 

Restent encore quelques courts récits tout à fait intéressants, dont « La Reine des villes » qui fait peut-être en partie écho à Babbulkund, mais c’est à mon sens dans ces quatre nouvelles plus longues que d’habitude que réside le meilleur de L’Épée de Welleran. Un recueil passablement différent des deux précédents, donc, mais tout aussi intéressant, dans son registre disparate. J’ai en tout cas été une nouvelle fois convaincu par l’art de Lord Dunsany, et ne compte bien évidemment pas en rester là. Suivront notamment les deux « Livres des Merveilles »…

CITRIQ

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T
Ca m étonne que tu ne fasses aucune mention des fautes, y en a bien une à chaque page, à moins que ton livre ait profité d une révision?? Quoiqu il en soit Contes d un Rêveur est au moins autant un<br /> sommet (puisque tu sembles les faire dans l ordre ;)).
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