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"La Dernière Frontière", d'Howard Fast

Publié le par Nébal

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FAST (Howard), La Dernière Frontière, [The Last Frontier], traduit de l'américain par Catherine de Palaminy, Paris, Gallmeister, coll. Totem, [1941] 2014, 307 p.

 

Vous vous en rappelez peut-être, c'est avec la brillante collection « Totem » des éditions Gallmeister que j'ai fait mes premières et plus bluffants découvertes dans le genre du western littéraire, avec Contrée indienne de Dorothy M. Johnson, Lonesome Dove de Larry McMurtry et Le Tireur de Glendon Swarthout. Il n'y avait donc rien que de très logique à ce que je continue de jeter un œil sur les publications de la collection. En avril dernier est paru cette Dernière Frontière d'Howard Fast (auteur notamment du Spartacus très politique adapté au cinéma par Stanley Kubrick avec Kirk Douglas), La couverture est assez éloquente : oui, il s'agit bien de tracer ici une page importante de la question indienne ; je ne pouvais donc pas décemment passer à côté.

 

Nous sommes en 1878. Les Indiens des plaines, et notamment les Cheyennes qui nous intéressent plus particulièrement ici, ont été parqués dans ce que l'on appelle alors le Territoire indien, aujourd'hui l'Oklahoma. Une terre pauvre, bien loin des plaines qu'arpentaient depuis des siècles les Cheyennes... C'est bien entendu inacceptable, et les Cheyennes comptent bien retrouver leur bien. Trois cents d'entre eux, hommes, femmes et enfants, décident donc de s'enfuir pour retourner dans leurs terres des Black Hills. Un baroud d'honneur, dans un pays tout entier à leurs trousses, où civils et surtout militaires, incarnant l'autorité de Washington, feront tout leur possible pour les ramener dans leur Territoire, idéal pour leur extinction programmée.

 

 La Dernière Frontière, qui repose pour autant que je sache sur une histoire vraie, nous rapporte ainsi le dernier sursaut de liberté et de dignité de la nation cheyenne, dans des États-Unis au développement rapide, qui s'empressent d'enterrer leurs premiers occupants. Mais le récit se montre d'autant plus fort et astucieux qu'il est ethnocentré : nous ne verrons pas, ici, le point de vue des Cheyennes ; nous devrons le deviner à travers les interrogations des officiers blancs qui ont pour mission de les ramener « chez eux », et qui ne comprennent pas cet exode, saugrenu et « illégitime » à leurs yeux. Ce déplacement, bien pensé, permet sans doute d'éviter de noyer le récit sous les « bons sentiments » ; nulle commisération, ici, et Howard Fast est trop adroit pour faire péter les violons à tout bout de champ. Son histoire n'en gagne que plus de poigne.

 

Certes, je ne ferais pas pour autant de La Dernière Frontière un chef-d'œuvre du genre, et il ne me paraît pas à même de rivaliser avec les trois titres que j'ai cités en début de chronique : il lui manque une certaine élégance stylistique, et en même temps une virulence dans le propos adroitement tempérée par une profonde humanité. Cela reste néanmoins un bon western, assez unique en son genre, poignant sans trémolos donc, et qui retrace avec finesse une page méconnue de la triste destinée du grand peuple cheyenne. Pas mal, donc, et même mieux que ça.

 

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