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"The Illustrated Man and other short stories / L'Homme Illustré et autres nouvelles", de Ray Bradbury

Publié le par Nébal

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BRADBURY (Ray), The Illustrated Man and other short stories / L’Homme Illustré et autres nouvelles, traduit de l’américain par Constantin Andronikov et Brigitte Mariot, préface de Thomas Day, Paris, Gallimard, coll. Folio Bilingue, [1951, 2002] 2011, 169 p. + [8] p. de pl.

 

Je dois confesser à ma grande honte n’avoir que très peu lu Ray Bradbury. Quasiment pas, à vrai dire : les Chroniques martiennes et Celui qui attend quand j’étais ado (je n’ai aucun souvenir ni de l’un ni de l’autre ; ça fait d’ailleurs longtemps que je me dis qu’il faudrait que je relise le premier, classique entre les classiques, tout de même) et plus récemment l’indispensable Fahrenheit 451 en anglais. Et c’est tout.

 

La parution dans la collection « Folio Bilingue » de ce petit volume m’a donc offert l’occasion de redécouvrir un brin l’auteur. Mais une précision s’impose d’emblée : sous ce titre de The Illustrated Man and other short stories / L’Homme Illustré et autres nouvelles, le lecteur ne trouvera pas l’ensemble du (célèbre) fix-up qu’est L’Homme Illustré, loin de là. Il ne s’agit que d’une très brève sélection de quatre nouvelles dont un prologue, « simplement » destinée à faire la rencontre avec l’auteur et son œuvre dans sa langue.

 

Je dois dire que j’ai même eu l’impression renforcée d’un ouvrage à vocation, disons, « pédagogique », par le choix des textes originaux et leur ordre, la langue très simple des deux premiers textes devenant plus riche et un brin plus complexe (tout en restant très abordable) dans les deux suivants ; mais peut-être n’est-ce qu’une impression… De toute façon, le texte français en parallèle offre une béquille bienvenue au cas où surviendrait la moindre difficulté, ce qui est bien après tout l’optique de ce genre de petits volumes, dont l’usage « scolaire » paraît couler de source (ce qui justifie sans doute la brièveté du recueil – néanmoins frustrante).

 

L’Homme Illustré est donc à la base un fix-up publié en 1951, le troisième ouvrage de l’auteur (juste après, notons-le, les Chroniques martiennes ; on pourra de même noter, tant qu’on y est, qu’il a été « adapté » au cinéma, pour un résultat semble-t-il passablement médiocre). Le caractère artificiel du lien entre les nouvelles saute très vite aux yeux, dès le prétexte (dans tous les sens du terme) que constitue « Prologue: The Illustrated Man / Prologue : L’Homme Illustré » (pp. 21-39). Nous y faisons la rencontre d’un homme mystérieux, abordant un voyageur « par un après-midi chaud de début septembre », et dont le corps entier est tatoué. Ou, plus exactement, illustré, tant l’œuvre qui recouvre sa peau sort de l’ordinaire. Cet Homme Illustré prétend avoir été tatoué ainsi par une sorcière, qu’il entend retrouver et tuer ; et il affirme que ses tatouages, changeants, racontent des histoires, et pas n’importe lesquelles : elles prédisent le futur… Le voyageur se perd dans la contemplation des tatouages, et nous entraîne avec lui dans le recueil.

 

Seules trois histoires du texte original ont donc été conservées ici, trois nouvelles entre science-fiction et fantastique, fort différentes les unes des autres. Nous commençons avec « Kaleidoscope / Kaléidoscope » (pp. 41-73), et je dois avouer avoir été soufflé par ce texte de science-fiction horrifique reposant sur une idée pourtant très simple (mais c’est après tout généralement le cas des meilleurs textes de SF, non ?) : une fusée explose en plein espace, son équipage se retrouve propulsé dans le vide ; les hommes, en scaphandre, mais qui n’ont pas eu le temps de prendre leur équipement de survie, sont voués à une mort certaine, tandis que l’un se dirige vers la Lune ou l’autre vers la Terre. Et ils se parlent, ne pouvant rien faire d’autre ; ils gémissent, s’insultent, se souviennent… Un horrible cauchemar, exprimé de manière très simple, mais d’une efficacité redoutable.

 

Suit une nouvelle plus ambitieuse en apparence, et passablement déstabilisante, puisque, avec « The Exiles / Les Bannis » (pp. 75-123), nous oscillons en permanence entre science-fiction et fantastique. Difficile d’en parler sans trop en dire… On se contentera donc de poser que la nouvelle, qui prend prétexte de la première expédition humaine à destination de la planète Mars, se trouve être en définitive un hommage aux grands noms de la littérature fantastique anglo-saxonne, étonnant mais réussi. On notera également au passage que ce texte préfigure en partie Fahrenheit 451, puisque nous y trouvons déjà des brûleurs de livres…

 

Et le recueil de s’achever (déjà !) avec « The Illustrated Man / L’Homme Illustré » (pp. 125-169), nouvelle passablement contradictoire avec le prologue envisagé plus haut, ce qui ne fait que ressortir davantage encore le caractère artificiel du fix-up (mais peu importe, a fortiori dans cette version abrégée). Nous assistons cette fois au tatouage de l’Homme Illustré, un employé de cirque obèse qui n’a pas d’autre choix que de devenir un freak s’il entend conserver son job ; mais le tatouage – prédisant le futur ? – aura très vite des conséquences perverses… Un beau texte, assez poignant.

 

 Au final, ce petit recueil, avec ce qu’il a de frustrant, remplit donc parfaitement son objectif : introduction judicieuse à l’auteur dans sa langue, il séduit et donne envie d’en lire plus. Je lirai sans doute un de ces jours le recueil intégral, et tant qu’à faire d’autres textes de Ray Bradbury ; il n’est franchement pas dit que j’aurais eu cette envie sans cette parution…

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