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"Lovecraft Studies", no. 33

Publié le par Nébal

"Lovecraft Studies", no. 33

Lovecraft Studies, no. 33, West Warwick, Necronomicon Press, Fall 1995, 36 p.

 

Retour, après une longue absence, aux fanzines lovecraftiens, parce que j’ai notamment pas mal de Lovecraft Studies (celui que je préfère à vue de nez), et vraiment plein de Crypt of Cthulhu, qui prennent la poussière dans ma bibliothèque. Il est bien temps de m’y remettre, et je vais tâcher d’en chroniquer régulièrement (même si je ne suis pas sûr que ça intéresse grand-monde à part moi, mais bon, hein, tant pis).

 

On commence avec « "Ex Oblivione" : The Contemplative Lovecraft », article de Paul Monteleone, qui part donc du poème en prose « Ex Oblivione » (dont je ne peux pas vraiment dire qu’il m’ait beaucoup marqué…) pour se pencher sur le pessimisme et l’indifférentisme de Lovecraft, à l’aune notamment des philosophes qui ont pu l’inspirer (comme Schopenhauer ou, pour remonter dans l’Antiquité, les matérialistes Epicure et Lucrèce) ou dont la pensée peut se révéler intéressante à titre de comparaison (l’auteur évoque ainsi Montaigne, mais aussi – même si c’est une très brève allusion en note, je ne peux m’empêcher de la relever… – Sade). Sont ainsi abordées, en trois temps, les conceptions lovecraftiennes de la vie, de « l’état contemplatif » propre au rêve, et de la mort (le deuxième étant préférable à la première, la dernière à tout le reste – se pose bien sûr alors la complexe question du suicide…). L’article est relativement intéressant quand il s’éloigne du texte de Lovecraft pour interroger les notions philosophiques, mais, hélas, il consiste essentiellement en une laborieuse paraphrase, extrêmement redondante, du poème en prose… Pas terrible, donc.

 

On reste dans la philosophie avec l’article suivant, signé Donald R. Burleson, « The Thing : On the Doorstep », qui s’intéresse à la notion de « Chose en soi » dans l’œuvre lovecraftienne, et plus particulièrement dans « Le Monstre sur le seuil » (le « Monstre » étant donc la « Chose » dans le texte original), avec un éclairage (façon de parler…) d’après les travaux de Kant et de Nietzsche. Si certains des délires déconstructivistes de l’auteur (notamment dans ses quêtes étymologiques à base de racines indo-européennes…) m’ont laissé pour le moins perplexe, et si ces interrogations, je suis bien obligé de le confesser, me dépassent largement, moi le béotien, il y a néanmoins quelques analyses fort pertinentes a priori, qui montrent bien que cette nouvelle de Lovecraft est peut-être moins « innocente » qu’il n’y paraît.

 

On passe à tout autre chose – et à autrement plus léger sur le plan des notions… – avec « Where was Foxfield ? » de Will Murray. Vous n’avez jamais entendu parler de Foxfield ? C’est normal, puisque cette ville lovecraftienne imaginaire de la région d’Arkham n’a jamais donné lieu à une œuvre de fiction… On ne la connaît en fait que par une carte manuscrite de Lovecraft (adaptée sur la quatrième de couverture pour être plus lisible), retrouvée (tardivement) par S.T. Joshi dans les archives de l’écrivain. Will Murray, qui s’est beaucoup intéressé à la genèse de la Nouvelle-Angleterre imaginaire de Lovecraft, et a livré quelques études passablement pointues sur la question, décortique donc en long et en large cette carte, et en cherche les inspirations dans des lieux authentiques. Ce qui pourrait être aride et lourd, mais se révèle en définitive plutôt amusant, et moins vain qu’on ne pourrait le croire.

 

Suit « The Genesis of "The Shadow Out of Time" », article de S.T. Joshi sur les inspirations et les conditions (difficiles) de la rédaction de cette dernière nouvelle lovecraftienne majeure qu’est « Dans l’abîme du temps » (une de mes préférées, par ailleurs). Cet article, dois-je dire, m’a un peu déçu, moi qui éprouve généralement une grande admiration pour les travaux de S. T. Joshi… La brève analyse du texte, au début de l’article, pour être indispensable sans doute, n’apprendra en effet rien à l’amateur, et les développements sur le processus d’écriture sont à mon sens un peu frustrants car bien trop brefs… La partie sur les inspirations est heureusement du plus grand intérêt, et on voit bien comment Lovecraft a repris à son compte pour l’essentiel trois œuvres (deux littéraires et, ce qui m’a semblé plus intéressant, une cinématographique) pour développer à sa manière le thème qui lui parlait énormément de l’échange de personnalités (il parlait plutôt d’échange « corporel », ce qui en dit long) dans le cadre d’une histoire de voyage dans le temps (avec quelques interrogations pertinentes sur les défauts de ce sous-genre essentiel de la science-fiction).

 

Le dernier article, dû à Stefan Dziemianowicz (qui commence fort humblement par afficher son statut de non-universitaire…) et sobrement titré « On "The Call of Cthulhu" », est donc une analyse (affichant par endroits sa subjectivité) de la plus célèbre et déterminante nouvelle de Lovecraft, « L’Appel de Cthulhu ». Je redoutais un peu le caractère convenu de cette énième lecture d’un texte tant étudié, mais force m’est de constater que l’analyse de Stefan Dziemianowicz, si elle n’a rien de révolutionnaire, est exhaustive, argumentée, claire, bref : irréprochable et même tout à fait convaincante. Je ne le suivrais pas sur tous les points (notamment quand il insiste sur le caractère « en demi-teinte » à ses yeux de la première partie de la nouvelle : pour ma part, dès ma première lecture, elle m’avait fait forte impression, et j’en avais déjà retiré des images qui ne m’ont jamais abandonné par la suite…), mais c’est à n’en pas douter une analyse de choix, finalement tout à fait bienvenue.

 

Peu de chroniques dans cette trente-troisième livraison, Peter Cannon ne traitant que de deux ouvrages : Résumé with Monsters de William Browning Spencer, roman (a priori plutôt de « littérature générale ») sur un écrivain qui fait dans la lovecrafterie, et que le chroniqueur a beaucoup aimé, puis le recueil de poésie « d’horreur comique » de Darrell Schweitzer Non Compost Mentis, au tirage passablement confidentiel.

 

Suite au prochain numéro…

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J
Je me permets une petite rectification : Foxfield n'est en effet jamais mentionnée dans aucune oeuvre de Lovecraft, mais a commencé à faire son apparition (depuis sa "redécouverte") dans le paysage lovecraftien, comme dans la nouvelle de R.M.Price "The shunpike" ainsi que dans l'un des scénarios de "Nouveaux contes de la Vallée du Miskatonic".
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N
La rectification est bienvenue, je ne savais pas, merci.