"Dying Earth, la Vieille Terre : Le Compendium des Avantages Indispensables de Cugel"
Dying Earth, la Vieille Terre : Le Compendium des Avantages Indispensables de Cugel, [s.l.], Archéos – Oriflam, [2000] 2004, 78 p.
Le Compendium des Avantages Indispensables de Cugel est dans un sens le seul supplément traduit en français pour le jeu de rôle Dying Earth, la Vieille Terre (si l'on omet les deux sélections sous forme de revue du Florilège du Jet Prismatique Excellent). Très court, il se présente comme un « guide des joueurs » pour les personnages de niveau Cugel (et ça tombe bien, puisque c'est ce niveau qui m'intéresse a priori le plus). Il a donc tout naturellement un côté un peu fourre-tout, où l'on pioche ce que l'on veut. Les auteurs vont d'ailleurs jusqu'à parler de « coffre à jouets », ce qui se vérifie surtout dans les premiers chapitres.
On notera au passage que la qualité formelle est toujours au rendez-vous, même si elle est desservie à l'occasion par une traduction qui peine un peu (mais reste très agréable dans l'ensemble). L'essentiel est que l'on y retrouve bien la couleur baroque des récits de Jack Vance, ce qui vient égayer joyeusement un supplément qui, à force de listes, avait tout pour être rébarbatif. Du beau boulot, donc.
L'aspect « coffre à jouets » saute aux yeux dans le premier chapitre, « Accessoires ésotériques à l'utilité manifeste », qui est une compilation de nouveaux objets magiques (définis par des scores de Possession) venant compléter celle, un peu maigrelette, du livre de base. C'est d'autant plus amusant à lire que c'est particulièrement vicieux, chacun de ces objets ou presque ayant des effets secondaires pour le moins rigolos, mais c'est aussi là que le bât blesse : en tant que tels, bon nombre d'entre eux sont trop ambigus voire suprêmement dangereux pour pouvoir se montrer réellement utiles ; toutefois, un maître de jeu un tantinet sadique n'hésitera pas à piocher là-dedans pour concocter des aventures passablement burlesques...
Le catalogue se poursuit avec « Guises, gadgets et gandins », nouvelle liste d'objets cette fois plus communs (certains peuvent néanmoins être magiques, mais sans nécessiter de points de Possession). Il y a là aussi quelques choses amusantes, mais assez peu, somme toute, comparé à ce que l'on vient de lire...
« Tours madrés à l'usage du gredin industrieux » vient ensuite combler ce qui me paraissait être un manque dans le livre de base, où les Tours n'étaient qu'à peine esquissés, là où les Sortilèges, comme de juste, prenaient beaucoup de place. Ce chapitre revient donc sur cette thématique particulièrement appropriée aux Dilettantes de niveau Cugel, et donne toute une série d'exemples de Tours – généralement anodins (mais bienvenus quand même), parfois amusants (eh), voire même... utiles. Si.
Le chapitre « Farragos, feintes et fustigations » est à mon sens et de loin le plus utile de ce bref ouvrage, en ce qu'il introduit les Amendements – des capacités spéciales, quelque part entre la spécialisation et le trait. Là encore, certains sont très amusants (j'aime beaucoup « Pardonnez mon compagnon qu'on a laissé échapper à la naissance », par exemple...). Si leur emploi nécessite des situations très précises et pas forcément très courantes, ils peuvent, bien utilisés, donner un tour très intéressant à la partie. Évidemment, il y a une contrepartie, tout cela impliquant de nouvelles règles spéciales... D'où cette précision bienvenue : c'est au joueur de connaître les effets de ses Amendements ; s'il vient questionner le maître de jeu sur des aspects techniques relatifs à un Amendement, il en perd aussitôt (et définitivement) le bénéfice. BIEN FAIT POUR TA GUEULE.
« L'art subtil de la négociation » est très différent (et est complété par les nombreux stratagèmes émaillant le livre, dont le dernier – impliquant les Puissances Qui Sont – vise à gruger le maître de jeu lui-même...). Il s'agit d'un ensemble de règles élémentaires (ou un peu moins), complétées par de très nombreux exemples, sur les mille et une manières de mettre en œuvre une négociation, cet aspect si fondamental de Dying Earth, a fortiori s'il s'agit, pour des gredins de niveau Cugel, d'escroquer des buses. Mais tout cela, ai-je trouvé, n'est guère convaincant (et les exemples prennent une grosse place qui aurait peut-être, à l'occasion, pu être mieux employée). C'est parfois amusant, là encore, mais guère plus (et l'on peut regretter, même si cela se tient, que les développements consacrés à la négociation avec des demi-hommes soient si brefs...).
En annexe, on trouvera... un générateur de costumes. C'est parfaitement futile, et donc tout à fait nécessaire dans le monde de Dying Earth, où l'on juge beaucoup sur l'apparence (ce qui ne viendrait pas à l'idée d'un habitant de l'Âge Larvaire, hein ?). Si le côté « aléatoire » me paraît mal à propos, il est clair qu'il y a là de quoi attifer correctement les PJ, ce qui ne peut que contribuer à leur donner davantage de couleur, et c'est donc plutôt bien vu.
Au final, ce Compendium des Avantages Indispensables de Cugel, en dépit de son titre, n'a absolument rien d'indispensable. Il est amusant, certes, et on peut y piocher à l'occasion des choses utiles (pour les joueurs, oui, mais aussi pour le maître de jeu ; je citerais en priorité les Amendements et les Tours, et les costumes aussi parce que ça m'amuserait bien d'inciter des victimes venues faire du jeu de rôle à jouer ne serait-ce que temporairement à la poupée, na) ; rien de transcendant pour autant. Un peu dommage qu'il n'y ait pas eu de suivi sur des suppléments a priori plus ambitieux... En attendant, je vais tout de même vous causer des deux volumes du Florilège du Jet Prismatique Excellent. Un de ces jours...
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