Les Faux Dieux, de Graham McNeill
McNEILL (Graham), Les Faux Dieux, [False Gods], traduit de l’anglais par Julien Drouet, Nottingham, Black Library, coll. The Horus Heresy, [2006, 2008] 2014, 415 p.
Suite de la monumentale série « L’Hérésie d’Horus », située dans l’univers facho-bariolé de Warhammer 40,000 (et qui le fonde à bien des égards). Dans ce deuxième tome qu’est Les Faux Dieux, Graham McNeill poursuit sur les bases développées par son compère Dan Abnett dans L’Ascension d’Horus. Et si ce précédent volume tenait à bien des égards du prologue, avec un Horus bien loin de se vautrer dans l’hérésie jusqu’aux toutes dernières pages (où l’on voyait tout juste le Maître de Guerre rebaptiser ses Luna Wolves en Sons of Horus, vague présage de la suite), la donne change largement dans Les Faux Dieux, avec son assez joli climax en fin de volume, « à suivre… ».
Nous n’en sommes cependant pas encore là. En attendant cette grande révélation qui n’en est pas une et pour cause, Graham McNeill nous concocte un divertissement sympathique, reprenant pour l’essentiels les points de vue du premier tome. Le Space Marine Loken y joue donc un grand rôle, figure d’intégrité, de loyauté et, dans un sens, de pondération, qui tranche régulièrement sur la brutalité débile et beuglante de ses camarades de l’Astartes. Ceux-ci, en effet, ne cessent d’émettre d’éloquents témoignages de leur bêtise toute militaire, renforcée d’une bonne dose de puérilité… Loken est un peu plus fréquentable, même s’il se montre à l’occasion un peu couillon aussi. En tout cas, Loken flaire des choses qui ne lui plaisent guère, notamment en rapport avec la loge des Space Marines, sorte de Maçonnerie présageant du futur Culte Impérial, ou se compromettant dans une servilité à l’égard du Maître de Guerre Horus qui ne vaut guère mieux. Et il s’interroge notamment sur le rôle joué par le Word Bearer Erebus dans les événements en cours (je ne spoile rien, Erebus a écrit en gros « PUTAIN DE BATARD DE TRAÎTRE » sur son casque)…
Lesdits événements tiennent pour l’essentiel dans le retour de la Légion sur la planète Davin, précédemment visitée lors de la Grande Croisade. Ce devrait donc être en toute logique un monde fidèle à l’Imperium de l’Humanité, hein ? Ben non : parce que le gouverneur qu’avait laissé Horus sur place a trahi. C’est rien de le dire : Horus le prend mal, c’est une insulte personnelle tout autant qu’une critique éloquente de sa compétence et de ses choix… Alors Horus décide d’aller fritter la gueule au félon, réfugié sur la lune de Davin, et de le faire à la tête de sa Légion ; ce qui, oui, est d’une connerie monumentale… Et bien évidemment, tout cela tourne mal, et Horus est gravement blessé. Les médecins de la flotte n’arrivent pas forcément à grand-chose, la vie du primarque est menacée… et la Loge, sur les conseils moisis d’Erebus, succombe aux superstitions locales, en confiant le soin du Maître de Guerre à un étrange temple de Davin…
Horus lui-même, du coup – et à la différence de ce qui s’était produit dans le précédent tome –, est cette fois lui-même un personnage point de vue. Le Maître de Guerre, jusqu’alors une figure épique, aussi charismatique qu’admirable, se montre ici plus humain, affligé de doutes, commettant plus qu’à son tour des erreurs, résultant généralement de son arrogance et d’une sorte d’ambition frustrée, qui pourrait paraître étrange de la part d’un si puissant personnage, mais, comme disait l’autre, « le pouvoir absolu corrompt absolument »… On sait bien, donc, dès le départ, qu’Horus va faire une grosse boulette, et succomber aux murmures du Warp – on n’identifie pas encore les dieux du Chaos, même si un joli spécimen démoniaco-tentaculaire fait son apparition, combattu par la foi d’une commémoratrice…
Les commémorateurs, donc, sont le troisième point de vue essentiel des Faux Dieux. Et ces artistes et intellectuels – souvent imbus d’eux-mêmes, mais ils sont loin d’être les seuls dans ce cas – développent des politiques dépassant largement leur fonction, qu’il s’agisse de faire dans la Lectio Divinitatus, donc, ou dans la subversion poétique… On se doute que tout ne va pas très bien se passer pour eux.
On se doute de pas mal de choses, à vrai dire, à la lecture des Faux Dieux… mais, dans un sens, ça fait partie du plaisir. Et, par ailleurs, Graham McNeill parvient malgré tout à créer la surprise à l’occasion. Encore une fois, pour toutes ces raisons, le climax final est tout à fait convaincant.
Alors, certes, on y retrouve bon nombre de défauts déjà présents dans L’Ascension d’Horus ; ça ne brille pas exactement par le style, et la traduction est de toute évidence, euh, « critiquable »… Mais ça constitue bien, malgré tout, un divertissement tout à fait honorable, dans un très bel univers. Ma nostalgie takata-boum est pleinement comblée.
Suite : La Galaxie en flammes, de Ben Counter.
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