EINSTÜRZENDE NEUBAUTEN, 2x4.
Tracklist :
01 – Fleisch « Blut Haut » knochen (Belgium 1982)
02 – Sehnsucht (nie mehr) (Berlin 1983)
03 – Womb (Hamburg 1980)
04 – Krach der schlagenden Herzen (Belgium 1982)
05 – Armenisch Bitter (Berlin 1982)
06 – Zum Tier machen (Berlin 1982)
07 – Sehnsucht (still stehend) (Berlin 1982)
08 – Durstige Tiere (Amsterdam 1982)
Einstürzende Neubauten. Rien que le nom de ce groupe mythique en a déjà fait trébucher plus d’un de ma connaissance ; tant mieux, dans un sens : prononcé à la ramasse, ça aurait presque quelque chose de cthulhien. Mais les gens de chez Roir ne sont pas joueurs : à tout hasard, ils précisent « Collapsing New Buildings » dans le livret de cette réédition en CD de ce live classique, qui n’avait connu qu’une édition en cassette en 1984.
On est là au tout début de la bande à Blixa Bargeld. Et autant dire que ça dépote. Rien à voir avec le néanmoins excellent double-album live intitulé 9-15-2000, Brussels, qui présente la facette la plus récente d’Einstürzende Neubauten, toujours expérimentale, mais bien plus douce. Ici, on fait dans l’agression sonore, dans le terrorisme musical ; on est même avant Halber Mensch, c’est-à-dire : encore pire. Chouette !
A mort la mélodie ! Dans la foulée des époustouflants concerts de Throbbing Gristle, les Berlinois se livrent ici à des performances scéniques particulièrement physiques, tout entières vouées au culte du bruit sous toutes ses formes. Blixa Bargeld ne chante pas : il hurle, déclame, se livre à des incantations. Derrière lui, les musiciens s’acharnent sur des batteries « concrètes » faites de divers objets métalliques, n’hésitant pas à rompre la rythmique (comme sur « Fleisch « Blut Haut » knochen ») pour mieux perturber l’auditeur, ou sur des instruments électroniques de leur propre fabrication. La basse se fait discrète, mais la guitare rugit de temps à autres ; pas d’arpèges ou d’agréables solis, ici : la musique, c’est avant tout du bruit, à l’état pur. Et les morceaux jonglent ainsi, dans leur construction unique, entre silence et rage.
Car il y a malgré tout des moments plus calmes, par exemple avec les étranges sonorités orientalisantes de « Womb » ou « Armenisch Bitter ». Ce n’est pas moins perturbant, à vrai dire, et c’est remarquablement jouissif.
Ce sont les racines de la musique industrielle, cet étrange courant à la fois populaire et hermétique éclos parallèlement au punk. La musique d’Einstürzende Neubauten est difficile d’accès, c’est vrai ; elle tient, finalement, tout autant de la composition savante que de l’art contemporain, du théâtre expérimental et du pamphlet anarchiste. Elle est brillante et rebutante. Elle est unique.
Et ce bref album live est à vrai dire indispensable à qui veut se plonger dans les abysses de l’underground du début des années 1980, et frémir avec jubilation devant cette inventivité extraordinaire, cette folie génialement créatrice, qui n’a pas vraiment connu d’équivalent depuis.
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