"Coraline", de Neil Gaiman
GAIMAN (Neil), Coraline, [Coraline], traduit de l'américain par Hélène Collon, illustrations de Dave McKean, Paris, Albin Michel – J'ai lu, coll. Science-fiction – Fantastique, [2002-2003] 2012, 154 p.
Coraline est probablement une des créations les plus célèbres de Neil Gaiman – et aussi une des plus primées, et avec lui, c'est jamais rien de le dire : Prix Hugo 2003, Prix Nebula 2003, Prix Locus 2003, Prix Bram Stoker 2003, British Science Fiction Award 2002, et oui, rien que ça. Le scénariste de Sandman (qui reste à mes yeux sa plus grande réussite tous genres confondus) nous a ainsi livré un conte noir pour les pitinenfants curieux et amateurs (déjà) d'horreur. Pas d'erreur sur le cœur de cible, ici, il s'agit clairement de littérature enfantine, bien plus que de littérature jeunesse. Mais comme la bonne littérature jeunesse, Coraline fait partie de ces livres dont certains adultes – votre serviteur, par exemple – sont à même de se régaler.
J'avais découvert Coraline par le biais du très bon film d'animation d'Henry Sellick (auquel on devait déjà cette merveille qu'est L'Étrange Noël de M. Jack) ; je m'en étais délecté, et me suis donc dit qu'il pourrait être intéressant de lire le conte original, à titre de comparaison et en espérant y retrouver les mêmes délices.
Nous avons donc Coraline Jones. Coraline, hein – et pas Caroline, comme tout le monde fait l'erreur... Coraline est une petite fille qui aime explorer. Elle vient d'emménager avec ses parents surbookés dans une vieille maison scindée en plusieurs appartements ; y vivent donc également un vieux toqué qui élève des souris de cirque, et deux actrices sur le retour (interprétées si je ne m'abuse dans le film par French & Saunders, la bonne idée que voilà). C'est bientôt la rentrée, mais, en attendant, Coraline s'ennuie. Et ses parents ne sont guère présents pour elle. Et, un jour, en explorant la maison, elle fait l'étrange découverte d'une porte donnant sur un mur de briques – en fait, une porte reliant leur appartement au dernier de la maison, inoccupé. Sauf que Coraline va trouver le moyen de franchir cette porte.
Et, de l'autre côté, elle va tomber sur un monde mystérieux, où tout est très semblable à chez elle, mais en mieux. Notamment, elle y fait la rencontre de ses Autres Parents, tellement plus affectueux – mais qui ont, idée géniale et terrifiante, des boutons cousus à la place des yeux... Son Autre Mère, surtout, se montre très démonstrative ; mais il va de soi que tant de bonheur dissimule une réalité bien plus sombre, à laquelle Coraline va bientôt devoir se coltiner...
Coraline est donc un conte, oui ; et un conte destiné en priorité aux pitinenfants. Ce qui explique sa plume très simple et l'impressionnante densité de ce bref récit, qui va toujours à l'essentiel. Ici, la littérature jeunesse s'assume pleinement, et n'endosse pas les oripeaux d'une littérature pour adultes. Mais les adultes peuvent à très bon droit se complaire dans la régression et savourer de même que les bambins cette histoire lumineusement noire et délicieusement horrible. Il y a en effet de quoi avoir quelques délicieux frissons à la lecture de Coraline, récit qui fait mouche à chaque touche, et sait particulièrement bien réveiller les angoisses du gamin qui sommeille en chaque lecteur.
Vous l'aurez compris, je ne peux que recommander chaudement la lecture de Coraline, ouvrage à la hauteur de sa réputation. Si j'ai un jour des gniards, ils n'y couperont pas (de même qu'à Mon voisin Totoro, mais c'est une autre histoire). En attendant (?), c'est le petit Nébal qui s'est bien amusé à partir explorer l'autre monde avec la charmante Coraline.
Y a pas, il est fort ce Neil Gaiman...
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