"Crypt of Cthulhu", no. 3
Crypt of Cthulhu, vol. 1, no. 3, Bloomfield, Cryptic Publications, Candlemas 1982, 24 p.
Crypt of Cthulhu, suite, avec ce troisième numéro, consacré pour l’essentiel au correspondant et collègue de Lovecraft, le créateur du célèbre Conan, Robert E. Howard. Si les deux hommes ne se sont jamais rencontrés, ils n’en ont pas moins beaucoup échangé (je reviendrai en partie sur leurs lettres dans le prochain compte rendu), et REH a apporté à plusieurs reprises sa contribution à l’édifice « mythique » élaboré par HPL. Comment exactement, dans quelle mesure et à quel titre, c’est ce que les études comprises dans ce numéro permettront de dire.
On commence avec « The Strange Case of Robert Ervin Howard », de Charles Hoffman et Marc A. Cerasini. Après avoir présenté quelque peu le personnage et sa participation à Weird Tales, notamment, les deux auteurs se penchent sur les deux seules histoires (à leurs yeux) écrites par Robert E. Howard et relevant véritablement du « Mythe de Cthulhu » (c’est-à-dire au-delà de simples allusions de passage à des divinités, etc.)… et portent dans l’ensemble des jugements peu flatteurs. « The Black Stone », sans surprise, est néanmoins jugée supérieure à « The Thing on the Roof » (j’avais beaucoup aimé cette première histoire, pour autant que je m’en souvienne, y voyant même une des meilleures « Légendes du Mythe de Cthulhu »…). Les deux histoires sont détaillées, et on y relève ce qui les unit, ainsi que les contributions de l’auteur au « Mythe » – essentiellement les fameux Nameless Cults de Von Junzt et le personnage de poète fou Justin Geoffrey (mais il y a d’autres éléments, plus anecdotiques). Finalement, les récits fantastiques de Robert E. Howard détachés du « Mythe » se voient accorder une bien plus grande estime (je lis ça prochainement, en principe).
Robert M. Price poursuit avec « The Borrower Beneath. Howard’s Debt to Lovecraft in « The Black Stone » ». Le titre est assez explicite. Il s’agit donc pour l’auteur de montrer où Howard a puisé son inspiration pour « The Black Stone ». À l’en croire (mais je ne suis que moyennement convaincu), il s’agirait tout simplement d’une reprise de « La Cité sans nom » (avec le même voyage en un lieu exotique, Nameless Cults pour le Necronomicon, Justin Geoffrey pour Abdul Alhazred – les vers des deux poètes sont comparés, et là c’est effectivement assez flagrant –, etc.). Admettons ; cependant, la conclusion ne saurait faire de doute : pour Robert M. Price (et pour votre serviteur aussi, pour autant qu’il s’en souvienne), la nouvelle de Howard est bien meilleure que celle de Lovecraft (que j’ai toujours trouvée plutôt mineure, ainsi que j’ai déjà eu à plusieurs reprises l’occasion de le dire).
Robert M. Price encore, pour « Yag-Kosha the Elephant Man ». Le personnage de Yag-Kosha apparaît dans « La Tour de l’éléphant », une des premières histoires de Conan (voyez ici). Et il est vrai que cette créature a quelque chose de passablement lovecraftien – ça crève les yeux –, même si elle est beaucoup plus sympathique que Yog-Sothoth et compagnie. Pour l’auteur, c’est même la nouvelle dans son ensemble qui a quelque chose de lovecraftien, dans la mesure où, une fois libéré par Conan, Yag-Kosha prend la vedette, tandis que le Cimmérien reste à l’arrière-plan ; là, je suis moins convaincu…
Robert M. Price toujours (eh, on est chez lui…) livre ensuite « Gol-Goroth, a Forgotten Old One ». Le personnage de Gol-Goroth apparaît à l’en croire dans plusieurs nouvelles de Howard (notamment « Les Dieux de Bal-Sagoth », voyez ici), et il l’identifie avec la bestiole de « The Black Stone », qu’on retrouve plus ou moins dans « The Thing on the Roof ». Ce Grand Ancien « oublié » des catalogues dressés par les lovecraftiens est donc décortiqué dans chacune de ses apparitions.
On s’arrête là pour Howard, mais le numéro se poursuit avec… devinez ? Eh oui, Robert M. Price (vous êtes trop forts). « Genres in the Lovecraftian Library » est plus ou moins un catalogue de « livres maudits », qui a surtout pour intérêt, donc, de différencier divers types d’ouvrage : grimoires, traités de démonologie, « écritures », chroniques non humaines, monographies, poésies (et autres œuvres d’art, en fait) « inspirées », et enfin variantes des précédents. On voit le nombre de « copies » pures et simples, absolument dénuées d’intérêt…
Les rubriques, ensuite. Le « fun guy from Yuggoth » de ce numéro est John Anthony, qui livre une jolie « réminiscence » de son premier (et dernier…) contact avec Lovecraft dans « The Call of Cthlhu’s Cadillac ». Amusant.
C.J. Henderson, dans la « R’lyeh Review », se répand en louanges à propos de l’anthologie dirigée par Ramsey Campbell New Tales of the Cthulhu Mythos (j’avais lu ça il y a une éternité, je n’en ai pas conservé le moindre souvenir, à part le titre de la contribution de Stephen King…). Après quoi Robert M. Price évoque brièvement des éditions de poche de Lovecraft.
Reste le « Mail-Call of Cthulhu », composé cette fois d’une unique lettre d’Ed Babinski, lequel défonce Lovecraft et lui préfère Poe ; le monsieur est censé écrire un article dans un prochain numéro, ça promet…
Bilan très sympathique dans l’ensemble, donc, pour ce troisième numéro de Crypt of Cthulhu, largement plus convaincant que le précédent. On verra bientôt ce qu’il en est de la suite des opérations.
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