"Experimental Jet Set, Trash And No Star", de Sonic Youth
SONIC YOUTH, Experimental Jet Set, Trash And No Star
Tracklist :
01 – Winner’s Blues
02 – Bull In The Heather
03 – Starfield Road
04 – Skink
05 – Screaming Skull
06 – Self-Obsessed And Sexxee
07 – Bone
08 – Androgynous Mind
09 – Quest For The Cup
10 – Waist
11 – Doctor’s Orders
12 – Tokyo Eye
13 – In The Mind Of The Bourgeois Reader
14 – Sweet Shine / [Untitled ghost track]
Sonic Youth, huitième album, après (pfff...) Confusion Is Sex, Bad Moon Rising, EVOL, Sister, Daydream Nation, Goo et Dirty. Si Butch Vig est toujours aux manettes, le groupe n’en abandonne pas moins l’orientation « gros son » du précédent album, pour livrer un disque cette fois bien plus reposé et mélodieux. Moins « commercial » ? À voir, puisqu’il se vend mieux : en fait, jusqu’à la sortie récente de The Eternal, Experimental Jet Set, Trash And No Star est l’album de Sonic Youth qui s’est le mieux placé dans les charts américains (34e, contre 89e pour Dirty ; The Eternal sera 18e). C’est d’autant plus surprenant que l’album n’a pas pu bénéficier d’une importante tournée promotionnelle, Kim Gordon étant enceinte, et n’a connu qu’un seul single, certes à gros succès, « Bull In The Heather »… Pour ma part, j’aurais en fait un peu envie de qualifier cet album de « plus commercial », car moins bruitiste, mais bon… affaire de point de vue, j’imagine. Le mieux sera donc de vous laisser juger vous-mêmes.
Décortiquons donc la bête, faite, comme son illustre prédécesseur, de morceaux courts dans l’ensemble. On commence avec « Winner’s Blues », qui n’est que plus ou moins bluesy, mais en tout cas pas du tout saturé (blasphème !). Une intro, et rien de plus à en dire…
Vient ensuite le gros carton de l’album, le tubesque (et tubé) « Bull In The Heather » (on admirera dans la vidéo Kathleen Hanna de Bikini Kill et Le Tigre en train de faire nawak) : très pop, peu noisy, mais très efficace. Rien d’étonnant à ce que cet unique single ait très bien marché, donc.
« Starfield Road » introduit enfin un peu de bruit dans l’album, même si, passée la chouette introduction, ce n’est plus qu’en fond. Pour le reste, ce n’est qu’un morceau de pop assez court, sympathique, sans plus.
« Skink » joue plus encore la carte de la pop mélodieuse, avec une certaine réussite. C’est pas mal, mais on s’ennuie un peu.
« Screaming Skull », un poil plus noisy, évoque les jours heureux où le groupe était signé sur des labels indépendants ; effectivement, c’était autre chose… Allez, pas mal.
« Self-Obsessed And Sexxee » était prévu à l’origine pour devenir le second single de l’album, mais cela ne fut finalement pas le cas. Un morceau très (trop ?) pop à nouveau, sans grand chose de dissonant (sauf sur la conclusion, comme pour le principe). Ça s’écoute, cela dit, mais sans grande passion.
Après quoi l’on passe à « Bone », qui s’énerve et dévie davantage dans un premier temps, ce qui fait du bien. La partie chantée (par Kim Gordon) retrouve le calme, puis le bruit revient, ouf. Un bon morceau.
Suit « Androgynous Mind » qui sait se montrer assez nerveux pour retenir l’attention, avec son pied martelant le morceau, son chant hystérique et ses dissonances en fond. Le niveau remonte enfin, et c’est pas plus mal.
« Quest For The Cup » joue d’emblée la carte de la syncope et de la dissonance, comme une confirmation… avant d’enchaîner et de se conclure sur une partie plus bluesy. Bizarre.
On y préférera sans doute « Waist », plus classique peut-être, mais aussi plus efficace. Un morceau vaguement dissonant, assez répétitif, clairement orienté punk. Sympa, en somme.
« Doctor’s Orders » est ensuite un morceau pop (vaguement « grunge » ?) d’assez belle facture. Jolie partie instrumentale à partir du milieu du morceau, assez planante.
« Tokyo Eye », ensuite, est clairement un de mes morceaux préférés de l’album, voire mon morceau préféré tout court. Il est assez original, et a un vague côté industriel (à la Einstürzende Neubauten, peut-être ?) qui n’est bien entendu pas pour me déplaire. Mais il sait en outre jouer tant sur l’ambiance que sur le bruit, pour un résultat tout à fait convaincant. C’est – enfin ! – le grand morceau que j’attendais depuis « Bull In The Heather ».
« In The Mind Of The Bourgeois Reader » est quant à lui un morceau orienté punk, assez réussi. Mouais, allez, sympathique.
Et l’album de se conclure sur une douceur avec « Sweet Shine » (suivi d’une « ghost track » de bruit…). C’est mignon, intéressant quand ça s’agite un poil plus sur le refrain, mais pas passionnant pour autant.
Un peu comme l’ensemble de cet album, en fait, dont le succès me paraît un peu démesuré. Je ne le qualifierai pas forcément de mauvais, non, mais je trouve qu’il ne fait pas le poids face à ceux qui l’entourent. Je lui préfère largement les soi-disant albums plus « commerciaux » que seraient Goo et Dirty, mais aussi l’album suivant, Washing Machine, qui verra le groupe, d’un côté revenir à ses amours dissonantes, de l’autre expérimenter à nouveau en faisant dans le morceau long, plus encore que sur Daydream Nation. En comparaison, ce Experimental Jet Set, Trash And No Star me paraît bien fade, inégal, et pour ainsi dire un peu médiocre…
Suite des opérations avec Washing Machine, donc.
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