"La Condition humaine", d'André Malraux
MALRAUX (André), La Condition humaine, dossier et notes réalisés par Sophie Doudet, lecture d’image par Agnès Verlet, Paris, Gallimard, coll. Folio plus classiques, [1946, 2007, 2010] 2012, [édition numérique]
[Oui, je sais, ces derniers temps mes comptes rendus étaient particulièrement miteux. Mais c’est que je les avais rédigés à un moment où. Bon. Hélas, le compte rendu d’aujourd’hui est probablement le pire dans le genre (et c’est bien pour cette raison que je le publie en dernier). J’en suis conscient et vous prie de m’en excuser, je ne publie cette (petite) bouse que parce que j’ai lu le bouquin, et que, ma foi, je me suis engagé à chroniquer tout ce que je lisais. Encore une fois toutes mes excuses.]
Je n’avais jusqu’à présent jamais rien lu d’André « Entre ici Jean Moulin » Malraux. Une lacune qu’il était très certainement nécessaire de combler au plus tôt, parce que « Le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas », alors bon (réponse 2). Par exemple avec La Condition humaine (prix Goncourt, si je ne m’abuse), probablement le plus célèbre roman de son auteur, malgré un titre qui a de quoi faire peur, m’enfin ce n’est que mon avis, et il vaut ce qu’il vaut, c’est-à-dire pas grand-chose. Allez, hop.
Shanghaï, 1927 (la drôle d’idée que voilà). Une époque pour le moins chaotique en Chine. Celle-ci est en proie aux intérêts occidentaux comme aux seigneurs de guerre locaux, même si, après la mort de Sun-Yat-Sen, se dessine un pouvoir fort autour du généralissime Chang-Kaï-Shek. Ce qui n’est cependant pas pour plaire aux communistes (on ne dit pas encore maoïstes). André Malraux, dans un décor un peu fantasmé, nous invite à suivre toute une kyrielle de personnages issus de tous horizons, mais notamment les militants communistes que sont Tchen, le nihiliste angoissé, et Kyo Gisors, le métis qui cherche sa place. Mais on pourrait en citer d’autres, comme le fantasque baron de Clappique – « Pas un mot ».
La Condition humaine est un roman de l’histoire en train de se faire ; celle, en l’occurrence, de la Chine contemporaine. C’est aussi un roman profondément métaphysique et éthique, roman de l’engagement jusqu’à l’absurde. C’est enfin le brillant roman d’un jeune homme aux dents longues, qui compte bien inscrire son nom dans l’histoire (justement). Autant dire qu’il ne manque pas d’ambition. Et le fait est que ce roman, pour périlleux qu’il soit, marche. On est en permanence sous le coup de son extrême densité, à tel point qu’on ne suit pas toujours, au juste, de quoi l’auteur nous raconte l’histoire (si tant est qu’il le fasse). La Condition humaine, sous cet angle, ne manque pas d’audace, pas plus que de brillant. L’auteur joue notamment de la multiplicité des points de vue avec une maestria qui mérite d’être soulignée.
Mais il fait bien plus. Et, l’air de rien, il interroge le lecteur sur des grands thèmes d’une actualité indéniable. Avec Tchen et Kyo, notamment, Malraux questionne nos espoirs comme nos désillusions, secoue le lecteur d’interrogations aussi fines que brutales.
Aussi La Condition humaine est-il très certainement un roman à la hauteur de sa réputation.
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