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"Le Vent sombre", de Tony Hillerman

Publié le par Nébal

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HILLERMAN (Tony), Le Vent sombre, [Dark Wind], traduit de l’anglais (États-Unis) par Danièle et Pierre Bondil, Paris, Rivages, coll. Noir, [1982, 1986] 1987, 253 p.

 

Après une interruption assez conséquente, retour aux polars navajos de Tony Hillerman avec ce Vent sombre, deuxième enquête du jeune Jim Chee, qui fut par ailleurs adapté au cinéma (mais l’auteur renia le film…). On y retrouve avec plaisir tout ce qui fait le sel des romans de Tony Hillerman, mêlant avec brio intrigue policière teintée de thriller et considérations ethnologiques, cette fois essentiellement centrées sur la mythologie hopi et les rationalités différentes des Blancs et des Américains d’origine (d’où le titre, ce « vent sombre » étant une expression désignant la folie).

 

Une fois n’est pas coutume, Tony Hillerman nous a concocté ici une intrigue fort complexe, et Jim Chee, qui vient tout juste de changer d’affectation – mais n’en est pas moins toujours tiraillé entre deux mondes (voir à ce sujet  Le Peuple des ténèbres) –, va en voir de toutes les couleurs. Au départ, le jeune flic navajo se contente d’enquêter sur des actes de vandalisme répétés sur un moulin se trouvant sur un territoire anciennement partagé entre Navajos et Hopis, mais finalement attribué à ces derniers par une décision toute récente.

 

Une nuit, alors qu’il fait le guet en espérant mettre la main sur le responsable de ces sabotages, Chee est témoin d’un accident d’avion à proximité. Se rendant immédiatement sur place, il trouve trois cadavres, dont un tué par balle. Tout cela sent fort le trafic de drogue, et la DEA est rapidement de la partie. Ce qui n’arrange pas notre héros : d’une part, il figure, de par sa simple présence sur les lieux du drame, sur la liste des suspects, et on l’accuse ouvertement de s’être emparé d’une grosse cargaison de cocaïne ; d’autre part, cette affaire n’étant pas de son ressort, son chef lui interdit formellement de s’en mêler sous peine d’être mis à pied : mais comment se défendre, alors, face aux insinuations et aux méthodes brutales des flics barbares de la DEA ? D’autant que Jim Chee, et c’est tout à son honneur, a fortiori étant donné sa profession, est d’un naturel curieux…

 

Ajoutons-y le cadavre d’un « John Doe » retrouvé peu de temps auparavant, semble-t-il un Navajo potentiellement tué par un sorcier – on parle beaucoup des méfaits d’un « porteur de peau » dans la région – et un mystérieux cambriolage, dont le butin ne refait pas surface, et l’on comprendra que Jim Chee a du pain sur la planche, d’autant que c’est son poste, voire sa vie, qui est en jeu. Et pendant ce temps, la sécheresse fait des ravages, et l’on attend désespérément un orage salvateur ; mais il se pourrait bien que le tonnerre gronde effectivement d’ici la fin du roman…

 

Qu’est-ce qu’il était fort, ce Tony Hillerman… Quand je me suis embarqué dans ce Vent sombre, c’était avec l’espoir d’un simple divertissement efficace, une pause dans mes lectures, dans un sens ; et, je l’avoue, je craignais un peu de me lasser, à force… Quelle erreur ! J’ai lu ce roman d’une traite, impossible de le lâcher à partir du moment où j’en ai lu la première page. Et j’aurais d’ores et déjà envie de dire que, pour l’instant, Le Vent sombre figure parmi mes romans préférés de l’auteur ; c’est peut-être même le meilleur que j’aie pu lire, devant même le très bon  Là où dansent les morts, qui m’avait collé une sacrée claque en son temps.

 

Si, comme d’habitude, le style est franchement médiocre, voire pire (mais sans doute guère aidé par la traduction), on fait très vite l’impasse sur ce travers récurrent, tant tout le reste est bon. Les personnages, Jim Chee en tête, sont très réussis, complexes et humains, et l’on vibre pour les malheurs de notre pauvre flic navajo confronté à une adversité dont il n’avait pas idée ; l’ambiance est tout à fait remarquable (excellente idée, au passage, que celle de cette sécheresse et de l’orage attendu, qui fournit un fil rouge au roman) ; les passages « ethnologiques », loin de tomber comme un cheveu sur la soupe, s’intègrent parfaitement à la trame de ce Vent sombre, et sont tout à fait passionnants ; l’intrigue, enfin, est d’une ingéniosité machiavélique (même si, passé une certaine révélation dont je ne dirai bien évidemment rien ici, on entrevoit sans trop de difficultés la résolution de l’énigme, qui n’en est pas moins brillante : la conclusion orageuse, riche de suspense, est un véritable modèle du genre).

 

Voilà. Je ne peux guère en dire plus : à force de chroniquer les romans navajos de Tony Hillerman, je tends nécessairement à me répéter… Je me contenterai donc de dire encore une fois que ce Vent sombre est un excellent polar mâtiné de thriller (en tout cas à mes yeux de béotien dans le genre), un divertissement intelligent et d’une efficacité redoutable, page-turner impossible à lâcher en cours de route, qui m’a fait beaucoup d’effet. Un régal. Et j’ai hâte de retrouver Joe Leaphorn et Jim Chee pour de nouvelles aventures…

CITRIQ

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J
Hello,<br /> Excellent bouquin (du reste, comme pratiquement tous les hillerman que j'ai plaisir à lire et à relire).<br /> Si quelqu'un sait où l'on peut trouver le film inspiré de l'histoire, je suis preneur !!<br /> Jean
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N
Tu vois quand tu veux tu as bon bon goût ... (joke)(pas taper)<br /> Je suis d'accord avec toi ce roman est un petite merveille. La suite de la saga Navajo tourne ensuite un peu plus autour des personnages (mais c'est tout bon aussi)<br /> @+,<br /> NicK.
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T
Bonjour Nebalia<br /> Un de mes auteurs chouchou et un des seuls que je relis avec plaisirs.<br /> <br /> Le Papou
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