"Lovecraft Studies", no. 8
Lovecraft Studies, no. 8 (vol. III, no. 1), West Warwick, Necronomicon Press, Spring 1984, 40 p.
Retour aux fanzines lovecraftiens après une pause un peu plus longue que prévue consacrée aux westerns. Ce huitième numéro des Lovecraft Studies est consacré pour l’essentiel à l’interprétation et aux influences du soi-disant « Mythe de Cthulhu ».
On commence avec le très chrétien Robert M. Price. Dans « Demythologizing Cthulhu », l’exégète applique au Mythe les principes d’interprétation modernes du Nouveau Testament. Mouais… Le problème, c’est surtout que, ce faisant, il enfonce largement des portes ouvertes, l’idée étant que le « Mythe de Cthulhu » n’est pas une pure création littéraire, pas davantage la « vérité » d’un auteur occultiste (il s’en trouvait visiblement encore pour le prétendre !), mais l’expression allégorique des croyances de l’auteur, en l’occurrence de son matérialisme mécaniste et de son indifférentisme cosmique. Tout ça pour ça…
On passe à quelque chose de relativement plus intéressant avec « The Dunwich Chimera and Others. Correlating the Cthulhu Mythos » de Will Murray, qui se consacre à l’influence des mythologies préexistantes, et notamment de la mythologie grecque si chère à son cœur, sur la production littéraire et « mythique » de Lovecraft. Pas grand-chose de stupéfiant dans cet article, mais néanmoins quelques remarques fort judicieuses (d’autres le sont un peu moins, mais ça va encore…) et ça se lit avec plaisir.
Dans la même veine, Jason C. Eckhardt se penche, dans « Cthulhu’s Scald. Lovecraft and the Nordic Tradition », sur la possible influence de la mythologie nordique sur la création lovecraftienne. On sait, bien sûr, les revendications « nordiques » du bonhomme (même si on a effectivement du mal à le voir en Viking…), mais l’influence de cette mythologie sur son œuvre est plus problématique. Les développements de l’auteur de ce bref essai emportent plus ou moins l’adhésion, mais quelques éléments me semblent assez pertinents.
Suit un texte de H.P. Lovecraft lui-même, « More Chain Lightning », originellement publié dans The United Official Quarterly d’octobre 1915. C’est pour le moins édifiant – il s’agit d’un texte prohibitionniste vitupérant sur les horribles dangers de l’horrible alcool – mais d’un intérêt pour le moins douteux…
Après quoi S.T. Joshi livre une brève communication assez intéressante sur la diffusion de l’œuvre lovecraftienne de par le monde, avec « Lovecraft in the Foreign Press, 1971-1982 ». On y constate que la France conserve une situation relativement privilégiée (même si Joshi s’enthousiasme pour la publication du premier volume des Lettres, sans oser avancer encore que ce sera le dernier, hélas…), mais que le corpus lovecraftien se répand un peu partout, sous des formes très diverses. La conclusion m’a cependant laissé un peu perplexe, ou du moins un peu étonné, selon laquelle Lovecraft était, encore à l’époque, plus populaire à l’étranger que dans sa patrie, ce qui me paraît assurément vrai, notamment en France, dans la période précédant immédiatement, mais surprenant à l’orée des années 1980.
Cela dit, cela s’explique peut-être par l’état de l’édition des œuvres de Lovecraft aux États-Unis alors, dont témoignent les deux recensions en fin de volume : The Best of H.P. Lovecraft: Bloodcurling Tales of Horror and the Macabre (une édition de poche introduite par Robert Bloch), et, du côté de la « small press », Uncollected Prose and Poetry 3, dont je vous avais déjà parlé précédemment. De toute évidence, il y avait alors un appel pour de nouvelles éditions des œuvres de Lovecraft outre-Atlantique, et Joshi lui-même n’y a pas peu contribué…
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