"Mariage à l'égyptienne", de Sylvie Miller & Philippe Ward
MILLER (Sylvie) & WARD (Philippe), Mariage à l’égyptienne, Rennes, Critic, coll. Fantasy, série Lasser, 2013, 306 p.
Mariage à l’égytienne, deuxième tome des aventures de Jean-Philippe Lasser, détective des dieux, est sorti presque immédiatement après Un privé sur le Nil, mais il s’agit cette fois pleinement d’un roman, et non d’un assemblage plus ou moins habile de nouvelles, comme c’était le cas pour le précédent volume. Sa lecture reste néanmoins très probablement un préalable indispensable, dans la mesure où l’univers cartoonesque élaboré par le « Noir Duo » repose en bonne partie sur un ensemble de personnages secondaires apparus dans le tome inaugural et qui refont tous ou presque leur apparition ici (de manière parfois un peu forcée, d’ailleurs).
Le roman débute – sans surprise – sur les chapeaux de roue, au bar de l’hôtel Sheramon, où Lasser sirote un whisky au milieu des murmures des pachas. C’est à nouveau la déesse Isis qui vient l’embaucher pour une enquête qu’il ne peut pas refuser : il s’agit pour lui de retrouver en l’espace d’une semaine environ Aglaé, une des filles de Zeus, afin qu’elle épouse comme prévu Horus, fils d’Isis, opération de rapprochement entre les panthéons grec et égyptien qui n’est pas du goût de tout le monde, loin s’en faut.
Lasser se rend donc à Alexandrie pour entamer son enquête, au volant d’une superbe voiture – cadeau divin –, mais manque se planter sur la route du fait de la très séduisante Médée, « journaliste » grecque qui lui colle aux basques… et s’avère être en fait une concurrente au service de Zeus. Lasser, qui est également embauché par Seth dans le cadre de cette enquête afin d’établir son innocence – il est évidemment le premier suspect –, a donc fort à faire, pressé qu’il est de toutes parts. Heureusement pour lui, ce loser achevé ne manque pas d’amis prêts à lui venir en aide… d’autant qu’il s’agit de faire la nique aux Grecs.
Les amateurs d’Un privé sur le Nil seront probablement emballés par Mariage à l’égyptienne, qui en reproduit les principaux personnages et gimmicks. Et, oui, le fait est que tout cela est fort sympathique. À condition d’accepter de poser son cerveau un moment, on peut effectivement passer un bon moment devant ce divertissement honnête et sans prétention.
Pourtant, objectivement, ce n’est sans doute pas très bon. Si les bons points du premier volume ont été repris, les mauvais ont également fait le voyage : on retrouve donc à nouveau quelques soucis de cohérence, notamment, et le moins que l’on puisse dire est que l’enquête ne casse pas des briques (on peut même trouver l’intrigue, ou plus exactement sa résolution, totalement invraisemblable, ce qui est tout de même un tantinet gênant…). Tout cela est en effet un peu trop simple, voire simplet, pour pleinement convaincre. Et si les rebondissements abondent, le rythme du roman étant même frénétique – tout va très vite, et sans doute trop vite –, il s’en dégage néanmoins une regrettable impression de facilité, à tous les niveaux : Lasser, pourtant un loser, surmonte toutes ses épreuves les doigts dans le nez, et on a quand même un peu l’impression d’un roman en roue libre, peut-être un peu baclé…
Et c’est dommage. Parce qu’il y a sans doute ici matière à faire bien mieux, de quoi passer du simplement « sympathique » au réellement enthousiasmant, voire jubilatoire. L’univers, les personnages, les gimmicks, tout cela pourrait être exploité plus à fond, pour livrer davantage que ces enquêtes plutôt mal fichues, qui se lisent certes sans déplaisir, mais sans grand plaisir non plus.
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