"The Downward Spiral", de Nine Inch Nails
NINE INCH NAILS, The Downward Spiral.
Tracklist :
01 – Mr Self Destruct
02 – Piggy
03 – Heresy
04 – March Of The Pigs
05 – Closer
06 – Ruiner
07 – The Becoming
08 – I Do Not Want This
09 – Big Man With A Gun
10 – A Warm Place
11 – Eraser
12 – Reptile
13 – The Downward Spiral
14 – Hurt
Si The Downward Spiral n’est « officiellement » que le deuxième album de Nine Inch Nails, il est dans les faits son quatrième enregistrement, après Pretty Hate Machine, Broken et Fixed. Et si ses thématiques auto-destructrices et suicidaires ont pu être perçues par une critique acerbe comme encore largement puériles, il est incontestablement, sur le plan musical, l’album de la maturité. Après les tentatives electro de Pretty Hate Machine et punk ou metal-indus de Broken, Trent Reznor trouve enfin la voie parfaite entre ces différentes influences, et trace son petit bonhomme de chemin là où personne d’autre que lui ne s’est jamais engagé. Cette fois, il s’est bel et bien émancipé : Nine Inch Nails est devenu un projet résolument à part, avec un son unique, et une musique hors-normes, que l’on qualifiera de metal-indus faute de meilleur terme.
Et un dernier point en guise d’introduction : quand, en chroniquant The Fragile, je l’avais qualifié de « meilleur album de Nine Inch Nails à mes oreilles », il fallait cependant comprendre que celui-ci n’était pas bien loin derrière…
Un grand album de metal-indus, donc, faute d’un meilleur terme. Même si – entendons-nous bien, si j’ose dire – le fait est que dans l’ensemble, ça défouraille sévère. Et ce dès la première piste, la bien nommée et très très énervée – hormis un bref passage – « Mr Self Destruct », débutant par un légendaire sample de THX 1138. Tout va très très vite, et quand les guitares se mettent vraiment de la partie, les oreilles saignent. Joie ! Joie ! Nine Inch Nails est vraiment de retour…
Mais Nine Inch Nails, ce n’est pas nécessairement du bruit, et en témoigne aussitôt après l’excellent « Piggy », sorte de quasi-trip-hop, porté par une chouette rythmique et une bonne basse, secondée par un orgue discret. Puis la rythmique se fait plus complexe – et en même temps plus chaloupée –, et ça devient un pur bonheur…
Changement complet de registre avec « Heresy », dont le couplet, avec sa voix de fausset, nous ramène quelque peu aux heures peu glorieuses à mes oreilles de Pretty Hate Machine… Heureusement, le refrain remonte un peu le niveau, de même que la fin du morceau. Pas terrible, quand même. Peut mieux faire.
Et fait bien mieux immédiatement avec le génial et tubesque « March Of The Pigs » (au clip pour le moins minimaliste…). Un morceau étrange, obéissant à une structure en deux fois trois parties, punk-electro-piano. Audacieux et efficace, très efficace. Et une vraie tuerie en live, sans surprise…
Suit immédiatement un autre tube, là encore dans une veine à la Pretty Hate Machine, mais avec plus de réussite, le très, aheum, « explicite », on va dire, « Closer ». Un morceau presque purement électronique fort bien fait, qui rentre dans le crâne (et où vous voudrez) et n’en ressort pas. Et la fin est véritablement excellente. Une réussite dans son genre, donc.
Et c’est sur ce morceau que s’achève le premier tiers de l’album, de fort bon goût dans l’ensemble comme on a pu le voir. Suit un deuxième (petit) tiers de qualité moindre – ou, plus exactement, constitué de morceaux assez bons, mais moins marquants – avant un troisième tiers retrouvant la puissance du premier.
On entame donc le deuxième tiers avec « Ruiner », un morceau dont on retiendra surtout le refrain grandiloquent au possible. Pour le reste, ce n’est pas mal, mais ça ne marque guère les esprits, quand bien même le côté bruitiste du couplet n’est pas désagréable. On notera aussi un amusant petit break vers la fin…
Suit « The Becoming », un morceau assez anecdotique en dépit d’un crescendo plutôt correct et d’un break à la guitare sèche qui tombe à pic. Ce n’est pas mal fait, mais, une fois de plus, et bizarrement d’ailleurs, ça ne marque guère les esprits…
« I Do Not Want This » joue la carte de la syncope, avant de laisser exploser un riff puissant. C’est répétitif, mais sans véritablement emporter l’adhésion. Assez fade, dans l’ensemble, même si ça s’améliore un peu sur la fin. Probablement le moins bon morceau de l’album avec « Heresy », à mes oreilles en tout cas.
On passe alors au bref et hystérique « Big Man With A Gun » (NB : on s'en cogne de la vidéo). Plus ou moins convaincant, mais de toute façon trop bref pour gêner comme pour véritablement plaire.
Après quoi le joli instrumental « A Warm Place » nous permet de faire la transition du deuxième au troisième tiers de l’album, et donc de revenir à des morceaux plus marquants. Une belle pièce que celle-ci, toute simple, mais très belle, oui, et procurant un moment d’apaisement bienvenu après tous ces excès de fureur autodestructrice…
Quant à la suite, « Eraser », c’est tout simplement à mon sens un des meilleurs morceaux de Nine Inch Nails, tous albums confondus. Un morceau longtemps instrumental, qui monte, qui monte, avec une rythmique imperturbable et une insidieuse petite mélodie à la guitare ; ça monte, ça mooooooonte, et puis ça s’arrête sur un palier de basse et de chant, d’un seul coup… avant d’exploser dans une furie métallique au riff en béton armé. Ça calme. Un seul défaut à mon sens : c’est trop court, on voudrait que ça dure une éternité, tellement c'est bon…
On poursuit avec « Reptile », qui nous scotche d’entrée de jeu de par sa superbe rythmique industrielle et son couplet parfait (et encore plus parfait – j’adore cette expression… – quand les claviers viennent l’assombrir). Dommage, du coup, quel dommage que le refrain soit aussi naze… car tout le reste est tout simplement génial. Et on en redemande, là encore.
Et l’on se rapproche dangereusement de la fin de l’album, là ; généralement, les dépressifs adorent. Ainsi, le quasi-instrumental suicidaire « The Downward Spiral », avec son son (non, pas mon mon… ouais, je sais, je l’avais déjà piquée, celle-là…) en sourdine ; joli, mais pas joyeux…
Mais dans le genre, il y a pire, avec la très belle ballade « Hurt » qui conclut l’album (NB : j’ai mis le clip officiel, tiré d’un live, parce qu’il est bô, même s’il diffère un peu de la version studio, que voici). Très jolie mélodie minimaliste, déjà, ce qui suffit à faire une belle ballade. Mais ce qui en fait un petit bijou à nul autre pareil, c’est cette fin extraordinaire, ces trois notes saturées définitives… Ces trois notes-là font partie des plus belles que j’ai jamais entendues, sans conteste.
Bref, The Downward Spiral est bel et bien l’album de la maturité pour Nine Inch Nails ; un excellent enregistrement, presque dénué de déchet – quand bien même il accuse un petit coup de fatigue vers le milieu – et riche en petites merveilles, uniques en leur genre. Un coup de maître, qui allait être concrétisé cinq ans plus tard avec The Fragile. Entre-temps, il y eut cependant un album de remix, bien sûr, intitulé Further Down The Spiral. Je vous en parlerai peut-être un jour…
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