"Waylander", de David Gemmell
GEMMELL (David), Waylander, [Waylander], traduit de l’anglais (Grande-Bretagne) par Alain Névant, Paris, Bragelonne – Milady, [1986, 2001, 2008] 2010, 441 p.
Après avoir adopté récemment la Charte de Respect des Auteurs, la Nébalie a encore fait un pas en avant dans le domaine de la critique littéraire, en se pliant à la Directive Pour la Propagation des Vraies Valeurs de la Vraie Bonne Critique Utile, à l’instigation du Parti Unifié des Donneurs de Leçons ; voici, à titre d’exemple, le modèle des critiques résultant de cette directive. En conséquence, la Nébalie promulgue la critique suivante de Waylander de David Gemmell.
Waylander est un roman de Davi Gemel. Il raconte l’histoire d’un personnage appelé Waylander, qui a aussi un autre nom. Après la dédicace et les remerciements, il y a un prologue, 25 chapitres et un épilogue. On y trouve aussi le début de Le Roi sur le Seuil. Rien que pour cela, il ne faut pas le manquer. Mais rien ne vous interdit d’apprécier, aussi, le reste.
…
*PIF*
*PAF*
*BOUM*
CITOYENS ! La Révolution nébalienne abroge les textes sus-cités, qui seront dorénavant remplacés par la Déclaration de Je Fais Tout Qu’est-ce Que J’veux Bordel Je Suis Chez Moi, formulée comme suit :
Article 1er : Oh et puis merde.
Article 2 : Envoyez-moi tout ça dans les rizières.
Article 3 : BEUAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAARH !!!
Ouf.
(Oui, moi aussi je peux être mesquin.)
Nouveau compte rendu beuarhesque, donc… et probablement le dernier avant un petit moment. Eh oui. Parce que 1°) bon, au bout d’un moment, ça suffit les conneries, et surtout 2°) cette fois la magie du BEUAAAAAAAAAAAAAARH !!! n’a pas opéré.
Tristesse.
Mais voilà, je suis bien obligé de le reconnaître : Waylander, c’est mauvais.
…
Non, mais, je veux dire, VRAIMENT mauvais. Plus que les autres, quoi. C’est même pas divertissant (alors que les autres, avec tous leurs défauts, si). Et ça tient plus du navet que du nanar. Ce qui est tout de même désolant. Mais, une fois de plus, n’allons pas trop vite en BEUAAAAAAAAAAAAAAAARHsogne, et posons un peu le cadre et le récit.
Dans la chronologie interne du cycle « Drenaï », Waylander et ses deux suites sont les romans les plus anciens, et donc bien antérieurs à Légende et compagnie, dont ils contiennent d’ailleurs la genèse d’éléments importants (ici, les Trente, le Comte de Bronze et son armure, la forteresse de Dross Delnoch…).
Vous savez quoi ? SURPRISE ! C’est la guerre. Étonnant, non ? La Drenaï a été envahie par les Vagrians, et les « Chiens du Chaos » y perpètrent moult ravages. Pour couronner le tout (si j’ose dire), le roi de Drenaï a été assassiné. Pas par n’importe qui, non : par nul autre que Waylander, ZE Assassin, ancien soldat, ancien fermier, même que sa famille s’est fait démonter la tête, et que depuis il est comme qui dirait vach’ment aigri de la vie (et vieillissant, comme tout héros gémmellien qui se respecte).
Waylander nous est donc présenté dans un premier temps tout du moins comme l’archétype du « héros meuchant » (on y reviendra). Mais le roman éponyme est pourtant celui d’une (bête) rédemption. En effet, plusieurs événements vont venir bouleverser la vie du Voleur d’Âmes. Il va tout d’abord, là, comme ça, sur un coup de tête, sauver un prêtre de la Source, Dardalion. Puis il va rencontrer l’amour en la personne de Danyal (ce qui nous vaut plusieurs scènes hautement romantiques), une nécessairement jeune et jolie réfugiée accompagnant trois gniards qui sont là pour la figuration. Enfin, il va rencontrer l’esprit d’Orien, le pôpa du roi qu’il a buté, qui va lui confier pour mission (car telle est la Volonté de la Source !) de retrouver son Armure de Bronze, planquée en plein territoire nadir (pour changer), et de la filer au général Egel, dernier espoir de Drenaï.
Bien entendu, les Vagrians ne comptent pas laisser faire Waylander (ah, oui, ce sont eux qui l’ont payé pour assassiner le roi de Drenaï, mais ensuite, SURPRISE !, ils l’ont trahi et envoyé des assassins à ses trousses, les imbéciles) et, à vrai dire, les Drenaïs ne lui font étrangement pas beaucoup confiance… Mais peu importe, hein ?
De son côté, Dardalion, « contaminé » par le sang de Waylander, va devenir le fondateur des Trente, les fameux moines-soldats (alors que les prêtres de la Source sont pacifistes, et se font donc hacher menu). Et s’il va aider de son mieux Waylander dans sa quête, il va aussi, avec ses potes, prendre part à la bataille de Dros Purdol, la dernière forteresse drenaï, même que c’est l’ultime bataille avant la prochaine (et donc une mauvaise préquelle façon remake de Légende).
On le voit, dans ce roman, Gemmell ne fait pas exactement dans l’originalité foudroyante, et on y trouve bien des éléments typiques de sa production, antérieure et ultérieure. Mais, cette fois, ça ne marche vraiment pas, étrangement. C’est mal écrit (et/ou traduit ?), mais encore plus que d’habitude, et bourré de pseudo-philosophie à dix balles (d’où un paquet de citations à se tordre) ; c’est mal construit ; l’histoire ne tient pas la route, et c’est bourré à la fois de clichés et de rebondissements improbables ; les personnages sont mal campés, quand ils ne sont pas tout simplement ridicules (Kaï, mon Dieu…), etc.
Bref, c’est mauvais. Très mauvais. Et cette fois, ça n’est même pas divertissant : on n’y croit pas deux secondes, les combats systématiques sont mollassons et répétitifs, les situations vues et revues… On s’ennuie. On n’a même pas envie de hurler « BEUAAAAAAAAAAAAAAARH », alors que tous les éléments semblent pourtant réunis ; mais la sauce ne prend pas.
Et puis cette histoire de rédemption m’a un tantinet agacé. Sous cet angle, Waylander m’a fait penser à La Compagnie noire (qui est mieux, certes, mais pas terrible quand même à mon sens) : c’est de la « fausse » dark fantasy avec « héros meuchant ». On nous dit et nous répète que Waylander est un dur, il se la pète bien dans ce sens, genre « j’ai pas d’amis et je suis impitoyable », mais se comporte comme un gentil dès le début du bouquin, et le devient de plus en plus au fur et à mesure que les pages défilent péniblement. Ce qui est tout de même bien frustrant, trouvé-je. On a l’impression que, de même qu’avec Druss mais d’une autre manière, Gemmell a voulu avec Waylander faire son « Conan ». Mais ça ne marche pas, tant la morale est préservée du début à la fin (une morale bourrine et qui pue un peu des pieds, certes, mais une morale quand même). On lira donc de préférence, et sans surprise, le modèle (ou, autre lecture de choix, « Kane », qui reste le plus chouette exemple de « héros vraiment meuchant » du genre à ma connaissance) plutôt que ce triste ersatz.
Rien à sauver dans ce naufrage (plouf), qui ne fait même pas sourire, quelques citations exceptées. On s’ennuie ferme. Et on a envie de passer rapidement à autre chose. Des vrais livres, par exemple.
Du coup, pour la suite, ben, faudra attendre un peu. Parce que c’était pas très BEUAAAAAAAAAAAAARH !!! là, quand même.
(‘tain, je suis déçu par un Gemmell… Tout est foutu…)
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