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"Rashômon et autres contes", de Ryûnosuke Akutagawa

Publié le par Nébal

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AKUTAGAWA (Ryûnosuke), Rashômon et autres contes, [Sakuhin-shu], traduction [du japonais] et introduction d’Arimasa Mori, Paris, Gallimard – Unesco, coll. Connaissance de l’Orient – coll. Unesco d’œuvres représentatives, série japonaise, [1965, 1986] 2011, 292 p.

 

Il y a quelque temps de cela, attiré bien sûr par l’aura du magnifique film d’Akira Kurosawa, je me suis régalé à la lecture de l’édition abrégée en Folio 2€ de Rashômon et autres contes de Ryûnosuke Akutagawa. À tel point, à vrai dire, que je m’étais promis d’en lire la version « complète » en « Connaissance de l’Orient » dès que possible. C’est désormais chose faite ; et le moins que l’on puisse dire est que je n’ai pas été déçu du voyage. Attention, cette chronique risque d’abonder en superlatifs et autres trucs du même genre ; mais il faut dire que l’on tient là vraiment ce qui constitue un chef-d’œuvre, un monument de la littérature mondiale, dont la lecture est indispensable, ah mais. Ryûnosuke Akutagawa, mort trop tôt (il s’est suicidé – plusieurs textes de ce recueil évoquent par ailleurs le suicide, ce qui laisse un goût amer en bouche…), était à coup sûr un authentique génie, une des plus grandes plumes du Japon post-Meiji, et ce recueil suffira amplement à le démontrer – même si je ne compte pas en rester là : j’ai La Vie d’un idiot et autres nouvelles qui m’attend sagement dans ma commode de chevet…

 

Un mot sur la désignation de « contes » : celle-ci n’est sans doute pas à prendre dans un sens trop « occidental » ; le merveilleux n’est pas toujours présent dans ces textes, loin de là, et, quand il intervient, c’est souvent avec une connotation macabre. Il est difficile, en fait de classer Akutagawa, de le confiner dans un registre particulier : héritier en partie du naturalisme japonais, il produit ici quelques textes réalistes de toute beauté, bien loin de tout fantastique ; mais cela n’empêche pas ce dernier de ressurgir là où on l’attend le moins, par exemple dans le dernier des récits « contemporains » qui concluent le volume, là où la majeure partie des textes qui le composent relèvent d’une inspiration historique, voire mythologique, que l’on pourrait croire a priori plus propice au développement du genre.

 

Je passe sur l’introduction – passionnante cela dit – d’Arimasa Mori pour arriver directement au vif du sujet. Le recueil attaque en force (euphémisme), avec l’extraordinaire « Figures infernales », superbe récit à la construction savamment alambiquée contant la réalisation par un peintre arrogant de son chef-d’œuvre – et à quel prix il y parvint. Et… c’est justement un chef-d’œuvre, déjà ; un texte qui marque durablement : il figurait déjà dans l’édition « abrégée », et c’était celui qui m’avait fait la plus forte impression. La relecture n’y a rien changé, bien au contraire.

 

Suit, sur un registre qui m’apparaît plus mineur, mais c’est pourtant semble-t-il la publication qui valut à Akutagawa d’être reconnu pour un maître, « Le Nez » : une fable, pourrait-on dire, sur un moine au nez beaucoup trop long ; et l’occasion de voir tout le talent de l’auteur pour camper des personnages tragicomiques (ce que l’on retrouvera par la suite, notamment dans « Gruau d’ignames »).

 

Après quoi l’on passe à « Rashômon » : ce titre fameux ne doit pas nous tromper, ce n’est là que l’une des deux nouvelles qui ont inspiré son film à Kurosawa, et celle dont l’importance est sans doute la plus relative, fournissant surtout un cadre au(x) récit(s) ; il faut dire que la nouvelle tient de l’épiphanie, du tableau cauchemardesque sur le mal et la pauvreté. Très fort. Mais c’est bien « Dans le fourré » qui constitue l’inspiration première du fantabuleux film Rashômon : l’histoire d’une mort, envisagée selon plusieurs points de vue. Brillante variation sur la réalité et les apparences, sur leur perception enfin (thème qui reviendra souvent dans le recueil), qui ne saurait laisser indifférent.

 

« Gruau d’ignames », le dernier des quatre textes figurant dans l’édition Folio 2€, relève un peu du même registre que « Le Nez », avec une réussite comparable, voire supérieure.

 

Suivent deux textes d’un genre que l’on pourrait qualifier de « mythologique ». « Les Vieux Jours du vénérable Susanoo », surtout, paraît mériter ce qualificatif. L’histoire jubilatoire d’un dieu jaloux qui ne parvient pas à triompher de l’amour de sa fille pour un étranger de passage, qui semble à même de se sortir de toutes les situations, quelque périlleuses qu’elles soient… « Le Fil d’araignée », inspiré semble-t-il par Dostoïevski, est à nouveau une fable, où Çakyamouni offre une échappatoire à un damné, dont le plus grand péché est peut-être bien l’égoïsme…

 

On passe alors à trois textes d’inspiration chrétienne, évoquant l’évangélisation du Japon par les Portugais, et les persécutions qui s’ensuivirent. « Le Martyr », au-delà de sa fin qui en rajoute peut-être un peu trop, est à nouveau une belle parabole sur la réalité et les apparences. « Le Rapport d’Ogata Ryôsai » inverse d’ailleurs les points de vue (on adopte ici celui d’un médecin peu charitable envers les chrétiens), pour un résultat très fort. « Ogin », enfin, est un récit déchirant sur les persécutions, à la conclusion bouleversante. Remarquable.

 

Suit un autre chef-d’œuvre, avec « L’Illumination créatrice », narrant une journée d’un fameux écrivain d’antan, s’interrogeant – par force – sur son art. Un récit magnifique, que l’on sent très personnel et douloureux, malgré sa conclusion relativement positive.

 

« Chasteté d’Otomi » est un texte assez déconcertant, mais assurément brillant, sur la « rencontre » entre une servante loyale et un clochard (un clochard ?). Très beau récit, à nouveau.

 

« Villa Genkaku » inaugure un cycle « contemporain ». Tableau sordide d’un drame familial, c’est un texte d’une grande beauté. On pourrait en dire tout autant du texte suivant, « Le Mouchoir », qui joue à nouveau astucieusement du thème de l’apparence et de la réalité pour interroger la morale japonaise post-Meiji.

 

Et le recueil de se conclure sur un nouveau chef-d’œuvre, avec « Les Kappa » : une succulente nouvelle – la plus longue du recueil – relevant du merveilleux satirique, dans la lignée de Swift et de son Gulliver, qui nous conte le séjour d’un homme (un fou, forcément…) dans le monde des Kappa, étranges petites créatures humanoïdes et gluantes, toujours ou presque un sourire malicieux au coin des lèvres, ressemblant vaguement à des tigres au crâne en forme d’assiette contenant de l’eau… Un régal, astucieux et fin, qui conclut le recueil sur la meilleure des notes.

 

Au risque de me répéter, Rashômon et autres contes (dans cette édition, faut-il le préciser…) est une lecture indispensable (ah mais) (donc), un monument dans lequel rien n’est à jeter ; on ne peut que s’incliner devant tant de génie, et crier au chef-d’œuvre. Vous savez ce qui vous reste à faire, si ce n’est déjà fait…

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"Palimpseste", de Charles Stross

Publié le par Nébal

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STROSS (Charles), Palimpseste, [Palimpsest], traduit de l’anglais par Florence Dolisi, Paris, J’ai lu – Nouveaux Millénaires, [2009] 2011, 158 p.

 

Décidément, j’aime bien Charles Stross. Après Crépuscule d’acier, Aube d’acier, Le Bureau des atrocités et Jennifer Morgue, et avant d’entamer le cycle des « Princes marchands », petit détour aujourd’hui par la case Palimpseste. Un texte court, néanmoins récompensé (prix Hugo 2010, catégorie « novella » si je ne m’abuse), qui se présente à vue de nez comme une astucieuse et complexe variation sur le principe de « La Patrouille du temps » de Poul Anderson. Et en profite pour faire mumuse avec un paquet de paradoxes temporels, dont, dès les premières pages, celui, fameux, du grand-père.

 

L’idée essentielle est que l’humanité est vouée à disparaître (ça commence bien). Peu importe la raison, qu’elle soit naturelle ou pas. La civilisation (ici définie de manière intéressante par l’apparition de la société de contrôle, avec les systèmes de surveillance ubiquitaires ; le bouquin est farci de « petites » idées aux grandes conséquences dans ce goût-là) est par principe transitoire, et l’humanité avec.

 

Mais il y a la Stase : des patrouilleurs temporels qui voyagent tout au long de l’histoire de la Terre afin de sauver, à chaque extinction, une petite parcelle d’humanité (généralement la plus « sauvage », car la plus « réadaptable ») avant de procéder à un « réensemencement ». Il y a eu ainsi des millions de fins du monde ; et des millions de renaissances… Tout cela s’accompagnant en outre de projets d’ingénierie planétaire nourris au meilleur et au plus bluffant « sense of wonder ».

 

Nous suivrons, au cours de sa longue initiation (vingt années subjectives), l’agent Pierce, qui fait tout d’abord figure de jeune crétin aux hormones en ébullition. Pierce va commettre une erreur : il va tomber amoureux. Deux fois. Et la deuxième fois, il en résultera une charmante petite famille. Problème : l’époque dans laquelle vit cette famille va être effacée par une nouvelle version de l’histoire, comme un palimpseste. S’engage alors pour lui une quête a priori perdue d’avance, Pierce cherchant dans la Bibliothèque de la fin des temps la moindre trace de cet univers, perdu dans les méandres de la non-histoire…

 

Si Palimpseste est fort court, il n’en est pas moins d’une grande richesse, la densité d’information étant conséquente (comme souvent chez Stross, j’ai l’impression). Les idées fusent à chaque page, et c’est un vrai bonheur que de lire un livre qui se permette une telle inventivité sans jamais tirer à la ligne, a fortiori aujourd’hui, à l’heure des pavés « nécessaires » et des cycles interminables. « Rien de trop », comme préconisaient ces petits malins de Grecs.

 

Mais bien assez, assurément. Palimpseste est en effet probablement une des plus puissantes variations sur le voyage dans le temps qu’il m’ait été donné de lire ces dernières années (avec l’excellent Les Vaisseaux du temps de Stephen Baxter, qui reste pour moi le champion du genre). Toutes les questions afférentes à ce type particulier de science-fiction sont envisagées, ou presque, au long de ces 160 pages. Alors, évidemment, ça fait un peu mal à la tête, parfois, mais ça n’en est pas moins très convaincant, constituant une somme bienvenue, un récapitulatif au plus près, une synthèse remarquable.

 

Il faut en outre y ajouter les passages concernant l’histoire du système solaire, très « hard science » (faut s’accrocher), mais impressionnants de « sense of wonder » (donc). Baxter, justement, est le seul ces dernières années à m’avoir autant fasciné avec ses projets démiurgiques et ses échelles spatio-temporelles démesurées. Un régal. Alors, n’en doutons pas, les amateurs en auront ici aussi pour leur argent.

 

(Enfin, façon de parler ; l’est un peu cher, ce bouquin, quand même, mais bon, ça va, c’est pas la mort non plus.)

 

La cerise sur le gâteau, c’est que Stross ne néglige pas l’humain pour autant. Pierce est un personnage fort réussi, de même que ses antagonistes (« Kafka » !) et sa petite famille. On passe ainsi sans cesse du macrocosme au microcosme, ce qui donne un peu le tournis, mais aucune partie n’est privilégiée par rapport à l’autre ; tout est traité avec la même attention, qu’il s’agisse de faire sortir la Terre de son orbite ou de narrer une rencontre amoureuse. Il n’y a guère que les scènes d’action qui me paraissent un peu plus faibles, car un brin confuses (mais bon, en même temps, c’est sans doute le but – très clairement pour l’une d’entre elles au moins).

 

Bref : Palimpseste mérite bien son Hugo. Une excellente novella, qui confirme tout le bien que je pensais déjà de Charles Stross, lequel est probablement l’un des plus enthousiasmants auteurs de science-fiction à l’heure actuelle.

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"Les Mystères du Ver", de Robert Bloch

Publié le par Nébal

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BLOCH (Robert), Les Mystères du Ver, [Mysteries of the Worm], édition et introduction de Robert M. Price, postface de Lin Carter, traduit de l’anglais par Philippe Poirier, Montigny-les-Metz, Oriflam, coll. Nocturnes, [1993] 1998, 303 p.

 

Robert Bloch est assurément l’un des plus célèbres membres du « cercle lovecraftien ». Les lecteurs des « Légendes du Mythe de Cthulhu » se rappellent nécessairement le petit jeu entrepris par le futur auteur de Psychose avec le maître de Providence, consistant à se tuer l’un l’autre de la manière la plus horrible qui soit par nouvelles interposées… Rien d’étonnant, dès lors, à ce qu’un recueil de ses lovecrafteries ait été publié, sous le titre de sa plus célèbre contribution au mythe, le grimoire infâme de Ludwig Prinn.

 

Mais il est important de noter que Bloch fut le plus jeune membre du « cercle lovecraftien », lui qui n’avait pas vingt ans lors de la publication de ses premières nouvelles dans Weird Tales. Et ça se sent… Bloch lui-même, dans un « Épilogue », ne se fait pas d’illusions sur la valeur de ces premiers textes : « des expériences, mal conçues et mal exécutées par un adolescent amateur qui méritait lui-même d’être exécuté »… On peut bien le dire d’ores et déjà : c’est la médiocrité qui domine dans ce recueil (voire pire), même s’il comprend à l’occasion quelques textes de jeunesse relativement intéressants, et, surtout, s’il permet de prendre en considération la nette évolution de l’auteur devenant « professionnel », au fil de textes de plus en plus personnels et aboutis. Le moins que l’on puisse dire est qu’il y a un sacré contraste entre les premiers textes de ce volume, et les derniers…

 

On ouvre le bal avec « Le Secret dans la tombe », première nouvelle de l’auteur à avoir été acceptée par Farnsworth Wright (qui « devait être de particulièrement bonne humeur ») pour Weird Tales. Effectivement, on se demande quel intérêt le rédacteur en chef de la revue a pu trouver à cette nouvelle mal bâtie, sans véritable histoire, et saturée d’adjectifs grandiloquents (défaut qu’on retrouve souvent dans les premiers textes, franchement écrits avec les pseudopodes – et traduits itou, ce qui n’arrange rien…) ; pour un peu, on y verrait presque une parodie…

 

« Suicide dans l’étude », piètre variation (et encore…) sur Dr Jekyll et Mr Hyde, est de même totalement dénuée d’intérêt.

 

On passe ensuite à quelque chose de beaucoup plus intéressant (même si…) avec « Le Démon venu des étoiles », qui est donc la nouvelle dans laquelle Robert Bloch « tue » Lovecraft (avec son autorisation…). Rien d’exceptionnel, mais la nouvelle présente quand même un minimum d’intérêt, d’une part dans sa digression sur Ludwig Prinn, et d’autre part dans le meurtre de « Lovecraft » par un vampire stellaire, scène joliment cracra.

 

« Le Dieu sans visage » introduit le thème égyptien, récurrent dans le recueil, d’une manière relativement potable. Disons qu’on a vu pire utilisation de Nyarlathotep…

 

« Le Rictus de la goule » introduit un autre thème prépondérant du recueil, Bloch aimant bien les histoires de goules (à en croire Robert M. Price, ce serait d’ailleurs également lui « l’inventeur » du Culte des goules du comte d’Erlette). Mais c’est sans intérêt…

 

« L’Obscur » est à nouveau un texte dont Lovecraft, à peine déguisé, est le « héros ». Mais ça ne marche pas à tous les coups…

 

Plus intéressant quoique très prévisible, « L’Homoncule » s’inscrit dans la droite lignée de fameux textes lovecraftiens comme « L’Abomination de Dunwich ». Correct.

 

Correct également, « La Progéniture de Bubastis » mêle goules et thème égyptien… en Cornouailles. Pourquoi pas ? Rien de fabuleux, mais la nouvelle n’en produit pas moins son petit effet.

 

« La Créature dans la crypte », autre histoire de goule prenant place cette fois à Arkham, est un texte assez maladroit, qui ne convainc pas vraiment. On passe.

 

Suivant : « Le Secret de Sebek », avec toujours le thème égyptien, mais cette fois lors du carnaval de la Nouvelle-Orléans, avec un décor « s’inspirant » ouvertement du « Masque de la mort rouge » de Poe. Pas trop mal.

 

Pas trop mal non plus, « Le Temple du Pharaon Noir » (toujours l’Égypte…) est un texte là encore très prévisible, mais plutôt bien ficelé. Globalement, ça commence à s’améliorer.

 

En témoigne « L’Étoile de Schemet », texte s’inspirant pas mal de classiques lovecraftiens tels que « De l’au-delà », « Le Modèle de Pickman », et « Les Chiens de Tindalos » de Frank Belknap Long, mais qui fonctionne plutôt bien. L’idée n’est pas mauvaise, et témoigne de cette amélioration sensible des lovecrafteries de Bloch.

 

Mais on fait à peu de choses près dans le saut quantique avec « L’Ombre du clocher », réponse (posthume…) de Bloch au meurtre de Robert « Blake » par Lovecraft dans « Celui qui hantait les ténèbres ». L’histoire est bavarde et complètement délirante, mais ça tient la route.

 

Nouveau saut quantique avec ce qui constitue probablement la meilleure nouvelle du recueil, « Manuscrit trouvé dans une maison déserte ». L’ambiance très « Dunwich » fonctionne à merveille, et le style de Bloch devient enfin plus personnel – et pour cause, le narrateur étant cette fois un enfant, comme dans « Le Peuple blanc » d’Arthur Machen, qu’on trouvait dans Le Cycle de Dunwich.

 

Mais le texte le plus personnel sur le plan du fond comme de la forme est probablement « La Crique de la terreur », par ailleurs le plus long du recueil. Bloch y délaisse le style « pastiche », et a bien raison, cette variation plus « moderne » sur le Mythe est tout à fait convaincante.

 

Et reste enfin une très belle nouvelle pour conclure, avec « Les Noces ineffables », qui revient à quelque chose de plus classique, mais avec une perception très particulière – et pas vraiment horrifique, en fin de compte – qui en fait tout le sel.

 

Au final, nous avons donc avec Les Mystères du Ver un recueil franchement médiocre, voire carrément très mauvais, sur près de la moitié du volume (tout de même), puis ça s’améliore, jusqu’à réserver de bonnes surprises dans les derniers textes, plus personnels et indéniablement plus maîtrisés. Autant dire que c’est là une lecture très dispensable dans l’ensemble, mais qui pourra, sur le tard, intéresser quelques lovecraftiens-et-plus-puisque-affinités dans mon genre… mais je ne saurais en recommander la lecture, faut pas pousser mamy dans les shoggoths.

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"L'Anarchie", d'Elisée Reclus

Publié le par Nébal

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RECLUS (Élisée), L’Anarchie, notes et postface de Jérôme Solal, [s.l.], Fayard – Mille et Une Nuits, [1896] 2009, 53 p.

 

Des grands noms de l’anarchisme au XIXe siècle, je ne savais à peu près rien d’Élisée Reclus, si ce n’est qu’il était un éminent géographe. D’où la lecture de ce tout petit ouvrage, afin d’en savoir un peu plus sur cet ami de Bakounine et Kropotkine. Il s’agit en fait d’une conférence prononcée devant une loge maçonnique bruxelloise en 1894 (quoique l’auteur, tout en étant « apprenti », ne goûte guère la Maçonnerie, ses rituels et sa hiérarchie), qui fut reprise sous forme d’article dans Les Temps nouveaux en 1895.

 

Le contexte a sans doute son importance : nous sommes alors en plein dans la vague de terrorisme anarchiste qui balaye l’Europe, et la répression est conséquente. Pourtant, Reclus, dans ce petit texte, n’évoque pas une seule fois la question de la violence révolutionnaire. Loin de se faire l’apologiste ou au contraire l’accusateur des poseurs de bombes, il n’en parle tout simplement pas. Il entend, semble-t-il, donner un autre visage à l’anarchisme, en en faisant une nécessité historique, dans une perspective éminemment positiviste et historiciste.

 

En effet, Reclus inscrit l’anarchisme dans l’histoire. À l’en croire, le mouvement est bien antérieur à Proudhon, et il y a dans un sens toujours eu des anarchistes, ou acrates. Dès que le pouvoir a existé, la contestation du pouvoir, voire de toute forme de pouvoir, a existé également. Aussi l’anarchisme contemporain peut-il à bon droit se réclamer de prestigieux modèles, et parallèlement grossir ses rangs de nombreuses personnes, qui sont autant d’anarchistes sans le savoir.

 

En effet, l’élément fondamental pour Reclus, et qui justifie la définition et la dénomination par la négative de l’anarchisme, avec le préfixe privatif « a- », c’est la contestation de l’autorité, quelle qu’elle soit. Or, dans cette perspective, depuis Descartes notamment, la science elle-même, ce moteur du XIXe siècle, rejetant toute forme d’autorité préétablie, est dans un sens « anarchiste » ; elle participe en tout cas de ce mouvement de remise en cause de l’autorité, et notamment de celle de Dieu.

 

Cependant, cette dénomination par la négative justifie aussi la singularité de l’anarchisme contemporain, et le distingue d’autres mouvements, proches par les idées, mais qui n’ont pas pour objectif cette dissolution du pouvoir, cherchant plutôt à s’en emparer pour « faire le bonheur des gens », chose que Reclus n’accepte pas : il s’agit bien de détruire toute forme d’autorité, seul moyen d’aboutir vraiment à la justice et à l’égalité ; conserver le pouvoir, même « temporairement », c’est s’exposer au risque de perversion des idéaux : cela ne revient qu’à changer de maître, quand il s’agit d’abolir les maîtres.

 

Mais l’anarchisme, alors, n’est-il pas une « chimère » ? Pas pour Reclus, qui entend justement montrer, donc, que l’anarchisme est dans l’ordre des choses, et qu’il constitue une nécessité historique. Le pouvoir est de jour en jour plus contesté, et les idéaux anarchistes de justice, d’égalité et d’harmonie se répandent : Reclus n’en doute pas, le futur sera anarchiste, car il ne saurait être autre chose. Peu importe à cet égard la complexité et la vastitude des sociétés modernes, argument souvent opposé à ceux qui défendent l’anarchisme en prenant pour exemple certaines sociétés dites « primitives », argument que balaye Reclus d’un geste, sans plus s’y attarder. Et de multiplier les anecdotes qui témoignent de ce changement d’état d’esprit fondamental, la plus importante étant celle du bateau et de son capitaine, qui, dans une envolée particulièrement lyrique, insiste sur le peu d’importance de son rôle, et présente la micro-société du navire comme un idéal anarchiste déjà réalisé.

 

Plus de cent ans ont passé depuis cette conférence. Et, n’en déplaise à Reclus, son anarchisme « harmonieux » et « nécessaire » semble plus que jamais « chimérique »… Reclus est un homme de son temps, qui assigne un sens à l’histoire ; mais l’histoire l’a fait mentir, comme tous ceux qui ont procédé de la sorte. Le principe d’autorité a connu, depuis, des hauts et des bas, mais on a toujours été bien loin de l’idéal anarchiste. Aujourd’hui plus que jamais, peut-être, alors que les électeurs, obsédés par la sécurité, y sacrifient volontiers leur liberté. Du bonheur d’être esclave – ou de la servitude volontaire… Reclus a sans doute trop facilement négligé les forces de résistance du pouvoir, chez ceux qui le détiennent comme chez ceux qui le « subissent », il a sans doute trop rapidement balayé l’instinct de conservation, voire de réaction, le besoin parfois brutalement affiché d’ordre et de sécurité, le côté « rassurant » de l’autorité. Oui, on peut bien le regretter, mais l’histoire n’est pas anarchiste…

 

Tout cela ne fait que me confirmer dans mon point de vue originel : je suis trop pessimiste pour être anarchiste. Et si je m’affiche volontiers libertaire, c’est au nom d’un combat toujours à recommencer, et qui ne prendra sans doute jamais fin…

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"Shades of Grey", de Jasper Fforde

Publié le par Nébal

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FFORDE (Jasper), Shades of Grey, I : The Road to High Saffron, London, Hodder, [2010] 2011, 435 p.

 

Avec Shades of Grey, I : The Road to High Saffron, qui devrait être traduit en français très prochainement au Fleuve Noir, l’excellent Jasper Fforde, que l’on connaissait jusqu’alors essentiellement pour la brillante série des « Thursday Next » (lisez-moi cette merveille tout de suite, si c’est pas déjà fait), entame une nouvelle trilogie qui l’éloigne quelque peu de ses préoccupations habituelles. Il s’agit en effet à bien des égards d’une sorte de dystopie, plus ou moins dans la lignée de 1984 et compagnie, mais néanmoins avec une touche bien particulière, très personnelle, de gros délire qui tache.

 

Nous sommes plusieurs siècles dans le futur. Et même plusieurs siècles après le mystérieux « Something Has Happened ». Le monde est désormais régi par la parole de Munsell, qui a instauré, à grands coups de règlements tous plus absurdes les uns que les autres – et dont chaque chapitre nous offre un exemple en tête –, une société passablement liberticide. Mais, surtout, inégalitaire, d’une manière pour le moins surprenante. En effet, dans ce monde-là, les individus sont hiérarchisés en fonction de leur affinité avec les couleurs de l’arc-en-ciel, qu’ils perçoivent plus ou moins, et qui déterminent en retour leurs fonctions et leurs relations sociales. On trouve ainsi des Rouges, comme notre héros Eddie Russett, mais aussi des Bleus, des Jaunes, etc. Et, en-dessous, la masse indistincte des Gris, qui n’ont pas suffisamment d’affinité avec telle ou telle couleur, et qui forment l’essentiel de la force de travail.

 

En outre, les individus sont jugés selon leur « mérite », qui se gagne et se perd en fonction de leurs actions, et constitue une sorte de monnaie d’échange (on peut ici penser à l’excellent Dans la dèche au Royaume Enchanté).

 

Enfin, la technologie des « Previous » est progressivement effacée, par une suite de « grands bonds en arrière » (grrr… Fforde, salaud de plagiaire ! Tu m’as volé cette idée !).

 

Eddie Russett, donc, est un Rouge. Et, accessoirement, il a « besoin d’humilité ». C’est pourquoi il est envoyé, aux côtés de son père (un « swatchman », une sorte de médecin), dans la localité excentrée d’East Carmine. On lui a en effet confié une mission absurde : faire un recensement des chaises de la ville. Après cela, il compte bien revenir à Jade-Under-Lime, et épouser Constance Oxblood, qui a plein de couleur à apporter à son lignage. Mais les choses ne s’annoncent pas si simples : à East Carmine, Eddie découvre une société gangrenée par la corruption et l’hypocrisie, et où pas mal de concitoyens traînent de vilaines casseroles ; et son retour semble très tôt compromis…

 

Mais il découvre aussi l’amour, le vrai, à East Carmine, en la personne de Jane, une Grise au nez particulièrement « retroussé ». Mais, pour son plus grand malheur, ladite Jane a un caractère de cochon, et est à peu de choses près une véritable psychopathe… qui a bien des choses à cacher.

 

Selon le schéma classique des dystopies totalitaires, nous suivrons donc Eddie dans sa prise de conscience progressive de la réalité perverse de la société dans laquelle il vit. Cocktail dangereux : Eddie est à la fois très curieux et un peu couillon… ce qui lui suscite bien des inimitiés, et l’obligera à risquer sa peau sur la route de High Saffron.

 

Avant de finir dans un arbre carnivore, du fait de Jane.

 

La dystopie de Shades of Grey est donc « classique » par certains côtés, mais, rassurez-vous, c’est loin d’être une énième resucée du genre : on reconnaît bien la patte délirante de Jasper Fforde, et son imagination sans limites, qui font de ce roman quelque chose d’extrêmement riche et dense. Les idées fusent en tous sens, meilleures les unes que les autres, et jamais gratuites. On se régale devant les nombreuses inventions de l’auteur de la première à la dernière page, et c’est assez impressionnant. Et c’est aussi très drôle, malgré la gravité indéniable du fond. Ce mélange de délire et de sérieux fonctionne à merveille. On peut éclater de rire sur une page, et s’indigner à la suivante, sans qu’il y ait véritablement de rupture de ton. Étonnant et admirable.

 

Le roman bénéficie en outre de personnages remarquablement bien campés : on s’identifie facilement à Eddie, et, comme lui, on ne manquera pas de tomber amoureux de cette dingue de Jane (Jasper Fforde est décidément très doué pour ses personnages féminins, lui qui m’avait déjà fait craquer pour Thursday Next…), tandis que d’autres personnages susciteront tour à tour l’indignation ou le rire avec un naturel désarmant.

 

Jasper Fforde m’avait légèrement déçu avec Moi, Jennifer Strange, dernière tueuse de Dragons. Avec ce premier tome de Shades of Grey, il remonte largement dans mon estime : si la série se poursuit avec autant de brio, on pourra bien la considérer au moins aussi bonne que celle des « Thursday Next », et ce n’est pas rien… J’attends la suite avec impatience.

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"Le Peuple des ténèbres", de Tony Hillerman

Publié le par Nébal

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HILLERMAN (Tony), Le Peuple des ténèbres, [People of Darkness], traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Danièle et Pierre Bondil, Paris, Rivages, coll. Noir, [1980, 1992, 2004] 2007, 299 p.

 

Et hop, un nouvel épisode des enquêtes Navajos de Tony Hillerman. Le quatrième en l’occurrence, et un livre qui a son importance dans le « cycle », dans la mesure où c’est le premier où apparaît Jim Chee (pour ce que j’ai cru comprendre), qui vient ici remplacer le lieutenant Joe Leaphorn, héros des trois premiers titres. Et à la différence de ce que l’on pourra lire plus tard (par exemple dans Blaireau se cache ou L’Homme Squelette), Jim Chee est bien le seul héros du roman (Joe Leaphorn n’y apparaît pas, même s’il est mentionné une fois en passant). Notons au passage qu’il s’agit là de la version intégrale de ce roman, autrefois paru en Série noire dans une version tronquée et désavouée par l’auteur sous le titre Le Peuple de l’ombre.

 

Jim Chee, donc. Un personnage déchiré entre deux cultures, celle des Blancs et celle des Navajos. Tout au long du roman, nous le verrons hésiter sur son avenir : doit-il rejoindre les rangs du FBI ? Ou bien doit-il continuer à étudier auprès de son oncle pour devenir yataalii (« chanteur ») ?

 

En attendant, le voilà engagé à titre privé – et pour une jolie somme – par la femme d’un milliardaire enrichi par l’uranium, qui vient d’être cambriolé : il s’agit pour lui de retrouver un petit coffre à souvenirs appartenant à son mari, volé d’après elle par « le Peuple des ténèbres », ainsi que l’on désigne les taupes chez les Navajos ; c’est-à-dire une sorte de secte, autrefois considérée comme illégale par le Conseil tribal parce qu’elle utilise le peyote dans ses cérémonies. Jim Chee hésite à se charger de l’affaire, mais elle l’intrigue néanmoins ; elle l’intrigue à vrai dire d’autant plus lorsque le milliardaire lui-même le contacte pour lui dire qu’il s’agit d’un malentendu, une simple affaire domestique qui ne nécessite pas son intervention… et entend le payer pour la « gêne ».

 

Jim Chee, curieux, se lance malgré tout sur la piste du voleur désigné par la femme du milliardaire, à savoir le chef du « Peuple des ténèbres ». Et, après une première rencontre fructueuse, le retrouve bientôt sous forme de cadavre… Ce qui en soi est déjà assez grave pour justifier une enquête (mais la police Navajo est-elle compétente ? Plus que jamais, la question des juridictions se pose dans cette affaire), mais vient poser un autre grave problème : Jim Chee et une de ses amies, Mary Landon, une institutrice d’abord un peu revêche, ont été peu ou prou témoins de l’assassinat du chef du culte du peyote ; et ils se retrouvent ainsi avec un impitoyable tueur à gages aux trousses…

 

Quel est le rapport entre les deux enquêtes ? Pourquoi attache-t-on tant d’importance à ce coffre de souvenirs d’apparence anodin ? Et quel est le but de ce tueur, qui semble, il y a quelque temps, avoir tenté de faire sauter le précédent chef du « Peuple des ténèbres » alors qu’il se mourait déjà du cancer et n’en avait plus pour très longtemps ? Jim Chee a du pain sur la planche, et il lui faut se dépêcher ; car c’est sa propre vie qui est en jeu…

 

Entre polar et thriller, Le Peuple des ténèbres est à nouveau une jolie réussite. Le roman se dévore littéralement, aidé par une plume fluide et des personnages très humains. L’enquête, sans être compliquée outre mesure – on voit assez vite les principaux tenants et aboutissants –, est astucieuse et – c’est le plus important – palpitante, et les scènes de suspense sont très efficaces.

 

Mais comme d’habitude avec Tony Hillerman, la cerise sur le gâteau, ce sont les aspects ethnologiques du roman. On aura ici l’occasion d’en apprendre davantage sur la sorcellerie Navajo, sur l’usage du peyote dans la Native American Church, sur les animaux-totems, sur la perception de la mort chez les Navajos et d’autres peuples indiens (Chee est toujours étonné par l’attitude des Blancs à l’égard de leurs cadavres…), et sur bien d’autres choses encore, qui font tout le sel de ce roman.

 

 Je n’en ferais pas un chef-d’œuvre, mais le fait est que ce Peuple des ténèbres est un bon, voire très bon polar, qui passionne de bout en bout, intelligent et richement documenté comme à l’habitude. Je suis décidément en train de devenir un fan de Tony Hillerman… À bientôt pour un nouvel épisode.

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"McSweeney's. Anthologie d'histoires effroyables", de Michael Chabon (éd.)

Publié le par Nébal

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CHABON (Michael) (éd.), McSweeney’s. Anthologie d’histoires effroyables, [McSweeney’s Issue 10. McSweeney’s Mammoth Treasury Of Thrilling Tales (Abridged)], édition et introduction de Michael Chabon, traduit de l’anglais par Laurence Viallet, Paris, Gallimard, coll. Folio Science-fiction, [2002, 2008] 2011, 374 p.

 

Michael Chabon est décidément un type bien. Non content d’avoir écrit de fabuleux romans tels que Les Extraordinaires Aventures de Kavalier & Clay (prix Pulitzer ô combien mérité) ou encore Le Club des policiers yiddish (prix Hugo ô combien mérité), il s’est mis aussi à jouer à l’anthologiste pour la revue McSweeney’s : il s’agissait pour lui de retrouver le plaisir de la nouvelle, et notamment de la nouvelle de genre. Il en est résulté aux Etats-Unis un numéro spécial de ladite revue d’excellence, et en France une Méga-anthologie d’histoires effroyables, reprise aujourd’hui en abrégé dans cette Anthologie d’histoires effroyables, mettant justement l’accent sur les genres qui nous intéressent au premier chef. L’occasion de voir neuf auteurs, et non des moindres, habitués ou non, s’exercer au fantastique ou à la science-fiction. Et le résultat est plus qu’alléchant (à tel point, en fait, que j’en suis venu à regretter de ne pas avoir lu la Méga-anthologie à sa sortie, erreur que je vais peut-être tâcher de réparer un de ces jours).

 

Mais restons-en à cette version abrégée pour le moment. Après une sympathique introduction de Michael Chabon, c’est Dan Chaon qui ouvre le bal avec « Les Abeilles », une nouvelle horrifique très délicatement teintée d’atmosphère fantastique, qui vaut notamment pour son beau portrait de père, ex-salaud alcoolique. Pas mal du tout.

 

À la différence du texte de Carol Emshwiller, « Le Général », qui m’a semblé constituer le seul léger ratage de cette anthologie. Que ce soit pour ce qui est du fond ou de la forme, j’avoue n’avoir guère trouvé d’intérêt à cette sorte de dystopie abstraite, narrant l’évasion d’un « général » et sa rencontre avec une « famille » perdue dans les montagnes. Mouais…

 

On passe à quelque chose de bien autrement réjouissant avec « Sinon, le chaos » de Nick Hornby, nouvelle parfaitement jubilatoire dans laquelle un adolescent nous conte comment il a perdu son pucelage. Ce qui en soi ne serait guère intéressant, s’il n’y avait en sus ce magnétoscope acheté 50 $ à un vieux hippie sur le retour… et qui explique tout. Un texte très drôle et bien vu, une authentique réussite.

 

Autre réussite pour le moins enthousiasmante, « Le Seau de Chuck » de Chris Offutt mêle « ghost story » et histoire de voyage dans le temps, sur un mode farceur et caustique très bien vu. La nouvelle est émaillée de clins d’œil aux petits camarades de l’auteur (en l’occurrence, Michael Chabon et Harlan Ellison), et est parfois à se tordre. On ne fait pas vraiment dans « l’effroyable » ici, mais on se régale.

 

Suit Michael Moorcock avec « L’Affaire du canari nazi ». Bon, déjà, j’aime le titre. Pour ce qui est du contenu, disons-le tout de go, ce n’est certes pas ce que Moorcock a fait de meilleur (lisez Mother London). Mais cette pochade uchronique dans laquelle un détective métatemporel (lié aux Von Bek) et son assistant, émules de Holmes et Watson, viennent en aide à un Hitler pas encore au pouvoir, est tout de même plus que sympathique, et se conclut fort bien. Pas mal, donc.

 

Sherman Alexie, ensuite, est le seul à faire véritablement dans « l’effroyable » avec « La Danse des esprits », nouvelle zombifique passablement gore, tenant de « l’épiphanie » tant vantée par Michael Chabon dans son introduction. Plus que correct.

 

Suivent les « Derniers Adieux » de Harlan Ellison (dont je vous ai vanté il y a peu les mérites du très bon I Have No Mouth & I Must Scream), là encore une pochade, où un homme en quête du Paradis (Cœur de l’Insatiable Perfection, Nid de la Réalité Inéluctable, Corpus de la Perception Nocturne, Abîme de l’Aurochs Prophétique, etc.) tombe, en plein Himalaya, sur un fast-food métaphysique. Rigolo.

 

Suit une longue novella très dickienne de Rick Moody, « Notes sous Albertine », qui prend place dans un futur où New York a été détruit par une explosion nucléaire, et met en scène une drogue permettant de revivre ses souvenirs… ou de voyager dans le temps, dans de véritables réalités partagées. Un excellent texte, du genre qui fait mal au crâne parfois, mais qui se révèle brillant de la première à la dernière ligne.

 

Et l’anthologie de s’achever sur le premier chapitre de « L’Agent martien, roman d’aventures planétaire » de Michael Chabon, qui nous la joue donc feuilletoniste. Rien de martien pour le moment, mais une sympathique uchronie dans laquelle les Etats-Unis n’existent pas mais, en plein XIXe siècle, sont toujours sous la férule de l’empire britannique. On aimerait bien lire la suite… prévue pour une autre Méga-anthologie d’histoires effroyables.

 

Au final, cette Anthologie d’histoires effroyables est donc de très bonne tenue. Si tout n’y est pas excellent, j’ai aimé, à des degrés divers, tous les textes qui la composent, en dehors de celui de Carol Emshwiller. En fait, comme je l’ai mentionné plus haut, j’en suis venu à regretter, une fois la dernière page tournée, de ne pas avoir lu la Méga-anthologie… S’il doit y avoir une deuxième fournée, je ne commettrai pas la même erreur.

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"Allez les mages !", de Terry Pratchett

Publié le par Nébal

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PRATCHETT (Terry), Allez les mages !, [Unseen Academicals], traduit de l’anglais par Patrick Couton, Nantes, L’Atalante, coll. La Dentelle du cygne – Fantasy burlesque, [2009] 2010, 525 p.

 

Le football étant un sport parfaitement crétin (pléonasme ?), joué par des débiles uniquement surpassés en débilité par ceux qui les supportent, il était tout naturel qu’il débarque un jour sur le Disque-monde de Terry Pratchett. C’est chose faite avec cet Allez les mages ! (sale titre), roman touffu qui se paye plus d’une cible : en effet, la haute-couture y passe aussi, de même que, au hasard, la philosophie allemande ou le racisme. C’est un peu, d’ailleurs, et autant le dire de suite, le problème de ce 33e (!) tome des « Annales du Disque-monde » : une certaine tendance à la dispersion, qui explique une mise en place assez longue et pas toujours très convaincante, avant que les choses ne deviennent un peu plus claires.

 

Il y a donc le football. Pardon : le fouteballe (ou foute-la-balle). Une vieille tradition qui a bien dégénéré. À Ankh-Morpork, c’est devenu le règne de la bouscule (autant dire des supporters, et donc des hooligans). Et a priori, il n’y a pas spécialement de raisons pour que ça change. Sauf que l’inénarrable Cogite Stibon découvre un jour que le fouteballe était une tradition de l’Université de l’Invisible également, tradition oubliée depuis quelque temps ; sauf qu’il serait temps de s’en rappeler, dans la mesure où un legs important fait à l’Université dépend légalement de l’existence d’une équipe de fouteballe de l’UI. Il s’agit donc de s’y mettre, et fissa.

 

Et étrangement, en gros au même moment, le Patricien Vétérini (toujours aussi classe, voire plus que jamais) (même bourré), qui s’était jusque-là fait remarquer par son aversion pour le fouteballe, semble y trouver un nouvel intérêt…

 

Mais nous suivrons cette histoire essentiellement par le prisme de quatre nouveaux personnages (ce qui participe également de la longue mise en place que j’évoquais plus haut) : il y a tout d’abord Trevor Probable, fils de David Probable, une ancienne légende du fouteballe (pour avoir marqué quatre buts dans sa carrière avant de mourir sur le terrain) (oui, il y a un peu de Blood Bowl dans le fouteballe version Disque-monde) ; un raté complet, mais qui parvient à obtenir de jolis résultats en jouant avec une boite de conserve.

 

Il y a aussi, en provenance directe de la cuisine de nuit de l’Université de l’Invisible, la caractérielle Glenda, proclamée « reine des tourtes », et son amie d’enfance Juliette (…), d’une beauté incomparable, mais complètement stupide. Ces deux-là vont osciller entre plusieurs univers bien codifiés, de la bouscule à la mode (naine) (qui n’irrite pas), avec l’UI et sa cuisine pour port d’attache.

 

Enfin et peut-être surtout, il y a monsieur Daingue. Un gobelin (tiens, une nouvelle espèce). Relégué dans les bas-fonds de l’Université de l’Invisible pour des raisons mystérieuses, alors qu’il est à l’évidence d’une intelligence et d’une bonne volonté rares, qui lui vaudraient en temps normal bien du mérite. Mais il y a, voyez-vous, une histoire de naturel qui revient au canot… ou pas.

 

Autour de ce quatuor de nouvelles têtes, nous retrouvons bien sûr bon nombre de personnages classiques d’Ankh-Morpork, et de l’UI en premier lieu. Notamment – autre histoire qui vient se greffer sur un fond déjà passablement complexe – nous aurons l’occasion d’assister à la rivalité explosive entre l’archichancelier Ridculle et son ancien doyen, devenu archichancelier de l’université de Jusseuil, à Pseudopolis…

 

Et au milieu de tout ça, il y a le fouteballe. Nécessairement. Et qui dépasse nécessairement le cadre du fouteballe.

 

Le roman, donc, est plutôt long à démarrer. J’avoue m’être passablement ennuyé un bon moment, et avoir craint que cet énième volume des « Annales du Disque-monde » ne se révèle plutôt faible, comme un certain nombre des plus récents. Pratchett veut y mettre beaucoup de choses à la fois, et, pendant un certain temps, on ne sait pas trop dans quelle direction on va.

 

Mais, finalement, passée cette longue mise en place, Allez les mages ! se révèle plutôt une réussite. Notamment grâce à une caricature en définitive très bien vue du fouteballe et de tout ce qui gravite autour, et du fait des apports intéressants que sont Glenda et surtout monsieur Daingue (entre autres nouvelles figures), personnages très chouettes, ma foi.

 

Monsieur Daingue, à bien des égards, est le véritable héros de ce roman. On pouvait craindre, au début, qu’il ne se contente de figurer une nouvelle espèce, sans autre apport véritable qu’un retournement des clichés concernant les gobelins. Mais c’est pourtant un personnage très attachant (il fait tout pour ça, faut dire), et qui apporte vraiment quelque chose au roman.

 

Par ailleurs – et ce n’était pas forcément le cas, loin de là, pour certains des derniers romans du cycle, en « adulte » comme en « jeunesse » –, si l’on passe sur quelques gags lourdingues, voire scato, Allez les mages ! contient quelques passages fort drôles (je pense notamment au banquet de l’UI et au match final, tendu comme c’est pas permis), et, avouons-le, ça fait quand même du bien de se marrer avec Terry Pratchett (d’autant qu’on n’en aura semble-t-il plus très souvent l’occasion, mais c’est une autre histoire…).

 

Un roman double, donc. Il faut survivre aux premières pages (longues et pas très enthousiasmantes) pour arriver vraiment à ce qui fait le sel de ce roman, et en tirer un bilan plutôt positif, voire aller jusqu’à parler de bon cru. Ce n’est donc pas une réussite totale, mais on a lu bien pire dans le cycle, et on a quelques occasions fort réjouissantes de se fendre la gueule. Après tout, c’était le but, non ?

 

Aha.

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"ABC Dick", d'Ariel Kyrou

Publié le par Nébal

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KYROU (Ariel), ABC Dick. Nous vivons dans les mots d’un écrivain de science-fiction, illustrations de Gosia Galas, Paris, Inculte, coll. Essais – Temps réel, 2009, 427 p.

 

Eh oui, encore Philip K. Dick. Pourquoi pas, après tout ? N’est-il pas le plus beau, le plus fort, le plus intelligent, le plus barbu ? Je continue donc mon exploration des textes sur Dick, après (outre les analyses figurant dans les ouvrages de Dick) le numéro de Bifrost qui lui fut consacré jadis, Je suis vivant et vous êtes morts d’Emmanuel Carrère, Invasions divines de Lawrence Sutin, Regards sur Philip K. Dick d’Hélène Collon (éd.), et Les Romans de Philip K. Dick de Kim Stanley Robinson, tous ouvrages très recommandables, chacun dans son genre.

 

Le livre qui va nous retenir aujourd’hui adopte une forme un peu différente. Comme son titre l’indique, il s’agit d’un abécédaire, ou si l’on préfère d’un dictionnaire, composé de soixante entrées thématiques, allant de « Androïde » à « Zonard » (les, en gros, 300 premières pages), suivi d’environ 125 pages de « notes et bibliographie » (tout de même). Outre cette apparence pour le moins particulière, le fond également promet de détonner par rapport à l’exégèse dickienne habituelle, du moins si l’on s’en tient aux promesses affichées par le préambule : il faudrait donc s’attendre ici à une lecture très personnelle de Dick, revendiquant sa subjectivité, et intéressée avant tout par les idées qui s’y déploient, dans un champ notamment philosophique et politique, et dans la mesure où elles semblent d’actualité (d’où le sous-titre : « Nous vivons dans les mots d’un écrivain de science-fiction »). Révélateur de ce fait, la bibliographie en fin de volume, où tous les textes (à l’exception notable des romans de « littérature générale ») de Dick se voient attribuer une note, non pas relative à l’intérêt littéraire, comme on pourrait s’y attendre, mais un « CIA » (aha – coefficient d’intérêt actuel) relatif aux seules idées.

 

On entame donc la lecture de ce beau livre avec curiosité, espérant lire quelque chose qui sorte un peu de l’ordinaire. Hélas, n’en déplaise à l’auteur qui critique, par exemple, le classicisme des travaux de Sutin et Robinson, la plupart des développements relatifs à l’œuvre dickienne – sa vie n’apparaît quasiment pas dans cet ouvrage, qui n’a strictement rien de biographique – sont généralement assez convenus ; c’est que l’on a déjà tellement écrit sur Dick… Autant dire que l’amateur de Dick, et a fortiori celui qui ne s’est pas contenté de lire l’auteur, mais a aussi lu sur l’auteur, n’apprendra pas grand-chose de neuf dans cet ouvrage.

 

Du coup, c’est quand Ariel Kyrou s’éloigne un peu de Dick pour confronter son œuvre à notre monde contemporain qu’il est le plus intéressant : on trouvera de belles pages, par exemple, sur la robotique et l’informatique contemporaines, envisagées sous l’angle de l’intelligence artificielle et de la vie artificielle. On notera aussi quelques intéressants développements d’ordre philosophique, à l’aune des penseurs contemporains, Baudrillard en tête. Quelques développements d’ordre politique sont également intéressants (même si l’on peut à bon droit juger Ariel Kyrou obsédé par le « Léviathan capitaliste »…).

 

Cela dit, le reste n’est pas sans intérêt pour autant : l’analyse, enthousiaste, est généralement pertinente, et toujours ou presque d’un abord clair et simple. Si l’implication de l’auteur (le « je » est récurrent) n’entraîne pas une lecture si originale que ça, en fin de compte, l’ensemble est néanmoins de très bonne tenue, généralement lucide, et on suit volontiers l’auteur dans ses développements.

 

Oh, il y a bien quelques traits qui peuvent légèrement agacer de temps à autre : l’obsession évoquée plus haut, un ton un peu bobo, voire un mépris latent du genre science-fiction, pas exactement porté aux nues (même si l’auteur a l’air de connaître son sujet, au-delà du seul Dick).

 

En fait, ce dernier trait me semble désigner le public idéal de cet essai : non pas les lecteurs de Dick et de science-fiction en général, qui n’y apprendront pas forcément grand-chose, mais les lecteurs de « blanche » qui voudraient découvrir cet auteur qui sort de plus en plus jour après jour et film après film du ghetto science-fictif. Ils trouveront sans doute là de quoi attiser leur curiosité, et l’enthousiasme déployé par Ariel Kyrou pour son sujet a de quoi en convertir plus d’un, m’est avis.

 

Pour les autres, cet ouvrage n’est cependant pas sans intérêt. Certes, on ne lui confèrera pas de caractère indispensable, mais sa présentation sous forme d’abécédaire et sa bibliographie détaillée en font un outil de recherche potentiellement utile, et la clarté d’exposition comme la justesse de la plume d’Ariel Kyrou nous donnent un ouvrage d’une lecture tout à fait agréable et convaincante. Alors on se contente du peu que l’on apprend réellement, et, ma foi, on ne regrette pas pour autant sa lecture. D’autant qu’on en ressort avec une furieuse envie de relire Dick… et c’est déjà ça de gagné.

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"I Have No Mouth & I Must Scream", de Harlan Ellison

Publié le par Nébal

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ELLISON (Harlan), I Have No Mouth & I Must Scream, introduction by Theodore Sturgeon, New York, Edgeworks Abbey – E-reads, [1967, 1979, 1983] 2009, 134 p.

 

Si c’est pas du titre qui claque, ça ! Désireux de me fournir en science-fiction en anglais et farfouillant sur [un site qu’on ne nommera pas], j’ai immédiatement été séduit par cette mystérieuse sentence. N’ayant en outre jamais rien lu d’Harlan Ellison (que je ne connaissais peu ou prou que comme le célèbre anthologiste de Dangereuses Visions, qui traîne toujours dans ma pile à lire…), je me suis dit que c’était l’occasion ou jamais.

 

Je passerai sur l’introduction de l’excellent Theodore Sturgeon (joli parrainage) et les textes de présentation d’Harlan Ellison (qui a l’air de se la péter un peu, quand même, mais c’est amusant), si ce n’est pour en retenir ceci : la volonté, semble-t-il tôt affirmée chez l’auteur, de rompre les barrières entre science-fiction et « mainstream », convaincu qu’il était que la première avait, pour le meilleur et pour le pire, largement infusé dans la seconde, et que les deux avaient tout à gagner à collaborer. Comme quoi, ça ne date pas d’hier… Et ce (très) petit recueil de sept nouvelles écrites entre 1958 et 1967 en témoigne déjà à certains égards.

 

On commence par la nouvelle-titre, prix Hugo et, d’après ce que j’ai cru comprendre, une des nouvelles de langue anglaise les plus souvent rééditées. Il faut dire qu’elle le mérite, dans la mesure où c’est un petit chef-d’œuvre… « I Have No Mouth & I Must Scream » décrit le calvaire enduré par les cinq derniers représentants de l’espèce humaine, piégés dans l’ordinateur géant et sadique AM, 109 ans après l’extinction de l’humanité. Un cauchemar sans fin, imprégné d’une douleur étonnamment palpable, où les quatre hommes et la femme qui ont survécu ne sont plus que des pantins au mains de l’intelligence artificielle démiurgique. Très, très fort. Et terrible.

 

Suivent quelques nouvelles d’une science-fiction plus classique, et, sans doute, plus anodine, mais pas inintéressante pour autant. « Big Sam Was My Friend », ainsi, est une histoire de télépathes (et plus puisque affinités) prenant pour cadre un cirque. La nouvelle brille par sa profonde empathie, et est tout à fait convaincante.

 

« Eyes Of Dust » décrit l’existence d’une famille de parias dans un monde où la beauté est la valeur fondamentale. Pas hyper original, mais joli : le destin de Person, le fils, véritable aberration, touche indéniablement au cœur.

 

« World Of The Myth » est sans doute la nouvelle la plus classique du recueil, à s’en tenir à la façade (un vaisseau humain s’écrase sur une planète étrangère, et les membres de l’équipage sont confrontés à ses habitants, d’étranges « fourmis » télépathes), mais son intérêt réside ailleurs : dans les relations qu’entretiennent les trois humains, deux hommes (dont l’un est totalement amoral) et une femme aux jambes broyées, coincés ensemble pour leur plus grand malheur. La conclusion est prévisible (et peut-être un brin misogyne, impression qui revient d’autres fois dans le recueil…), mais peu importe à ce stade.

 

Puis le petit volume change de tonalité, s’orientant davantage vers le fantastique et l’onirique, mais avec toujours cette touche très caractéristique de cynisme et d’ironie grinçante, mêlée d’un désespoir tragiquement douloureux.

 

En témoigne assurément « Lonelyache », nouvelle fort étrange – et à mon sens un peu bancale – mais poignante, dans la mesure où on la sent très personnelle : s’il est difficile de la résumer – elle passe un peu du coq à l’âne en permanence –, on retiendra néanmoins qu’elle traite avant toute chose de thèmes tels que le divorce et l’adultère, de manière très crue, à vif.

 

« Delusion For A Dragon Slayer » est qualifiée par Theodore Sturgeon, dans son introduction, de « psychédélique » ; Ellison, pour sa part, préfère parler de « mysticisme baroque », et même « rococo ». Tous termes qui s’appliquent parfaitement à cette curieuse fantasy (?) grandiloquente, où un homme, aux portes de la mort, part à la conquête de son paradis… ce qui implique de tuer un monstre et d’en sauver une fille.

 

Et le recueil s’achève enfin (non, déjà ?) sur un autre chef-d’œuvre, avec la très belle nouvelle qu’est « Pretty Maggie Moneyeyes ». On évitera de la résumer, pour ne pas spoiler outre mesure. Mais sachez que cette nouvelle prenant pour cadre Las Vegas et ses casinos est d’une grande beauté…

 

Le tout est enfin écrit avec une grande attention portée au style, s’autorisant régulièrement quelques traits expérimentaux. Ce qui n’a pas facilité ma lecture, sans être pour autant rédhibitoire.

 

Au final, j’ai passé un excellent moment de lecture avec I Have No Mouth & I Must Scream, et vais sans doute tâcher, à l’avenir, de lire d’autres textes d’Ellison (même si je ne sais pas trop quoi, la production du bonhomme étant abondante). Ah, et Dangereuses Visions aussi, tant qu’à faire…

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