Suite de notre campagne d’Adventures in Middle-Earth ! La « mini campagne » de Wilderland Adventures étant achevée, et parce qu’il y a un fossé de quelques années entre celle-ci et aussi bien celle d’Erebor Adventures que celle d’Eriador Adventures dans la chronologie officielle, nous revenons à Mirkwood Campaign pour une suite de scénarios brefs.
Si vous souhaitez remonter au début de la campagne, vous pouvez suivre ce lien. Pour l’épisode précédent, c’est là. Enfin, si vous voulez revenir au premier épisode du scénario précédent, c’est là-bas.
La présente séance est la seule et unique du scénario de Mirkwood Campaign portant sur l’année 2951 du Troisième Âge, intitulé « The Helm of Peace » (pp. 25-28).
… Agariel, une Dúnedain (Vagabonde/Chasseuse d’ombres 6)…
… Aldamar le Laconique, un Homme des Bois (Protecteur/Frontalier 6)…
… Fredegar Sanglebuc, un Hobbit de la Comté (Protecteur/Héraut 6)…
… Jorinn, un Bardide (Chasseur de trésors/Espion 6)…
… et enfin Nárvi, un Nain du Mont Solitaire (Frère d’armes/Maître d’armes 6).
Le camarade Bran diffuse ces aventures en direct sur sa chaîne Twitch.
Pour la musique, j’ai essentiellement utilisé, outre quelques compositions de Howard Shore pour la trilogie du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson, les bandes originales de divers jeux de la saga The Elder Scrolls : Morrowind, Oblivion, Skyrim, et The Elder Scrolls Online.
Les illustrations sont empruntées pour l’essentiel aux gammes de L'Anneau Unique et d'Adventures in Middle-Earth, le reste a été chipé çà et là sur le ouèbe. L’illustration en tête d’article est due à Bran.
C’est tout pour « Le Heaume de Paix »… Mais nos héros ont encore bien d’autres aventures à vivre, alors…
Si vous souhaitez remonter au début de la campagne, vous pouvez suivre ce lien. Pour le début du précédent scénario, c’est là, et pour seulement l’épisode précédent, c’est ici que ça se passe.
… Agariel, une Dúnedain (Vagabonde/Chasseuse d’ombres 5)…
… Aldamar le Laconique, un Homme des Bois (Protecteur/Frontalier 5)…
… Fredegar Sanglebuc, un Hobbit de la Comté (Protecteur/Héraut 5)…
… Jorinn, un Bardide (Chasseur de trésors/Espion 5)…
… et enfin Nárvi, un Nain du Mont Solitaire (Frère d’armes/Maître d’armes 5).
Pour la musique, j’ai essentiellement utilisé, outre quelques compositions de Howard Shore pour la trilogie du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson, les bandes originales de divers jeux de la saga The Elder Scrolls : Morrowind, Oblivion, Skyrim, et The Elder Scrolls Online.
Si vous souhaitez remonter au début de la campagne, vous pouvez suivre ce lien. Et si vous voulez seulement revenir sur le précédent scénario, celui-ci.
… Agariel, une Dúnedain (Vagabonde/Chasseuse d’ombres 4)…
… Aldamar le Laconique, un Homme des Bois (Protecteur/Frontalier 4)…
… Fredegar Sanglebuc, un Hobbit de la Comté (Protecteur/Héraut 3)…
… Jorinn, un Bardide (Chasseur de trésors/Espion 4)…
… et enfin Nárvi, un Nain du Mont Solitaire (Frère d’armes/Maître d’armes 4).
Pour la musique, j’ai essentiellement utilisé, outre quelques compositions de Howard Shore pour la trilogie du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson, les bandes originales de divers jeux de la saga The Elder Scrolls : Morrowind, Oblivion, Skyrim, et The Elder Scrolls Online.
Les illustrations sont en principe empruntées aux gammes de L'Anneau Unique et d'Adventures in Middle-Earth, mais, cette fois, j’en ai surtout chipé à l'excellent compte rendu de campagne (pour L’Anneau Unique), très détaillé, signé Ego, que vous trouverez ici sur le forum Casus NO.
Pour ceux que ça intéresserait, vous trouverez juste en dessous l’enregistrement brut, ou « actual play », de la séance :
Mais en voici autrement le compte rendu écrit...
3A 2948
Après le jugement d’Oderic, Jorinn est retourné à Dale, où il a appris la mort de son père – un bête accident, il a chuté dans un escalier. Jorinn, qui ne s’en était jamais senti très proche, n’en était pas très affecté, mais, en tant qu’aîné, il a dû s’occuper de pas mal d’affaires, même s’il apparaissait clairement qu’il ne comptait pas prendre la succession et demeurer dans la ville du roi Bard ; un de ses frères s’en occuperait bien mieux que lui.
Ceci étant, Jorinn a peu ou prou commencé à entretenir quelques liens encore ténus avec le roi de Dale, justement, en lui rapportant les événements qui se sont produits à l’ouest de l’Anduin : Valter le Sanguinaire, après tout, était un Bardide, et l’avait assuré qu’un jour il renverserait l’Archer et régnerait sur sa ville ! Bard s’est montré réceptif – il n’en a pas fait ouvertement état, mais il apprécierait sans doute que Jorinn fasse office d’agent ou du moins d’informateur pour lui : ce qui se passe de l’autre côté de la Forêt Noire l’intéresse grandement.
Il a d’ailleurs envoyé un observateur à l’assemblée de Rhosgobel – un jeune noble impétueux mais désireux d’apprendre, du nom de Lifstan, fils de Leiknir, un conseiller apprécié de Bard.
Bard est un homme très occupé… y compris, ainsi que l’a découvert Jorinn en rentrant à Dale, sur le plan sentimental : tout le monde en ville discute inlassablement de ce cette princesse marchande du Dorwinion, une vraie beauté du nom d’Una, sous le charme de laquelle le roi est tombé ! Et elle n’y est pas indifférente – elle qui a été sauvée des brigands par une escorte opportune dépêchée par le roi. Et tout le monde en ville en est convaincu : le rude Bard le Tueur de Dragon est amoureux ! Et il y a du mariage dans l’air…
Aldamar, lui, est retourné auprès des siens, à Rhosgobel – leur offrant les produits de chasses fructueuses : son chien Barran a fait beaucoup de progrès.
Passant du temps sur place, il a un jour entraperçu un bien curieux visiteur, accueilli par Radagast – un vieil homme qui, à vrai dire, ressemblait par certains aspects au magicien : s’agirait-il d’un autre magicien ? Aldamar avait toujours perçu Radagast comme quelqu’un de profondément unique… Le visiteur, vêtu d’une pèlerine grise, avait l’air plutôt sévère – et inquiet. Mais personne en ville n’a aucune idée de leur conversation ; et ce « Gandalf » est parti comme il est arrivé. Certains à Rhosgobel semblaient avoir une idée de qui il était au juste, mais ils rechignaient systématiquement à en parler : on a fait comprendre à Aldamar que cet homme-là était un oiseau de mauvais augure – quand il se rend quelque part, les ennuis le suivent, à moins qu’ils ne le précèdent…
Fredegar quant à lui a passé beaucoup de temps à la Maison de Beorn, mais aussi à l’Auberge Orientale – qui est visiblement sous la protection du Changeur de Peau : maintenant qu’il a rencontré les animaux merveilleux de Beorn, le Hobbit comprend sans peine que Shadrach a été donné aux frères Dodinas et Dinodas pour veiller sur eux. L’auberge se développe, devient assez prospère. D’autres voyages vers Bree et la Comté et retour ont été organisés – mais Dinodas se lasse, regrette son pays, et sans doute y retournera-t-il définitivement dans quelque temps. Ce qui attriste Dody (et Fredegar !), mais il doit bien faire avec – Dindy a été chamboulé par ses mésaventures dans les Monts Brumeux…
Nárvi a consacré tous ses efforts, à l’ouest de la Forêt Noire, à préparer l’assemblée de Rhosgobel, en même temps qu’il faisait très méthodiquement du repérage sur la Vieille Route des Nains à l’orée occidentale de la Forêt Noire. Il y a croisé régulièrement des Nains, originaires aussi bien des Montagnes Bleues que des Monts du Fer ou du Mont Solitaire – un de ces voyageurs lui a d’ailleurs amené une récompense de poids pour ses exploits, dont Dáin Pied-d’Acier a eu vent : un Haubert des Nains en provenance directe d’Erebor !
Surtout, Nárvi a enfin retrouvé Bofri, fils de Bofur, lequel s’était vu confier officiellement, par le roi Dáin en personne, la mission de restaurer la route. Bofri est un jeune Nain, et au fond assez proche, en termes de caractère, de Nárvi – il apparaît en tout cas clairement que tous deux sont possédés par l’envie de parcourir le monde, et que la restauration de la route confine pour eux à l’obsession. Tous deux sont par ailleurs sérieux et méticuleux – et parfaitement conscients que leur mission demandera des années pour être accomplie : mieux vaut s'armer de patience ! Nárvi perçoit cependant autre chose, quand il évoque la Guilde des Bâtisseurs et sa réorientation : Bofri est fier de ses attributions – et s’il est ravi que d’autres l’aident dans son travail, il ne se laissera pas déposséder de sa fonction, aussi se montre-t-il parfois un peu méfiant… Nárvi n’a aucune envie de prendre la place de Bofri, et entend le rassurer à demi-mots à ce propos, mais il lui faudra prendre en compte ce préjugé par la suite, pour que tout se passe au mieux…
Agariel s’est attardée à la Maison de Beorn et dans les environs – parcourant méthodiquement les lieux en quête de signes d’une présence orque ; elle s’en est entretenue par ailleurs avec d’autres Hommes du Nord.
Puis elle a franchi le Haut Col, avant que la neige ne l’obstrue, pour passer l’hiver à Fondcombe. Elle s’est entretenue avec Elrond des événements à l’est des Monts Brumeux – passant en revue la menace orque, la Colline du Tyran, le rôle de Beorn, etc. Elle a aussi passé du temps avec son fils, Estelion – toujours en apprentissage auprès d’un Elfe érudit.
Agariel aussi a eu vent des allées et venues de Gandalf de part et d’autre des Monts Brumeux – mais, contrairement à Aldamar, elle a pu croiser le magicien par le passé et avoir une vague idée, au moins, de qui il est. Il se murmure, à Fondcombe, qu’il souhaiterait qu’un des grands dirigeants des Peuples Libres du Nord intègre le Conseil Blanc – mais ce ne sont que des rumeurs, et il est impossible d’en savoir davantage.
Le printemps venu, Agariel est retournée dans les Terres Sauvages – et, vers le milieu de l’été, elle se rend à Rhosgobel pour l’assemblée, en compagnie de Fredegar et Nárvi, tandis que Jorinn y retourne par ses propres moyens, Aldamar s’y trouvant déjà : tous les compagnons s’y retrouvent donc quelques jours avant que ne débute officiellement l’assemblée des Hommes des Bois.
LES PARTICIPANTS
Les participants et observateurs arrivent à la demeure de Radagast l’un après l’autre, au fil de plusieurs semaines : l’Assemblée ne débutera vraiment que quand tous seront présents. Elle attire bien du monde, au-delà des seuls participants et observateurs : les marchands et les saltimbanques sont nombreux à avoir fait le déplacement, l’occasion paraît fructueuse, et Rhosgobel a tout d’une foire depuis quelques jours déjà.
Ce genre d’assemblée, dans son principe, n’est pas forcément exceptionnel : régulièrement, les Hommes des Bois de Fort-Bois, Bourg-les-Bois, Rhosgobel et Castel-Pic en tiennent de semblable, où sont discutées diverses affaires, politiques et commerciales. Ce qui distingue plus particulièrement cette assemblée précisément, c’est que l’on savait depuis plusieurs mois désormais qu’y seraient tranchées des questions d’une ampleur inhabituelle – tout spécialement, le désir de Ceawin le Généreux d’intégrer sa communauté de la Brèche Est dans le plus vaste ensemble des Hommes des Bois des Terres Sauvages.
Ces assemblées tiennent à ce qu’il n’y a pas vraiment de chefs chez les Hommes des Bois – et en tout cas pas de roi. C’est au peuple lui-même de gérer directement ses affaires, ainsi que le veulent les traditions – qui se trouve dans la Maison Longue quand sont débattues les questions politiques et commerciales a son mot à dire.
Ou du moins est-ce le cas pour les Hommes des Bois. En l’espèce, l’Assemblée accueillera un certain nombre d’observateurs, qui, en tant que tels, ne sont pas censés prendre part aux votes, mais peuvent, s’ils y mettent les formes, dire quelques mots.
Cela vaut aussi pour les compagnons : depuis qu’ils ont ramené Mâcheloup, ils ont acquis la confiance des Hommes des Bois de la Forêt Noire – et leurs exploits ultérieurs, dûment colportés par les voyageurs, ont confirmé leur statut hors-normes. S’ils choisissent de parler, on les écoutera.
Pas de chefs ici, donc. Maintenant, il est des Hommes des Bois qui bénéficient d’un certain prestige, et qui de fait ont une position particulière. Et, bien qu’on ne le formule certainement pas en ces termes, si les Hommes des Bois devaient avoir un roi, ce serait très certainement Ingomer Briseur-de-Haches, de la Maison de Fort-Bois. C’est un vieil homme charismatique, à l’esprit affûté, et encore un grand guerrier malgré le poids des ans. Il a toujours entretenu des liens serrés avec Rhosgobel et Radagast. Il n’est donc pas un roi, et ne veut surtout pas le devenir – c’est à vrai dire une sorte de hantise. Mais il a conscience de ce que les Hommes des Bois le respectent, et il ne rechignera jamais à donner son avis quand on le lui demande. De manière tacite, tout le monde semble considérer que c’est à lui que revient la tâche de présider les débats.
Outre Ingomer, d’autres Hommes des Bois bénéficient en raison de leur compétence d’un statut particulier. Il en va ainsi notamment de Hartfast, fils de Hartmut, qui représente la Maison de Castel-Pic. Les Hommes des Bois des Monts Brumeux sont assez différents de ceux de la lisière de la Forêt Noire – pour le coup, à Castel-Pic, Hartfast a bel et bien un statut de chef : la menace des raids gobelins rend cette fonction peu ou prou indispensable. Mais il n’est pas du genre à en abuser, et pas plus qu’Ingomer il n’a d’ambitions monarchiques. Hartfast est un vieil homme lui aussi, mais très massif, très grand également, même au regard des normes des Hommes du Nord. D’un abord un peu rugueux, il est très pragmatique, et en cela aussi il se distingue des siens.
Il faut aussi mentionner Fridwald le Coureur, de la Maison de Bourg-les-Bois – Aldamar l’a maintes fois croisé, mais il en va de même pour Agariel : il fait office de messager entre les différentes communautés de la Forêt Noire. Plus exactement, il envisage les Hommes des Bois de la lisière comme une seule vaste communauté – aussi ne se perçoit-il pas vraiment, de lui-même, comme un représentant de Bourg-les-Bois. Sage et diplomate, il est très apprécié de tous.
Il est venu à Rhosgobel en compagnie de son neveu Munderic, âgé d’une dizaine d’années. On dit que Fridwald voudrait en faire son héritier – ou en tout cas un messager comme lui. Mais le petit garçon a déjà la réputation d’un bon à rien qui ne s’intéresse pas à grand-chose…
Radagast le Brun lui-même est présent, bien sûr : la coutume veut qu’on lui réserve un siège à chacune de ces assemblées des Hommes des Bois. Celle-ci se tenant à Rhosgobel, dans sa demeure même, sa présence est jugée indispensable. Mais le magicien se montre distrait – et Aldamar sait, notamment, qu’il ne prend en principe jamais la parole lors de ces assemblées, préférant amuser les enfants avec des petits tours de magie ou des spectacles improvisés de souris savantes… Les Hommes des Bois ne s’en offusquent pas, cela fait partie du personnage – et Radagast aura toujours un siège parmi eux.
Il faut aussi mentionner les observateurs. Parmi eux, il en est un, ou plutôt une, que tous les compagnons ont eu l’occasion de croiser : en effet, Beorn a dépêché à Rhosgobel, pour le représenter, Avila des Trois-Chênes, la jeune veuve d’Odon. Elle a fait la route avec Agariel, Fredegar et Nárvi.
Bofri, fils de Bofur, représente quant à lui les Nains du Mont Solitaire.
Lifstan, fils de Leiknir, enfin, est le délégué du roi Bard à Rhosgobel, et a fait la route avec Jorinn.
Il faut enfin mentionner, parmi les personnages de marque, deux individus qui ont des affaires importantes à traiter lors de cette assemblée. Et tout d’abord Ceawin le Généreux, dont les compagnons ont régulièrement entendu parler depuis un an environ : à maints égards, c’est précisément pour régler une question le concernant que la présente assemblée a lieu. En effet, Ceawin est le chef d’une communauté de la Brèche Est, et il plaide pour que ses compatriotes et lui intègrent la plus vaste communauté des Hommes des Bois, ce qui passerait par la reconnaissance officielle de sa Maison. Ceawin est aux petits soins avec tout le monde, et il est venu avec de nombreux cadeaux pour ses cousins de l’Ouest, faisant honneur à son surnom – vins, pâtisseries, produits de l’artisanat… Un moyen comme un autre d’obtenir le soutien des Hommes des Bois.
Mais Ceawin n’est pas le seul, ici, à désirer renforcer tout à la fois sa position et les liens entretenus par son peuple avec les Hommes des Bois. C’est aussi, quoique d’une manière un peu différente, le souhait d’une charismatique jeune femme qui a beaucoup attiré les regards depuis son arrivée à Rhosgobel : Amaleoda, qui est originaire des Eaux-Noires, une petite communauté au bord d’un lac, à quelques dizaines de kilomètres à l’est de Rhosgobel. – en pleine Forêt Noire, et à proximité du Goulet. Amaleoda est qualifiée par les siens de Protectrice des Eaux-Noires. Depuis que l’Ombre a quitté la Forêt Noire Méridionale, la communauté d’Amaleoda n’a cessé de s’agrandir, et elle est devenue relativement prospère. Amaleoda est venue à Rhosgobel pour obtenir de l’assemblée la reconnaissance de Bourg-Eaux-Noires comme un établissement majeur des Hommes des Bois de la Lisière Ouest – concrètement, elle demande l’autorisation d’édifier une Maison Longue chez elle, invitant qui le souhaite à intégrer la nouvelle communauté.
Certains des compagnons connaissent quelques-uns de ces personnages marquants. Aldamar présente ses hommages à tous les principaux délégués des Hommes des Bois (il connaissait relativement bien Fridwald, Ingomer un peu moins mais sa réputation parle pour lui, Hartfast du lointain Castel-Pic était en revanche peu ou prou un inconnu), ainsi qu’à Amaleoda. Il est favorable à sa cause, ainsi qu’il le lui signifie, et elle apprécie le geste.
Agariel, quant à elle, a notamment salué Fridwald – un collègue, d’une certaine manière. Ils discutent de l’ordre du jour et des personnages présents. Elle est notamment curieuse des opinions du Coureur quant aux propositions de Ceawin et Amaleoda – il ne dit pas tout, ces questions seront traitées en temps et en heure, mais il a toujours été favorable à l’idée d’une communauté étendue des Hommes des Bois, aussi son vote n’a-t-il rien de mystérieux.
Mais elle s’est aussi entretenue avec Avila ; elles avaient voyagé ensemble, mais la Dúnedain n’avait alors pas osé sonder les intentions de la représentante de Beorn. Une fois arrivées à Rhosgobel, cependant, la rumeur publique a bientôt mis en évidence une dissension : les Hommes des Bois, tout spécialement ceux de Castel-Pic, de l’autre côté de l’Anduin, renâclent à payer aux Béornides du Vieux Gué le péage qu’ils exigent, jugé excessif par les commerçants régulièrement amenés à l’emprunter. Avila n’est pas vraiment en mesure de le renégocier, mais cette question suscite des tensions, et il faudra bien la trancher un jour.
Fredegar, qui s’ennuie un peu, se présente comme étant « un observateur de la Comté ». Bon nombre des personnes présentes n’avaient jamais vu de Hobbits ni entendu parler de la Comté – elles le prennent au mot ! S’il est là, c’est qu’il doit avoir une bonne raison, après tout…
Mais son comportement n’a décidément rien de diplomate. Il se rend devant Ingomer, et lui demande : « Briseur-de-Haches ? Vraiment ? » Le vieil Homme des Bois interloqué par cet étrange petit homme a un temps d’arrêt, puis : « Oui. Vraiment. En mon temps. Je ne suis plus très jeune. Vous n’avez pas froid aux yeux, mon petit gars… Mais j’ai entendu parler de vous, et j’aime ça ! » Il doit s’abaisser pour adresser au Hobbit une vigoureuse tape sur l’épaule – amicale, mais qui l’envoie presque bouler… Fredegar n’a en vérité aucun doute sur la force d’Ingomer.
Nárvi quant à lui passe l’essentiel de son temps avec Bofri et les autres Nains, pour beaucoup des marchands. C’est ainsi qu’il prend conscience des besoins de Bourg-les-Bois, notamment, en fer et en produits de l’artisanat nain. Cette question, du coup, ramène elle aussi au péage du Vieux Gué : les Nains de l’assistance, s’ils ne sont pas censés intervenir dans l’assemblée, sont d’accord avec les Hommes des Bois pour dire que les Béornides exigent un péage bien trop élevé, qui nuit au commerce.
Nárvi et Bofri discutent d’une autre chose – car beaucoup des présents ont remarqué une singulière absence dans cette assemblée : il n’y a pas le moindre représentant du Royaume Sylvestre. Ça n’est pas vraiment une surprise : de base, ces Elfes sont passablement xénophobes, et préfèrent le plus souvent ignorer les communautés humaines. En outre, les tensions ne manquent pas avec ces dernières : les Nains savent, de même que Jorinn et Lifstan, que certains Bardides ont coupé du bois un peu trop près du Palais de Thranduil au goût de ce dernier – et notamment des hêtres blancs que les Elfes sylvains prisent particulièrement… Le Royaume Sylvestre associe probablement tous les hommes, mais si cette tension (qui n’a pour l’heure pas dégénéré non plus) en a rajouté, il était de toute façon très improbable que Thranduil daigne envoyer quelqu’un à Rhosgobel. Pour Bofri, ça n’est pas plus mal : qui dit « Royaume Sylvestre » dit « Sentier des Elfes », soit le principal concurrent de la Vieille Route de la Forêt qu’il entend restaurer… Tout ce qui pourra faire de cette dernière une alternative préférable est bon à prendre !
LES DÉBATS DU PREMIER JOUR
L’assemblée à proprement parler débute enfin. Le temps étant clément, et comme il y a foule, on décide de procéder aux débats dehors, devant la Maison Longue, plutôt qu’à l’intérieur de celle-ci. Pour autant, les échanges n’ont rien d’anarchique. La coutume organise les discussions, et, le cas échéant, Ingomer répartit le temps de parole de manière tacite et non autoritaire.
Les premières questions évoquées sont celles d’ordre un peu secondaire : les récriminations des Hommes des Bois, notamment de ceux de Castel-Pic, concernant le péage du Vieux Gué (Avila se tait – elle n’est pas prise à parti directement), les besoins en fer et en étain de Bourg-les-Bois, etc. Tout ceci prend des heures, et est passablement ennuyeux pour qui n’y a pas directement un intérêt – tout spécialement sans doute pour les compagnons, Aldamar excepté.
Mais vient le moment de trancher des questions plus amples et complexes. C’est tout d’abord Amaleoda qui prend la parole, afin de convaincre les participants de ce que Bourg-Eaux-Noires devrait être reconnu comme un établissement majeur des Hommes des Bois dans la Lisière Ouest.
Depuis que l’Ombre a quitté la Forêt Noire Méridionale, la petite communauté au bord du lac n’a cessé de s’agrandir. Tournée initialement vers la chasse et la pêche, elle devient relativement prospère – car la chasse est bonne, et la pêche est bonne. L’agriculture n’y est pas encore très développée, mais sa part s’accroît petit à petit, et les récoltes sont prometteuses. Jadis, les brumes méphitiques en provenance du sud en faisaient un endroit rude, elle le concède volontiers – mais l’Ombre a disparu, et Bourg-Eaux-Noires ne s’est jamais aussi bien porté.
Tout ce qui manque à la petite communauté en plein essor, c’est une reconnaissance officielle de sa place au sein du peuple des Hommes des Bois. Amaleoda considère que le temps est venu : elle s’est rendue à Rhosgobel pour demander humblement cette reconnaissance. Concrètement, cela passerait par l’édification d’une Maison Longue – et d’une enceinte assez large pour le bourg en expansion. Amaleoda, enthousiaste, invite tous les Hommes des Bois de bonne volonté à venir avec elle, pour qu’ils construisent ensemble cette Maison Longue, et s’installent éventuellement dans la région. Bourg-Eaux-Noires deviendrait de la sorte un établissement conséquent en pleine Forêt Noire – proche de Rhosgobel, mais distinct. Et tout le monde y gagnerait.
Murmures et grognements d’approbation, hochements de têtes aussi, semblent témoigner de ce que la cause d’Amaleoda a de bonnes chances de l’emporter lors du vote du lendemain. La jeune femme est charismatique, si parfois un peu timide, elle est intelligente aussi, de toute évidence, et les principaux délégués ne dissimulent guère leur soutien.
Il y a toutefois quelques voix dissonantes – mues par un sentiment xénophobe et casanier tristement commun : il en est bien qui rechignent à étendre ce qu’ils jugent comme étant leurs « privilèges » à des « étrangers », ce qui ne pourrait que diminuer la valeur desdits « privilèges »… Mais, en l’espèce, ils sont clairement minoritaires.
D’autres avancent que la proximité de Dol Guldur les inquiète – on dit que l’Ombre est partie, Amaleoda y insiste, mais… Ce point fait davantage mouche – parmi les compagnons, d’ailleurs, Agariel partage cette inquiétude (elle a aussi en tête la Colline du Tyran, toute proche des Eaux-Noires), mais elle ne l’exprime pas.
La communauté dans son ensemble demeure cependant favorable à la proposition de faire de Bourg-Eaux-Noires un établissement des Hommes des Bois de premier plan.
Puis c’est au tour de Ceawin le Généreux de plaider pour son peuple – à l’invitation d’Ingomer, qui le présente comme « un parent éloigné ». La cause de Ceawin est au fond assez proche de celle d’Amaleoda.
Il rapporte, en termes choisis et d’une voix habile au discours, comment feu son père, ayant eu vent de la Bataille des Cinq Armées, a traversé le Goulet de la Forêt, partant des Basses Vallées Ouest de l’Anduin, pour s’installer avec les siens dans la Brèche Est – et comment cette communauté a prospéré depuis, récoltant les fruits de son rude travail.
Mais il y manque bien quelque chose. Pour Ceawin, que son peuple vive à l’est de la Forêt Noire ne change rien au fait que, culturellement, il se rattache aux Hommes des Bois. Il prend bien soin de montrer combien il respecte les coutumes de ses cousins occidentaux – par exemple, il décrit abondamment comment il a érigé sa Maison Longue à l’ombre des arbres. Comme Amaleoda, il plaide donc, humblement, pour une reconnaissance officielle de son statut, en somme.
Mais ses arguments ne sont pas que d’ordre culturel, il en a aussi de plus pragmatiques : les terres sont bonnes, dans la Brèche Est – très fertiles. Et le commerce aisé avec Esgaroth et Dale, ou même Erebor, voire les Monts du Fer ou le riche Dorwinion, qui le fournit notamment en ces vins de qualité dont il a abreuvé l’assistance.
Tout le monde gagnerait à ce que la communauté de Ceawin intègre officiellement celle des Hommes des Bois – les liens noués de part et d’autre de la Forêt Noire assureraient la stabilité et la prospérité de la région, ce qui ne pourrait que plaire aux Bardides comme aux Hommes du Lac ou encore aux Nains du Mont Solitaire et des Monts du Fer : de précieux alliés parmi tous les Peuples Libres du Nord, dont la bonne entente doit être perpétuée pour que la grande victoire de la Bataille des Cinq Armées ne demeure pas sans lendemain. Cela n’a rien d’un rêve inaccessible : jadis, il y avait un grand royaume du Nord, qui s’étendait sur les deux versants de la forêt… Certes, les hommes de Dale ou d’Esgaroth ont depuis développé une culture très distincte, là où Ceawin et les siens sont demeurés plus proches de ceux de la Lisière Ouest. Mais, dans tous les cas, la bonne entente entre les peuples prime – et l’inclusion de sa communauté dans l’ensemble plus vaste des Hommes des Bois ne pourra qu’y contribuer, de manière salutaire.
Parce que Ceawin vient de loin, il ne suscite pas autant l’approbation qu’Amaleoda, même si ses paroles sont bien accueillies. Certains font état de cette distance, qui les laisse perplexes – ce qui suscite une réaction de la part de Hartfast : dans un grand éclat de rire, et en se tapant le ventre de contentement, il rappelle à ceux qui ont la mémoire courte que sa propre communauté de Castel-Pic est en fait bien plus éloignée des établissements des Hommes des Bois de la Lisière Ouest que la Brèche Est ! Et en fait de bois, sur les contreforts des Monts Brumeux… Or son peuple est associé aux Hommes des Bois – et cela ne pose aucun problème à personne, n’est-ce pas ? En outre, Hartfast est sensible aux arguments les plus pragmatiques de Ceawin : Castel-Pic également prise le commerce, et en sait la valeur. Il soutient sans l’ombre d’un doute la motion juste et bénéfique de Ceawin ! L’intervention de Hartfast, pleine de bon sens, fait taire bon nombre de critiques. La cause de Ceawin semblait plutôt appréciée avant cela, mais ne l’est que davantage ensuite.
Nárvi, galvanisé par le rude bagout de Hartfast, prend la parole à son tour – il tient un discours un peu confus sur ce qui fait les Nains, qu’importe le lieu ou l’occupation… et se rassied bien vite, comprenant que son intervention a fait l’effet d’un cheveu sur la soupe, et suscite quelques rires sous cape. Hartfast, avec un grand sourire, l’appuie : « Il a raison, ce pe… Cet ami du Mont Solitaire ! » Ingomer hoche la tête – ce qui en dit long.
CELUI QUI N’A PAS ÉTÉ INVITÉ
Mais Nárvi rougissant, peut-être parce qu’il était aux aguets de réactions moqueuses, remarque alors quelque chose : un petit oiseau s’est posé sur l’épaule de Radagast, et c’est comme si l’animal chuchotait quelque chose à l’oreille du magicien… Les traits de ce dernier se ferment, mais il ne dit pas un mot. Puis l’oiseau s’envole à nouveau – on n’y a pas prêté attention.
Mais se fait alors entendre le bruit d’un cor, en provenance de la forêt au sud-est. Les rires cessent aussitôt, tout le monde redevient extrêmement sérieux. Certains se montrent même plus nerveux, dont la main se pose par réflexe sur leur hache ou leur épée au fourreau.
Quelques petites minutes s’écoulent, puis un Homme des Bois arrive en courant de la porte du village : « Une troupe arrive ! Une quinzaine de cavaliers, en armures ! Je sais pas qui, mais ils ont pas l’air d’être des Hommes des Bois ! » Ingomer, Hartfast, Fridwald et leurs suites se lèvent, l’air inquiet. Puis un autre guetteur prend le relais du premier : « Ils disent être venus pour l’assemblée, et veulent que je leur ouvre ! Je fais quoi ? » Ingomer, suivi de tous, s’avance vers la porte.
Les compagnons reconnaissent sans peine la mise des intrus, qui se sont arrêtés devant la porte : ce sont des guerriers de la Colline du Tyran, des serviteurs de Mogdred – à l’instar de ceux avec qui ils avaient eu maille à partir l’année précédente : la troupe emmenée par Dagmar que fuyait Beran le Vigilant, l’agent de Radagast. Agariel en informe Avila à ses côtés – le mot passe jusqu’à Ingomer.
Deux chevaux, à l’arrière, ploient sous la charge visiblement lourde de grands sacs qui pendent de part et d’autre de la selle. À la tête de la compagnie, un cavalier est revêtu d’une armure plus ouvragée que les autres, avec un heaume en forme de dragon qui dissimule ses traits.
Tout le monde est dans l’expectative. Ingomer s’avance enfin : « Seuls les Hommes des Bois et leurs invités sont les bienvenus à l’assemblée. Vous n’en faites pas partie, qui que vous soyez. »
Mais le cavalier au casque en forme de dragon l’enlève alors, et répond avec une certaine morgue : « Mais je suis un Homme des Bois ! Par le sang. Tu ne me reconnais pas, Ingomer ? » Ce dernier, interloqué, ne répond pas. « Je m’en doutais… Je suis ton propre fils, Ingold ! C’est ainsi que tu m’appelais, à l’époque. Mais tu n’as pas fait tant d’efforts pour m’extirper des geôles du Nécromancien… Le pauvre petit gamin que j’étais… Alors je me suis dit que je pouvais changer de vie et de nom. On m’appelle maintenant Mogdred – le seigneur de la Colline du Tyran. Je me suis établi là-bas, après avoir langui des années dans l’esclavage. Qui ne m’ont pas brisé : maintenant, je commande une troupe nombreuse – dont cette compagnie n’est qu’un mince aperçu. Oui, une troupe nombreuse – qui vous serait utile, à vous autres. »
Il pointe du doigt Amaleoda : « Toi, je te connais. Toi et les tiens, vous seriez morts depuis longtemps sans ma protection. » S’adressant de nouveau à tous : « Si vous ouvriez seulement les yeux, vous verriez que les ténèbres s’abattent de nouveau sur la forêt ! Les orques rôdent à Pont-Marais – et il y a quelque chose à Dol Guldur. »
Personne n’a osé interrompre le discours de Mogdred. Ingomer accuse visiblement le coup : le fier guerrier se mue subitement en vieillard fragile, à l’esprit tourmenté, au point qu’il doit s’asseoir – il a dû s’appuyer sur l’épaule de Hartfast pour ne pas s’effondrer au sol. Ce coup de théâtre a secoué l’assemblée – mais les Hommes des Bois sont plus sceptiques et même méfiants qu’autre chose.
Fredegar s’avance : quelles preuves Mogdred a-t-il qu’il est bel et bien le fils d’Ingomer ? « Disparu à l’âge de sept ans dans cette forêt, mes traits ont changé et je n’ai certes rien sur moi qui atteste de ma paternité… » Il se tourne vers « son père » : « Mais regarde-moi, Ingomer ! Regarde-moi, et tu sauras que c’est la vérité. » De fait, il y a bien quelque chose dans les traits de Mogdred qui peut rappeler Ingomer.
Le silence plane, pesant. Puis, dans la foule, un Homme des Bois anonyme s’avance, dont le ton est agressif : « Bien, tu as fait ton apparition très théâtrale, tu nous as raconté de jolies histoires… Mais que fais-tu ici ? Qu’est-ce que tu attends de cette assemblée que tu profanes ? »
Mogdred descend de cheval, en prenant son temps. « Ce que j’attends de cette assemblée ? Au fond, quelque chose de pas si différent de ce que vos invités, Amaleoda et… Ceawin, sont venus quémander. Ce que je veux ? » Il balaie l’assemblée de sa main : « Un siège au conseil des Hommes des Bois. » Il pointe du doigt Amaleoda : « Un tribut des Eaux-Noires. » Il ouvre les bras : « Des femmes pour mes soldats. » Il fixe Hartfast du regard : « De l’or et du fer des montagnes. »
Personne n’ose répondre. Tout le monde, à vrai dire, est stupéfait. Amaleoda et Ceawin se sont montrés humbles dans leurs requêtes, mais Mogdred se comporte en pays conquis : il ne demande pas, il exige. L’intrus en est visiblement conscient, et cela l’amuse. Il s’avance lentement, un sourire au coin des lèvres. Il se plante enfin devant Ceawin : « Le voici, "le Généreux" ! Il a plaidé sa cause bien à l’avance, à grands renforts de présents, et de pots-de-vin à proprement parler ! Des babioles, du miel, la promesse de juteux contrats avec Dale et le Dorwinion… Mais tout ça c’est du vent. Mon offre est plus… concrète. »
Mogdred adresse un signe aux cavaliers de l’arrière-garde. Ils descendent de cheval, et ôtent les gros sacs pendant de part et d’autre de la selle – qu’ils traînent ensuite jusque devant Mogdred. Ils en défont les cordes et en déversent le contenu au pied du seigneur de la Colline…
Des têtes d’orques tranchées – plusieurs dizaines.
La foule des Hommes des Bois, pourtant des guerriers stoïques, ne peut retenir l’expression de sa surprise à ce spectacle. Mogdred est visiblement satisfait de l’effet produit.
Il reprend la parole : « Qu’en dites-vous ? Les hommes de la Colline du Tyran sont en mesure de vous protéger contre les orques qui infestent la forêt au sud. Car ils ont pris Pont-Marais, et il y a toujours quelque chose à Dol Guldur. Vous avez le choix : si vous accédez à mes demandes, nous serons les meilleurs amis du monde, et les meilleurs alliés qui soient, quand l’Ombre frappera à nouveau – ce qu’elle ne manquera pas de faire. Et si vous refusez… Ma foi, je m’en remettrai. Vous, ça n’est pas garanti. »
Mogdred se détourne alors de l’assemblée, retournant d’un pas nonchalant vers son cheval tandis que le silence persiste. Il monte en selle, et s’adresse une dernière fois aux Hommes des Bois : « Je sais que les votes auront lieu demain, et je compte bien y assister. J’espère que vous saurez prendre la bonne décision. À demain, mes amis. »
Il tourne son cheval vers la sortie, et ses hommes le suivent – ils établissent un camp tout près, mais hors les murs de Rhosgobel.
LES HÉSITATIONS DES HOMMES DES BOIS
Tout le monde est stupéfait. Ingomer est très affaibli, sous le choc, incapable de mener les débats. Hartfast a tout naturellement pris le relais : le seigneur de Castel-Pic annonce que l’assemblée est levée pour la journée, et qu’elle reprendra le lendemain, avec les votes.
Nárvi est nerveux – il discute avec Fredegar : il faut informer les Hommes des Bois de ce que les guerriers de la Colline ont fait à Beran le Vigilant, s’ils ne le savent pas déjà ! Mogdred ne peut pas s’en tirer comme ça ! Ils comptent en parler déjà avec Radagast… mais le magicien s’est éclipsé discrètement, et sa demeure est inaccessible – son entrée est barrée par la végétation, signe manifeste de ce qu’il n’est là pour personne.
Aldamar va interroger Fridwald le Coureur – il a du mal à croire que Mogdred pourrait être le fils disparu d’Ingomer, et qu’il aurait pu quitter les cachots du Nécromancien comme ça… Et d’abord, qu’est-ce que c’est que cette histoire de disparition ?
Sur ce dernier point, Fridwald lui explique que le fils d’Ingomer a bel et bien disparu dans la forêt il y a des années de cela – une histoire que nombre d’Hommes des Bois connaissent. Ingomer l’a cherché en vain pendant des mois – mais il avait enfin trouvé des indices de ce qu’Ingold avait été enlevé par des orques. Il a dû se résoudre, dans la douleur, à admettre qu’il ne reverrait jamais son fils. Rien ne permet d’affirmer que Mogdred est bel et bien Ingold, mais Fridwald doit reconnaître que l’âge apparent du seigneur de la Colline du Tyran correspond, et qu’il y a bien quelque chose d’Ingomer dans les traits de Mogdred – mais peut-être est-ce seulement l’effet après coup de ses explications ?
Mais Aldamar ne comprend pas comment Mogdred aurait pu fuir les geôles du Nécromancien – il le suspecte d’être bien plutôt un agent de l’Ombre, oui ! Mais, là encore, Fridwald n’en est pas si sûr. On dit que l’Ombre a été chassée de Dol Guldur à peu près au moment de la Bataille des Cinq Armées. Il n’en sait guère plus, Radagast serait probablement plus au fait de ce qui s’est passé au juste, mais peut-être les prisonniers ont-ils alors eu l’occasion de quitter les lieux ? Il n’en sait rien.
« Quoi qu’il en soit de tout cela, ce Mogdred a l’air d’un sacré gaillard. Se ramener ici, comme ça, avec cette arrogance… J’ai pas spécialement envie de m’acoquiner avec lui, moi… »
Aldamar abonde en son sens – et lui raconte, avec Nárvi et Agariel qui ont rejoint la conversation, ce qui est arrivé à Beran le Vigilant, et leur rôle dans cette affaire : Mogdred leur paraît décidément très, très louche, et ses relations avec les orques plus suspectes que ce que toutes ces têtes tranchées laissent entendre…
Fridwald ne sait pas qu’en penser : le tas de têtes l’impressionne, tout de même – et la nouvelle, très grave, de ce que les orques se sont installés à Pont-Marais. Il n’apprécie pas Mogdred, mais doit admettre, à contre-cœur, que ses arguments ne manquent pas de poids. Tout spécialement au regard des us et coutumes des Hommes des Bois, qui n’ont pas de roi ni d’armée permanente.
Mais il y a autre chose : les revendications de Mogdred interagissent avec celles d’Amaleoda et de Ceawin. Si Mogdred tient la Colline du Tyran, on peut aussi bien considérer qu’il est le maître du Goulet de la Forêt. Dès lors, les relations avec la Brèche Est dépendraient de son bon vouloir, ou peu s’en faut. En outre, la Colline du Tyran est au fond très proche des Eaux-Noires, à une centaine de kilomètres au plus – la communauté d’Amaleoda sera sous contrainte, qu’ils acceptent ou rejettent la proposition de Mogdred… Mais Agariel retourne cet argument : si les Hommes des Bois vont dans le sens de Mogdred, ils seront tous sous sa contrainte d’ici quelques années. C’est ce que Fridwald tend à croire, oui…
Les autres figures de l’assemblée sont incluses dans la conversation. Ceawin dit ne jamais avoir eu affaire à ce Mogdred. Amaleoda, si, en revanche : elle confirme que les hommes de Mogdred sont régulièrement venus aux Eaux-Noires pour exiger un tribut, depuis quelque chose comme deux ou trois ans. Elle s’y est toujours opposée – en gonflant les muscles, le cas échéant. Un affrontement était à craindre, mais pour l’heure ce refus de se plier à la volonté de Mogdred n’a jamais dégénéré en conflit armé. Amaleoda doute que cela continue éternellement ainsi. Elle ajoute aussi, tout spécialement quand Agariel s’interroge sur la fortune de Mogdred, qui dispose d’une forte troupe bien équipée qu’il faut bien financer, que des clans d’Hommes des Bois au sud des Eaux-Noires ont quant à eux choisi d’obéir aux exigences de la Colline, lui versant un tribut conséquent.
Le perspicace Fredegar comprend, seul de la compagnie, que c’est précisément la raison pour laquelle Amaleoda a choisi de présenter sa requête à l’assemble des Hommes des Bois : elle avait besoin d’appuis extérieurs pour résister à Mogdred… même si elle n’en a jamais fait mention.
Mais Agariel s’interroge : si les orques infestent bel et bien la région, peut-on dire, comme Amaleoda l’a fait, que « les choses vont mieux » ? La Protectrice des Eaux-Noires se brusque : « Les choses vont mieux. Ne remettez pas ma parole en question. En tout cas, tout va bien aux Eaux-Noires. Peut-être est-ce dû à la protection des Filles de la Rivière ? Je ne le sais pas. Mais notre communauté prospère. Les brumes ont disparu, la menace du sud avec. Je n’ai pas vu un orque à proximité des Eaux-Noires depuis des années. » Agariel la croit.
Mais elle interroge alors Ceawin quant à ce qu’il pourrait savoir lui d’une activité orque dans sa région. Il dit ne pas en connaître. La Bataille des Cinq Armées a changé la donne, et c’est précisément la raison pour laquelle son père avait quitté la vallée de l’Anduin : là-bas, oui, ils avaient maille à partir avec les orques ! Ils descendaient sans cesse des Monts Brumeux pour lancer des raids. Hartfast en sait quelque chose. Mais depuis que Ceawin et les siens se sont installés dans la Brèche Est, ils n’en ont jamais vu un seul.
Et Nárvi s’interroge – jouant même à l’avocat du diable face à Fredegar. Il n’aime pas Mogdred et ne lui fait pas confiance – mais se le mettre à dos pourrait être problématique. Quelqu’un comme lui, peut-être vaut-il mieux l’avoir dans son camp que dans celui d’en face… Amaleoda ne fera pas la fière, si elle doit subir à la fois les assauts des orques et de Mogdred ! Et aussi agaçant soit ce dernier, il semble avoir fait la démonstration qu’il était tout disposé à combattre l’Ombre, s’il y a intérêt… Peut-être serait-il possible de négocier, pour conclure un accord moins discourtois ?
Mais Agariel n’y croit pas : « Il ment. » En fait, la Dúnedain tend à croire que Mogdred a déjà maille à partir avec l’Ombre – il lui fait penser à Valter le Sanguinaire, mais plus encore, en fait, aux trop nombreux hommes qui ont été corrompus par l’Ombre pour avoir fréquenté ses geôles, et les histoires à leur propos sont tristement répandues : à supposer même qu’il soit sincère, Agariel est convaincue qu’il n’apportera que le mal aux Hommes des Bois, qu’il le veuille ou non. Elle convainc sans peine Jorinn et même le perplexe Nárvi.
Aldamar, à ce propos, ne croit décidément pas aux portes de cachot qui s’ouvrent par magie… même s’il a conscience de ce qu’il s’est bien passé quelque chose à Dol Guldur il y a quelques années de cela.
Agariel est curieuse du sentiment d’Avila. Elle ne fait pas confiance à Mogdred elle non plus – et l’affaire lui rappelle à elle aussi Valter le Sanguinaire. En même temps, c’est un tueur d’orques… Ces créatures qui ont tué son époux. La décision en la matière sera cruciale – plus encore que celles concernant Amaleoda et Ceawin. Elle ne s’attendait pas à quelque chose comme cela en venant en tant qu’observatrice dépêchée par Beorn. Elle n’a guère été formée à la diplomatie – et se retrouve un peu désemparée, comme à vrai dire bien des Hommes des Bois sans doute.
Nárvi quant à lui demande à Bofri ce qu’il en pense – notamment au regard de leur projet commun de restauration de la Vieille Route de la Forêt. Mais Bofri n’est pas très loquace, et ne répond que par des banalités. Nárvi, lui, s’étend sur le sujet et sur ce qui s’était passé avec Beran le Vigilant, mais son interlocuteur a la tête ailleurs.
Et Fredegar et Agariel essayent d’en parler avec Ingomer. Le vieil homme est très affecté par ce coup de théâtre, et sous la garde de Hartfast. Agariel fait son rapport aux deux Hommes des Bois, en présentant ses opinions personnelles. Hartfast préfère qu’on laisse Ingomer en paix, et s’éloigne avec les compagnons.
Il entend les craintes d’Agariel, mais le spectacle des têtes d’orques tranchées ne l’a pas laissé indifférent. Mais Agariel en a soupé de cet argument : « Quel prix accordez-vous à ces têtes d’orques ? Un prix en or, en femmes, en statut ? » Cela ne prouve rien : aussi bien, les serviteurs de la Colline sont tout simplement tombés à deux contre un sur une bande en maraude et se sont dit que cela servirait leur cause… Les traits de Hartfast se durcissent : « Ma p’tite dame, vous me prenez de haut et ça ne me plaît pas. Je ne suis pas n’importe qui. » Agariel en a bien conscience – c’est en fait pourquoi elle lui parle avec franchise, quitte à donner l'impression d'être irrespectueuse. Mais le seigneur de Castel-Pic n’en a pas fini : des orques, Hartfast en a tué beaucoup. Et il en tuera beaucoup d'autres. Il sait dès lors que cela n’est pas si facile – et que c’est précieux. Il n’aime pas Mogdred, et il n’est pas certain qu’il soit bien Ingold. Mais, quoi qu’en dise Agariel, il a bel et bien des arguments.
Et, peut-être surtout, la question de Mogdred affecte directement les propositions d’Amaleoda et Ceawin. Hartfast, une fois le vote tenu, pourra aussi bien s’en retourner à Castel-Pic, loin de tout cela… Mais Amaleoda sera aux premières loges. Ceawin, aussi – même s’il ne s’en rend peut-être pas compte : « Ça a l’air d’être un bon gars, mais sans doute un peu trop rêveur pour faire un bon chef. » Mais c’est surtout le cas d’Amaleoda qui le préoccupe : si l’assemblée accepte l’offre de Mogdred, elle se retrouvera clairement inféodée à lui – si elle la refuse, le tyran en puissance aura toutes les raisons de s’en prendre à la nouvelle communauté de Bourg-Eaux-Noires…
Les compagnons ont alors le sentiment d’avoir parlé à tous ceux qu’ils souhaitaient interroger. Tout le monde se retire pour la nuit – pour un certain nombre avec l’esprit tourmenté. Le lendemain, l’assemblée se réunira à nouveau pour voter les différentes motions…
LE VOTE
L’assemblée se réunit à nouveau au matin. Radagast n’est pas sorti de sa chaumière – Mogdred et ses cavaliers sont de retour, mais les Hommes des Bois les tiennent un peu à l’écart, et ils s’en accommodent semble-t-il assez bien. Leur présence est à vrai dire assez intimidante, si l’idée d’un affrontement armé est hors de propos…
Durant les premières heures, les questions mineures sont traitées – mais il y aura trois votes majeurs à main levée sur les questions de plus ample importance. Les compagnons ont pu prendre la température du conseil sur ces divers sujets : les Hommes des Bois sont très favorables à la proposition d’Amaleoda, plutôt favorables à celle de Ceawin, et plutôt défavorables à celle de Mogdred. Mais rien n’est encore dit, et, dans les trois cas, de bons arguments peuvent faire pencher la balance dans un sens ou dans l'autre.
Le premier vote porte donc sur la proposition d’Amaleoda de faire de Bourg-Eaux-Noires un établissement des Hommes des Bois de premier rang en y érigeant une Maison Longue. Plusieurs Hommes des Bois interviennent dans le sens d’Amaleoda. Personne ne parle ouvertement contre elle, même si la menace de Mogdred pèse tacitement sur les échanges. Ingomer, qui s’est un peu repris, Hartfast, Fridwald, parmi d’autres, parlent tous en faveur d’Amaleoda.
Le résultat du vote a l’air acquis, aussi les compagnons n’interviennent-ils pas. La proposition d’Amaleoda est effectivement adoptée : elle pourra bâtir une Maison Longue à Bourg-Eaux-Noires, ériger une palissade aussi, et y accueillir les Hommes des Bois qui le souhaitent pour accroître le prospère domaine. Amaleoda est soulagée, mais pas autant qu’elle l’espérait en se rendant à Rhosgobel, car il lui faudra subir les conséquences du vote de l’assemblée concernant l’offre de Mogdred.
Le deuxième vote porte sur la proposition de Ceawin le Généreux. L’assemblée a l’air plus partagée. Les arguments favorables comme défavorables de la veille sont repris. Hartfast confirme son soutien, et beaucoup sont prêts à le suivre. Mais, suite à l’intervention de Mogdred, de nouveaux arguments contradictoires apparaissent : notamment, s’il y a bien des orques en masse dans la Forêt Noire Méridionale, tenter de commercer avec la Brèche Est, tout spécialement via le Goulet de la Forêt, ne sera pas sans danger…
Nárvi décide d’intervenir, cette fois. Il demande la parole dans les formes, on la lui accorde : il prêche pour la paix et l’union des Peuples Libres du Nord, rappelant le souvenir de la Bataille des Cinq Armées. Le commerce y jouera un rôle important – et si les Hommes des Bois veulent commercer avec la Brèche Est, ils auront besoin d’une route… Ils savent dès lors qui pourrait s’en charger ! Cependant, cette intervention ne change pas grand-chose aux inclinations de l’assemblée.
Fredegar prend le relais. Le Hobbit parle de la lointaine Comté, et de sa division en quartiers – cependant, la Comté fait bloc en cas de menace. Cet exemple pourrait inspirer les Hommes des Bois. Au départ, ils ne voyaient pas bien où cet étrange petit homme voulait en venir… et l’histoire de cette « Comté » leur paraissait bien hermétique, à eux qui n'en avaient jamais entendu parler. Mais, au fur et à mesure qu’ils ont compris où il voulait en venir, ils se sont mis à adhérer aux propos du Hobbit en même temps qu’à leur forme assez distrayante. Les paroles de Fredegar les touchent bien plus qu’ils ne le supposaient initialement, et font pencher un peu plus la balance en faveur de la proposition de Ceawin.
Le vote est tenu : la proposition de Ceawin est adoptée à une assez large majorité (les principaux délégués ont tous voté en sa faveur). Sa communauté de la Brèche Est, qu’il décide de rebaptiser Bourg-Radieux, sera intégrée à la communauté plus vaste des Hommes des Bois. Certains feront avec lui le trajet depuis la lisière occidentale de la Forêt Noire pour établir des accords commerciaux – la question du passage régulier à travers le Goulet de la Forêt sera examinée en son temps.
Reste une dernière motion à examiner : l’offre de Mogdred. Amaleoda et Ceawin sont ravis de ce que l’assemblée a tranché en leur faveur, mais ils savent, comme tout le monde ici, que le vote concernant Mogdred les concernera directement.
L’arrivée théâtrale de Mogdred, sa morgue, le fait qu’il ait exigé un tribut plutôt que d’offrir humblement son alliance, sa tendance à considérer d’ores et déjà Bourg-Eaux-Noires comme un domaine vassal… Tout cela ne plaît guère aux Hommes des Bois. Mais plusieurs parlent pourtant en sa faveur : d’accord, il n’est pas très… poli, mais n’est-il pas préférable de s’en faire un allié plutôt qu’un ennemi ? Surtout si, comme il l’affirme, les Hommes des Bois ont déjà plus d’ennemis qu’ils ne le savent… Dire non à Mogdred, relèvent un peu cyniquement certains, cela revient à faire peser une menace supplémentaire sur Bourg-Eaux-Noires et sur Bourg-Radieux. Par ailleurs, s’il est bien le fils d’Ingomer… eh bien, bon sang ne saurait mentir : si Ingold a hérité des traits d’Ingomer, on aurait tout intérêt à l’accepter (cet argument fait visiblement fulminer Ingomer lui-même). Et si les orques sont bien au sud, la Colline du Tyran pourrait constituer un précieux tampon protégeant les établissements des Hommes des Bois plus au nord… L’assemblée est visiblement très partagée.
Nárvi se lève à nouveau – et rapporte en détail ce qui est arrivé à Beran le Vigilant, le contenu de son rapport à Radagast, et l’embuscade qui a été tendue aux compagnons par Dagmar. C’est plus qu’assez pour remettre en cause l’intégrité de Mogdred. On l’écoute avec attention – Mogdred fulmine, mais sait qu’il ne doit pas répondre sur le moment. Le discours dépassionné du Nain, membre de la compagnie qui a ramené Mâcheloup, convainc plusieurs Hommes des Bois.
Puis Aldamar le Laconique se lève. Conformément à son surnom, l’Homme des Bois n’est pas du genre à se livrer à de longs discours. Il parle rarement, et peu – mais, en l’espèce, il parle bien : Mogdred ne cherche pas à intégrer la communauté des Hommes des Bois – ce qu’il veut, c’est la soumettre. L’idée de famille, si importante pour le peuple d’Aldamar, ou le respect des coutumes, ne signifient rien pour Mogdred – il n’est qu’un tyran et une brute cynique. Il n’est pas venu avec une offre, mais avec une menace. Il n’est pas un atout, mais un danger. Et Aldamar se rassied. Ses mots forts et directs, sans ambiguïté, portent : les traditions comptent beaucoup pour les Hommes des Bois. Ceux qui penchaient en faveur de Mogdred le faisaient pour des raisons pragmatiques, mais le discours d’Aldamar les a ramenés aux valeurs de leur peuple – et ils retirent en conséquence, non sans un vague sentiment de honte, leur soutien à Mogdred.
Le vote a lieu. C’est le plus serré des trois, mais, en définitive, l’assemblée rejette l’offre de Mogdred. On ne lui fait pas confiance : on n’a pas apprécié ses manières, on ne compte certainement pas soumettre le tout nouveau Bourg-Eaux-Noires à un tribut de la Colline du Tyran ; Bourg-Radieux de même ne lui sera pas soumis. Mogdred ne fait pas partie de la communauté des Hommes des Bois.
Le silence plane quelque temps sur l’assemblée. Enfin, Mogdred émet un soupir chargé de mépris, et, sans un mot de plus, il remonte à cheval – sa troupe quitte Rhosgobel comme elle y était venue, et prend la direction de la Colline du Tyran.
Agariel félicite chaudement Aldamar – mais elle quitte bien vite Rhosgobel : Fondcombe doit être informé de ce qui s’est produit lors de l’assemblée – elle ne pourra pas franchir les Monts Brumeux elle-même, mais le message doit être transmis.
Nárvi s’étonne de ce que Bofri ne soit pas intervenu. Il a l’air un peu indécis – il a quelque chose en tête, visiblement, mais ne compte pas le partager avec Nárvi. Bofri non plus ne s’attardera pas à Rhosgobel – il prépare bientôt son paquetage.
Fredegar parlerait bien avec Radagast… mais le magicien est toujours inaccessible, calfeutré dans sa chaumière.
Tous les compagnons ont conscience d’avoir assisté à un moment historique – dont les répercussions se feront sentir sur des décennies. Et ils y ont eu leur part.
C’est tout pour « L’Assemblée de Rhosgobel », à ceci près que vous pourrez également vous reporter au journal tenu par Nárvi pour avoir son point de vue sur cette aventure (et ce qui l’a entourée) :
Suite de notre campagne d’Adventures in Middle-Earth ! Nous entamons doucement la Mirkwood Campaignavec le présent scénario – sachant que, pour un temps, nous allons alterner avec le « prologue » que constitue la « mini campagne » de Wilderland Adventures.
Si vous souhaitez remonter au début de la campagne, vous pouvez suivre ce lien.
… Agariel, une Dúnedain (Vagabonde/Chasseuse d’ombres 3)…
… Aldamar le Laconique, un Homme des Bois (Protecteur/Frontalier 3)…
… Jorinn, un Bardide (Chasseur de trésors/Espion 3)…
… Nárvi, un Nain du Mont Solitaire (Frère d’armes/Maître d’armes 3).
… et enfin, en remplacement d’Aeweniel, tuée lors du précédent scénario, Fredegar Sanglebuc, un Hobbit de la Comté (Protecteur 2).
Pour la bande originale, je ne suis pas allé chercher bien loin : j’ai utilisé les compositions de Howard Shore pour la trilogie du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson.
Pour ceux que ça intéresserait, vous trouverez juste en dessous l’enregistrement brut, ou « actual play », de la séance :
Mais en voici autrement le compte rendu écrit...
3A 2947
Nous sommes au début de l’été de l’an 2947 du Troisième Âge, dans la Lisière Ouest de la Forêt Noire, à peu près à mi-chemin entre Bourg-les-Bois au nord et Rhosgobel au sud.
Ce dernier sanctuaire est le pays natal d’Aldamar, qui s’est enfin décidé à affronter ses craintes et à y retourner – en compagnie de son nouveau camarade Fredegar Sanglebuc, un ami de Dodinas et Dinodas Brandebouc rencontré à l’Auberge Orientale : le Hobbit est gourmand et toujours volontaire pour goûter à de nouveaux plats.
Nárvi a passé pas mal de temps dans la région – à l’orée de la Forêt, là où la Vieille Route des Nains jaillit des bois pour se prolonger en direction du Vieux Gué, mais aussi à Rhosgobel même, car il a appris que s’y tiendrait l’an prochain une assemblée des Hommes des Bois qui pourrait favoriser ses plans, en associant le peuple de Ceawin le Généreux, dans la Brèche Est, aux clans de la lisière occidentale – il y a aura des observateurs des autres cultures lors de cette assemblée, car les conséquences pourraient être énormes pour l’ensemble des Peuples Libres du Nord.
Quant à Agariel et Jorinn, ils ont beaucoup navigué, dans cette région et au-delà, la Dúnedain acheminant des lettres entre les différentes communautés, et le Bardide accompagnant diverses caravanes commerçantes en pays des Hommes des Bois mais aussi béornide.
Les héros ont donc eu maintes occasions de se croiser durant l’année qui vient de s’écouler. Leurs liens sont forts, peut-être même plus que jamais après le tragique décès d’Aeweniel dans les tunnels gobelins sous les Monts Brumeux. Régulièrement, ils voyagent ensemble – et, quand cette aventure débute, à l’invitation d’Aldamar, ils se livrent à une partie de chasse au nord de Rhosgobel.
LE FUGITIF
Nárvi entend soudain un bruit – celui produit par quelque chose se déplaçant dans les fourrés ; un homme, probablement, et qui ne cherche pas à être discret. Le Nain s’arrête ostensiblement, et fait signe aux autres de l’imiter.
Bientôt, un homme apparaît devant les compagnons – essoufflé, livide, une bave jaune aux lèvres, il s’avance vers eux en titubant, avec une main plaquée près du cœur. Aldamar a l’impression de l’avoir déjà rencontré, mais sans parvenir à l’identifier clairement. Nárvi comprend que l’homme est probablement poursuivi, et reste aux aguets, la main prête à saisir sa hache.
C’est devant le Nain que l’intrus s’effondre, tendant la main comme pour le saisir, sans parvenir à prononcer le moindre mot tant il a du mal à respirer – il parvient cependant à extirper de sa tunique une lettre, qu’il tend à Nárvi juste avant de sombrer dans l’inconscience. Le Nain méfiant avait fait un bond en arrière en voyant que l’intrus cherchait à sortir quelque chose, mais Fredegar, plus confiant, s’est avancé et a pris le bout de papier.
Agariel tend l’oreille : ça n’est pas tout près, mais la vagabonde perçoit des bruits dans la direction d’où venait l’homme empoisonné – une troupe humanoïde assez nombreuse, mais impossible d’en dire davantage, sinon qu’elle n’est pas à plus d’une heure de marche.
Aldamar, stupéfait, finit par mettre un nom sur l’inconnu : oui, il l’avait déjà rencontré, même si sa teinte livide et son allure générale l’avaient tout d’abord empêché de le reconnaître – il s’agit de Beran le Vigilant, un Homme des Bois de Rhosgobel, et au service direct de Radagast le Brun ! Aldamar se penche sur Beran pour évaluer son cas – l’Homme des Bois comprend qu’il a été empoisonné, probablement par du venin d’araignée à très haute dose ; il en est résulté une paralysie toujours plus prononcée – cet empoisonnement n’est pas fatal à brève échéance, mais Beran aura besoin de soins assez rapidement, sans quoi le venin pourrait bien finir par avoir sa peau – mais personne au sein de la compagnie ne dispose des remèdes adéquats pour le traiter sur place ; il faudra gagner un sanctuaire pour cela, et probablement Rhosgobel, où Radagast saura tout mettre en œuvre pour sauver son agent.
Fredegar lit la lettre de Beran – qui est adressée à Radagast. C’est une sorte de rapport, témoignant d’une résurgence de l’activité orque au sud, notamment au niveau du château de Pont-Marais, une ancienne fortification un peu au nord de Dol Guldur ; la lettre est accompagnée d’une carte approximative qui indique cet emplacement – ladite carte mentionnant également, mais de manière plus ambiguë, un autre endroit davantage au nord, et donc plus proche de Rhosgobel, nommé la Colline du Tyran (ces noms n’évoquent rien pour Fredegar, et pas davantage pour Jorinn et Nárvi, mais Aldamar et Agariel ont entendu parler, en termes plus ou moins vagues, du Nécromancien et de sa Colline de la Sorcellerie ; en revanche, personne parmi eux ne sait quoi que ce soit à propos de Pont-Marais ou de la Colline du Tyran). Agariel comprend l’importance de ce rapport, et fait une copie de la lettre et de la carte, un peu à la hâte.
Les poursuivants de Beran approchent – et il sera impossible de les semer, par exemple pour gagner Rhosgobel au plus tôt, d’autant que Beran inconscient les ralentirait. Aldamar ne connaît pas vraiment de refuge dans la région immédiate, mais, avec Agariel, ils font en sorte de dissimuler le fugitif empoisonné dans une souche creuse, et de se « cacher » autant qu’il est possible pour une compagnie de six personnes et un chien (Barran, le nouveau limier d’Aldamar), de sorte à pouvoir tendre une embuscade le cas échéant. Fredegar grimpe ensuite dans un arbre pour se dissimuler dans le feuillage – mais nul autre au sein de la compagnie ne parvient à le suivre, même si Aldamar s’y essaye.
Mais, pendant que ses camarades préparent les lieux à cet effet, Jorinn part en éclaireur pour en apprendre davantage sur cette troupe qui approche. Le Bardide n’est pas aussi discret qu’il le souhaiterait, mais parvient tout de même à s’approcher sans se faire repérer. Il découvre une troupe de cinq hommes, cinq guerriers en armures et équipés d’épées, avec une femme à l'air sévère et très digne à leur tête, et autant de chiens-loups d’une taille impressionnante. Jorinn n’est pas en mesure de les identifier plus précisément : ils ressemblent à des Hommes des Bois, mais le chasseur de trésors a pourtant le sentiment qu’il y a quelque chose qui ne colle pas, quoi que ce soit. Mais Jorinn s’attarde un peu trop longtemps pour les étudier : les molosses flairent dans sa direction, encouragés par la femme à la tête de la troupe (que ses soldats ont appelée Dagmar) – Jorinn comprend qu’il lui faut partir au plus vite ! Il retourne auprès de ses compagnons, mais la troupe derrière lui a accéléré le pas…
Le Bardide fait rapidement son rapport – avec ses descriptions précises, Aldamar comprend ce qui cloche chez ces « Hommes des Bois » : ils n’arborent le symbole d’aucun clan connu. Les poursuivants de Beran ne sont plus qu’à une dizaine de minutes, les chiens se font entendre – les héros se préparent à une rencontre qui pourrait mal tourner…
LES SBIRES DE LA COLLINE
La mystérieuse troupe rejoint la compagnie – seul Fredegar a pu se dissimuler à leurs yeux en grimpant dans un arbre, mais les nouveaux venus ignorent peu ou prou les héros ; lesquels avaient dissimulé Beran inconscient dans une souche creuse, mais cette précaution s’avère totalement inutile : les chiens-loups le repèrent aussitôt…
Ce n'est qu'alors que la femme s’enquiert de l’identité des compagnons. Aldamar ne se montre d’emblée par très coopératif – il est un Homme des Bois chez lui ! Qui est-elle pour le questionner de la sorte ? Dagmar rétorque qu’ils sont des Hommes des Bois, eux aussi… Mais qu’importe : le fugitif accueilli par les compagnons, dit-elle, est un voleur – qui a dérobé le bien de son maître, « Mogdred de la Colline » (Aldamar a vaguement entendu ce nom, celui d’un homme mystérieux qui aurait acquis un certain pouvoir un peu plus au sud – la Colline du Tyran figurant sur la carte de Beran ? –, où des Hommes des Bois lui paieraient tribut, dit-on). Dagmar poursuit, quand Aldamar évoque l’empoisonnement de Beran : cet imbécile, en tentant de s’évader, s’est précipité dans une toile d’araignée… Mais Aldamar ne mange pas de ce pain-là, de toute façon : accuser Beran, un Homme des Bois, et le fidèle serviteur de Radagast, d’être un voleur ? Calomnie ! Mais Dagmar est intraitable : la Colline veut entretenir de bonnes relations avec les Hommes des Bois, qui sont un peuple honorable, mais il n’en reste pas moins que cet homme-ci est un voleur. Qu’a-t-il donc volé ? Les compagnons n’ont pas à en savoir davantage : il a volé le bien de Mogdred, et c’est tout.
Mais Aldamar a une parole malencontreuse : cet homme n’avait qu’un simple bout de papier sur lui… Dagmar exige aussitôt qu’on le lui montre – elle était déjà dure jusqu’alors, mais elle devient subitement plus menaçante encore. Aldamar dit que cela ne regarde que Radagast, et personne d’autre. Agariel n’en évoque pas moins son contenu devant Dagmar – il paraissait potentiellement incriminant pour Mogdred… Les hommes de Dagmar fouillent Beran, mais ne trouvent rien sur lui (c’est Fredegar, que personne n’a repéré dans son arbre, qui dispose de l’original de la lettre).
Dagmar exige qu’on lui donne ce rapport – mais elle est indécise, visiblement : le combat ne lui fait pas peur, loin de là, mais elle ne veut probablement pas commettre d’impair diplomatique… Quand la Dúnedain évoque « un problème avec les Orques » au sud (et Nárvi en rajoute une couche, en se montrant beaucoup moins allusif), Dagmar répond qu’il n’y a rien de la sorte – les accusations calomnieuses d’un voleur en tant que tel indigne de la moindre confiance… Elle fait signe à ses hommes d’emporter Beran – pour qu’il réponde de son crime : justice sera rendue. Radagast n’appréciera pas, rétorquent les héros… Non, mais l’autorité du magicien ne s’étend pas à la Colline, affirme Dagmar.
Mais elle comprend qu’elle ne parviendra pas à raisonner les compagnons ; elle fait signe à ses hommes d’emporter Beran, et se retourne une dernière fois vers les héros : elle fera son rapport, et Mogdred n’appréciera pas, lui non plus… La troupe s’enfonce à nouveau dans la forêt – l’atmosphère est pourtant électrique…
EMBUSCADE !
Il faut gagner Rhosgobel au plus tôt, et prévenir Radagast ! Même si cela implique de laisser Beran aux mains de Dagmar et de ses hommes ? Dilemme… Mais peut-être dénoncer les actes de Mogdred permettra-t-il de sauver en définitive Beran ? Nárvi pense que Dagmar gardera l'agent de Radagast en vie, ou du moins veut-il le croire, mais Agariel est nerveuse… Ils prennent cependant la direction de Rhosgobel – qui est à quelque chose comme deux jours de marche au sud.
À mi-chemin, les compagnons dressent le camp pour la nuit. Mais les craintes d’Agariel se vérifient bientôt : si Fredegar et Nárvi, les guetteurs de la compagnie, n’avaient rien remarqué, les hommes de la Colline les suivaient – et, au cœur de la nuit, sous les ordres de Dagmar elle-même, ils lancent l’assaut sur le campement !
Aldamar les traite de sales lâches, mais ils s’en moquent, et viennent au combat – Dagmar restant pour l’heure en retrait.
Nárvi et Agariel se positionnent aussitôt pour leur bloquer le passage – tous deux encaisseront la majorité des coups, mais infligeront des attaques dévastatrices : la Dúnedain extermine à elle seule trois molosses, tandis que le Nain du Mont Solitaire se consacre davantage aux guerriers. Il est en mesure de tirer parti de ses entraînements au sein de la Guilde des Bâtisseurs : il sait désormais utiliser son bouclier de manière offensive ! Cependant, les coups pleuvent sur lui, et, en dépit de sa forte constitution et de sa lourde armure, il subit de vilaines blessures, qui le contraignent à faire appel à son second souffle…
Il apparaît bientôt que le Nain est le plus redoutable guerrier de la compagnie – Fredegar l’encourage, en lui offrant le soutien de son arc, mais Dagmar s’avance vers Nárvi pour briser la résistance des héros.
Cependant, les autres compagnons ne sont pas épargnés : les molosses qui se sont infiltrés, notamment, infligent de cruelles blessures à Jorinn – qui parvient cependant à tuer un guerrier. Agariel encaisse mieux, même si elle commet à un moment une maladresse qui aurait pu lui être fatale, en offrant une opportunité d’attaque à son adversaire ; en définitive, ses réflexes la sauvent.
Au cœur de la bataille se déroule l’affrontement singulier de Nárvi et Dagmar – mais c’est très vite le Nain qui l’emporte : lançant son cri de guerre, Nárvi assène deux attaques de sa hache et de son bouclier contre la meneuse des guerriers de la Colline – et la tue ! Emporté par la furie, il parvient même à blesser grièvement un des guerriers dans la foulée !
Et, si certains d’entre ces derniers tentent de placer un dernier coup, d’autres prennent leurs jambes à leur cou et tentent de fuir. La plupart périssent au combat, même si à ce stade Nárvi et Jorinn sont épuisés. L'un d'entre eux aurait pu parvenir à s'échapper si Agariel ne s’était pas aussitôt lancée à sa poursuite – secondée par un Fredegar d’abord hésitant, car supposant que ses camarades auraient bien besoin de ses soins. Mais Agariel coupe court au débat, plaquant au sol le dernier guerrier et le capturant…
Le guerrier, blessé et ligoté, fait d’abord le malin, refusant de répondre aux questions des héros ; il maintient que Beran était un voleur, refuse de dire où il se trouve, et dit que Dagmar refusait de laisser « ses complices » se répandre en calomnies sur le compte de Mogdred. Aldamar se retient difficilement de gifler le prisonnier – ce qui fait rire ce dernier : l’intimidation ne prend pas ; mais ce comportement ne fait guère honneur aux héros…
Agariel lui offre de répondre maintenant à leurs questions, essentiellement de dire où se trouve Beran, et de rentrer ensuite chez lui – sinon, ils n’auront pas d’autre choix que de l’emmener à Rhosgobel, auprès de Radagast. Le prisonnier proteste : il ne dépend pas du magicien brun, il dépend de la Colline ! Mais la Dúnedain n’en tient pas compte : il est sur le territoire de Rhosgobel, que cela lui plaise ou non, et répondra de ses méfaits devant Radagast et les Hommes des Bois ; elle comprend très bien qu’il reste fidèle à son maître, ce qui sied bien à tout serviteur, mais il n’en tombe pas moins sous la juridiction des autochtones. La vagabonde est sincère dans son offre de le relâcher, mais le captif ne la croit pas – même s’il ne saurait justifier ses actes autrement que par l’obéissance aux ordres de ses maîtres. Nárvi également essaye de le convaincre, mais sans succès : le guerrier semble se résoudre à devoir affronter le jugement de Radagast – et Agariel tend à croire qu’il craint bien plus l’ire de Mogdred que celle de Radagast et des Hommes des Bois ; il leur reproche en même temps le meurtre de Dagmar, une chasseresse admirable et loyale. Et l’embuscade, alors ? Ils ont frappé les premiers, mais pour se défendre des voleurs et de leurs complices, qui voulaient eux aussi leur tendre une embuscade ! Mais oui, Beran est vivant – évidemment qu’il l’est ! Pour qui le prennent-ils ?
Avec le soutien de Fredegar, Agariel parvient cependant enfin à convaincre le guerrier de les guider là où ils ont laissé l’agent de Radagast, en échange de la promesse qu’il pourra rentrer chez lui – les hommes de la Colline l’avaient tout simplement laissé à l’abri d’un arbre, sans surveillance : dans son état, Beran était bien incapable de fuir… Les compagnons le trouvent effectivement à l’endroit indiqué, toujours inconscient et sévèrement empoisonné – il lui faut des soins au plus tôt ! Aldamar parvient à le stabiliser pour quelque temps, mais il faut rapidement gagner Rhosgobel.
Conformément à sa promesse, Agariel libère l’homme de la Colline – et lui donne même les rares pièces trouvées sur les cadavres des guerriers (qui n’avaient rien d’autre de valeur), ainsi que quelques rations, ce qui le stupéfie profondément ; sa première réaction est probablement de se demander si elle ne cherche pas à l’empoisonner… La Dúnedain le comprend, et mange un morceau devant elle : il n’a rien à craindre d’eux – mais peut-être, de retour à la Colline du Tyran, ferait-il bien de s’interroger sur la manière dont on l’a traité, et celle dont Mogdred traite les autres. Troublé, le guerrier accepte les vivres, et détale dans la forêt.
UN MAGICIEN PRÉOCCUPÉ
Les héros attendent le lever du jour, ce qui leur permet de récupérer un peu pour ceux qui en avaient besoin, comme surtout Nárvi et Jorinn, puis ils prennent la direction de Rhosgobel. Le voyage s’effectue sans autres difficultés, même si transporter Beran les ralentit un peu.
Les compagnons arrivent à Rhosgobel, où ils sont bien accueillis par la petite communauté qui vit à proximité de l’étrange demeure de Radagast le Brun : c’est le peuple d’Aldamar, et on se souvient de ce que les héros ont rendu Mâcheloup aux Hommes des Bois. Les autochtones reconnaissent bien entendu Beran, et conduisent la compagnie au-devant de la futaie de Radagast : ils savent que le magicien excentrique, et parfois asocial, tient à écouter ce qu’ils ont à rapporter, tandis qu’il s’occupera de soigner son agent Beran.
De fait, Radagast leur ouvre ses portes. Les héros pénètrent dans sa demeure, et rencontrent l’étonnant magicien, à la vêture incongrue. Aldamar le sait lunatique, mais il a toujours agi en protecteur des Hommes des Bois, et probablement de plus en plus ces dernières années. Radagast sert un thé à tout le monde, sans demander l'avis de qui que ce soit, et les écoute tandis qu’il soigne Beran ; fouillant dans son manteau de peau un peu grotesque, il en extirpe au bout d’un moment une fiole qu’il fait boire à son agent – ce dernier demeure inconscient, et il lui faudra plusieurs jours pour récupérer, mais il est hors de danger.
Radagast n’attendra cependant pas si longtemps, il faut que les compagnons lui racontent d’ores et déjà ce qui s’est passé. Aldamar a beau avoir rencontré à plusieurs reprises le magicien, il est intimidé, et c’est essentiellement Fredegar qui fait son rapport. Le nom de Dagmar ne dit rien au magicien, mais il a vaguement entendu parler de Mogdred, même s’il ne sait pas bien dans quelles circonstances, et surtout de la Colline du Tyran, qu’il appelle Amon Bauglir. Le Hobbit tend la lettre de Beran à Radagast, qui l’étudie très attentivement (à vrai dire, il y consacre un temps hors de proportions avec le peu de mots que la lettre comprend). Tout cela est très inquiétant… « On aurait pu penser que la Forêt Noire connaîtrait enfin la paix, après que le Conseil a… Mais si les Orques sont à Pont-Marais… et si ce Mogdred… La Colline du Tyran était autrefois une dépendance de Dol Guldur… »
Radagast remercie les héros pour tout ce qu’ils ont fait, et semble se souvenir de ce qu’Aldamar, plus jeune, avait fait bien des bêtises dans les environs, mais il lui faut réfléchir à tout cela, maintenant… Il congédie ainsi les compagnons, les pressant de finir leurs thés sans plus de manières – un comportement qui n’étonne en rien Aldamar : c’est ainsi que fait toujours Radagast le Brun ; ceci dit, cela faisait longtemps qu’il n’avait pas autant témoigné de son inquiétude…
Et les rumeurs qu’entendent les compagnons en s’attardant à Rhosgobel ne sont à vrai dire guère rassurantes. Certains des Hommes des Bois disent avoir entendu parler de Mogdred, qui serait lui-même un Homme des Bois, encore qu’on ne sache pas très bien d’où il vient exactement – mais il aurait effectivement entrepris de se bâtir un royaume plus au sud, ou du moins des Hommes des Bois lui paient-ils tribut.
Mais il y a des rumeurs plus ouvertement inquiétantes : on raconte qu’une étrange créature rôde à l’orée orientale du Sentier des Elfes, qui volerait et parfois tuerait les voyageurs imprudents… Et certains de ces derniers, des Nains plus spécialement qui auraient commis la gravissime erreur de quitter temporairement le Sentier, font état d’une autre créature maléfique : le Loup-garou de la Forêt Noire serait de retour…
C’est tout pour « L’Agent du Magicien », très brève introduction à Mirkwood Campaign, à ceci près que vous pouvez également vous reporter au journal tenu par Nárvi pour avoir son point de vue sur cette aventure (et ce qui l’a entourée) :