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"Le Royaume de Dieu", de Damon Knight

Publié le par Nébal

Le-Royaume-de-Dieu.jpg

 

 

KNIGHT (Damon), Le Royaume de Dieu, [Rule Golden], traduit de l'américain par Nathalie Dudon, Neuvy-en-Champagne, Le Passager clandestin, coll. Dyschroniques, [1954, 1980, 2012] 2014, 155 p.

 

 

 

L'idée derrière la collection « Dyschroniques » du Passager clandestin m'a toujours paru fort intéressante et en tant que telle tout à fait louable : il est bon, sans doute, d'exhumer ainsi quelques pépites oubliées de la science-fiction et, même si cela passe par des tarifs parfois un peu élevés, de rappeler par la même occasion combien le genre est historiquement lié au format court, de la nouvelle (voire de la short short) à la novella.

 

 

 

Le choix des textes, cependant, est quant à lui plus discutable... Et pour chaque bon titre ainsi ressuscité, j'ai le sentiment que le Passager clandestin a tiré des limbes par la même occasion des textes qui auraient mieux fait d'y rester. Aussi ne puis-je m'empêcher, devant chaque publication de la collection, d'attendre d'abord quelques avis autorisés avant d'acquérir la chose.

 

 

 

Ce Royaume de Dieu de l'auteur (mais surtout éditeur et critique, ai-je l'impression) Damon Knight ayant reçu un avis favorable auprès desdites autorités compétentes, je me le suis donc procuré les yeux fermés, ou presque.

 

 

 

Et mal m'en a pris.

 

 

 

En effet, si cette novella a pu en séduire dans mon entourage, je l'ai pour ma part trouvée extrêmement mauvaise (à vrai dire, mon jugement est peut-être d'autant plus négatif que mes attentes étaient élevées). Je m'en vais tâcher de dire ici pourquoi.

 

 

 

Cette nouvelle a été publiée originellement en 1954, au plus fort de la guerre froide. Cela n'a rien d'innocent et se doit d'être souligné, tant le contexte d'équilibre de la terreur est fondamental dans son élaboration comme dans sa réception.

 

 

 

On va aller à l'essentiel, hein (et ça va SPOILERpas mal, vous êtes prévenus) : au milieu d'une cohorte de faits-divers étranges, de type coïncidences troublantes pour certains d'entre eux, un journaleux se met à enquêter sur un secret militaire bien gardé (ou peut-être pas tant que ça...) qui s'avère une sorte de « Zone 51 » (on est aussi au cœur de « l'épidémie » d'OVNI, avec Roswell et compagnie).

 

 

 

Et notre bonhomme de faire ainsi la rencontre d'Aza-Kra, extra-terrestre de son état, tripède pour faire un pied (aha) de nez à H.G. Wells et ses Martiens. Et Aza-Kra va parvenir, grâce à notre scribouillard humain, à s'échapper pour amener la paix sur Terre aux hommes de bonne volonté. Car telle est sa mission, justifiée par l'état d'avancement de la science terrienne.

 

 

 

Ce scénario ne manque pas de rappeler, à bien des égards, le célèbre film de Robert Wise Le Jour où la Terre s'arrêta...qui est antérieur de trois ans au Royaume de Dieu.Certes, l'aspect le plus « gênant » de la mission de Klaatu est ici évacué (il n'est donc pas question d'imposer la paix de l'extérieur au nom d'une menace encore plus terrible !), mais, hélas, tout ce qui faisait l'intérêt du film de Robert Wise (sur le pur plan narratif s'entend – on ne critique pas ici les aspects les plus spécifiquement audiovisuels) est dégagé par la même occasion...

 

 

 

Et, du coup, ce Royaume de Dieupré-hippie devient tout bonnement insupportable tant il dégouline de bons sentiments. Bon, ça n'engage que moi, hein, et je suis un gros con cynique. Mais là, franchement, c'est trop. La niaiserie nous est servie à la louche dans cette apologie (justifiée par ailleurs) de la non-violence, ce qui aboutit à des scènes pour le coup très comiques (la révolte des employés des abattoirs, tout de même...).

 

 

 

C'est fâcheux, mais la justesse du propos et la générosité des idées, ici, viennent nuire au texte. Et c'est bien pourquoi j'ai trouvé, en fin de compte, ce Royaume de Dieuquasi illisible. Resservez-moi de la pâtée dépressive, cynique et violente, et plus vite que ça ! On s'alimente comme on peut...

 

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